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Décisions

CA Lyon, 1re ch. civ. A, 4 novembre 2021, n° 21/00574

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Eurofor (Sasu)

Défendeur :

Tesmec SpA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Wyon

Conseillers :

Mme Clément, Mme Isola

Avocat :

AARPI Bird & Bird

T. com. Lyon, du 26 oct. 2016, n° 2011J0…

26 octobre 2016

La société de droit italien Tesmec SPA (la société Tesmec) est fabricante de matériels de travaux publics, de machines dites trancheuses pour les travaux de tranchées et de terrassement. Elle a développé une activité commerciale de location à long terme, négoce et distribution par l'intermédiaire de la société Tesmec située en France.
Le 1er avril 2004, la société Tesmec a conclu, avec la société Eurofor, ayant pour activité la distribution de matériels de forage, un contrat de distribution exclusive sur le territoire français de trancheuses et pièces détachées fabriquées ou commercialisées par la société Tesmec sous licence Tesmec, pour une durée de quatre ans, tacitement renouvelable pour une durée identique.
L'article 7 du contrat prévoyait que chacune des parties pouvait mettre fin au contrat avec un préavis d'un an précédant la date de son renouvellement en motivant sa décision par des causes réelles et sérieuses. Si la rupture intervenait du fait de la société Tesmec, celle-ci s'engageait à reprendre le fonds de commerce, ainsi que les stocks, machines et pièces existant à la date de la rupture. Si celle-ci intervenait à l'initiative de la société Eurofor, les parties devaient se rapprocher pour déterminer les conditions du transfert du fonds de commerce.
A partir de 2010, des difficultés sont apparues entre les parties.
Alléguant de graves manquements de la part de la société Eurofor, la société Tesmec lui a, le 21 mars 2011, signifié le non-renouvellement du contrat à sa date anniversaire le 1er avril 2012.
La société Eurofor a contesté cette rupture en invoquant une violation de la clause d'exclusivité de la part de la société Tesmec.
En juin 2011 et mars 2012, la société Eurofor a assigné la société Tesmec devant le tribunal de commerce de Lyon en demandant sa condamnation au paiement de diverses sommes.
Par jugement du 24 mars 2014, le président du tribunal de commerce de Lyon a :
- ordonné la jonction des deux procédures
- constaté que la société Tesmec a été à l'origine du non-renouvellement du contrat de distribution exclusive et dit qu'il lui appartenait de reprendre le fonds de commerce en application de l'article 7 du code de procédure civile
- eu égard au désaccord des parties sur l'évaluation de ce fonds, a désigné un expert afin de déterminer la valeur du fonds de commerce de l'agence de Nîmes appartenant à la société Eurofor ainsi qu'à celle du stock, machines et pièces, au 1er avril 2012.
L'expert a rendu son rapport en date du 7 mai 2015.
Par jugement du 26 octobre 2016, le tribunal de commerce de Lyon a, notamment :
- jugé que la société Tesmec avait résilié le contrat pour des causes réelles et sérieuses,
- condamné la société Tesmec à verser à la société Eurofor diverses sommes au titre de la reprise du fonds de commerce, des pièces détachées et des frais d'expertise : 30 000 euros au titre de l'acquisition du fonds de commerce, hors stock, outre intérêts aux taux légal à compter du 31 mars 2012, 74 547 euros au titre de l'acquisition des pièces détachées, outre intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2012, 160 037 euros, outre la marge de la vente Y du 5 mars 2012, soit 30 % du montant HT facturé au titre de toutes les ventes en violation de l'exclusivité, outre intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012, 18 636 euros au titre des frais d'expertise,
- condamné la société Eurofor au paiement à la société Tesmec de l'intégralité des frais d'expertise judiciaire ainsi que des frais d'expertise amiable, soit 18 328 euros HT,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- dit qu'il n'y a pas lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Tesmec aux entiers dépens.
Le 12 janvier 2017, la société Eurofor a relevé appel de la décision.
Par un arrêt du 14 février 2019, la cour d'appel de Lyon a, notamment :
- confirmé le jugement en ce qu'il a :
* condamné la société Tesmec à payer à la société Eurofor les sommes relatives à la reprise du fonds de commerce et des frais de l'expertise de M. W,
* rejeté les demandes reconventionnelles de la société Tesmec.
- infirmé le jugement pour le surplus.
Et statuant à nouveau, a :
- condamné la société Tesmec à verser à la société Eurofor, au titre de la violation de la clause d'exclusivité, jugée valable, la somme totale de 572 879 euros au titre des ventes aux sociétés X(moteur, mars 2011), Y (trancheuse, mars 2012) et Z (trancheuse, septembre 2010),
- condamné les sociétés Eurofor et Tesmec à supporter chacune la moitié des frais de l'expertise judiciaire de M. B,
- dit que la société Tesmec a décidé du non-renouvellement du contrat de distribution sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société Tesmec à verser à la société Eurofor, à titre de dommages-intérêts la somme de 1 200 000 euros.
