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Décisions

CA Versailles, 14e ch., 23 septembre 2021, n° 21/00331

VERSAILLES

PARTIES

Demandeur :

Bati Pro Therm (SAS)

Défendeur :

Logirep (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Guillaume

Conseillers :

Mme Le Bras, Mme Igelman

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP Nan…

10 décembre 2020

EXPOSÉ DU LITIGE:

La SA d'HLM LogiRep a consenti par acte en date du 12 décembre 2018 à effet du 14 décembre 2018 un bail commercial à la société CVC Elec, prise en la personne de son président M. Nour Eddine B., portant sur un local situé [...].

Le 10 juillet 2019, un avenant au bail a été conclu entre le bailleur et une personne se présentant comme étant M. Nour Eddine B. représentant de la SAS Bati Pro Therm, nouvelle société dont il était aussi le président et dont le siège social était provisoirement situé dans les locaux loués.

Aux termes de cet avenant, le bailleur a accepté que la SAS Bati Pro Therm succède à l'ancien preneur.

Par acte du 14 février 2020, la société Logirep a fait délivrer en vain à la SAS Bati Pro Therm un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur une somme de 7 183,40 euros au titre des loyers demeurés impayés.

Par acte du 3 juillet 2020, la société Logirep a donc fait assigner en référé la société Bati Pro Therm aux fins de faire constater la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire, et d'obtenir son expulsion et sa condamnation à lui payer une provision de 9 895,25 euros à valoir sur loyers impayés au 29 juin 2020 ainsi qu'une indemnité d'occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 10 décembre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre a :

- condamné la société Bati Pro Therm à payer à la société Logirep la somme provisionnelle de 9 895,25 euros correspondant aux loyers restant dus au 29 juin 2020,

- constaté la résolution du bail au 15 mars 2020,

- ordonné, si besoin avec le concours de la force publique, l'expulsion de la société Bati Pro Therm ou de tous occupants de son chef des locaux situés [...],

- condamné la société Bati Pro Therm à payer à la société Logirep une indemnité d'occupation à compter du 15 mars 2020 et ce, jusqu'à la libération effective des lieux, égale au montant du loyer, augmenté des charges et taxes afférentes, qu'elle aurait dû payer si le bail ne s'était pas trouvé résilié,

- rappelé que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamné la société Bati Pro Therm à payer à la société Logirep la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Bati Pro Therm aux dépens en ce compris le coût des commandements de payer.

Par déclaration reçue au greffe le 18 janvier 2021, la société Bati Pro Therm a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a rappelé que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution.

Dans ses dernières conclusions déposées le 12 avril 2021 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Bati Pro Therm demande à la cour, au visa des articles 1104 et 1128 du code civil, de :

- prononcer la nullité de l'acte de signification de l'ordonnance de référé opérée le 31 décembre 2020 par l'huissier de justice, ainsi que la nullité de la remise de l'acte à l'étude ;

en conséquence,

- la juger recevable et bien fondée en son appel ;

sur le fond,

- infirmer l'ordonnance entreprise en ses dispositions critiquées ;

et, statuant à nouveau,

- constater l'existence d'une contestation sérieuse dans la mesure où l'avenant au bail en date du 10 juillet 2019 a été consenti dans des conditions irrégulières, de sorte que l'avenant est nul et de nul effet, et que le bail initial en bail du 12 décembre 2018 s'est nécessairement poursuivi au nom de la société CVC Elec ;

- débouter dès lors la société Logirep de l'ensemble de ses demandes et prétentions, particulièrement infondées ;

- condamner la société Logirep au paiement d'une indemnité de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles que la société Bati Pro Therm s'est trouvée contrainte d'engager, et ce conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Logirep en tous les dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés par Maître Véronique B.-R. dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées le 11 mars 2021 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Logirep demande à la cour, au visa des articles 490, 514-1, 641, 642, 834, 835 et 836 du code de procédure civile, 1134 ancien devenu 1103 nouveau du code civil, L. 145-1 et suivants et L. 145-41 du code de commerce, de :

- déclarer bonnes, valables et régulières la signification du 31 décembre 2020 et la lettre simple de l'article 658 du code de procédure civile ;

- déclarer l'appel de la société Bati Pro Therm irrecevable comme tardif ;

- subsidiairement l'en déclarer mal fondé ;

- débouter la société Bati Pro Therm de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- juger que le juge des référés ne peut pas prononcer la nullité d'un bail ou d'un avenant au bail ;

