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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 18 mai 2011, n° 10/01266

PAU

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Meallonnier

Conseiller :

Mme Poelemans

Avoués :

SCP Piault Lacrampe Carraze

Avocats :

Me Boyer, SCP Longin Longin Dupeyron Mariol

TGI, du 17 mars 2010

17 mars 2010

Objet succinct du litige - Prétentions et arguments des parties

Vu l'appel interjeté le 26 mars 2010 par Monsieur Bruno G. à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Tarbes du 17 mars 2010,

Vu les conclusions de Monsieur Bruno G. du 28 juin 2010,

Vu les conclusions de la SELARL François L. du 17 octobre 2010,

Vu les conclusions de Monsieur le Directeur Départemental des Finances Publiques des Hautes Pyrénées du 27 octobre 2010,

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Général du 13 octobre 2010,

Vu l'ordonnance de clôture du 1er février 2011 pour l'affaire fixée à l'audience du 8 février 2011,

Vu le renvoi contradictoire à l'audience du 22 mars 2011.

Les trésoreries de T. et de T. réclament à Monsieur Bruno G. un impôt sur le revenu chiffré à 112 495,86 € suite à un redressement fiscal. Les trésoriers concernés ont demandé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à son encontre et l'ont assigné devant le Tribunal de Commerce de Tarbes le 12 mai 2009. Ce tribunal s'est déclaré incompétent par jugement du 7 décembre 2009. Ils ont donc saisi le Tribunal de grande instance de Tarbes, lequel par jugement du 17 mars 2010 auquel il est expressément référé pour le rappel des faits et de la procédure antérieure a :

- constaté l'état de cessation de paiement de Monsieur Bruno G. à la date du 12 mai 2009,

- prononcé l'ouverture de la liquidation judiciaire de Monsieur Bruno G. demeurant ...,

- désigné Madame D. S. en qualité de Juge Commissaire titulaire,

- désigné Monsieur B. en qualité de Juge Commissaire suppléant,

- désigné Maître François L., 3 rue Brauhauban, Tarbes en qualité de mandataire liquidateur,

- dit que ce dossier sera rappelé à l'audience du 16 mars 2011 à 14 heures,

- rappelé qu'en application de l'article L. 641-4 et R. 622-4 du code de commerce l'inventaire des biens doit être dressé et une prisée du patrimoine du défendeur ainsi que des garanties qui le grèvent doit être réalisé dès l'ouverture,

- désigné à cet effet la SCP SANTRAILLE huissier de justice à Tarbes qui procédera sans délai à ces opérations,

- dit qu'il sera procédé, conformément à la loi, par le greffe, aux formalités de publicité,

- rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire en application de l'article 328 du décret du 28 décembre 2005,

- dit que les dépens seront passés en frais de liquidation judiciaire.

Monsieur Bruno G. considère qu'il ne peut être placé ni en redressement judiciaire, ni en liquidation judiciaire. Il n'a, en effet, pas d'activité susceptible de donner lieu à l'ouverture d'une procédure collective au sens de la loi du 26 juillet 2005.

Monsieur Bruno G. indique qu'il n'est pas immatriculé au registre du commerce et des sociétés. Le numéro de SIREN ne correspond à aucune immatriculation de commerçant. Il s'agit de l'ancienne immatriculation qu'il avait dans le cadre de l'exercice d'une profession libérale et donc civile. Même si l'immatriculation a subsisté, il n'a aucune activité à ce titre.

Les demandeurs n'établissent pas que Monsieur Bruno G. exercerait au jour de l'assignation ou au jour de l'audience, une activité commerciale, artisanale, libérale, agricole et nécessairement indépendante. Ils n'ont pas non plus établi que cette activité aurait pu cesser, moins d'un an avant l'engagement de la procédure.

Il souligne qu'il a mis fin à son activité de banque au plus tard le 14 décembre 2004, date à laquelle le Tribunal correctionnel de Tarbes l'a condamné à une peine d'interdiction d'exercer toute profession effectuant des opérations de crédit et démarchage pendant 5 ans, interdiction confirmée par la Cour d'Appel le 12 janvier 2006.

Les services fiscaux n'ont jamais remis en cause le caractère libéral ou salarié des revenus tirés de son activité jusqu'en 2004. Il ne l'ont pas considéré comme un commerçant.

Le juge n'a pas vérifié la condition d'antériorité de la cessation de paiements par rapport à la cessation d'activité.

Le juge pénal a considéré que Monsieur Bruno G. n'avait pas agi à titre indépendant dans le cadre de l'activité invoquée par les trésoriers mais en tant que commettant de la société qui l'employait.

Monsieur Bruno G. n'agissait même pas à titre indépendant lorsqu'il était intermédiaire.

