Cass. 3e civ., 12 janvier 2000, n° 98-12.446
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M.Beauvois
Rapporteur :
Mme Boulanger
Avocat général :
M. Weber
Avocat :
SCP Guiguet, Bachellier et Potier de La Varde
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 novembre 1997), que M. Y..., promoteur, a construit un centre commercial et a prévu la création d'une association des commerçants pour en promouvoir le développement ; qu'il a donné à bail commercial à M. Z... un local, celui-ci ayant été revendu à Mme Y..., son épouse ; qu'invoquant un préjudice d'exploitation lié au mauvais fonctionnement de ce centre commercial, ce locataire a assigné les époux Y... en dommages-intérêts ;
Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, 1 ) qu'en mettant à la charge des époux Y... la réparation du préjudice causé à M. Z... par l'échec commercial du centre au sein duquel il exploitait un commerce de restauration rapide, à raison du défaut de paiement par M. Y... de cotisations dues à l'Association des commerçants du centre, sans caractériser le lien de causalité direct et certain entre ce fait et l'échec du centre commercial, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 2 ) qu'en s'abstenant de caractériser le lien de causalité direct et certain entre le défaut de paiement des charges de copropriété par M. Y... et l'échec commercial du centre, des conséquences duquel elle a indemnisé M. Z..., la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que M. Y..., membre de droit de l'association des commerçants, ne s'était pas acquitté de ses cotisations qui auraient permis les actions de promotion prévues dès l'origine et que ces cotisations impayées étaient les plus importantes, que l'absence de paiement des charges par les copropriétaires, notamment par M. Y..., pour un montant considérable, avait entraîné l'impossibilité de payer les consommations d'électricité et d'eau du centre et l'interruption de ces prestations, et ayant relevé que M. Y..., en sa qualité de propriétaire de lots donnés à bail, avait manqué à son obligation de faire respecter, tant le règlement de jouissance des locaux dressé à sa requête, obligeant les preneurs à exploiter les magasins, que la résolution d'une assemblée générale de copropriétaires ayant imposé des heures d'ouverture des fonds de commerce, la cour d'appel a pu en déduire que ces actes personnels de M. Y... étaient en relation directe avec le préjudice d'exploitation de M. Z... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu l'article 1382 du Code Civil ;
Attendu que, pour condamner "solidairement" Mme Y... au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que celle-ci, lors d'une assemblée générale, s'est opposée à la poursuite des copropriétaires défaillants pour non-paiement de charges, notamment de son époux, et s'est abstenue sur la demande tendant à la réouverture des premier et deuxième étages du centre commercial ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'assemblée générale avait décidé de la poursuite des copropriétaires débiteurs et sans constater que l'abstention de Mme Y... suffisait à empêcher la réouverture des étages, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que Mme Y... a été condamnée "solidairement" à payer la somme de 600 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 27 novembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.