- confirmer l'ordonnance entreprise,

y ajoutant,

- en actualisation, condamner la société Bati Pro Therm à lui payer à titre provisionnel la somme de 13 820,03 euros au prorata au 28 janvier 2021, date de la reprise des lieux, selon décompte émis le 3 mars 2021 ;

- condamner la société Bati Pro Therm à lui payer les frais de levée des états et de Kbis qui s'élèvent à 48,42 euros en mars 2020 (16 mars 2020 veille du confinement) et 48,42 euros après le confinement ainsi que la totalité du droit proportionnel dû à l'huissier de justice ;

- condamner la société Bati Pro Therm à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés irrépétibles exposés devant la cour d'appel qui comprendront notamment le droit de timbre de 225 euros qui seront recouvrés par SELARL M.-T. agissant par Maître Stéphanie T., avocat au barreau de Versailles.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 juin 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de "constatations" qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques.

- sur la nullité de la signification de l'ordonnance et la recevabilité de l'appel de la société Bati Pro Therm :

La société HLM LogiRep soutient que l'appel interjeté par la société Bati Pro Therm le 18 janvier 2021 est tardif, l'ordonnance du 10 décembre 2020 lui ayant été régulièrement signifiée à l'adresse des lieux loués par acte du 31 décembre 2020.

En réponse aux moyens adverses, elle affirme que l'acte de signification n'encourt pas la nullité, l'huissier de justice ayant procédé aux vérifications d'usage conformément aux dispositions de l'article 656 du code de procédure civile et précisé notamment sur l'acte que le nom de la société était sur la boîte aux lettres et l'adresse confirmée par une voisine.

Elle ajoute que l'effectivité de cette adresse est confirmée par le fait que le représentant légal de la société Bati Pro Therm s'est présenté en personne le 18 janvier 2021 en l'étude d'huissier pour récupérer l'acte de signification, ce dont elle déduit qu'il avait bien été informé de cette signification notamment par la lettre simple que l'huissier instrumentaire lui a envoyée en application de l'article 658 du code de procédure civile dès le 4 janvier 2021 à l'adresse des lieux loués et que l'appelante a en sa possession puisqu'elle la verse aux débats.

Elle soutient aussi que le fait que le commandement de payer aux fins de saisie vente et le commandement aux fins de quitter les lieux lui aient été délivrés le 8 janvier 2021 à l'adresse de son siège social à Nanterre ne rend pas la précédente signification nulle dès lors que l'huissier de justice a procédé à cette dernière, après vérification, à l'adresse des lieux loués où la société Bati Pro Therm, en vertu du l'avenant au bail du 10 juillet 2019, avait élu domicile pour l'exécution dudit contrat et qu'il n'était donc pas tenu de se présenter au siège social de la société Bati Pro Therm à Nanterre.

La société HLM LogiRep fait également observer que l'adresse des lieux loués figurait d'ailleurs sur le Kbis de la société Bati Pro Therm entre le 30 avril 2019 et le 14 février 2020 comme étant aussi l'adresse de son siège social.

En réponse, la société Bati Pro Therm conclut à la nullité de l'acte de signification de l'ordonnance critiquée et par voie de conséquence à la recevabilité de son appel, faisant valoir en substance que l'huissier de justice n'a pas vérifié par des démarches concrètes l'exactitude du domicile élu, alors que par une simple consultation de son Kbis, il se serait rapidement aperçu que son siège social ne se trouvait plus à l'adresse des lieux loués mais [...].

L'appelante précise qu'au jour de la signification, elle n'avait aucun établissement principal à Bois-Colombes, le transfert de son siège social étant intervenu depuis le 11 juin 2020, et que l'huissier de justice lui a d'ailleurs signifié dès le 8 janvier 2021 d'autres actes à Nanterre.

Ayant été informée tardivement de la signification de l'ordonnance en raison de la défaillance de l'huissier de justice dans la vérification de son domicile, la société Bati Pro Therm précise n'avoir pu retirer l'acte de signification que le 18 janvier 2021 et avoir interjeté appel le jour même.

Sur ce,

En application de l'article 490 du code de procédure civile, le délai d'appel contre une ordonnance de référé est de 15 jours, étant rappelé que le délai de recours ne peut partir que d'une notification régulière de la décision.

