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Décisions

CA Bordeaux, premier président, 14 décembre 2021, n° 19/03894

BORDEAUX

Ordonnance

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Eiffage Energie Systèmes Poitou Charentes (Sté)

Défendeur :

DGCCRF

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lebreton

Avocats :

Me Barast, Me Cholet

TGI Bordeaux, JLD, du 26 juin 2019, n° 0…

26 juin 2019

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance en date du 26 juin 2019, le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Bordeaux, a autorisé M. X, directeur adjoint de la Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi Nouvelle Aquitaine (la DREETS) à procéder ou faire procéder aux opérations de visites et de saisies (OVS) sur le fondement de l’article L 450-4 du code de commerce dans les locaux de huit entreprises ayant passé des marchés avec le Syndicat Départemental d’Electrification et d’Equipement rural de la Charente maritime (SDEER 17) dans le secteur de l’électrification rurale, dont la société Eiffage Energies Systèmes-Poitou Charentes (la société Eiffage), afin de : « Rechercher la preuve des agissements qui entrent dans le champ des pratiques prohibées par l’article L 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE dans le secteur de l’électrification rurale des travaux de génie civil connexes, ainsi que toute manifestation de ces comportements prohibés ».

Cette ordonnance a été complétée par une seconde rendue sur commission rogatoire le 1er juillet 2019 par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Saintes pour désigner les chefs de service compétents pour nommer les officiers de police judiciaire amenés à assister aux visites domiciliaires.

Les OVS se sont déroulées le 2 juillet 2019 dans les locaux de la société Eiffage Energies Systèmes-Poitou Charentes (la société Eiffage) entre 9 h et 22 h 15, avec une pause méridienne. À la suite de ces opérations des procès-verbaux de visite et de saisie ont été établis sous les références suivantes : n° EIFFAGE/02/07/2019/A et n° EIFFAGE/02/07/2019/B.

Par déclaration du 9 juillet 2019 la société Eiffage a interjeté appel contre l’ordonnance n° 07/2019 rendue par le juge des libertés de la détention du tribunal de grande instance de Bordeaux le 26 juin 2019, et de l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention (JLD) du tribunal de grande instance de Saintes le 1er juillet 2019, sur commission rogatoire.

Par conclusions déposées le 16 septembre 2021, et soutenues à l’audience, la société Eiffage demande à la première présidente de bien vouloir :

- déclarer recevable la société Eiffage en son appel ;

Y FAISANT DROIT

- dire et juger nulle l’ordonnance du JLD près le Tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 26/06/2019 ; en raison d’un défaut de contrôle et de caractérisation d’un faisceau de présomptions par le JLD qui s’est contenté d’énumérer les observations inopérantes de la requête en les interprétant au regard d’une lettre anonyme irrecevable ; en raison de la violation du principe de proportionnalité dans son principe et son champ géographique ; en raison de la détermination des lieux à visiter en considération d’une lettre anonyme irrecevable.   

EN CONSEQUENCE

- infirmer l’ordonnance du JLD près le Tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 26/06/2019 et consécutivement celle du JLD près le Tribunal de grande instance de Saintes, en date du 1/07/2019 ;

- annuler tous les actes subséquents y compris les éventuelles ordonnances secondaires prises sur son fondement et les saisies ;

- ordonner la restitution de toutes les pièces irrégulièrement saisies lors des opérations de visites et de saisies réalisées dans les entreprises où elles ont eu lieu en vertu de l’ordonnance susvisée ;

- interdire à toute personne ou autorité autre que leur propriétaire de faire usage desdites pièces ;

- interdire toute utilisation de double ou copie desdites pièces par une personne ou autorité autre que leur propriétaire ;

- en tout état de cause, interdire toute divulgation à des tiers des documents couverts par le secret professionnel ou par le secret des affaires ;

- condamner le Ministre chargé de l’économie représenté par la DIRECCTE ou tous succombant à 5 000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens.