Statuant sur le pourvoi de la société Tesmec, la Cour de cassation a cassé cet arrêt sauf en ce qu'il confirme le jugement, d'une part, en ce qu'il a condamné la société Tesmec à payer à la société Eurofor les sommes de 30 000 euros au titre de l'acquisition du fonds de commerce, 75 547 euros au titre de l'acquisition des pièces détachées, 18 636 euros au titre des frais d'expertise (expert M. W) du dossier Fulchiron sauf à dire que le chiffre exact est 18 638,46 euros TTC, d'autre part, en ce qu'il a rejeté la demande de la société Eurofor tendant à voir condamner la société Tesmec à produire une facture sous astreinte (Com., 18 novembre 2020, pourvoi n° 19-14.828).
La Cour de cassation a jugé que :
- en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé que la clause d'exclusivité s'étendait à l'ensemble du territoire national et qu'il s'en déduisait une présomption d'affectation du commerce entre États membres, dont il appartenait à la société Eurofor de rapporter la preuve contraire résultant des caractéristiques de l'accord et du contexte économique dans lequel la clause s'insérait, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, L. 420-1 du code de commerce et 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,
- en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société Tesmec faisait valoir qu'en application du règlement européen (UE) n° 330/2010 du 20 avril 2010 de la Commission de l'Union européenne concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, une clause d'exclusivité ne pouvait interdire à d'autres fournisseurs de commercialiser leurs produits par l'intermédiaire de leur site internet, y compris sur le territoire visé par l'exclusivité, si ces fournisseurs ne procédaient à aucune prospection active et individualisée des clients situés sur le territoire exclusif du distributeur, ce qui était, selon elle, le cas de l'achat par la société Z d'une machine à la société italienne CMI, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
- en retenant une vente intervenue le 31 mars 2012, soit plus d'un an après la décision de non-renouvellement intervenue le 21 mars 2011, impropre à caractériser l'absence de cause réelle et sérieuse qu'elle devait apprécier à la date à laquelle cette décision a été prise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
Par déclaration du 22 janvier 2021, la société Eurofor a saisi la cour d'appel de Lyon, désignée cour de renvoi.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 7 septembre 2021, la société Eurofor demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* dit que la société Tesmec n'avait pas respecté la clause d'exclusivité,
* rejeté les demandes reconventionnelles de la société Tesmec tendant à la condamnation de la société Eurofor au paiement des sommes suivantes :
* 2 325 000 euros au titre d'un prétendu préjudice lié à de prétendus actes de concurrence déloyale et à une prétendue mauvaise exécution du contrat,
* 550 000 euros au titre des frais de rachat de la machine TRS 1475 auprès de la société Fulchiron et de 3 700 euros au titre de la garantie bancaire,
* 50 000 euros au titre d'un prétendu préjudice moral,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
* jugé que la société Tesmec avait résilié, avec cause réelle et sérieuse, le contrat de distribution exclusive,
* limité le préjudice consécutif à la violation de l'exclusivité à la somme de 160 037 euros,
* débouté la société Eurofor de toutes ses autres demandes, fins et prétentions,
* condamné la société Eurofor à payer à la société Tesmec la somme de 18 328 euros HT au titre des frais d'expertise de M. B et des frais du rapport de M. C,
* dit qu'il n'y a pas lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par voie de conséquence, statuant à nouveau et ajoutant,
A titre principal :
- déclarer prescrite l'exception de nullité soulevée par la société Tesmec en ce qui concerne la clause d'exclusivité,
- prononcer à titre subsidiaire la validité de la clause d'exclusivité contenue dans le contrat de distribution exclusive conclu entre les sociétés Eurofor et Tesmec,
- condamner en tout état de cause la société Tesmec à lui payer, au titre de la violation de la clause d'exclusivité, jugée valable, la somme totale de 572 879 euros au titre des ventes aux sociétés ERS (moteur, mars 2011), B. (trancheuse, mars 2012) et B. (trancheuse, septembre 2010),
- condamner les sociétés Tesmec et Eurofor à supporter chacune la moitié des frais de l'expertise judiciaire d'un montant total de 12 393,60 euros,
- condamner la société Tesmec à supporter seule les frais de l'expertise unilatérale de M. C qu'elle a initiée,
- débouter la société Tesmec de l'intégralité de ses demandes qui sont irrecevables et infondées,
- juger sans cause réelle et sérieuse le non-renouvellement par la société Tesmec du contrat de distribution exclusive conclu entre les sociétés Eurofor et Tesmec,
- condamner la société Tesmec à lui payer la somme de 1 200 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer son préjudice résultant de la rupture injustifiée du contrat de distribution,
A titre subsidiaire,
- si par impossible la Cour devait faire droit à la demande de la société Tesmec, es-qualités de subrogée dans les droits de la société Fulchiron, dire et juger recevable et bien fondé l'appel en garantie de la société Eurofor, et par voie de conséquence, condamner la société Tesmec au paiement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à l'encontre de la société Eurofor, principal, intérêts et frais,
Si par impossible la cour devait s'estimer insuffisamment informée,
- désigner tel expert qu'il plaira aux frais avancés de la société Tesmec à l'effet de vérifier ses allégations quant à la vente de produits concurrents par le distributeur, en violation de la clause d'exclusivité.