L'article 654 du code de procédure civile dispose que la signification doit être faite à personne. La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

Aux termes de l'article 655 du même code, si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

Selon l'article 658 dudit code, dans tous les cas prévus aux articles 655 et 656, l'huissier de justice doit aviser l'intéressé de la signification, le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et rappelant, si la copie de l'acte a été déposée en son étude, les dispositions du dernier alinéa de l'article 656. La lettre contient en outre une copie de l'acte de signification. Il en est de même en cas de signification à domicile élu ou lorsque la signification est faite à une personne morale. Le cachet de l'huissier est apposé sur l'enveloppe.

Le non-respect de ce formalisme constitue un vice de forme de l'acte de signification qui encourt la nullité, conformément à l'article 114 du code de procédure civile, s'il cause un grief à celui qui l'invoque.

Si comme le rappelle la société HLM LogiRep, la notification destinée à une personne morale de droit privé peut être faite au lieu de son établissement et que l'huissier instrumentaire n'est donc pas nécessairement tenu de se présenter au siège social pour parvenir à une signification à personne, c'est cependant à la condition qu'il ait vérifié que l'adresse où il entend procéder à cette signification correspond bien à un des établissements, principal ou secondaire, où celle-ci exploite son activité.

En l'espèce, l'huissier de justice a précisé dans son acte du 31 décembre 2020, procéder à la signification 'à l'adresse des lieux loués' et a indiqué, après avoir relevé que 'le nom était sur la boîte aux lettres' et que 'l'adresse a été confirmée par une voisine', concernant les circonstances rendant impossible la signification à personne, que 'l'intéressé est absent ; la société est fermée ; je n'ai pu, lors de mon passage, avoir d'indication sur le lieu où rencontrer le destinataire de l'acte'.

Or, il ressort de l'historique des inscriptions modificatives au RCS concernant la société Bati Pro Therm que celle-ci a déclaré depuis le 11 juin 2020, avoir transféré à la fois son siège social et son établissement principal au [...] (pièce 13 de la société Bati Pro Therm), ce qui ressort d'ailleurs de son extrait Kbis édité le 10 novembre 2020 (pièce 3 de l'appelant), aussi, pour tenter de signifier valablement l'ordonnance à personne à l'adresse des lieux loués, l'huissier de justice ne pouvait se contenter des constatations précitées sans faire mention qu'il avait vérifié notamment à partir d'un extrait Kbis, qu'il s'agissait bien, à défaut d'être son siège social, de l'établissement principal ou d'une succursale où la société Bati Pro Therm exploitait effectivement son activité.

La société Bati Pro Therm fait en outre à raison observer que quelques jours plus tard, soit le 8 janvier 2021, ce même huissier de justice lui a fait signifier un commandement aux fins de saisie-vente et un commandement de quitter les lieux à l'adresse de son siège social à Nanterre, ce dont il se déduit qu'il avait connaissance de cette autre adresse.

A défaut d'avoir procédé à des vérifications suffisantes pour tenter de signifier l'ordonnance de référé à la personne de la société Bati Pro Therm, l'acte de signification est entaché d'un vice de forme qui a nécessairement causé à l'appelante un grief dès lors qu'elle a eu connaissance de cette signification trop tardivement pour interjeter appel dans les temps.

Le fait que la société Bati Pro Therm ait finalement pu récupérer la lettre simple à une date qui n'est d'ailleurs pas précisée, n'a en outre pas pour effet de régulariser rétroactivement la procédure de signification, ni d'écarter le grief qui lui a été causé.

De même, est sans incidence le fait que la société Bati Pro Therm ait eu connaissance de l'ordonnance lors de la signification le 8 janvier 2021 des commandements susvisés, ces actes étant insusceptibles de constituer le point de départ du délai d'appel.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient d'annuler l'acte de signification daté du 31 décembre 2020 de l'ordonnance de référé et de constater qu'à défaut de notification régulière de cette décision, le délai d'appel n'avait pas commencé à courir à cette date, de sorte que l'appel interjeté le 18 janvier 2021 par la société Bati Pro Therm est recevable.

- sur la régularité de l'avenant au bail du 10 juillet 2019 :

La société Bati Pro Therm soutient que la demande de la société HLM LogiRep tendant à faire constater la résiliation du bail se heurte à une contestation sérieuse dès lors que l'avenant au bail dont la bailleresse se prévaut pour prétendre qu'elle aurait succédé à la société CVC Elec en tant que preneur du bail commercial, est nul et de nul effet compte tenu des conditions irrégulières dans lesquelles il a été signé.

Elle explique qu'au jour de sa signature, soit le 10 juillet 2019, M. B. n'avait plus qualité pour la représenter dans la mesure où il avait démissionné de son mandat de président ainsi que cela résulte de ses statuts mis à jour le 21 juin 2019.