Elle fait valoir à cette fin :

- que l’ordonnance du 26 juin 2019 n’est pas fondée sur des éléments pertinents de nature à établir une probabilité suffisante de la mise en œuvre d’une quelconque pratique anticoncurrentielle, puisque les comportements dénoncés sont normaux et caractéristiques du secteur concerné et ne peuvent être suspects, l’autorité de la concurrence n’ayant jamais admis la valeur probante des indices opposés en l’espèce et n’ayant jamais condamné les pratiques de répartition de marché sur ce secteur, notamment s’agissant de soumissionner à un nombre limité de lots, d’obtenir le marché en tant que mieux-disante et non en tant que moins-disante, de proposer son prix le plus attractif uniquement sur un lot, de proposer un prix supérieur à l’estimation du maître d’ouvrage et supérieure à l’offre de 2014, de la prévisibilité de la hiérarchisation des offres sur le critère prix, de la reconduction des titulaires de lots d’un marché à un autre, des hausses de coefficients identiques ou proches entre 2014 et 2018 pour les opérateurs soumissionnant sur un même lot (observations qui ne la concernent pas), des rabais proposés sur des lots convoités par d’autres entreprises pour le marché de 2014 (observations qui ne la concernent pas) ;

- que les éléments de contexte destinés à rendre suspects des comportements légitimes sont irrecevables, l’ordonnance s’appuyant sur une lettre anonyme, non datée et non signée, ou non pertinents, sur des comportements que la pratique décisionnelle de l’autorité de la concurrence écarte systématiquement, sur une interprétation erronée d’une décision de ladite autorité et sur une présentation erronée des caractéristiques du marché ;

- que les opérations de visite et de saisie autorisées dans l’ordonnance sont disproportionnées et ne sont pas conformes aux dispositions des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, tant dans leur principe, le contrôle juridictionnel n’ayant pas été effectué a priori et  in concreto, qu’en ce qu’elles ne précisent pas le champ géographique dans lequel elles devaient s’exercer.

Par conclusions déposées le 13 octobre 2021, la DREETS demande à la première présidente de :

- dire et juger mal fondée la société Eiffage dans toutes  ses demandes et l’en débouter ;

- déclarer régulière l’ordonnance du juge des libertés et de la détention près le tribunal de Grande instance de Bordeaux, délivré le 26 juin 2019, autorisant des opérations de visite et de saisies notamment dans les locaux de la société Eiffage ;

- rejeter en conséquence la demande formulée par la société Eiffage d’annulation de l’ordonnance du juge des libertés de la détention de Bordeaux du 26 juin 2019 et des actes d’enquête subséquents, notamment des opérations de visite et saisies du 2 juillet 2019.

Elle fait valoir :

- que la préparation de la requête par l’administration répond aux standards de mise en œuvre des enquêtes de pratiques anticoncurrentielles, tant en ce qui concerne le formalisme ayant présidé à l’établissement de la requête qu’en ce qui concerne la licéité des pièces et annexes l’accompagnant, le juge n’étant tenu de vérifier que la licéité apparente de la détention des documents produits par l’administration ;

- que les opérations de visite et de saisie réalisées par l’administration se sont déroulées dans le respect des principes applicables, en ce que l’ordonnance est fondée et repose sur des éléments pertinents et suffisants pour présumer la mise en œuvre d’une pratique anticoncurrentielle, à ce stade la preuve ne devant pas être rapportée, n’étant pas démontré que les indices proposés par l’administration sont caractéristiques des marchés à bons de commande dans le secteur de l’électrification rurale en dehors de toute entente, n’étant pas démontré que ces comportements répondent à une seule logique rationnelle, il en va ainsi du fait d’avoir soumissionné un nombre de lots limités et ciblés, du fait pour chaque entreprise de proposer son prix le plus attractif uniquement sur un lot différent des autres entreprises, de la reconduction quasi-systématique des titulaires des lots d’un marché à un autre, du fait d’avoir obtenu le marché en tant que mieux-disante et non en tant que moins-disante, sur le fait d’avoir proposé un prix supérieur à l’estimation du maître d’ouvrage, de la prévisibilité de la hiérarchisation des offres sur le critère prix, et de la hausse de coefficients identiques ou proches entre 2014 et 2018 ;

