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Décisions

CA Pau, 1re ch., 30 novembre 2021, n° 19/01091

PAU

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Duchac

Conseillers :

Mme Rosa-Schall, Mme de Framond

TI Mont De Marsan, du 26 mars 2019

26 mars 2019

FAITS ET PROCÉDURE :

M. Mehdi K. a acheté à M. Patrick B., via une annonce parue sur « le bon coin » un chiot de race Doberman pour la somme de 1 300€, livré le 19 septembre 2017 à son domicile par le vendeur, un acompte de 400€ ayant été versé avant la vente le 29 août, et le solde après la livraison le 20 septembre. Lors de la prise en charge du chiot, M. Mehdi K. a constaté la présence de deux bandages sur les oreilles de l'animal qui avaient été coupées. Une infection se développant, M. Mehdi K. a été contraint de consulter un vétérinaire. Le vendeur, averti, a refusé de prendre en charge les frais exposés. L'acheteur a alors pris contact avec l'éleveuse de l'animal et constaté que le chiot avait été vendu à M. Patrick B. pour le prix de 200 €.

M. Mehdi K. a porté plainte contre M. Patrick B. d'une part, et lui a adressé d'autre part, par lettre recommandée du 15 février 2018 une mise en demeure de lui régler la somme de 1 359,10 € en réduction du prix et remboursement des frais de vétérinaire. Cette lettre est restée sans effet.

M. Mehdi K. a alors assigné M. Patrick B. par acte du 12 juin 2018 devant le tribunal d'instance de Mont-de-Marsan aux fins de le voir restituer le prix de vente pour défaut de conformité du chien livré et pour voir réparer ses préjudices.

Par conclusions du 3 juillet 2018, Mme Claire W., ayant payé une partie du prix de vente du chien intervenait, volontairement à l'instance aux côté de M. Mehdi K..

Par jugement contradictoire rendu le 26 mars 2019, le tribunal d'instance de Mont-de-Marsan a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de Mme Claire W.,

- débouté Mme Claire W. et M. Mehdi K. de l'intégralité de leurs demandes,

- condamné solidairement Mme Claire W. et M. Mehdi K. à verser à M. Patrick B. la somme de 500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Mme W. et M. Mehdi K. aux entiers dépens, ceux-ci bénéficiant tous deux de l'aide juridictionnelle.

Concernant l'obligation de délivrance conforme le premier juge a considéré, en application des dispositions des articles 1604 du Code civil et L. 217-4 et suivants du code de la consommation que si l'acheteur est en droit d'exiger la conformité du bien livré au contrat, il ne peut cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu'il avait contracté. De plus, l'acception sans réserve d'une chose vendue couvre ses défauts apparents de conformité. Or, les acheteurs avaient accepté sans réserve l'animal lors de la livraison alors que celui-ci présentait de façon visible des bandages aux oreilles, outre une section de sa queue.

La demande fondée sur la non remise des documents relatifs à l'identification et l'agrément de l'animal a été rejetée en raison d'une demande imprécise et au regard de l'identification provisoire de l'animal.

Par déclaration en date du 1er avril 2019, M. Mehdi K. et Mme Claire W. ont interjeté appel de cette décision critiquant le jugement rendu en toutes ses dispositions sauf sur la recevabilité de l'intervention de Mme Claire W..

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 27 mai 2019, M. Mehdi K. et Mme Claire W. demandent à la cour de réformer le jugement et :

- d'ordonner la résolution judiciaire de la vente,

- de condamner M. Patrick B. à payer à M. Mehdi K. et à Mme Claire W. la somme de 1 300 € en remboursement du prix versé pour l'acquisition de ce chien,

- condamner M. Patrick B. à payer à M. Mehdi K. et à Mme Claire W. la somme de 359,10 € au titre des frais vétérinaires exposés,

- condamner M. Patrick B. à payer à M. Mehdi K. et à Mme Claire W. la somme de 2 000€ en réparation de leur préjudice moral,

- condamner M. Patrick B. à payer à M. Mehdi K. et à Mme Claire W. la somme de 5 000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE outre les entiers dépens,

- ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

A l'appui de leurs demandes fondées sur le défaut de conformité de l'animal vendu en application des dispositions de l'article L. 217-1 et suivants du code de la consommation, les demandeurs contestent avoir vu avant la vente des photos de l'animal et un certificat de bonne santé rédigé par le vétérinaire le 2 septembre 2017 qui en toute hypothèse ne mentionne pas les oreilles coupées, alors que le chien leur a été livré avec les deux oreilles sectionnées ce qui n'avait jamais été abordé avant la signature du contrat, ce qu'ils n'ont jamais demandé, ni souhaité, et qui est interdit par la législation européenne ratifiée par la France depuis le 1er mai 2004, interdiction d'ordre public. Cette otectomie, faite en dehors de tout cadre sanitaire a entraîné des complications médicales dont les frais ont été intégralement supportés par eux. Ils ajoutent que le vendeur ne leur a jamais remis les documents d'identification et d'agrément de l'animal manquant donc également à son obligation de délivrance.

