Cass. com., 21 septembre 2004, n° 03-12.319
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Chambre syndicale nationale de la confiserie
Défendeur :
Optos Opus (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. tricot
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Optos Opus fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré la chambre syndicale recevable en sa demande, alors, selon le moyen, que l'action prévue par l'article L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle dans le cas où un enregistrement a été demandé en fraude des droits d'un tiers n'est ouverte qu'à la personne qui estime avoir un droit sur la marque ; qu'en prononçant sur l'action exercée par la Chambre syndicale, laquelle ne pouvait prétendre à aucun droit sur la marque et n'avait donc pas qualité à agir, la nullité de la marque Halloween déposée par la société Optos Opus comme l'ayant été en fraude des droits des entreprises dont l'intérêt collectif se trouvait défendu par ce syndicat, la cour d'appel a violé les articles L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle et 31 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève qu'aux termes de ses statuts, la chambre syndicale, syndicat professionnel régi par les dispositions du livre IV du Code du travail, a pour objet de représenter et défendre les entreprises de confiserie et d'exercer devant les juridictions compétentes les actions propres à réparer les atteintes portées à l'intérêt collectif de ses membres ; qu'il retient que l'action intentée qui a pour but de rendre disponible un terme nécessaire à l'activité de ses adhérents sans que ceux-ci puissent se voir opposer le droit des marques, entre manifestement dans l'objet social de ce syndicat ; que c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'avait pas été saisie d'une demande en revendication de marque fondée sur l'article L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle, mais d'une demande en nullité fondée sur la théorie générale de la fraude a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu que la société Optos Opus reproche à l'arrêt d'avoir déclaré frauduleux le dépôt de la marque Halloween et de l'avoir annulé, alors, selon le moyen :
1) que toute personne est habile à acquérir un droit sur une marque, sans avoir à justifier qu'elle est en mesure de l'exploiter personnellement ; qu'en déclarant frauduleux le dépôt de la marque Halloween par la société Optos Opus pour désigner le sucre et la confiserie, au motif que cette société n'avait pas pour activité la fabrication ou la distribution de produits de confiserie ou liés au sucre mais le conseil aux entreprises, d'où la cour d'appel a déduit que le dépôt de la marque ne tendait pas à désigner un produit ou un service mais à empêcher l'ensemble des professionnels de ce secteur d'utiliser le signe déposé à titre de marque, la cour d'appel a violé les articles L. 711-1, L. 712-1, L. 713-1 et L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
2) que la nature du produit sur lequel la marque de fabrique ou de commerce doit être apposée ne peut, dans aucun cas, faire obstacle à l'enregistrement de la marque ; qu'en déclarant frauduleux le dépôt de la marque Halloween par la société Optos Opus au motif que la fabrication ou la distribution de produits de confiserie ou liés au sucre n'était pas dans l'objet de la société Optos Opus, la cour d'appel a violé l'article 7 de la Convention d'union de Paris ;
3) que le dépôt d'un signe à titre de marque n'interdit pas l'usage du même signe non pour désigner des produits ou des services mais dans un but descriptif ; qu'en déclarant frauduleux le dépôt de la marque Halloween pour désigner le sucre et la confiserie au motif que le dépôt de la marque tendait à empêcher l'ensemble des professionnels d'utiliser librement le nom d'une fête liée à la confiserie quand seul l'usage de ce nom pour désigner des produits identiques ou similaires se trouvait interdit par le dépôt de la marque, la cour d'appel a violé les articles L. 711-2, L. 713-2, L. 713-3 et L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
4) qu'en déclarant frauduleux le dépôt de la marque Halloween, distincte pour désigner des produits de la confiserie, sans relever l'accomplissement par la société Optos Opus d'aucun acte démontrant une volonté de s'approprier de façon générale l'emploi du terme Halloween dans le domaine de la confiserie, notamment d'aucun acte auprès des entreprises de ce secteur par lequel la société Optos Opus aurait cherché à imposer à ces entreprises la conclusion de contrats de licence, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 712-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la fête d'Halloween a été introduite en France à partir de 1991-1992 et que dès avant le dépôt de la marque, le 1er décembre 1995, le développement de la fête ainsi que son association aux produits de confiserie étaient en plein essor en France ; qu'il retient que la marque litigieuse a été opposée à diverses entreprises de confiserie, faisant état de mises en demeure et que si la société Optos Opus indique avoir toujours reconnu le droit des professionnels de faire usage du mot Halloween pour désigner la fête du même nom, la réalité des faits démontre les difficultés d'un tel usage ;
qu'en déduisant de ces constatations et appréciations le caractère frauduleux du dépôt qui avait pour but d'empêcher les professionnels d'utiliser le nom d'une fête liée au commerce de la confiserie, sauf pour les professionnels à accepter un contrat de licence, eu égard à l'activité de conseil aux entreprises réellement exercée par la société Optos Opus, la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision, a pu prononcer l'annulation de la marque sans encourir les griefs du moyen ; que celui-ci n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.