- dire, le cas échéant, afin de respecter le secret des affaires, que l'expert reportera dans son rapport que la liste des clients de la société Eurofor et des machines vendues par elle pour un montant supérieur à 50 000 euros sur la seule période antérieure à la résiliation du contrat, comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 mars 2012, et pour le seul marché des trancheuses,
- condamner, en toute hypothèse, la société Tesmec à lui payer la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux dépens de première instance et d'appel.
Dans ses dernières conclusions en date du 8 septembre 2021, la société Tesmec demande, en substance, à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* jugé que la société Tesmec a résilié avec causes réelles et sérieuses le contrat de distribution tel que le permet l'article 7 du contrat,
* condamné la société Tesmec à payer à la société Eurofor les sommes suivantes :
* 30 000 euros au titre de l'acquisition du fonds de commerce, hors stock, outre intérêts aux taux légal à compter du 31 mars 2012,
* 74 547 euros au titre de l'acquisition des pièces détachées, outre intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2012,
* 18 636 euros au titre des frais d'expertise sauf à dire que le chiffre exact est de 18 638,46 euros TTC.
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
* condamné la société Tesmec à payer à la société Eurofor la somme de 160 037 euros, outre la marge de la vente B. du 5 mars 2012, soit 30 % du montant HT facturé au titre de toutes les ventes en violation de l'exclusivité, outre intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2012,
* débouté la société Tesmec de toutes ses autres demandes, fins et prétentions.
En conséquence, statuant à nouveau et y ajoutant :
- juger irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par la société Eurofor dans ses conclusions signifiées le 7 septembre 2021 pour violation du principe de l'estoppel et de l'obligation de loyauté procédurale,
- juger nulle et de nul effet la clause d'exclusivité contenue dans le contrat de distribution conclu entre la société Tesmec et la société Eurofor,
- juger que la société Tesmec a bien respecté ses obligations contractuelles envers la société Eurofor et notamment la clause d'exclusivité du contrat de distribution, dans l'hypothèse où la Cour considérait ladite clause valide,
Par voie de conséquence, statuant à nouveau et ajoutant,
- condamner la société Eurofor au paiement de la somme de :
* 2 325 000 euros au titre du préjudice subi par la société Tesmec lié au fait de concurrence déloyale et de mauvaise exécution du contrat de distribution par la société Eurofor,
* Sur ce point, si par extraordinaire, la cour ne retenait pas la somme de 2 325 000 euros telle que résultant du rapport de l'expert M., à titre subsidiaire, ordonner à la société Eurofor la production de ses grands livres 2009 à 2014 ainsi que la liste des machines vendues pour un montant supérieur à 50 000 euros.
* 50 000 euros en réparation du préjudice moral subi et de la grave atteinte à l'image de marque subie en France par la société Tesmec,
* 550 000 euros au titre des frais liés au rachat auprès de la société Fulchiron de la machine TRS 1475 et 3 700 euros au titre de la garantie bancaire,
* l'intégralité des frais d'expertise judiciaire et amiable de M. C, soit 20 000 euros HT,
- débouter la société Eurofor de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions formulées à son encontre,
- condamner la société Eurofor à lui rembourser la somme de 10 000 euros correspondant aux condamnations au titre de l'article 700 résultant de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 14 février 2019 qui a statué sur un arrêt qui n'a plus d'existence juridique,
- condamner la société Eurofor à lui rembourser la somme de 3 000 euros correspondant à la condamnation au titre de l'article 700 prononcée par arrêt de la cour d'appel de Lyon en date du 11 mars 2020 dans le cadre du recours en révision enrôlé sous le numéro RG 20/5902 car portant sur un arrêt qui n'a plus d'existence juridique,
- condamner la société Eurofor à lui payer la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2021.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.
Par ailleurs, l'arrêt du 14 février 2019 n'a pas été cassé en ce qu'il a condamné la société Tesmec à payer à la société Eurofor les sommes suivantes :
* 30 000 euros au titre de l'acquisition du fonds de commerce, hors stock, outre intérêts aux taux légal à compter du 31 mars 2012,
* 74 547 euros au titre de l'acquisition des pièces détachées, outre intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2012,
* 18 636 euros au titre des frais d'expertise sauf à dire que le chiffre exact est de 18 638,46 euros TTC.
