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Décisions

Cass. com., 2 novembre 2011, n° 10-24.725

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Buckfast (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Metz, du 13 avr. 2010

13 avril 2010

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception de nullité de la marque " buckfast " alors, selon le moyen, que le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés ; que sont dépourvus de caractère distinctif les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ; que M. Z... faisait valoir que le terme « Buckfast " était employé de façon usuelle et nécessaire, dans le milieu apicole, pour désigner un type d'abeille, créé en 1929 par le Frère Adam en Angleterre ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que « l'abeille Buckfast » descend « d'une ou plusieurs souches précises » et présente des « caractéristiques spécifiques " ; qu'en jugeant que le terme « Buckfast » aurait eu un caractère distinctif et aurait pu être déposé à titre de marque en 1981, aux motifs inopérants que, « dans les années 1980, Raymond Y... était le seul en France à « créer » des Buckfast », et que « les publications faisant état du développement de ces abeilles datent de 2001, 2002, 2003 », sans rechercher si, au moment du dépôt de la marque litigieuse, le terme " Buckfast » était, dans le langage courant ou professionnel, la désignation nécessaire, générique ou usuelle du type d'abeille susvisé, créé pour la première fois en 1929, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'arrêt relève que, dans les années 1980, M. Y..., titulaire initial de la marque, était le seul en France à créer des abeilles " buckfast " et que les publications faisant état du développement de ces abeilles dataient des années 2001, 2002 et 2003 ; qu'en l'état de ces constatations souveraines, dont il se déduit qu'à la date du dépôt de la marque, le terme " buckfast " n'était pas la désignation nécessaire ou générique des produits désignés, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense :

Attendu que M. X... soutient que le moyen, nouveau et, mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

Mais attendu que le moyen n'est pas nouveau dès lors que M. Z... a soutenu devant la cour d'appel qu'il avait utilisé le terme " buckfast " dans son sens courant et qu'il n'existait pas d'autre moyen de nommer le type d'abeilles présentant les caractéristiques des abeilles " buckfast " ;

Et sur le moyen :

Vu l'article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour condamner M. Z... pour contrefaçon de la marque " buckfast ", l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les annonces qu'il a fait publier contiennent, pour l'une, la reproduction à l'identique de la marque " buckfast " pour désigner des abeilles et, pour l'autre, le terme " buck " qui génère, en raison de sa ressemblance avec le terme " buckfast " et du fait qu'il se rapporte à des abeilles, un risque de confusion dans l'esprit du public avec la marque ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, à la date des faits argués de contrefaçon, les termes " buckfast " et " buck " n'étaient pas devenus, dans le langage des professionnels de l'apiculture, nécessaires pour désigner un certain type d'abeilles et si M. Z... ne les avait pas employés dans leur signification habituelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Z..., pour contrefaçon de la marque " buckfast ", à payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et prononcé diverses mesures accessoires, l'arrêt rendu le 13 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.