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Décisions

Cass. com., 13 octobre 1992, n° 90-21.828

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bezard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. Curti

Avocats :

Me Choucroy, Me Barbey

Paris, 4e ch. b, du 27 sept. 1990

27 septembre 1990

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré que la marque déposée par M. B... était contrefaisante des marques déposées par la société Visa alors, selon le pourvoi, d'une part, que la marque Visas n° 1 234 730 était essentiellement une marque de service des classes 35 et 41 de la classification internationale, plus spécialement pour "publicité, distribution de prospectus, conseils, informations et renseignements d'affaires, édition de livres, journaux, magazines, supports divers", et ne pouvait contrefaire la marque Visa n° 1 053 804 qui était une marque de service de la classe 36, limitée aux services des cartes bancaires et aux services de chèque de voyage, sans inclure ni des publications imprimées figurant dans la marque distincte Visa n° 1 320 318, ni les services précisés dans la marque Visas n° 1 234 730 ; qu'en effet, la contrefaçon ne pouvait découler du seul fait que l'activité de services de la société Visa impliquait des publications imprimées, la distribution de prospectus, l'édition de livres, journaux, magazines, supports divers, dès lors que ces activités, s'adressant à une clientèle différente, ne constituaient pas des services identiques ou similaires à ceux objet de la marque Visa n° 1 053 804 ; que l'arrêt a donc violé les articles 5 et 27 de la loi modifiée du 31 décembre 1964 ; alors, d'autre part, que la marque de services Visas n° 1 234 730 ne pouvait non plus contrefaire la marque de produits Visa n° 1 320 318 dans la seule classe 16 pour "cartes bancaires, imprimés, publications imprimées, papeterie, formulaires, index et repères pour affiches, étiquettes et décalcomanies, bandes de papiers pour calculatrice, instructions imprimées pour machines et instructions de fonctionnement", en raison de ce que ces publications imprimées recouvriraient la distribution de prospectus, l'édition de livres, journaux, magazines, supports divers de la marque Visa, et ne se limiteraient pas à la seule activité bancaire de la société Visa ; qu'en effet, le seul fait d'inclure dans une marque de produits les termes généraux "publications imprimées" s'inscrivant dans une activité essentiellement bancaire ne saurait conférer au titulaire de cette marque le droit de s'approprier des services publicitaires et d'édition précisés dans un dépôt de marque postérieur au titre de marque de service dans le cadre d'une activité non-concurrente ; que l'arrêt a donc encore violé les articles 5 et 27 de la loi précitée du 31 décembre 1964 ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt constate que la société Visa a utilisé, depuis 1977, de manière constante, sa marque dans les documents destinés aux utilisateurs des services offerts par elle et a retenu que l'usage de la marque impliquait la nécessité de la faire connaître auprès du public auquel sont destinés les produits ou services concernés par elle ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt énonce que la loi oblige le déposant à déclarer les produits et services couverts par la marque mais ne le contraint pas à énumérer tous les objets couverts dès lors qu'une expression précise permet de les désigner d'une manière concise et retient que les termes définissant les produits protégés dans la classe 16 sont suffisamment précis pour faire connaître aux tiers que la marque Visa est indisponible pour tout ouvrage imprimé ; Attendu qu'en statuant ainsi qu'elle a fait, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Sur le second moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré la marque Visa notoirement connue, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt ne pouvait légalement définir la prétendue notoriété de la marque complexe Visa objet du dépôt 1 053 804 par des considérations tirées indistinctement des deux marques Visa, la marque simple Visa n° 1 320 818 et la marque complexe Visa n° 1 053 804 ; que l'arrêt est donc entaché d'un défaut de base légale par violation de l'article 4 de la loi modifiée du 31 décembre 1964 ; alors, d'autre part, que l'arrêt se devait d'examiner la question de la notoriété de la marque Visa non pas à la date de son prononcé ni à la date du début de l'instance, mais à la date du dépôt de la marque Visas n° 1 234 730, soit le 9 février 1983, ainsi que le réclamaient les conclusions ; que l'arrêt a donc violé à nouveau l'article 4 de la loi modifiée du 31 décembre 1964 ; alors, au surplus que la notoriété étant conditionnée non seulement par une connaissance par un large public, mais aussi par une réputation importante, l'arrêt ne pouvait se borner à faire état de la première condition et devait aussi examiner la seconde, compte tenu du fait qu'en France, comme le rappelaient les conclusions et ainsi que l'avait décidé la justice, la renommée était attachée à l'expression "carte bleue" qui ne faisait pas partie de la marque complexe Visa ; que l'arrêt est donc vicié par défaut de base légale, en violation de l'article 4 de la loi modifiée du 31 décembre 1964 ; alors enfin, qu'en tout état de cause, la notoriété laissant subsister la spécialité, la marque complexe Visa devait voir sa notoriété limitée au seul secteur bancaire sans pouvoir s'étendre aux secteurs publicitaires et d'édition, exclus du dépôt ; que l'arrêt a donc violé l'article 4 de la loi précitée ;

Mais attendu que l'arrêt, après avoir rappelé que M. B... contestait la notoriété de la marque VISA à la date du dépôt opéré par ses soins de la marque Visas, et considéré que la marque Visas était la reproduction quasi servile des deux marques Visa, retient que celles-ci, et non la seule marque complexe, étaient connues d'un grand public sous ce terme sans qu'il soit nécessairement associé à ceux de carte bleue pour les services visés aux dépôts à une date antérieure à celle du dépôt de la marque Visas ; qu'en statuant au vu de ces constatations, la notoriété des marques contrefaites, la cour d'appel a répondu, en les écartant aux conclusions invoquées et, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.