Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 4 novembre 2021, n° 19/03918

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Les Ateliers du Décorateur (SARL)

Défendeur :

Home Standing (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Grandjean

Conseillers :

Mme Trouiller, Mme Arbellot

TI Lagny-sur-Marne, du 19 oct. 2018, n° …

19 octobre 2018

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Home standing a conclu le 17 juillet 2015 un contrat de franchise aux termes duquel elle détient le droit d'exploiter le concept " les Ateliers du décorateur " sous l'enseigne " L.A.D.D. Les Ateliers du décorateur ".

Par acte sous seing privé en date du 26 octobre 2016, M. X et Mme X ont accepté un devis d'aménagement de leur pavillon pour un montant de 21 116,15 euros, présenté par la société Home standing.

M. et Mme X ont dénoncé des malfaçons et un abandon du chantier par le prestataire.

Ils ont saisi le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne d'une action aux fins d'indemnisation dirigée contre la société Home standing prise en la personne de son liquidateur, Maître Y et contre la société les Ateliers du décorateur.

Par un jugement réputé contradictoire rendu le 19 octobre 2018 auquel il convient de se reporter, ce tribunal a notamment :

- condamné la société les Ateliers du décorateur à payer à M. et Mme X la somme de 5 996 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation ;

- fixé la créance de M. et Mme X au passif de la société Home standing à la somme de 5 996 euros.

Le tribunal a principalement retenu que M. et Mme X avaient bien contracté avec la société les Ateliers du Décorateur, de sorte que cette société est engagée en raison des malfaçons survenues dans l'exécution du chantier réalisé.

Par une déclaration en date du 19 février 2019, la société les Ateliers du décorateur a relevé appel de cette décision dans la seule limite des dispositions la concernant.

La société les Ateliers du décorateur a été dissoute le 31 juillet 2019 à l'issue d'une liquidation amiable et Mme Z a été désignée par ordonnance du 2 mars 2020 en qualité de mandataire ad hoc pour poursuivre l'instance d'appel.

Aux termes de conclusions remises le 30 juin 2020, la société les Ateliers du décorateur demande à la cour :

- d'infirmer le jugement dont appel,

- de " mettre hors de cause " la société les Ateliers du décorateur en ce qu'elle est étrangère au litige qui oppose M. et Mme X à la société Home standing,

- de condamner M. et Mme X au paiement de la somme de 6 000 euros au titre d'une procédure abusive.

L'appelante expose que le contrat litigieux lie M. et Mme X à la société Home Standing seulement, et que les conditions générales de vente mentionnent " L.A.D.D. Les Ateliers du décorateur " par référence à l'enseigne que la société Home standing est en droit d'utiliser aux termes du contrat de franchise.

Elle précise que l'identité de nom et d'enseigne ne crée pas pour autant de lien contractuel entre elle et M. et Mme X et rappelle au visa de l'article A. 441-1 du code de commerce que les entités sont juridiquement et économiquement indépendantes dans le cadre d'un contrat de franchise de sorte que même une action engagée à l'encontre du franchiseur, la société Maelheem aurait été vouée à l'échec.

Elle précise avoir subi un préjudice du fait de la saisie attribution dont elle a fait l'objet et se fonde sur l'article 32-1 du code de procédure civile pour en réclamer la réparation.

Par des conclusions remises le 10 juillet 2019, M. et Mme X demandent à la cour :

- de dire la société les Ateliers du décorateur mal fondée en son appel et l'en débouter ;

- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.

Les intimés dénoncent la mauvaise foi de la société les Ateliers du décorateur ; ils relèvent que la présidente de la société Maelheem est la même que celle de la société les Ateliers du décorateur et qu'un courrier reçu le 31 octobre 2017 mentionne bien l'existence d'un contrat de franchise entre la société Home standing et la société les Ateliers du décorateur. Ils affirment que le bon de commande présente la société L.A.D.D. comme franchiseur de la société Home standing. Ils soulignent que les conditions générales du contrat litigieux prévoient que la société les Ateliers du décorateur opérera un suivi du chantier et ils concluent que l'abandon de chantier engage la responsabilité de cette dernière.

Ils ajoutent que l'exécution provisoire de la décision avait été prononcée, que la société les Ateliers du décorateur aurait pu en solliciter la suspension et que ne l'ayant pas fait, elle est d'autant plus infondée à se prévaloir du caractère abusif de la procédure.

La tentative de signification de la déclaration d'appel le 11 avril 2019 à la société Home standing prise en la personne de son mandataire judiciaire, la SCP W a fait l'objet d'un procès-verbal de difficultés, la SCP W indiquant qu'elle n'avait plus qualité pour recevoir l'acte.

Les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur l'irrégularité de la procédure d'appel à l'encontre de la société Home standing.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 juin 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Avisée par message du greffe en date du 28 mars 2019 que la société Home Standing prise en la personne de la SCP W n'avait pas constitué avocat, la société les Ateliers du décorateur n'a pas régulièrement signifié la déclaration d'appel, la SCP W ayant indiqué qu'elle n'avait plus qualité pour recevoir l'acte d'huissier.

