Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 19 janvier 1970, n° 68-12.432

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Rapporteur :

M. Barrau

Avocat général :

M. Gégout

Avocat :

Me Nicolay

Aix-en-Provence, du 21 mars 1968

21 mars 1968

SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET PARTIELLEMENT CONFIRMATIF ATTAQUE QUE X..., ARTISTE PEINTRE, A VENDU, LE 30 JANVIER 1963, A Y... UN CERTAIN NOMBRE DE TABLEAUX DE MAITRES, UN TABLEAU ATTRIBUE AU TITIEN ET DIFFERENTS MEUBLES ANCIENS, LE PRIX ETANT FIXE A 550000 FRANCS ;

QUE X... N'AYANT PU REPRESENTER QUE QUELQUES-UNS DES TABLEAUX QU'IL AVAIT VENDUS, UNE NOUVELLE CONVENTION FUT CONCLUE ENTRE LES PARTIES LE 10 JUILLET 1964, AUX TERMES DE LAQUELLE X... S'OBLIGEAIT A LIVRER A Y... 677 GOUACHES EXECUTEES PAR LUI ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DIT QUE LA SECONDE CONVENTION AVAIT POUR BUT DE REMPLACER LES TABLEAUX MANQUANTS PAR 677 GOUACHES, Y... CONSERVANT SES DROITS SUR LES TOILES ET OBJETS VENDUS QUE X... AVAIT REMIS A Y..., ALORS, D'UNE PART, QU'AUX TERMES DE L'ACTE DU 10 JUILLET 1964, QUI A ETE DENATURE, LES PARTIES SONT CONVENUES DE SUBSTITUER AUX OBLIGATIONS DE X..., TELLES QU'ELLES RESULTAIENT DU PRECEDENT ACCORD DU 30 JANVIER 1963 ET QU'IL N'AVAIT PU EXECUTER, LA CHARGE DE LIVRER EXCLUSIVEMENT 677 GOUACHES ET 55 TABLEAUX " EN REGLEMENT DES SOMMES QU'IL AVAIT DEJA TOUCHEES " ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION SANS CAUSE OU SUR UNE FAUSSE CAUSE NE PEUT AVOIR AUCUN EFFET ET QUE LA CAUSE FAIT DEFAUT QUAND LA PROMESSE DE L'UNE DES PARTIES N'EST PAS EXECUTEE OU S'AVERE NULLE OU DE REALISATION IMPOSSIBLE, ALORS ENFIN QU'EST NULLE D'UNE NULLITE D'ORDRE PUBLIC TOUTE CONVENTION A CARACTERE LEONIN ET QU'EN L'ESPECE EST ENTACHE D'UNE TELLE NULLITE L'ACTE PRECITE DU 10 JUILLET 1964, PAR LEQUEL Y... DECLARE CONSERVER SES DROITS, BIEN QUE LA REMISE DES 677 GOUACHES ET 55 TABLEAUX SOIT DITE DE NATURE A LE REMPLIR INTEGRALEMENT DE SES DROITS ;

MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE LES JUGES DU FOND RELEVENT, SANS DENATURATION, QUE LE CONTRAT DU 10 JUILLET 1964 PRECISAIT QU'IL N'ENTRAINAIT PAS NOVATION DES DROITS DE Y... ;

QU'AINSI C'EST PAR UNE INTERPRETATION NECESSAIRE QU'ILS ONT DECIDE QUE LA REMISE DES 677 GOUACHES DE X... N'AVAIT POUR BUT QUE DE REMPLACER LES MANQUANTS DE LA VENTE PRECEDENTE ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE LA CONVENTION DU 10 JUILLET 1964 AVAIT UNE CAUSE ET NE PRESENTAIT AUCUN CARACTERE LEONIN PUISQU'ELLE AVAIT POUR BUT DE FIXER L'INDEMNISATION DE L'INEXECUTION DE SES OBLIGATIONS PAR X... ;

QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE RETENU EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;

SUR LES QUATRE BRANCHES DU DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QUE, PAR UNE AUTRE CONVENTION DU 10 JUILLET 1964, X... CEDAIT A Y... SA PRODUCTION ARTISTIQUE DU 1ER JUILLET 1964 AU 1ER JUIN 1965 ;

QUE CE CONTRAT FUT RENOUVELE POUR UNE DUREE DE CINQ ANS, LE 15 JUIN 1965 ;

QUE LA RESILIATION EN FUT CEPENDANT ADMISE PAR LES PARTIES, DANS UN DELAI DE SIX MOIS A DATER DU 13 NOVEMBRE 1965 ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AUX JUGES DU FOND D'AVOIR DECLARE CES CONVENTIONS VALABLES, ALORS, D'UNE PART, QUE LES CESSIONS GLOBALES D'OEUVRES FUTURES SONT NULLES, ALORS, D'AUTRE PART, QU'AUX TERMES DES CONVENTIONS QUI AURAIENT ETE DENATUREES, LES CESSIONS DE LA PRODUCTION FUTURE DE X... ETAIENT SUBORDONNEES A LA POSSIBILITE, POUR Y..., DE RECUEILLIR UNE SOMME DOUBLE DE CELLE REPRESENTANT LES INVESTISSEMENTS EFFECTUES MAJOREE DES FRAIS D'EXECUTION, CONDITION QUI NE S'EST PAS REALISEE, ALORS ENCORE QUE, DANS DES CONCLUSIONS DEMEUREES SANS REPONSE, X... AVAIT FAIT VALOIR QUE LES CONTRATS LITIGIEUX NE RESPECTAIENT PAS LE DROIT MORAL DE L'AUTEUR ;