A cette date, elle affirme que seul M. Nicolas B., son nouveau président, était à l'égard des tiers en capacité de contracter en son nom et de l'engager dans un bail.

L'appelante précise également qu'à supposer comme M. B. le prétend, que sa signature aurait été falsifiée par un autre de ses associés, M. G., ce dernier n'avait pas davantage qualité pour la représenter et la nullité serait d'autant plus encourue qu'elle affecterait la validité même de l'acte, la société HLM LogiRep ne pouvant raisonnablement considérer que M. G. avait la capacité de signer l'avenant.

La société Bati Pro Therm fait également valoir que la nullité de cet avenant est encourue compte tenu des mentions incohérentes qui y figurent. Elle relève que :

- la société CVC'Elec y figure comme preneur en entête de l'acte alors que le signataire est désigné comme étant la société Bati Pro Therm,

- l'avenant ne prévoit pas une substitution des parties entre ces 2 sociétés mais uniquement un changement de nom de la société CVC'Elec en la société Bati Pro Therm, de telles déclarations étant mensongères, ces 2 sociétés étant 2 entités distinctes.

En réponse, la société HLM LogiRep relève d'abord que la demande de la société Bati Pro Therm tendant à prononcer la nullité de l'avenant litigieux est irrecevable devant le juge des référés dès lors que cela excède ses pouvoirs.

L'intimée fait également valoir que les différends existant entre les associés de la société Bati Pro Therm ne lui sont pas opposables, son contractant étant la société Bati Pro Therm qui justifiait par un extrait Kbis avoir installé son siège social dans les locaux loués et ce depuis le 30 avril 2019.

Elle relève que le nouveau président de la société Bati Pro Therm ne pouvait ignorer l'avenant du 10 juillet 2019 dans la mesure où d'une part, celle-ci produit la copie de cet acte accompagné de la carte de visite de sa conseillère commerciale lui en souhaitant bonne réception et où d'autre part, il résulte d'un extrait Kbis du 14 février 2020 que le siège social de la société Bati Pro Therm était toujours à cette date dans les lieux loués.

La société HLM LogiRep précise que cet avenant avait bien pour objet de transférer le bail de la société CVC'Elec à la société Bati Pro Therm, l'acte autorisant également une extension d'activités à la maçonnerie, plomberie, chauffage, qui sont bien celles exploitées par l'appelante alors que le premier preneur se consacrait uniquement aux travaux d'électricité.

Elle ajoute que l'avenant précise expressément que les clauses et conditions du bail n'ont fait l'objet d'aucune autre modification et que la société Bati Pro Therm a élu domicile à l'adresse des lieux loués.

Sur ce,

Ses décisions étant par nature provisoire, le juge des référés n'a pas le pouvoir d'annuler un contrat, de sorte que la demande de la société Bati Pro Therm tendant à constater que l'avenant au bail du 10 juillet 2019 est nul et de nul effet est irrecevable.

Il convient malgré tout d'examiner les moyens développés au soutien de cette prétention dans la mesure où ils sont susceptibles de constituer une contestation sérieuse de la qualité de preneur de la société Bati Pro Therm.

Il est en l'espèce constant et admis par la société Bati Pro Therm en page 3 de ses conclusions qu'immatriculée au RCS de Nanterre le 30 avril 2019, elle était à l'origine présidé par M. B. et avait installé son siège social et son établissement principal à l'adresse des locaux loués où se trouvait également la société CVC Elec, signataire du bail, elle aussi dirigée par M. B..

Il ressort de l'avenant au bail dont se prévaut la société HLM LogiRep que celui-ci a été signé le 10 juillet 2019 au nom de la société Bati Pro Therm, par M. B. en sa qualité de gérant, le cachet commercial de l'appelante étant en outre apposé sur sa signature.

Force est d'abord de constater que la société Bati Pro Therm procède par affirmation lorsqu'elle prétend que M. B. aurait lui-même dénié sa signature sur l'avenant, aucune pièce n'étant produite pour étayer cette argumentation. Cette contestation ne peut donc être retenue comme sérieuse.

