Cass. 3e civ., 13 octobre 2021, n° 20-16.421
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocats :
CP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Didier et Pinet
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 12 décembre 2019), la SCI Jesapaal (la SCI), propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail à Mme [Z], lui a délivré un congé avec refus de renouvellement, prenant effet le 31 décembre 2014, sans offre d'indemnité d'éviction.
2. Un jugement du 23 novembre 2017 a notamment fixé une indemnité d'éviction.
3. Le 19 janvier 2018, la SCI a exercé son droit de repentir.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
Mme [Z] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la SCI la somme de 12 015 euros par an pour la période du 1er janvier 2015 au 18 janvier 2018 à titre d'indemnité d'occupation, alors :
« 1°/ que selon l'article L. 145-28 du code de commerce, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation ; qu'il en résulte que les dispositions des articles L. 145-33 et L. 145-34 du code de commerce, qui, régissant la détermination du montant et de la variation du loyer des baux renouvelés, figurent dans la section 6, doivent être appliquées pour déterminer l'indemnité d'occupation, compte tenu de tous éléments d'appréciation ; qu'en retenant que Mme [Z] ne pouvait voir appliquer les dispositions de l'article L. 145-34, alinéa 4, issues de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, à l'indemnité d'occupation due à compter de la date de prise d'effet du congé avec refus de renouvellement jusqu'à la date de l'exercice, par la bailleresse, de son droit de repentir, la cour d'appel a violé ce texte, et l'article L. 145-28 du code de commerce ;
2°/ que la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 145-34 du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, auxquelles renvoie l'article L. 145-28 du même code pour la détermination de l'indemnité d'occupation, s'appliquent à la détermination de l'indemnité d'occupation due par le preneur, en conséquence de la seule occupation des lieux, entre la date d'effet d'un congé avec refus de renouvellement délivré après l'entrée en vigueur de cette loi et l'exercice, par le bailleur, du droit de repentir ; qu'en retenant, pour exclure son application à la détermination d'une indemnité d'occupation due à compter d'un congé, dont elle relevait qu'il avait été délivré le 27 juin 2014 pour le 31 décembre 2014, que l'article L. 145-34 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, n'était applicable « que pour » les contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014, la cour d'appel, statuant par un motif inopérant, a violé l'article 21 II de la loi du 18 juin 2014, par fausse application, et les articles L. 145-28 et L. 145-34, alinéa 4, du code de commerce, ensemble l'article 1er du code civil, par refus d'application ;
3°/ qu'en toute hypothèse, sauf si elle en dispose autrement, la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques non définitivement réalisées avant son entrée en vigueur ; qu'il résulte uniquement de l'article 21 II de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 que les dispositions de l'article L. 145-34 du code de commerce, dans leur rédaction issue de cette loi, sont applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014 ; qu'aucune disposition transitoire ne diffère l'application des dispositions de l'article L.145-34 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, à la détermination de l'indemnité d'occupation due par le locataire en l'absence, précisément, de tout contrat, par le seul effet de la loi, à compter de la date d'effet du congé et jusqu'à l'exercice par le bailleur de son droit de repentir ; qu'en retenant que l'article L. 145-34, alinéa 4, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 18 juin 2014, n'était applicable qu'aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014, pour exclure son application à la détermination d'une indemnité d'occupation due à compter du 1er janvier 2015, la cour d'appel a violé l'article 21 II de la loi du 18 juin 2014, par fausse application, et les articles L. 145-28 et L. 145-34, alinéa 4, du code de commerce, ensemble l'article 1er du code civil, par refus d'application. »
Réponse de la Cour
5. L'article L. 145-34, dernier alinéa, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, qui instaure, dans les cas qu'il détermine, un étalement de la hausse du loyer résultant du déplafonnement, est inapplicable à la détermination de l'indemnité d'occupation qui est due, en application de l'article L. 145-28 du code de commerce, par le locataire entre la date d'expiration du bail commercial et l'exercice du droit de repentir par le bailleur et qui est distincte du loyer auquel elle se substitue de plein droit.
6. La cour d'appel a énoncé, à bon droit, que le mécanisme instauré par la loi du 18 juin 2014 à l'article L. 145-34, dernier alinéa, du code de commerce n'est applicable qu'au loyer et ne peut l'être à l'indemnité d'occupation, qui doit correspondre à la valeur locative.
7. En conséquence, elle a exactement fixé l'indemnité d'occupation due par la locataire entre la date de prise d'effet du congé et l'exercice du droit de repentir par le bailleur à la valeur locative.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.