Partant, la déclaration d'appel est caduque à l'égard de la société Home standing par application de l'article 902 du code de procédure civile.

Ni l'appelante, ni M. et Mme X ne critiquent la disposition par laquelle le premier juge a fixé la créance de ceux-ci au passif de la liquidation judiciaire de la société Home standing.

Echappant à l'effet dévolutif de l'appel, cette disposition conserve toute sa portée.

Il ressort des extraits K-bis du registre du commerce et des sociétés versés aux débats que la SAS Home standing, la SARL les Ateliers du décorateur et la SAS Maelheem sont des entités juridiques distinctes dotées de la personnalité juridique.

L'appelante produit un contrat de franchise conclu le 17 juillet 2015 entre la société Maelheem, franchiseur et la société Home standing, franchisée dont il ressort notamment :

- que la SARL les Ateliers du décorateur constituée en 2007 a développé un concept de cabinet d'architecture intérieure,

- que sa dirigeante, Mme A a constitué la société Maelheem afin de développer un réseau de franchise sur la base de ce concept,

- que la société Maelheem, franchiseur a concédé à la société Home standing, franchisée le droit d'exploiter le concept " Les Ateliers du décorateur " sous l'enseigne " L.A.D.D. Les Ateliers du décorateur ".

La SARL les Ateliers du décorateur n'est pas partie à ce contrat et c'est donc à tort que M. et Mme X soutiennent que la SARL les Ateliers du décorateur est le franchiseur de la société Home Standing.

Ainsi qu'ils l'indiquent eux-mêmes, M. et Mme X ont accepté un devis établi par la société Home standing.

Conformément au contrat de franchise, ce devis porte en tête l'enseigne " L.A.D.D. Les Ateliers du décorateur ".

Conformément à l'article A. 441-1 du code de commerce, qui impose au franchisé d'informer le consommateur de sa qualité d'entreprise indépendante, de manière lisible et visible, sur l'ensemble des documents d'information, le devis mentionne en en-tête que la SAS Home standing est " franchisé LADD/Les Ateliers du décorateur " et indique en bas de page les références spécifiques de son inscription au registre du commerce et des sociétés.

Les conditions générales de vente annexées au devis et qui sont communes à l'ensemble des franchisés de la société Maelheem qui les a élaborées sont présentées sous l'en-tête " LADD Les Ateliers du décorateur " et le prestataire y est désigné sous son enseigne " LADD Les Ateliers du décorateur " sans jamais qu'il soit fait référence à une quelconque " société Les Ateliers du décorateur " contrairement à ce que le premier juge a retenu.

M. et Mme X ne produisent aucun élément de nature à établir que la SARL les Ateliers du décorateur est intervenue de quelque manière dans la relation contractuelle qu'ils ont nouée avec la société Home Standing.

Le rapport du technicien qui a examiné, à la demande de leur assureur, les désordres qu'ils dénonçaient a clairement indiqué que leur contractant était la " SAS Home standing sous franchise LADD ".

Contrairement à que les intimés soutiennent, le courrier qui leur a été adressé le 31 octobre 2017 par la société Maelheem ne fait aucune mention de la SARL Les Ateliers du décorateur : le franchiseur y expose les nombreuses doléances reçues à propos de l'un de ses franchisés, la société Home standing, dénonce l'atteinte à l'enseigne LADD et invite les plaignants à se joindre à la plainte collective qu'il a initiée à l'encontre de la société Home standing pour tromperie, faux, usage de faux et diverses autres violations de la loi.

En conséquence, M. et Mme X sont mal fondés à opposer à la SARL les Ateliers du décorateur un contrat auquel celle-ci n'est pas partie.

La demande de " mise hors de cause " formée par l'appelante étant improprement libellée par utilisation d'une notion dépourvue de contenu juridique, il convient plus exactement de débouter M. et Mme X de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société les Ateliers du décorateur.

L'appelante ne caractérise pas une intention malicieuse de M. et Mme X dans leur action judiciaire à son encontre qui ne peut se déduire du seul fait que la société Home Standing fait l'objet d'une procédure collective. Par ailleurs, elle ne saurait se prévaloir des voies d'exécution forcée mises en oeuvre par M. et Mme X au mois de mars 2019 pour obtenir le bénéfice d'une décision exécutoire par provision prononcée le 19 octobre 2018.

L'appelante est déboutée de sa demande indemnitaire pour abus de droit.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,

- Constate la caducité de la déclaration d'appel à l'encontre de la société Home Standing ;

- Infirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

- Déboute M. X et Mme X de l'ensemble de leurs prétentions ;

- Déboute la société les Ateliers du décorateur de sa demande indemnitaire ;

- Condamne M. X et Mme X aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la SARL les Ateliers du décorateur la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.