Il en résulte que la cour d'appel de Lyon a statué de manière irrévocable sur ces chefs dans son précédent arrêt, de sorte que la demande de la société Tesmec tendant à la confirmation du jugement sur ces points est irrecevable.
Sur la demande de la société Eurofor en indemnisation pour violation de la clause d'exclusivité
La société Eurofor soutient que la société Tesmec a réalisé plusieurs ventes directement, en violation de la clause d'exclusivité figurant au contrat liant les parties.
Le contrat de distribution signé par les sociétés Tesmec et Eurofor le 1er avril 2004 stipule en son article 2, intitulé « Exclusivité » que « en application de l'article 1, Tesmec s'interdit de proposer ses matériels sur le territoire, si ce n'est à Eurofor. Respectivement, Eurofor s'interdit la commercialisation de matériels neufs concurrents de ceux produits par Tesmec. Toutefois, il est précisé qu'Eurofor garde sa liberté d'achat pour ce qui concerne les pièces d'usure adaptables sur les machines ».
* sur la validité de la clause d'exclusivité
La société Eurofor soutient que l'exception de nullité de cette clause soulevée par la société Tesmec est prescrite ; à titre subsidiaire, que la clause est valable dès lors qu'elle n'était pas de nature à affecter le commerce intracommunautaire.
La société Tesmec réplique que la société Eurofor est irrecevable à lui opposer la prescription ; sur le fond, elle soutient que cette clause viole le droit de l'Union.
L'article 81 du Traité instituant la Communauté européenne (TCE), devenu l'article 101 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), dispose que :
1. Sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur, et notamment ceux qui consistent à :
[...]
c) répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement,
2. Les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit.
3. Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables :
- à tout accord ou catégorie d'accords entre entreprises,
- à toute décision ou catégorie de décisions d'associations d'entreprises et
- à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertées
qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans:
a) imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs,
b) donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.
La société Tesmec fait référence aux dispositions du règlement n° 330/2010, inapplicable en l'espèce, compte tenu de la date de conclusion du contrat et il convient d'appliquer le règlement CE n° 2790/1999 du 22 décembre 1999 concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, qu'elle vise à titre subsidiaire.
Le règlement du 22 décembre 1999 prévoit en son article 2 que :
1. Conformément à l'article 81, paragraphe 3, du traité, et sous réserve des dispositions du présent règlement, l'article 81, paragraphe 1, du traité est déclaré inapplicable aux accords ou pratiques concertées qui sont conclus entre deux ou plus de deux entreprises dont chacune opère, aux fins de l'accord, à un niveau différent de la chaîne de production ou de distribution, et qui concernent les conditions dans lesquelles les parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services (ci-après dénommés "accords verticaux").
La présente exemption s'applique dans la mesure où ces accords contiennent des restrictions de concurrence tombant sous le coup de l'article 81, paragraphe 1 (ci-après dénommées "restrictions verticales").
2. L'exemption prévue au paragraphe 1 s'applique uniquement aux accords verticaux conclus entre une association d'entreprises et ses membres, ou entre une telle association et ses fournisseurs, si tous ses membres sont détaillants de biens et sous réserve qu'aucun des membres individuels de cette association, conjointement avec ses entreprises liées, ne réalise un chiffre d'affaires annuel total qui dépasse 50 millions d'euros ; des accords verticaux conclus par ces associations sont couverts par le présent règlement sans préjudice de l'application de l'article 81 aux accords horizontaux conclus par les membres de l'association et aux décisions adoptées par l'association.»
L'article 5 du règlement précise que :
« L'exemption prévue à l'article 2 ne s'applique à aucune des obligations suivantes contenues dans des accords verticaux :
a) toute obligation directe ou indirecte de non-concurrence, dont la durée est indéterminée ou dépasse cinq ans; une obligation de non-concurrence tacitement renouvelable au-delà d'une période de cinq ans doit être considérée comme ayant été conclue pour une durée indéterminée; cette limitation de la durée à cinq ans n'est toutefois pas applicable lorsque les biens ou services contractuels sont vendus par l'acheteur à partir de locaux et de terrains dont le fournisseur est propriétaire ou que le fournisseur loue à des tiers non liés à l'acheteur, à condition que la durée de ces obligations de non-concurrence ne dépasse pas la période d'occupation des locaux et des terrains par l'acheteur ; [...] ».
En prévoyant une clause de distribution exclusive sur le territoire français, le contrat conclu entre les sociétés Tesmec et Eurofor entre dans les prévisions de l'article 81 du TCE, devenu 101 du TFUE.
S'agissant d'un accord vertical, il pourrait bénéficier de l'exemption prévue à l'article 2 du règlement du 22 décembre 1999, dès lors qu'il n'est pas allégué qu'une des deux sociétés réalise un chiffre d'affaires annuel total qui dépasse 50 millions d'euros.