QU'EN S'ABSTENANT DE RECHERCHER LES CONDITIONS D'EXECUTION DE CES CONVENTIONS, L'ARRET ATTAQUE N'AURAIT PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;

ALORS ENFIN QU'IL Y A CONTRADICTION MANIFESTE A AFFIRMER QUE LA CONVENTION A ETE RESILIEE SELON LES CONDITIONS CONVENUES, ALORS QU'IL N'EST PAS CONTESTE QUE LEDIT ACCORD PREVOIT DES FORMALITES QUI, EN L'ESPECE, N'ONT PAS ETE RESPECTEES ;

MAIS ATTENDU QU'A BON DROIT L'ARRET RELEVE QUE LA CESSION DE SES OEUVRES FUTURES PAR UN PEINTRE EST LICITE, DES LORS " QU'ELLE EST LIMITEE DANS LE TEMPS ET QU'ELLE NE S'ACCOMPAGNE PAS D'EXIGENCES INCOMPATIBLES AVEC LE DROIT MORAL DE L'ARTISTE ", REPONDANT AINSI AUX CONCLUSIONS PRETENDUMENT DELAISSEES RELATIVES AU DROIT MORAL DE X... ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE, SANS DENATURATION, L'ARRET RELEVE QUE LA CONVENTION QUI PREVOYAIT LA POSSIBILITE POUR Y... DE RECUEILLIR UNE SOMME DOUBLE DE CELLE REPRESENTANT SES INVESTISSEMENTS A ETE RESILIEE DE L'ACCORD DES PARTIES ;

QU'AINSI, SANS CONTRADICTION, IL A RAPPELE LES CONDITIONS DE CETTE CONVENTION, COMME DES PRECEDENTES RELATIVES A LA CESSION DES OEUVRES FUTURES, MAIS INDIQUE QU'ELLES AVAIENT ETE RESILIEES, QUE LE MOYEN DOIT DONC ETRE ECARTE EN SES QUATRE BRANCHES ;

ET SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QUE Y... AVAIT RECU MANDAT, PAR LA PREMIERE CONVENTION DU 30 JANVIER 1963, D'UTILISER PARTIE DU PRIX, SOIT 250000 FRANCS, A L'ACQUISITION, DE PARTS DE LA SOCIETE LA BELIERE POUR LE COMPTE DE X... ;

QUE, PAR LA SUITE, Y... AVAIT DEMANDE A X... DE RENONCER A SES DROITS DANS LA SOCIETE, EN CONTREPARTIE DE LA PERTE QU'IL EPROUVERAIT EN CEDANT CES DROITS SUR LA PRODUCTION DE X... A UN TIERS ;

QUE CETTE OPERATION N'AYANT PAS EU LIEU, LA COUR D'APPEL A DECIDE QUE LA RENONCIATION DE X... ETAIT SANS CAUSE ET QUE Y... DEVRAIT " RESTITUER OU FAIRE RESTITUER " LES PARTS A X... ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AUX JUGES D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE, ALORS, D'UNE PART, QUE LE PRIX DE LA DEFAILLANCE D'UN DEBITEUR CONTRACTUEL NE PEUT QUE SE RESOUDRE EN DOMMAGES-INTERETS, ALORS, D'AUTRE PART, QUE LES JUGES DU FOND, LIES PAR LES CONCLUSIONS DES PARTIES, NE PEUVENT MODIFIER D'OFFICE L'OBJET DE LA DEMANDE DONT ILS SONT SAISIS ;

ALORS ENFIN QU'IL Y A CONTRADICTION MANIFESTE A DECLARER, EN PREMIER LIEU, QU'IL N'Y A PAS LIEU DE REMETTRE EN QUESTION LES OBLIGATIONS SOUSCRITES PAR Y... ET A LES MODIFIER PAR LA CONDAMNATION PRONONCEE ET A ENONCER, EN SECOND LIEU, QUE Y... A EXECUTE LES OBLIGATIONS SOUSCRITES, ET A NE PAS ORDONNER LE REMBOURSEMENT DE LA SOMME INITIALEMENT VERSEE ;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, A QUI IL ETAIT DEMANDE DE PRONONCER LA NULLITE POUR ABSENCE DE CAUSE DE LA RENONCIATION DE X... A SES PARTS DANS LA SOCIETE LA BELIERE, ET QUI N'AVAIT PAS A SE PRONONCER SUR LES DOMMAGES-INTERETS A ALLOUER POUR INEXECUTION D'UN CONTRAT, A, SANS CONTRADICTION, RELEVE QUE Y... AVAIT REMPLI LE MANDAT QUI LUI AVAIT ETE CONFIE D'ACQUERIR LES PARTS DE LA SOCIETE POUR LE COMPTE DE X... ET AINSI N'AVAIT PAS A REMBOURSER LA SOMME DE 250000 FRANCS QU'IL AVAIT UTILISEE A CET EFFET, ET, SANS MODIFIER L'OBJET DE LA DEMANDE, DECIDE QUE LA NULLITE DE LA RENONCIATION DE X... REMETTAIT LES PARTIES DANS L'ETAT ANTERIEUR A CETTE RENONCIATION ;

QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU, LE 21 MARS 1968, PAR LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE.