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Décisions

Cass. com., 10 mars 2021, n° 19-22.395

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Défendeur :

Fonds commun de titrisation Hugo

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Barbot

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Capron, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Amiens, du 20 juin 2019

20 juin 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 20 juin 2019), le 29 mars 2007, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est (la banque) a consenti à la société civile AVL finances, dont MM. W et M Y sont les associés, un prêt de 750 000 euros, remboursable en sept annuités, un avenant du 25 février 2011 ayant réaménagé les échéances.

2. Le 23 février 2012, la banque a prononcé la déchéance du terme, en raison d'incidents de paiement, et mis la société AVL finances en demeure de lui payer le solde du prêt, avant de l'assigner en paiement, le 30 mai 2012, devant un tribunal de grande instance.

3. Le 27 septembre 2012, la société AVL finances a été mise en liquidation judiciaire, la société Grave Randoux étant nommée liquidateur. La banque a déclaré sa créance, avant de la céder au Fonds commun de titrisation Hugo créances II (le FCT).

4. Le 24 octobre 2013, la liquidation judiciaire de la société AVL finances a été clôturée pour insuffisance d'actif.

5. Dans le cadre de l'instance pendante devant le tribunal de grande instance, le FCT est intervenu volontairement, en exposant venir aux droits de la banque et, par un jugement du 22 mai 2014, ce tribunal a déclaré le FCT irrecevable en sa demande de fixation de sa créance au passif de la société AVL finances.

6. Le FCT a assigné MM. W et M Y, en leur qualité d'associés de la société AVL finances, en paiement de la dette sociale, à proportion de leurs droits sociaux.

7. MM. W et M Y se sont opposés à ces demandes en soutenant, notamment, que le jugement du 22 mai 2014 s'analysait en une décision de rejet entraînant l'extinction de la créance du FCT à l'égard de la société et, par voie de conséquence, à l'égard des associés.

Sur le second moyen, ci-après annexé

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le premier moyen

Enoncé du moyen

9. MM. W et M Y font grief à l'arrêt de les condamner au profit du FCT, alors « que toute décision par laquelle le juge rejette la demande de fixation d'une créance au passif d'une société en liquidation judiciaire emporte, quel que soit son motif, son extinction ; qu'il s'ensuit que le créancier d'une société civile ne peut poursuivre le paiement des dettes sociales contre les associés dès lors que, par jugement irrévocable, il a été déclaré irrecevable en sa demande de fixation de sa créance au passif de la société civile ; qu'en jugeant, après avoir pourtant constaté que la demande de fixation de la créance du FCT au passif de la SCI AVL Finances avait été déclarée irrecevable par un jugement du tribunal de grande instance de Saint Quentin du 22 mai 2014, que la dette n'était pas éteinte et qu'ainsi le FCT conservait le droit de poursuite à l'encontre des consorts Y, associés de cette SCI, la cour d'appel a violé l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble les articles 1857 et 1858 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. Le juge du fond, qui statue dans une instance en cours reprise conformément à l'article L. 622-22 du code de commerce, ne fait pas application de l'article L. 624-2 du même code. Il en résulte que la décision par laquelle ce juge déclare irrecevable la demande d'un créancier tendant à la fixation du montant de sa créance ne constitue pas une décision de rejet de cette créance entraînant, dès lors, l'extinction de celle-ci.

11. Après avoir reproduit les termes de l'article 1857 du code civil, l'arrêt relève, d'abord, par motifs propres et adoptés, que, par un acte du 30 mai 2012, la banque a assigné la société civile AVL finances, que le FCT est intervenu volontairement à l'instance et qu'il a assigné le liquidateur en intervention forcée. Il relève, ensuite, qu'il ressort du jugement du 22 mai 2014, rendu par un tribunal de grande instance, que la demande du FCT tendant à la fixation de sa créance au passif de la société civile a été déclarée irrecevable au motif que, la liquidation judiciaire emportant dissolution de la société AVL finances, celle-ci n'avait plus d'existence.

12. De ces constatations, desquelles il ressort que le jugement du 22 mai 2014 avait été rendu dans une instance en cours, de sorte que, même s'il déclarait la demande du FCT irrecevable, il ne pouvait être assimilé à une décision de rejet prise par le juge-commissaire dans la procédure de vérification du passif, la cour d'appel a déduit à bon droit que, la dette de la société AVL finances n'étant pas éteinte, le FCT conservait son droit de poursuite contre les associés de cette société civile, tenus des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.