Ils se fondent sur l'article L. 217-11 du code de la consommation pour réclamer le remboursement du prix du chien et des dépenses faites pour l'animal suite à l'otectomie pratiquée, outre leur préjudice moral pour les déplacements chez le vétérinaire, leur angoisse et le temps passé à soigner la chienne.

M. Patrick B., bien qu'ayant régulièrement reçu en personne la déclaration d'appel et les conclusions des appelants, n'a pas comparu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 01 septembre 2021.

SUR CE :

Selon les articles L. 216-1 et L. 217-4 et 5 du Code de la consommation, le vendeur délivre un bien conforme au contrat ainsi qu'aux critères énoncés à l'article L. 217-5, à savoir notamment qu'il est propre à l'usage habituellement attendu d'un bien de même type.

Il répond des défauts de conformité existant au moment de la délivrance du bien, c'est- à-dire lors du transfert au consommateur de la possession physique ou du contrôle du bien, qui apparaissent dans un délai de deux ans à compter de celle-ci.

Il ressort de ces textes que la garantie du vendeur s'applique à un défaut de conformité existant avant ou lors de la livraison, mais non apparent à l'acquéreur et qui apparaît postérieurement à celle-ci.

Il ressort des pièces versées au débat par M. Mehdi K. et Mme Claire W. que ceux-ci ont acheté à M. Patrick B. une petite chienne de race doberman le 19 septembre 2017 qui a été livrée avec des pansements sur ses oreilles qui avaient été coupées. Dans le jugement rendu par le tribunal de Mont de Marsan, M. Patrick B., qui était comparant, a affirmé que M. Mehdi K. voulait un chien de race, ce qui signifiait selon lui qu'il ait les oreilles coupées. Outre que cette caractéristique est interdite par la réglementation européenne et française et sanctionné par l'article 521-1 du code pénal. En première instance, M. Patrick B. n'a pas produit de pièces démontrant une demande en ce sens des acheteurs, ni qu'il leur avait montré le chien qu'il allait leur livrer avec les oreilles coupées ou versé des pièces sur des échanges de mails relatifs aux soins en cours sur le chiot qui leur était destiné. Les photos versées en appel par M. Mehdi K. et Mme Claire W. présentent le compte Facebook de M. Patrick B. où, le 27 mai 2017, apparaît effectivement une portée de chiots doberman, mais sans aucune atteinte corporelle.

Il y a donc lieu de considérer que M. Mehdi K. et Mme Claire W. ignoraient l'otectomie pratiquée sur le chiot qu'ils avaient commandé à M. Patrick B. avant sa livraison le 19 septembre 2017. A cette date par contre, le chien a été remis en la possession des acquéreurs avec les oreilles coupées, et le solde du prix de vente a été réglé par eux avec deux chèques datés du 20 septembre 2017 pour 900 € au total.

Il s'en suit que lors de la délivrance du chien aux acquéreurs, le défaut de conformité, à savoir la section des deux oreilles de l'animal, était manifeste, puisque celui-ci portait deux pansements et que le vendeur s'en est expliqué sur interrogation des acheteurs.

En acceptant le chiot en connaissance de cause et en payant le solde du prix de vente sans réserve, ils ont donc accepté et validé comme conforme à leur commande cette caractéristique du chien, apparente à la livraison.

Quant aux documents prétendument non remis par M. Patrick B. lors de la livraison du chiot, pas plus que devant le 1er juge les appelants ne précisent de quelles pièces il s'agit et qui manqueraient à l'identification de ce chiot, dès lors qu'un contrat de vente a bien été établi indiquant un numéro de tatouage.

Par conséquent, M. Mehdi K. et Mme Claire W. ne sont plus fondés à demander la résolution de la vente sur le fondement du défaut de conformité des articles L. 216-1 et L. 217-4 et suivants du code de la consommation et leur demande doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, et le complétant, ils seront condamnés aux dépens de la procédure d'appel, leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel étant également rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 26 mars 2019 en toutes ses dispositions et y ajoutant,

Rejette la demande de M. Mehdi K. et Mme Claire W. au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. Mehdi K. et Mme Claire W. aux entiers dépens de la procédure d'appel.