Cass. com., 14 décembre 2010, n° 09-16.755
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
IBA (Sté)
Défendeur :
C&I (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Mandel
Avocat général :
Mme Batut
Avocats :
SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament
Sur le premier et le second moyens, rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2009), que la société IBA, aux droits de laquelle vient la société C&I, est titulaire d'une marque française verbale " Cocofrigo " déposée le 23 octobre 1998 et d'une marque française tridimensionnelle déposée le 9 juillet 2003 consistant en la forme d'oeuf de son produit désodorisant, enregistrées pour désigner notamment des désodorisants autres qu'à usage personnel ; qu'elle a poursuivi la société de droit italien Tavola avec laquelle elle entretenait des relations d'affaires, lui reprochant d'avoir déposé frauduleusement et de mauvaise foi le 13 mars 2001, sous priorité d'un dépôt effectué en Italie le 12 janvier 2001, une marque internationale tridimensionnelle n° 754 495, en forme d'oeuf, désignant notamment la France ;
Attendu que la société C&I fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en revendication de la partie française de la marque internationale n° 754 495 déposée par la société Tavola et d'avoir rejeté la demande subsidiaire tendant à voir prononcer la nullité de la partie française de cette marque, alors, selon le moyen, que la personne en fraude des droits de laquelle a été enregistrée une marque peut en revendiquer la propriété sans que le déposant puisse lui opposer la prescription triennale réservée au déposant de bonne foi ; qu'agit de mauvaise foi le déposant qui procède frauduleusement à l'enregistrement d'une marque ; qu'est frauduleux le dépôt d'une marque effectué par un déposant en parfaite connaissance de la création et de l'exploitation antérieure et continue du signe par un autre opérateur économique qui l'a autorisé à exploiter parallèlement ce signe à l'étranger ; qu'en l'espèce, la société C&I, venant aux droits de la société IBA, faisait valoir qu'elle avait créé en 1999 un désodorisant pour réfrigérateur en forme d'oeuf comportant dans sa partie supérieure des ouvertures lancéolées réparties en étoile le long de la calotte supérieure, que ce produit était largement commercialisé par elle en France depuis 1999 ainsi qu'à l'étranger, notamment en Belgique et en Espagne, qu'elle avait autorisé en 1999 la société Tavola, qui était son distributeur exclusif en Italie pour d'autres produits d'entretien et absorbeurs d'odeurs, à s'adresser à son fabricant et à utiliser le moule de son nouveau produit pour en assurer la distribution en Italie ; que la société C&I en déduisait que, connaissant ainsi parfaitement la création et l'exploitation de la forme de ce produit par la société IBA, c'était de mauvaise foi et en fraude de ses droits et intérêts que la société Tavola avait, à son insu, en ne l'en avertissant qu'un an plus tard, déposé le 13 mars 2001 une marque internationale visant la France reproduisant à l'identique la forme de son propre produit, pour désigner des désodorisants et absorbeurs d'odeurs pour réfrigérateurs ; qu'en retenant qu'il ne peut être déduit de la seule existence de relations commerciales entre les parties que la société Tavola a déposé de mauvaise foi la marque tridimensionnelle internationale visant la France, et que le fait que la société Tavola ait attendu plus d'un an pour prévenir la société IBA du dépôt de cette marque ne pouvait caractériser sa mauvaise foi, alors que celle-ci s'apprécie au moment du dépôt, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, ayant parfaitement connaissance de la création et de la commercialisation par la société IBA d'un désodorisant pour réfrigérateur ayant la forme objet de son dépôt de marque internationale et distribuant elle-même en Italie ce produit avec l'accord de la société IBA, la société Tavola n'avait pas, en procédant au dépôt de marque litigieux sans même en avertir antérieurement ou dans le même temps la société IBA, cherché à nuire à cette société en s'appropriant le conditionnement créé et exploité par celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle et du principe fraus omnia corrumpit ;
Mais attendu qu'ayant relevé que non seulement la société Tavola avait expliqué à la société IBA qu'elle avait procédé au dépôt litigieux pour empêcher un tiers de lancer sur le marché une copie du produit, mais encore qu'elle avait proposé de lui céder les droits sur la marque internationale contre le seul remboursement des frais d'enregistrement et estimé que la mauvaise foi ne pouvait se déduire de la seule existence de relations commerciales entre les parties, la cour d'appel, qui s'est placée au moment du dépôt et qui a pris en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.