Toutefois, dès lors que, par application de son article 6, le contrat était renouvelé « automatiquement » tous les quatre ans pour une durée de quatre ans, sauf si une partie le dénonçait avec un préavis d'un an avant la date du renouvellement, et a, de fait, duré huit ans, cette convention doit être considérée comme ayant été conclue pour une durée indéterminée au sens de l'article 5 du règlement susvisé
Il s'en déduit que le contrat entre dans le champ d'application de l'article 81 du TCE, devenu 101 du TFUE, sans bénéficier de l'exemption prévue à l'article 2 du règlement du 22 décembre 1999.
La société Eurofor soulève pour la première fois devant la cour de renvoi, dans ses écritures déposées deux jours avant la clôture, la prescription de l'exception de nullité de la clause d'exclusivité soulevée par la société Tesmec.
Par application de l'article 123 du code de procédure civile, une fin de non-recevoir peut être proposée en tout état de cause, sauf pour la partie qui la soulève tardivement à être condamnée au paiement de dommages-intérêts.
Ainsi, pour regrettable que soit ce comportement procédural, aucune irrecevabilité de la fin de non-recevoir tirée de la prescription ne peut être opposée à la société Eurofor sur ce fondement, étant observé que la société Tesmec ne sollicite aucune indemnisation à ce titre.
Il est constant qu'à compter de l'expiration de la prescription de l'action en nullité, l'exception de nullité ne peut faire échec à la demande d'exécution d'un acte qui a déjà reçu un commencement d'exécution par celui qui l'invoque.
En l'espèce, le contrat signé entre les parties a reçu exécution par la société Tesmec et l'action en nullité est prescrite depuis le 19 juin 2013, ce dont il résulte que cette société est, par application des dispositions du code civil, irrecevable à opposer la nullité de la clause d'exclusivité.
Cependant, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les règles applicables aux recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l'effet direct du droit de l'Union ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne (principe de l'équivalence) et elles ne doivent pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits conférés par l'ordre juridique de l'Union (principe d'effectivité) (CJUE, arrêt du 5 juin 2014, Kone e.a., C-557/12, point 25).
Or, la pleine efficacité de de l'article 81 du TCE devenu l'article 101 TFUE ne serait pas assurée si, par l'effet de la réglementation nationale, une société à laquelle une violation d'une clause d'exclusivité est reprochée était privée de la possibilité de faire examiner la régularité de cette clause au regard de ce texte, afin que soient respectées les règles de la concurrence.
Il convient en conséquence de déclarer recevable l'exception de nullité soulevée par la société Tesmec.
Il est constant qu'il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une entente s'étendant à l'ensemble du territoire d'un Etat membre, ayant, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, induit une forte présomption d'affectation du commerce entre les Etats membres, qui ne peut être écartée que si l'analyse des caractéristiques de l'accord et du contexte économique dans lequel il s'insère démontre le contraire.
En l'espèce, la clause d'exclusivité s'étendant à l'ensemble du territoire national comme il a été indiqué ci-avant, il s'en déduit une présomption d'affectation du commerce entre États membres.
Par suite, il appartient à la société Eurofor de rapporter la preuve contraire résultant des caractéristiques de l'accord et du contexte économique dans lequel la clause s'insère.
Celle-ci soutient que l'exclusivité a permis de commercialiser de nouvelles machines de conception et de fabrication italienne sur un marché français jusque-là dominé par des acteurs américains, contribuant de fait au développement du commerce entre Etats membres, au lieu d'affecter celui-ci.
Cependant, comme le fait valoir la société Tesmec, elle distribuait ses produits sur le territoire français antérieurement à l'accord conclu entre les parties, de sorte que l'accord conclu n'a pas permis une « véritable entrée sur le marché » français, au sens du paragraphe 61 des lignes directrices du 10 mai 2010 sur les restrictions verticales, publiées par la Commission « afin d'aider les entreprises à évaluer elles-mêmes les accords verticaux au regard des règles de concurrence de l'UE ».
Le fait que l'activité globale de la société Tesmec avant la cession du fonds de commerce ne lui ait pas permis de dégager un bénéfice significatif ne signifie pas pour autant qu'elle n'était pas déjà entrée sur le marché français, dès lors que l'acte de cession ne précise pas le chiffre d'affaires relatif à l'activité cédée.
Au demeurant, la notion d'entrée sur le marché n'est pas subordonnée à la réussite économique de l'opération.
Par ailleurs, il sera rappelé que pour être frappée de nullité, il suffit que la clause litigieuse ait été susceptible d'exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur le courant d'échanges entre les Etats membres, de sorte que le fait que la société Tesmec reproche par ailleurs à la société Eurofor un faible chiffre d'affaires et la perte de parts de marché en France ne permet pas d'écarter la présomption d'affectation du commerce entre les Etats membres.