- que les éléments de contexte figurant dans la requête sont recevables, tant la lettre anonyme produit en annexe que la lecture faite par l’administration de la décision numéro 11–D–13 de l’autorité de la concurrence ;

- qu’enfin les opérations de visite et de saisies autorisées sont proportionnées au but recherché, l'ordonnance terminant un champ géographique d'investigation suffisamment précise et pertinente au regard des contours de la pratique anticoncurrentielle soupçonnée. 

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

Par visa au dossier en date du 13 août 2019, le Procureur général s’en rapporte.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de dispositions de l’article L. 450-4 du code de commerce, les agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence habilités à cet effet ne peuvent procéder aux visites en tous lieux ainsi qu'à la saisie de documents et de tout support d'information et, le cas échéant, de leurs moyens de déchiffrement, susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles que dans certaines hypothèses et notamment, sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ; le juge vérifie que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession du demandeur de nature à justifier la visite ; lorsque la visite vise à permettre la constatation d'infractions aux dispositions du livre IV du présent code en train de se commettre, la demande d'autorisation peut ne comporter que les indices permettant de présumer, en l'espèce, l'existence des pratiques dont la preuve est recherchée.

A cet égard le juge peut autoriser les visites et saisies domiciliaires dans les lieux où sont susceptibles de se trouver des documents concernant les pratiques punissables dont la preuve est recherchée par l’administration en se fondant sur des éléments produits par cette dernière, y compris en se référant à une déclaration anonyme, dès lors que cette déclaration lui est soumise au moyen d’un document établi et signé par les agents lui permettant d’en apprécier la teneur et que cette déclaration est corroborée par d’autres informations qu’il est en mesure d’analyser.

En l’espèce la lettre anonyme litigieuse, reçue par la DIRECCTE Poitou Charente le 13 avril 2011, si elle est présentée telle qu’elle, bien que certains éléments qu’elle cite puissent être concrètement vérifiés et l’aient été en l’espèce pour mesurer sa crédibilité, n’est visée par l’ordonnance déférée qu’à la fin d’une motivation qui analyse le déroulement des marchés suspectés d’être entachés de pratiques anticoncurrentielles en s’appuyant sur d’autres documents produits, juste avant la phrase conclusive du raisonnement et en des termes qui ne laissent aucune ambiguïté sur le fait qu’elle n’a pas constitué un élément déterminant de la décision du juge des libertés et de la détention, à savoir « (...) une lettre anonyme reçue en avril 2011 constituant un élément de nature à mieux comprendre le contexte du fonctionnement du secteur de travaux d’électrification rurale et du génie civil connexes. ».

Par conséquent, ce document ancien, dont il est admis qu’il est sans rapport avec les marchés en cause compte tenu de sa date, a été présenté par l’administration comme un élément contextuel et considéré comme tel par le juge, et il importe peu qu’il ait le cas échéant alerté l’administration qui a effectué ensuite une veille sur le secteur de l’électrification rurale.

Il s’en déduit que cette lettre anonyme, non datée et non signée, mais reçue par la DIRECCTE à une date certaine sans autre pièce, et produite non pas en tant qu’indice mais comme un simple élément de contexte non déterminant venant cependant illustrer des éléments de preuve objectifs vérifiés par le juge, ne peut être considérée comme illicite et n’est en tout état de cause pas de nature à invalider la décision critiquée.

Par ailleurs la société Eiffage reproche en vain à la DREETS d’avoir présenté une interprétation erronée de la décision n° 11-D-13 de l’Autorité de la concurrence dans sa requête, selon laquelle plusieurs des entreprises citées dans la requête avaient été sanctionnées pour des pratiques analogues, dès lors que le juge a été en mesure de vérifier lui-même la réalité de cette affirmation et que cette interprétation n’est pas reprise par le juge des libertés et de la détention dans les motifs de sa décision.

