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Décisions

Cass. com., 2 juin 1992, n° 90-16.914

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Sedexdoc (SARL), Le Revenu français (SARL)

Défendeur :

Groupe usine nouvelle (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. Curti

Avocats :

Me Goutet, Me Thomas-Raquin

Paris, 4e ch. A, du 10 avr. 1992

10 avril 1992

Sur le moyen unique pris en ses trois branches :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 10 avril 1990) que la société Sedexdoc et le Revenu Français, la première, éditeur d'une revue intitulée "Les Affaires", le second, titulaire de la marque "Les Affaires", déposée le 26 février 1988, enregistrée sous le numéro 1 527 793 pour désigner, dans les classes 16 et 38, les journaux, revues, périodiques et magazines, ont assigné, pour concurrence déloyale et contrefaçon de la marque, la société Groupe usine nouvelle, elle-même titulaire des marques "A Comme Affaires" et "A Pour Affaires" déposées le 26 janvier 1989 sous les numéros 1 510 904 et 1 510 905 pour désigner les produits et les services dans les classes 16, 35, 38, 41 et 42 ;

Attendu que la société Sedexdoc et le Revenu Français font grief à l'arrêt d'avoir déclaré nulle, comme usuelle et générique, pour distinguer une publication de presse spécialisée dans ce domaine, la marque "Les Affaires" et rejeté la demande de contrefaçon de cette marque alors, selon le pourvoi, d'une part, que le fait d'avoir plusieurs acceptions exclut que le terme employé comme marque et, notamment, comme titre d'un journal présente un caractère générique, descriptif et nécessaire et lui confère, par nature, une part d'arbitraire en ce qu'il correspond à d'autres activités foncièrement différentes, et cela même si l'une des acceptions correspond au domaine dans lequel le journal est spécialisé, une telle circonstance n'ayant pas pour conséquence de faire perdre au terme employé sa diversité, de le priver de sa part d'arbitraire et de lui conférer un caractère générique, descriptif et nécessaire qu'il suit de là que l'arrêt, qui constate que le terme "affaires" n'est pas consacré uniquement au domaine économique et est susceptible d'autres acceptions et, cependant déclare nulle la marque correspondante, exclusivement parce qu'elle désigne un journal spécialisé dans ce domaine, ne tire pas de ses propres constatations les conséquences légales qu'elles comportent et ne justifie pas légalement sa décision au regard des dispositions de la loi du 31 décembre 1964, alors d'autre part, que les conclusions de première instance et d'appel faisaient valoir la diversité des sujets traités par le journal, destiné à fournir aux entreprises des conseils de tous ordres et que, dés lors, l'arrêt ne pouvait fonder sa décision sur le fait que la publication était spécialisée dans le domaine économique et financier, sans répondre à ces conclusions que ne l'ayant pas fait, il viole les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et ne donne pas une base légale à sa décision au regard des dispositions de la loi du 31 décembre 1964 alors enfin que, si la marque d'un produit ne peut ni être constituée par le nom usuel de ce produit ni en définir la qualité ou la composition, tel ne saurait être le cas du titre d'un journal qui a pour objet essentiel d'informer ses lecteurs potentiels de la nature des informations qu'ils peuvent y trouver et qui, par conséquent, doit indiquer le domaine dont traite la publication que sans cette indication, le lecteur ne peut exercer le libre choix inhérent à la liberté même de la presse que, dans ces conditions, l'arrêt ne pouvait déclarer nulle la marque en litige au motif qu'elle désignait, par le mot "affaires", usuel dans le domaine économique, un journal traitant des activités de cette nature qu'ainsi l'arrêt n'est pas légalement justifié et méconnait les dispositions de la loi du 31 décembre 1964,

Mais attendu qu'un titre de journal peut constituer une marque à la condition de ne pas utiliser de termes recouvrant par leur banalité l'objet même de la publication ou d'y associer des éléments permettant de la distinguer des publications concurrentes que la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, a considéré que le terme "affaires", déposé seul pour désigner un journal traitant essentiellement des activités économiques et de marché qui sont précisément ce qui est désigné de manière courante sous le terme "affaires" ne pouvait pas faire valablement l'objet d'un dépôt à titre de marque ; qu'en statuant ainsi qu'elle a fait, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre aux conclusions invoquées qui n'étaient pas de nature à avoir une influence sur la solution du litige, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS;

REJETTE le pourvoi.