Les revenus qu'il reçoit de ses fermages ne permettent pas de considérer qu'il s'agirait d'une activité indépendante.

À titre subsidiaire, il soutient qu'il doit pouvoir bénéficier d'une procédure de redressement judiciaire et d'une période d'observation.

Monsieur Bruno G. demande à la Cour de réformer le jugement entrepris, de constater qu'il n'est pas admissible au bénéfice d'une procédure collective à défaut pour lui d'exercer une profession ou une activité indépendante au jour de la demande en justice comme au jour où le juge statue, de rejeter les demandes du trésorier de T. et du trésorier de Tarbes, de les condamner aux dépens, de débouter les demandeurs de toute prétention contraire, et à titre subsidiaire, de constater qu'il n'est pas établi qu'il ne puisse pas manifestement se redresser, de réformer partiellement le jugement entrepris et de lui accorder le bénéfice d'une procédure de redressement judiciaire.

La SELARL François L. en qualité de liquidateur judiciaire de Monsieur Bruno G. prétend que ce dernier a exercé des activités indépendantes et agricoles justifiant l'ouverture d'une procédure collective à son encontre. Monsieur Bruno G. a été immatriculé dans le cadre de l'exercice d'une profession libérale. Il demande à la cour de confirmer du jugement, de débouter Monsieur Bruno G. de toutes ses prétentions et de condamner ce dernier aux entiers dépens.

Monsieur le Directeur Départemental des Finances Publiques des Hautes Pyrénées soutient qu'il ressort de la consultation d'infogreffe réalisée le 15 octobre 2010 que le SIREN 328 167 614 correspond bien à une activité libérale exercée par Monsieur Bruno G. Cette activité n'a cessé qu'au jour du jugement du Tribunal de grande instance soit le 17 mars 2010. Au fond, Monsieur Bruno G. n'est pas en mesure de faire face à son passif exigible. Il convient de confirmer le jugement entrepris.

Monsieur le Procureur Général s'en rapporte à justice.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour entend se référer, pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures ci-dessus visées.

Sur ce

En application de l'article L. 620-2 du code de commerce, la procédure de sauvegarde est applicable à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout agriculteur, à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ainsi qu'à toute personne morale de droit privé.

Monsieur le Directeur Départemental des Finances Publiques des Hautes Pyrénées qui est à l'origine de la procédure estime que Monsieur Bruno G. exerce une activité susceptible de faire l'objet d'une liquidation judiciaire dans la mesure où il ressort de la consultation infogreffe réalisée le 15 octobre 2010 que le numéro de SIREN 328 167 614 correspond bien à une activité libérale exercée par Monsieur Bruno G. Cette activité de nature juridique n'a cessé, selon Monsieur le Directeur Départemental des Finances Publiques des Hautes Pyrénées que le jour du jugement du Tribunal de grande instance soit le 17 mars 2010.

En fait, le numéro de SIREN 328 167 614 correspond à l'immatriculation ancienne de Monsieur Bruno G. dans le cadre de l'exercice d'une profession libérale, activités juridiques remontant au 1er janvier 1983.

Ce seul élément ne permet pas d'établir que Monsieur Bruno G. exercerait encore cette activité, dans la mesure où par Arrêt de la Cour d'Appel de Pau du 12 janvier 2006 sur appel d'un jugement du Tribunal correctionnel de Tarbes du 14 décembre 2004 Monsieur Bruno G. a été reconnu coupable d'escroquerie. Il a été prononcé notamment à son encontre, l'interdiction d'exercer toute profession effectuant des opérations de crédit et démarchage pendant une période de cinq ans, étant précisé que la Cour a relevé dans les renseignements que Monsieur Bruno G. n'exerçait aucune activité, qu'il était en arrêt maladie.

Dès lors, il y a lieu de relever qu'il n'est pas établi que Monsieur Bruno G, tant au jour de l'assignation, qu'au jour de l'audience, exerçait effectivement une activité, commerciale, artisanale, libérale, agricole et nécessairement indépendante. Il n'est pas non plus établi que cette activité ait pu cesser moins d'un an avant l'engagement de la procédure.

La procédure prévue à l'article L. 620-2 du code de commerce ne peut être appliquée à l'encontre de Monsieur Bruno G. Il convient de réformer le jugement entrepris.

Par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement, par Arrêt contradictoire en dernier ressort,

Réforme le jugement du Tribunal de grande instance de Tarbes du 17 mars 2010,

Constate que Monsieur Bruno G. n'est pas admissible au bénéfice d'une procédure collective à défaut pour lui d'exercer une profession ou une activité indépendante au jour de la demande en justice comme au jour où le juge statue,

Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,

Laisse les dépens à la charge du trésor.