En l'absence de tout autre élément, il convient de retenir que la société Eurofor ne renverse pas la présomption d'affectation du commerce entre Etats membres par la clause d'exclusivité contenue dans le contrat liant les parties.
Il y a lieu en conséquence de déclarer cette clause nulle par effet l'article 81 du TCE, devenu 101 du TFUE, et de rejeter les demandes de la société Eurofor fondées sur la violation de la clause d'exclusivité, le jugement étant infirmé sur ce point.
Sur la rupture du contrat de distribution
Le contrat de distribution prévoit en son article 7 que « si l'une des parties ne souhaite pas renouveler le présent contrat, elle doit motiver sa décision par des causes réelles et sérieuses ».
Par lettre du 21 mars 2011, la société Tesmec a signifié à la société Eurofor le non-renouvellement du contrat.
L'existence d'une cause réelle et sérieuse doit être appréciée à la date à laquelle la décision de non-renouvellement a été prise.
Il sera observé que le contrat de distribution ne définit pas la notion de « cause réelle et sérieuse » à laquelle il se réfère, alors que celle-ci n'est pas usuelle en droit des affaires.
Les premiers juges ont relevé que la société Eurofor la définissait comme « une raison qui pénalise le fonctionnement du contrat ou la perte de confiance ».
Dans ses écritures, elle fait valoir que « cette cause suppose qu'il y ait des faits objectifs, précis et vérifiables qui lui soient opposables et suffisamment importants pour justifier la rupture ».
Pour justifier cette absence de renouvellement, la société Tesmec invoque des causes qu'elle qualifie de réelles et sérieuses, tenant à la baisse du chiffre d'affaires, la perte de parts de marché en France, l'absence de communication d'informations sur le marché, le non-respect des délais contractuels de paiement, des manquements dans le cadre du service après-vente ; la société Eurofor conteste chacune des causes ainsi énoncées.
Par ailleurs, l'article 10 du contrat fait obligation au distributeur d'informer le constructeur sur l'évolution du marché et de lui fournir des prévisions de vente régulières destinées à planifier les cycles de fabrication.
Cette stipulation contractuelle ne prévoit pas les modalités d'information du constructeur et il ressort des pièces produites, à savoir des comptes rendus de réunion des 27 août 2008 et 9 juin 2009 ainsi que des lettres des 3 mars et 31 août 2010, que la société Eurofor a rempli ses obligations à ce titre, de sorte qu'aucune cause réelle et sérieuse de non-renouvellement du contrat ne peut être retenue à ce titre, contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges.
S'agissant du non-respect des délais contractuels de paiement fixés par l'article 12 du contrat, il convient de relever que seule une facture est visée et que l'absence de paiement partiel s'explique par la défaillance de la machine, de sorte que ce grief ne constitue pas une cause réelle et sérieuse.
En ce qui concerne les manquements du service après-vente, les allégations de la société Tesmec reposent sur deux lettres émanant, pour l'une, de la société Y, pour l'autre, de la société Z.
Cependant, la société Eurofor justifie, d'une part, qu'elle a commandé les pièces auprès de la société Tesmec pour le client Y et a dû relancer le constructeur pendant de nombreux mois, d'autre part, qu'elle avait adressé plusieurs offres de vente à la société Y, de sorte que le grief articulé à ce titre ne pouvait fonder le non-renouvellement du contrat.
Sur les deux derniers griefs, le rapport de l'expert judiciaire permet de comparer le chiffre d'affaires de la société Eurofor au fil des années ainsi que le montant et la proportion de l'activité Tesmec dans le chiffre d'affaires de la société Eurofor (en K€) :
               
<TABLEAU>
Il ressort de ce tableau que la part de l'activité Tesmec dans le chiffre d'affaires de la société Eurofor s'est réduite de manière significative en 2009 et a chuté en 2010 pour ne plus représenter que 1,28 %, alors que ce pourcentage s'établissait à 9,15 % en 2007.
Si la crise économique peut expliquer la diminution du chiffre d'affaires de la société Eurofor d'environ 25 % en 2010, elle ne permet pas de justifier la diminution drastique de la part des produits Tesmec dans l'activité de la société Eurofor, passée en un an de 6,35 % à 1,28 %.
Pour justifier de cette baisse, la société Eurofor se réfère à des ventes passées par la société Tesmec en violation de la clause d'exclusivité.
Seule la vente réalisée au profit de la société Z est intervenue en 2010, pour la somme de 580 000 euros.
En prenant en considération cette vente, nonobstant la nullité de clause d'exclusivité, le chiffre d'affaires de la société Eurofor se serait élevé à la somme de 26 163 000 euros et la part de l'activité Tesmec à 908 000 euros, soit un pourcentage de 3,47 %.
