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Décisions

Cass. 3e civ., 8 décembre 2021, n° 20-21.439

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Tellier

Rapporteur :

Mme Farrenq-Nési

Avocat général :

M. Brun

Avocat :

SCP Yves et Blaise Capron

Riom, 1re ch. civ., du 14 janv. 2020

14 janvier 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 14 janvier 2020), le 13 octobre 2008, Mme [K] et M. [D] ont vendu à M. [Y] une maison avec, attenant à cette habitation, un atelier recouvert d’une toiture en tuiles.

2.  Ayant constaté des infiltrations dans l'atelier, ainsi qu'un affaissement de la charpente en bois de la toiture, M. [¥], au vu d'un constat d'huissier de justice du 1 er avril 2014, a assigné les vendeurs en référé expertise, le 16 mars 2015, puis au fond, le 27 septembre 2016, pour obtenir paiement des travaux de réparation et indemnisation de son préjudice de jouissance sur le fondement de la garantie des vices cachés.

3. En appel, Mme [K] et M. [D] lui ont opposé la prescription de son action.

Moyens

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen

4. M. [¥] fait grief à l’arrêt de déclarer son action irrecevable comme prescrite, alors«   que le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, c'est-à-dire de la conclusion de la vente dans le cas du délai applicable à l'action en garantie des vices cachés ; qu’en énonçant, dès Iors, pour déclarer irrecevable, comme prescrite l'action présentée par M. [H] [Yj, que la vente litigieuse avait été conclue le 13 octobre 2008, que M. [H] [Y] avait saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand aux fins d'obtenir l’organisation d'une mesure d’expertise par un acte d’assignation en date du 13 février 2015 et que l’action de M. [H][Y] sur le fondement de l’article 1648 du code civil était donc prescrite depuis le 1 4 octobre 2013, la cour d’appel a violé les dispositions de l'article 2232 du code civil.»

Motivation

Réponse de la Cour

Vu les articles 1648, alinéa 1er, 2224 et 2232 du code civil :

5.  Selon le premier de ces textes, l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

6.  Aux termes du deuxième, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

7.  Selon le troisième, le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.

8.  Il est de jurisprudence constante qu'avant la Loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, la garantie légale des vices cachés, qui ouvre droit à une action devant être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, devait également être mise en oeuvre à l’intérieur du délai de prescription extinctive de droit commun.

9.  L'article 2224 du code civil, qui a réduit ce délai à cinq ans, en a également fixé le point de départ au jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, ce qui annihile toute possibilité d'encadrement de l'action en garantie des vices cachés, le point de départ de la prescription extinctive du droit à garantie se confondant avec le point de départ du délai pour agir prévu par l'article 1648 du même code, à savoir la découverte du vice.

10. En conséquence, l’encadrement dans le temps de l’action en garantie des vices cachés ne peut être assuré, comme en principe pour toute action personnelle ou mobilière, que par l’article 2232 du code civil qui édicte un délai butoir de vingt ans à compter de la naissance du droit.

11. Le droit à la garantie des vices cachés découlant de la vente, l'action en garantie des vices cachés doit donc être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, sans pouvoir dépasser un délai de vingt ans à compter du jour de la vente (3e Civ., 1 er octobre 2020, pourvoi n° 19-16.986, en cours de publication).

12. Pour déclarer l’action de M. [Y] irrecevable, l'arrêt retient que l'action, qui devait être engagée dans le délai de la prescription applicable à la vente, laquelle était intervenue le 13 octobre 2008, était prescrite depuis le 13 octobre 2013.

13. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Dispositif

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour:

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déclare irrecevable l’action de M. [Y] sur le fondement de la garantie des vices cachés, l’arrêt rendu le 14 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Riom ;

Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.