Cass. com., 13 septembre 2011, n° 10-24.536
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Just'In (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
Me Blondel, SCP Ghestin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 30 juin 2010), que la société System'D, locataire commercial de la société civile immobilière Just'In (la SCI), ayant été mise en liquidation judiciaire par jugement du 28 novembre 2008, le liquidateur a assigné la SCI, afin que lui soit étendue cette procédure, pour confusion de leurs patrimoines ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement déféré pour absence de mise en cause de la société System'D alors, selon le moyen :
1°) que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendu ou appelée ; que le débiteur est partie au jugement d'extension à une autre personne de la procédure ouverte à son encontre et son audition est requise à peine de nullité du jugement ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société System'D n'avait été ni appelée, ni entendue dans l'instance ayant abouti au jugement entrepris étendant la procédure de liquidation judiciaire à la SCI et qu'elle n'avait pas davantage été appelée ou entendue en cause d'appel ; qu'en refusant d'annuler le jugement entaché d'un tel vice, la cour d'appel a violé l'article 14 du code de procédure civile, les articles L. 621-1 et L. 661-1 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°) que le jugement entrepris ayant prononcé l'extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société System'D à la SCI, cette dernière avait un intérêt légitime à demander l'annulation de cette décision qui lui faisait grief ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 14 et 31 du code de procédure civile ;
Mais attendu que le débiteur visé par l'extension n'a pas qualité pour invoquer, au lieu et place du débiteur initialement soumis à la procédure collective, l'absence de mise en cause de celui-ci ; que le moyen est irrecevable ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la confusion des patrimoines alors, selon le moyen :
1°) que la confusion des patrimoines entre plusieurs sociétés ne se trouve caractérisée que par l'imbrication du passif et de l'actif de ces sociétés ; que l'existence de flux financiers anormaux constitue un critère de la confusion des patrimoines dans la mesure seulement où des mouvements de fonds sans contrepartie réelle peuvent être établis entre la société en redressement ou liquidation judiciaires et la société à l'encontre de laquelle une demande en extension de procédure collective a été formé et si ces flux procèdent d'une volonté systématique de créer une confusion des patrimoines, de telle sorte qu'une dissociation entre les sociétés s'avère impossible ; que l'arrêt relève seulement, à l'appui de sa décision, que la société System'D avait pris en charge les travaux d'aménagement des locaux qui lui étaient loués pour un montant de 91 438 euros ; qu'il en résultait l'absence de mouvements de fonds entre les deux sociétés puisque les dépenses de travaux de la société System'D avaient été réalisées par des entreprises tierces et pour les besoins de son activité dans des locaux dont elle avait la jouissance et qu'elles avaient été portées à l'actif de son bilan ; qu'en affirmant néanmoins l'existence de flux financiers anormaux entre les deux sociétés, la cour d'appel a violé l'article L. 621-2 du code de commerce ;
2°) qu'un flux financier entre deux sociétés ne peut présenter un caractère anormal, révélateur d'une confusion de patrimoines, que s'il est dépourvu de contrepartie ; qu'en l'espèce, la société System D bénéficiait aux termes du bail de la jouissance exclusive pendant toute la durée du bail des aménagements et travaux d'amélioration qu'elle avait effectués à ses frais dans les lieux litigieux, ce qui constituait une contrepartie sérieuse à cette dépense, laquelle ne pouvait profiter au bailleur, la SCI, qu'en fin de bail ; qu'en se bornant à relever qu'aux termes du bail, tous les embellissements, améliorations ou autres restaient sans indemnité la propriété du bailleur en fin de bail, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'anormalité de la dépens exposée par la société System'D, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-1 du code de commerce ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient que, dépassant la seule obligation, qui lui était imposée par le bail, d'effectuer les grosses réparations au sens de l'article 606 du code civil, la société System'D a supporté, en plus du loyer, la charge d'importants travaux d'aménagement, intérieur et extérieur, de l'immeuble loué pour un coût équivalent à six années de loyers, qu'elle a dû partiellement financer par le recours à l'emprunt, tandis que la SCI, au terme du bail, devenait, sans aucune indemnité, propriétaire de tous les aménagements ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations caractérisant des relations financières anormales entre les deux sociétés, peu important l'absence de mouvements de fonds entre elles relatifs aux travaux d'aménagement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.