Par ailleurs, pour soutenir que M. B. n'avait plus qualité au 10 juillet 2019 pour la représenter, la société Bati Pro Therm produit :

- une copie également non signée du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 31 mai 2019 prenant acte de la démission de M. B. en tant que président et désignant M. B. pour le remplacer,

- une copie, au demeurant non signée et sans date de publication, de ses statuts mis à jour par l'assemblée du 21 juin 2019 dont l'article 15 précise que son président est désormais M. Nicolas B.,

- l'historique des inscriptions modificatives au RCS la concernant (pièce 13), dont il ressort qu'au 13 juillet 2019, il a été ajouté la mention d'un représentant en la personne de M. B., président, et supprimé la mention de M. B. comme représentant.

Or, il résulte de ce dernier document que l'officialisation au RCS du changement de représentant légal de la société Bati Pro Therm n'est intervenue que le 13 juillet 2019, soit postérieurement à la signature de l'avenant litigieux.

L'extrait Kbis de la société Bati Pro Therm visé à l'avenant et qui a été communiqué au bailleur le 9 juillet 2019 ne portait donc pas encore mention de son changement de président.

En outre, à défaut d'information sur la date de publication des statuts prétendument modifiés le 21 juin 2019 et de signature du supposé procès-verbal d'assemblée générale, les 2 premières pièces ne peuvent utilement servir à démontrer que le changement de président était opposable aux tiers et donc à la société HLM LogiRep au jour de la signature de l'avenant litigieux.

Ainsi, en l'absence d'élément tendant à accréditer le fait que la société HLM LogiRep était réputée être informée du changement de dirigeant de la société Bati Pro Therm au jour de la signature de l'avenant, la contestation tirée du défaut de qualité de M. B. à signer cet acte au nom de la société Bati Pro Therm ne peut être retenue comme sérieuse.

Enfin, s'agissant des prétendues incohérences et irrégularités qui affecteraient la validité de l'acte, si effectivement il est mentionné en son entête qu'il a été conclu entre les soussignés, la société HLM LogiRep et la société CVC Elec, la société Bati Pro Therm n'en demeure pas moins seule concernée par le contenu de l'avenant qui stipule qu'elle reprend à son compte le bail initialement conclu par la société CVC'Elec dans les termes clairs et précis qui suivent :

Un bail commercial pour le local cité en préambule a été signé par son gérant M. B. pour la SAS CV'Elec ; M. B. vient de créer la société Bati Pro Therm, immatriculée au RCS de Nanterre le 30 avril 2019 sous le numéro 814 338 315 et a exprimé la demande que le bail commercial soit au nom de cette nouvelle société dont le Kbis nous a été adressé le 9 juillet 2019. L'activité a été également étendue aux activités principales suivantes : la réalisation de tous travaux de maçonnerie, plomberie, chauffage, électricité, menuiserie, peinture, la modification du nom de la société sera effective après signature des 2 parties, la facturation du loyer et des charges seront établis également après signature des 2 parties et pour le prochain avis d'échéance du 4ème trimestre 2019. Les clauses et conditions du bail en cours n'ont pas fait l'objet de modification.

Peu importe l'intitulé de cette clause, maladroitement dénommée changement de nom et rajout d'activité' et l'erreur en liminaire sur le nom du preneur, cet avenant constitue un engagement contractuel clair de la société Bati Pro Therm à reprendre le bail de sorte qu'il impliquait pour être valable d'être signé, comme ce fut le cas, par cette dernière et non par la société CV Elec, étant rappelé que ces 2 sociétés avaient à cette date le même représentant aux yeux du bailleur.

Les erreurs formelles relevées par la société Bati Pro Therm ne peuvent ainsi constituer une contestation sérieuse de la validité de cet avenant contractuel et de son engagement à reprendre le bail, sachant qu'à l'époque, la société Bati Pro Therm avait déjà installé son siège social dans les locaux loués, qu'elle ne donne aucune explication sur les conditions dans lesquelles elle occupait les lieux jusqu'au transfert de son siège social vers Nanterre déclaré le 11 juin 2020 et qu'elle ne justifie d'aucun autre titre d'occupation que le bail.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la société HLM LogiRep rapporte la preuve non sérieusement contestable qu'à la suite de l'avenant au bail signé le 10 juillet 2019, la société Bati Pro Therm avait la qualité de preneur des locaux loués, de sorte que l'intimée est recevable à agir à son encontre pour faire constater la résiliation du bail et obtenir le paiement à titre provisionnel de la dette locative.

- sur la résiliation du bail :

La société Bati Pro Therm ne développe pas d'autres moyens que ceux tendant à contester sa qualité de preneur.