Ainsi, même en prenant en considération cette vente passée par un autre distributeur, la part de l'activité Tesmec dans le chiffre d'affaires de la société Eurofor a connu une baisse très importante en 2010.
Il ressort de l'attestation de l'ancien directeur commercial de la société Eurofor à l'agence de Nîmes que cette dernière a orienté ses efforts sur les machines « no dig » au détriment des trancheuses Tesmec et l'ancien salarié considère que « cette orientation est indéniable [au vu] des résultats des ventes entre 2008 où [il a] réalisé 10 TRS Tesmec et 2009/2010 où M. T a réalisé un TRS Tesmec et 16 machines du groupe Astec », ce qui explique les chiffres rappelés ci-avant.
Cette attestation est corroborée par une lettre de la société Socodima, datée du 13 février 2012, qui relève qu'au cours des années 2009 à 2011, il s'est vendu en France près de soixante-dix machines mais que peu sont de marque Tesmec.
La baisse de la part de la société Tesmec dans l'activité de la société Eurofor et la perte de marchés sont suffisamment significatives en 2010, même en prenant en considération la vente à la société Z, pour constituer, chacune, une cause réelle et sérieuse de non-renouvellement du contrat décidé en 2011, indépendamment de leur éventuel caractère fautif, quand bien même aucun objectif chiffré n'était précisé dans le contrat de distribution.
Ainsi, ces baisses sont suffisamment « importantes » compte tenu des proportions rappelées et caractérisent, à tout le moins, une perte de confiance entre les parties, pour reprendre la définition donnée par la société Eurofor de la cause réelle et sérieuse.
Au demeurant, la société Tesmec fait valoir à juste titre que les engagements perpétuels sont prohibés et que si le contrat prévoyait une durée de quatre années, la résiliation ou le non-renouvellement était subordonné à une cause réelle et sérieuse, de sorte que les parties restaient liées indéfiniment en l'absence d'une telle cause.
Il en résulte que le constructeur pouvait mettre un terme au contrat, sans avoir à justifier d'une cause réelle et sérieuse, à charge pour lui de respecter un préavis suffisant.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a jugé que la société Tesmec avait valablement mis un terme au contrat et a rejeté les demandes indemnitaires de la société Eurofor.
Sur la demande de la société Tesmec au titre d'une concurrence déloyale et d'une mauvaise exécution du contrat
La société Tesmec, qui a soutenu avec succès la nullité de la clause d'exclusivité, ne peut reprocher à la société Eurofor d'avoir violé celle-ci.
Ainsi, la vente par la société Eurofor de machines d'autres marques ne peut lui être imputée à faute et aucune « concurrence déloyale » n'est établie de ce chef, étant observé que la société Eurofor, qui est un distributeur et non un fabricant comme la société Tesmec, n'est pas un concurrent de cette dernière.
Il ressort des développements ci-avant que sont établies la baisse de la part de la société Tesmec dans l'activité de la société Eurofor et la perte de marchés en 2010.
Cependant, l'existence d'une cause réelle et sérieuse de non-renouvellement du contrat n'induit pas obligatoirement l'existence d'une faute commise par la société Eurofor, les deux notions étant distinctes.
Ainsi, les baisses constatées ne procèdent pas nécessairement d'un comportement fautif de la société Eurofor.
Si l'attestation de l'ancien directeur commercial de la société Eurofor démontre que la société Eurofor a privilégié les machines d'une autre société pour l'année 2010, elle ne permet pas pour autant d'établir que ce choix était fautif.
Ainsi, la société Eurofor observe à juste titre, d'une part, que les machines vendues sont différentes de celles de la société Tesmec, d'autre part, qu'à la suite de la crise financière de 2008, le marché des trancheuses en Europe a connu une baisse importante et que le prix de celles de la société Tesmec est très élevé.
En l'absence de démonstration d'une faute commise par la société Eurofor, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes indemnitaires de la société Tesmec.
Sur la demande au titre de la vente Fulchiron
La société Fulchiron a acquis une machine Tesmec auprès de la société Eurofor en septembre 2009.
A la suite de dysfonctionnements de ce matériel et après expertise judiciaire, la société Tesmec a racheté la trancheuse litigieuse pour le prix de 550 000 euros et sollicite de la société Eurofor le remboursement de cette somme, outre le paiement de la somme de 3 700 euros au titre de la garantie.
Contrairement à ce qu'allègue la société Eurofor, cette demande n'est pas nouvelle puisqu'elle avait été présentée aux premiers juges.
En revanche, comme le souligne la société Eurofor le fondement juridique de cette demande n'est pas précisé puisque la société Tesmec, d'une part, se prétend subrogée dans les droits de la société Fulchiron, d'autre part, invoque la responsabilité contractuelle du distributeur, dans un paragraphe intitulé « sur l'absence de prescription de l'action en répétition », après avoir soutenu qu'elle s'est « conventionnellement substituée par novation à la société Fulchiron », le tout sans viser aucun texte.