Au stade de l’enquête, le juge n’a pas à rechercher la preuve que les éléments constitutifs de telle ou telle infraction sont réunis, puisqu’il lui appartient de vérifier, in concreto, si le faisceau d’indices apporté par l’administration, pris dans leur globalité, est de nature à démontrer qu’il existe une présomption de pratiques anticoncurrentielles susceptible de le convaincre de la pertinence de la demande d’autorisation de procéder à des visites et des saisies pour rechercher la preuve d’une pratique punissable.

La société Eiffage ne peut donc utilement opposer aux indices proposés à l’analyse du juge des libertés et de la détention, les pratiques décisionnelles de l’autorité de la concurrence à laquelle revient l’appréciation au fond des éléments de preuve qui lui sont soumis pour caractériser l’existence d’une pratique punissable.

S’agissant de l’appréciation des indices présentés par l’administration, il doit être rappelé que la présomption de pratiques illicites peut se déduire de la présence de plusieurs indicateurs allant ensemble dans ce sens, même si pris isolément ils ne peuvent suffire à la caractériser.

En l’occurrence, il résulte de l’examen du règlement de la consultation de 2018 qu’un candidat pouvait soumissionner sur plusieurs lots et devait s’engager pour un nombre maximal de lots dans le cas où plusieurs de ces offres seraient mieux-disantes, or il n’est pas sérieusement discuté que le nombre moyen d’offres s’élevait à 3,2 par lot, soit un nombre suffisamment faible pour induire une concurrence limitée.

Il ressort par ailleurs de la comparaison des marchés passés en 2014 et 2018 que les titulaires des différents lots géographiques du marché de 2014 ont été pour l’essentiel reconduits sur les mêmes lots en 2018, la comparaison entre les marchés passés en 2011 et ceux passés en 2014 et 2018, révélant au surplus que huit attributaires (sur 11 lots en 2011 et 2014 passés à 12 lots en 2018 en raison de la division en deux du lot n° 3 de 2014) ont été reconduits à trois reprises.

En outre, l’analyse du tableau récapitulatif des offres et des résultats de la consultation en 2018 révèle que dans la majorité des cas les soumissionnaires ont remis des offres pour plusieurs lots avec un coefficient sur bordereau différent et qu’ils ont chacun remis leur offre la moins-disante sur des lots différents, ce qui a eu pour conséquence pratique qu’une seule entreprise a remis une offre moins-disante par lot et qu’elle a été à chaque fois attributaire de ce lot.

De surcroît, il se déduit de la seule formule mathématique de notation du critère prix choisi par l’acheteur, telle qu’énoncée dans le règlement de la consultation du 29 mai 2018, que son application aboutit nécessairement au fait que l’offre la moins-disante obtient la note maximale, ce qui rendait prévisible la hiérarchisation des offres sur le critère prix dans le cadre d’une concertation anticoncurrentielle, même si le prix intervient à hauteur de 40 % dans les critères de jugement des offres et d’autant que les titulaires historiques des lots peuvent être considérés comme mieux placés que les autres pour obtenir une meilleure note technique au vu de leur connaissance du secteur et de ses contraintes, étant rappelé que dans le marché de 2018, pour 11 lots sur 12, l’entreprise ayant remis l’offre la moins-disante a été attributaire du lot et que l’entreprise sortante a été attributaire de son lot pour la majorité des lots.

En outre la circonstance que les offres de soumission ont pu être déposées par les entreprises en fonction d’un logique économique rationnelle, correspondant notamment à une analyse du marché, des coûts de structure et de la rentabilité, tout comme la nécessaire actualisation de l’estimation du maître d’ouvrage, alors que les prix proposés par tous les soumissionnaires sont systématiquement supérieurs à cette estimation, ne sont pas incompatibles avec une répartition entre lesdites entreprises résultant d’une concertation préalable, les facteurs rationnels de prise de décision n’étant pas susceptibles à eux seuls à ce stade, de renverser une présomption qui procède de la réunion des indices significatifs de pratiques illicites.