Pour sa part, la société HLM LogiRep rappelle qu'elle a fait délivrer par 2 actes du 14 février 2020, un commandement de payer visant la clause résolutoire pour obtenir le paiement d'une somme en principal de 7 183,40 euros que la société Bati Pro Therm n'a pas réglée dans le délai d'un mois imparti par l'article L. 145-41 du code de commerce, ainsi qu'un commandement de justifier de l'assurance des locaux qui n'a reçu aucune réponse.

Elle s'estime ainsi fondée à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire et à demander l'expulsion du preneur.

Sur ce,

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai.

La société HLM LogiRep produit aux débats les 2 commandements visant la clause résolutoire signifiés à la société Bati Pro Therm le 14 février 2020.

Il sera observé que celle-ci n'en critique pas la régularité et ne prétend pas ne pas les avoir reçus, sachant qu'à l'époque, son établissement principal et son siège social étaient toujours déclarés à l'adresse des lieux loués (pièce 16 de la société HLM LogiRep).

L'appelante ne prétend pas non plus, ni ne justifie du règlement des loyers et charges impayés qui lui étaient alors réclamés à hauteur d'un montant en principal de 7 183,40 euros. Il en est de même de l'attestation d'assurance des locaux.

A défaut de régularisation des causes des 2 commandements dans le délai imparti par les dispositions précitées, la société HLM LogiRep rapporte la preuve non sérieusement contestable que le bail a pris fin par l'acquisition de la clause résolutoire insérée en son article 11, à la date du 15 mars 2020.

L'ordonnance sera en conséquence confirmée de ce chef et en ses dispositions subséquentes, au demeurant non critiquées, relatives à la mesure d'expulsion, au sort des meubles et à l'indemnité d'occupation.

- sur la demande de provision au titre de la dette locative :

La société Bati Pro Therm n'émet aucune critique sur la demande de provision que la société HLM LogiRep a actualisée à hauteur d'appel à la somme de 13 820,03 euros arrêtée au 28 janvier 2021, date de reprise des lieux.

L'intimée précise qu'aucun loyer n'a été versé malgré une mise en demeure du 23 janvier 2020 et le commandement de payer du 14 février 2020. Elle indique avoir tenu compte du remboursement du dépôt de garantie crédité sur le compte locataire pour fixer le montant de sa créance dont elle dit justifier par la production d'un décompte arrêté au 3 mars 2021, des relevés de charges et de régularisation d'eau.

Sur ce,

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, statuant en référé, peut, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Il impose au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Force est de constater que la société Bati Pro Therm n'oppose aucune autre contestation que celles déjà écartées à la demande de provision formée par la société HLM LogiRep. En outre, celle-ci produit les quittances et décomptes pour en justifier avec l'évidence requise en référé.

Il convient en conséquence, par infirmation de l'ordonnance afin de tenir compte de l'actualisation de la créance locative de la société HLM LogiRep arrêtée au 3 mars 2021, d'accorder à cette dernière une provision à ce titre de 13 820,03 euros.

- sur les demandes accessoires :

Au vu de ce qui précède, l'ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société Bati Pro Therm ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles. Elle devra en outre supporter les dépens d'appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.

Il est en outre inéquitable de laisser à la société HLM LogiRep la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. L'appelante sera en conséquence condamnée à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu en revanche de faire droit à la demande de la société HLM LogiRep tendant à ce qu'elle soit en plus remboursée par la société Bati Pro Therm des frais de levée des états et de Kbis, ces pièces étant de simples éléments de preuve et non des actes nécessaires à la procédure.

Il en sera de même pour le droit proportionnel dû à l'huissier de justice, la société HLM LogiRep ne précisant pas à quels actes qui ne seraient pas déjà compris dans les dépens, il se rapporte.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

ANNULE l'acte de signification de l'ordonnance du 10 décembre 2020 intervenu le 31 décembre 2020 ;

REJETTE le moyen d'irrecevabilité de l'appel soulevé par la société HLM LogiRep et déclare en conséquence la société Bati Pro Therm recevable en son appel ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise en date du 10 décembre 2020 sauf en ses dispositions relatives au montant de la provision ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

CONDAMNE la société Bati Pro Therm à payer à la société HLM LogiRep une provision de 13 820,03 euros à valoir sur l'arriéré locatif arrêté suivant décompte du 3 mars 2021 ;

CONDAMNE la société Bati Pro Therm à payer à la société HLM LogiRep une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que la société Bati Pro Therm supportera les dépens d'appel qui pourront être recouvrés avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, président, et par Madame Elisabeth TODINI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.