Si la société Eurofor vise à tort l'article 56 du code de procédure civile relatif à l'assignation, il n'en demeure pas moins que la société Tesmec, qui invoque quatre notions juridiques distinctes, n'a mis ni son contradicteur ni la cour en mesure de connaître le fondement de sa demande.
Quoi qu'il en soit, à supposer que sa demande soit recevable, elle est mal fondée dès lors que la société Tesmec ne démontre aucune faute de la société Eurofor.
Ainsi, il ressort du rapport d'expertise de M. W, désigné par ordonnance de référé du 9 février 2011, déposé le 30 août 2012, qu'aucune faute n'est imputable à la société Eurofor, distributeur, les désordres étant causés pour certains par des problèmes de conception et de réalisation par la société Tesmec, pour d'autres, par l'utilisation de la machine par l'acquéreur.
Bien qu'il ait été déposé en l'état, ce rapport est suffisant pour écarter toute responsabilité de la société Eurofor.
Par suite, quel que soit le fondement de la demande de la société Tesmec, celle-ci n'est pas fondée et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a rejetée.
Dans le corps de ses conclusions, la société Tesmec sollicite la condamnation de la société Eurofor à payer les frais de l'expertise de M. W, sans reprendre cette prétention dans le dispositif de ses conclusions, qui seul saisit la cour, puisqu'elle demande au contraire la confirmation du jugement qui l'a condamnée à prendre en charge ces frais.
Au demeurant, il a été statué irrévocablement sur ce chef de demande par l'arrêt du 14 février 2019 non censuré sur ce point.
Sur la demande en paiement des frais de l'expertise judiciaire et de l'expertise de M. C
Les frais de l'expertise amiable confiée à M. C constituent des frais irrépétibles et ne peuvent être indemnisés à un autre titre, de sorte que le jugement sera infirmé de ce chef.
Les frais de l'expertise judiciaire sont compris dans les dépens et il sera statué sur leur sort à ce titre, le jugement étant modifié sur ce point.
Sur les demandes en restitution des sommes versées au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Le 16 octobre 2020, la société Tesmec a déposé un recours en révision contre l'arrêt du 14 février 2019.
La société Tesmec sollicite la condamnation de la société Eurofor à lui rembourser la somme de 3 000 euros mise à sa charge au titre de l'article 700 du code de procédure civile par l'arrêt de la cour d'appel du 11 mars 2021 statuant sur ce recours en révision.
La cour ne peut à l'occasion de la présente procédure remettre en cause une autre décision ayant l'autorité de la chose jugée, de sorte que cette demande est irrecevable.
La société Tesmec sollicite également la condamnation de la société Eurofor à lui rembourser la somme de 10 000 euros à laquelle elle a été condamnée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par l'arrêt du 14 février 2019.
Le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution de l'arrêt frappé de cassation, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par la société Eurofor.
Sur les autres demandes
Chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a engagés, les frais de la mesure expertise judiciaire confiée à M. B étant partagés par moitié.
Chacune des parties succombant partiellement, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant sur renvoi de cassation, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 18 novembre 2020,
Déclare irrecevable la demande de la société Tesmec SPA tendant à la confirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la société Eurofor les sommes suivantes :
* 30 000 euros au titre de l'acquisition du fonds de commerce, hors stock, outre intérêts aux taux légal à compter du 31 mars 2012,
* 74 547 euros au titre de l'acquisition des pièces détachées, outre intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2012,
* 18 636 euros au titre des frais d'expertise sauf à dire que le chiffre exact est de 18 638,46 euros TTC.
Confirme le jugement, sauf en ce qu'il dit que la société Tesmec SPA n'a pas respecté la clause d'exclusivité, condamne la société Tesmec à payer à la société Eurofor la somme de 160 037 euros, outre la marge de la vente B. du 5 mars 2012, soit 30 % du montant HT facturé au titre de toutes les ventes en violation de l'exclusivité et condamne la société Eurofor au paiement des frais de la mesure d'expertise judiciaire et des frais de l'expertise amiable de M. C ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare recevable l'exception de nullité soulevée par la société Tesmec SPA ;
Déclare nulle la clause d'exclusivité figurant dans le contrat conclu entre les sociétés Tesmec SPA et Eurofor ;
Rejette les demandes de la société Eurofor au titre de violation de la clause d'exclusivité ;
Déclare irrecevable la demande de la société Tesmec SPA en remboursement des indemnités mises à sa charge au titre de l'article 700 du code de procédure civile par l'arrêt du 14 février 2019 ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens, les frais de la mesure d'expertise confiée à M. B étant supportés pour moitié par chaque partie ;
Rejette les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.