Par conséquent les développements la société Eiffage sur ces points ne permettent pas de contredire la présomption qui découle des indices ci-dessus analysés, lesquels, pris dans leur ensemble, suffisent à justifier dans le cas présent la recherche de preuve de pratiques anticoncurrentielles au travers des saisies et visites qui ont été autorisées par le juge des libertés de la détention, et la décision n’encourt pas la nullité du chef du défaut de contrôle et de caractérisation du faisceau d’indices présenté par la DREETS.

Dans leur principe, les opérations autorisées sont par ailleurs proportionnées à l’objectif poursuivi de régulation du marché dans le secteur de l’électrification rurale et des travaux de génie civil connexe à propos duquel existaient des soupçons solides et raisonnables relatifs à une pratique d’entente entre les entreprises intéressées par le marché de Charente-Maritime.

En effet si l’ordonnance déférée précise que « la liste des marchés pour lesquels il existe des présomptions d’entente n’est probablement exhaustive, les marchés mentionnés dans la présente ordonnance n’étant que des illustrations des pratiques dont la preuve est recherchée dans le secteur concerné ; qu’en effet, la réalisation d’une entente entre entreprises peut supposer des mécanismes de compensation qui affectent la concurrence d’autres marchés, y compris en dehors de la zone géographique visée », l’objet de la mesure demeure toutefois suffisamment déterminé puisqu’elle est relative à la recherche de la preuve d’actions concertées ayant pour objet de fausser le jeu normal de la concurrence au bénéfice d’opérateurs soumissionnaires et au détriment du pouvoir adjudicateur dans le secteur d’activité des travaux d’électrification rurale et de génie connexes, sans qu’il soit nécessaire de limiter la recherche de la preuve à un seul marché, dès lors que les pratiques suspectées peuvent impacter d’autres marchés pour lesquels les entreprises visées ont soumissionné du fait des mécanismes de compensations réciproques.

Enfin, le juge des libertés et de la détention a donné commission rogatoire aux juges de libertés et de la détention de Niort, La Rochelle et Saintes pour exercer le contrôle de opérations dans le ressort de leur juridiction et désigner le chef de service territorialement compétent, et l’ordonnance désigne expressément les locaux des entreprises à visiter, qui sont limitativement énumérés et autorise les opérations dans les locaux « des entreprises des mêmes groupes qui se situeraient à ces mêmes adresses » de sorte que l’étendue géographique des opérations de visite et de saisies est clairement déterminée.

Les opérations sont donc également proportionnées au regard de leur périmètre géographique et la décision n’encourt pas la nullité invoquée du chef du caractère disproportionné des opérations par la société Eiffage.

La circonstance que l’identification des locaux à visiter a pu être effectuée pour partie grâce aux mentions figurant dans le courrier anonyme de 2011 est indifférente, puisque cette identification n’en découle que très partiellement et que les informations utilisées ont été vérifiées par l’administration au travers des informations diffusées sur un réseau social professionnel dont les extraits figurent à l’appui de la requête, étant observé que l’administration disposait des éléments d’information relative aux adresses des entreprises et à l’identification des responsables, éventuellement décisionnaires, mentionnés sur les actes des marchés litigieux.

La décision n’encourt pas davantage la nullité invoquée de ce chef par la société Eiffage.

Dans ces conditions, la décision déférée doit être confirmée et la société Eiffage doit être déboutée de l’intégralité de ses demandes.

Succombant à l’instance elle sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS  

Rejette des exceptions de nullité soulevées par la société Eiffage à l’encontre de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 26 juin 2019 et des ordonnances subséquentes,

Confirme l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 26 juin 2019 et de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Saintes en date du 1er juillet 2019,

Déboute la société Eiffage de ses demandes, Condamne la société Eiffage aux dépens.