Cass. com., 18 octobre 2016, n° 15-13.076
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 décembre 2014), que la SCP Lexia-Vincent X- Eric Y- Albin Z- Olivier A- Jean-Philippe B (la SCP Lexia), titulaire de la marque semi-figurative « Cabinet Lexia société d'avocats » n° 93 500 302, déposée le 31 décembre 1993 à l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) et renouvelée en dernier lieu le 27 septembre 2013, pour désigner les services juridiques en classe 45, a fait opposition à la demande d'enregistrement de la marque verbale « Lexina », déposée le 29 avril 2013 à l'INPI par Mme C pour désigner, notamment, les services juridiques et conseils en propriété intellectuelle dans la même classe ; que, par décision du 31 janvier 2014, le directeur général de l'INPI a partiellement rejeté la demande d'enregistrement ;
Attendu que la SCP Lexia fait grief à l'arrêt d'annuler cette décision alors, selon le moyen :
1°) qu'est interdite, sauf autorisation du propriétaire, l'imitation de la marque d'autrui pour désigner des services identiques à ceux visés dans l'enregistrement, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public ; que l'existence d'un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de la circonstance que le consommateur n'a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l'image non parfaite qu'il en a gardée en mémoire ; qu'il en résulte que pour apprécier le risque de confusion, le juge doit prendre en considération les ressemblances entre les marques en cause, et non se fonder sur leurs seules différences ; qu'en se bornant à pointer les différences entre la marque de la SCP Lexia et celle de Mme C, pour écarter tout risque de confusion dans l'esprit du public, sans rechercher si leurs ressemblances n'étaient pas de nature à créer un risque de confusion pour le consommateur moyen n'ayant pas les deux marques sous les yeux, la cour d'appel, qui n'a pas respecté les critères gouvernant l'appréciation globale du risque de confusion, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de l'article 5 § 1 b) de la directive 2008/ 95/ CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques ;
2°) que le risque de confusion doit être apprécié selon la perception que le public des produits ou services a des signes en cause et en tenant compte de tous les facteurs pertinents, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire ; que la SCP Lexia faisait valoir en appel que les parties au litige exerçant la même activité juridique dans la même ville, du fait de l'existence de son bureau secondaire à Paris, le public fera un rapprochement entre les deux marques litigieuses et pensera qu'elles sont associées ; qu'en retenant qu'il n'existait pas de risque de confusion entre un cabinet d'avocat situé à Bordeaux et une avocate située à Paris sans égard pour la circonstance, invoquée par la société Lexia dans ses conclusions, que les parties exerçaient la même activité dans la même ville en raison de son bureau secondaire, ce qui était de nature à accroître le risque de confusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de l'article 5 § 1 b) de la directive 2008/ 95/ CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques ;
3°) qu'en se bornant à pointer la différence conceptuelle des signes « Lexia » et « Lexina » sans constater les éléments lui permettant de retenir cette différence conceptuelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de l'article 5 § 1 b) de la directive 2008/ 95/ CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques ;
4°) que l'appréciation globale du risque de confusion, à laquelle les juges du fond doivent se livrer, implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et notamment la similitude des marques et celle des produits ou services couverts ; qu'ainsi un faible degré de similitude entre les marques peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les produits ou services couverts et inversement ; qu'en se bornant à affirmer qu'un faible degré de similitude entre les marques peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les produits ou services couverts, et inversement, sans rechercher si en l'espèce la similitude des services couverts par les marques en cause ne venait pas compenser les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles entre ces signes, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de l'article 5 § 1 b) de la directive 2008/ 95/ CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté l'identité et la similarité des services et procédé à la comparaison des marques, l'arrêt relève que celles-ci ont en commun la séquence « Lex », aisément compréhensible du public comme évoquant la loi, et, par conséquent, les services désignés ; qu'ayant rappelé qu'un faible degré de similitude entre les signes peut être compensé par un degré de similitude élevé entre les services, il en déduit qu'en l'état des différences visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les marques prises dans leur ensemble, le public pertinent ne sera pas amené à croire que le signe contesté est une déclinaison ou une adaptation de la marque antérieure ; que la cour d'appel, qui a ainsi procédé à une appréciation globale du risque de confusion, en se fondant, sans accorder aux termes mêmes « Lexia » et « Lexina » de signification particulière, sur l'impression d'ensemble produite par les signes et en prenant en compte aussi bien leurs ressemblances que leurs différences, ainsi que l'interdépendance des facteurs, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, que, dans la mesure où les marques françaises bénéficient d'une protection sur tout le territoire national, le critère géographique tiré du lieu d'exploitation des signes en présence était indifférent dans l'appréciation du risque de confusion pour l'examen d'une opposition à l'enregistrement d'une marque, en sorte que le grief de la deuxième branche, qui s'attaque à un motif surabondant, est inopérant ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.