CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 14 décembre 2021, n° 19/02102
CHAMBÉRY
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Elyseum Advisory (Sasu)
Défendeur :
Start Sécurité (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ficagna
Conseillers :
Mme Fouchard, Mme Real Del Sarte
Avocats :
Me Dormeval, Selafa Jean Claude Coulon & Associés, Me Fillard, Seleurl Andre Cattan Avocat, Selarl Lexavoue Grenoble - Chambery
Le 2 août 2016, la société Start Sécurité a signé un contrat de surveillance et de gardiennage avec la société DF développement (DF) représentée par son gestionnaire la société Elyseum Adisory (Elyseum) ayant pour objet d'assurer la surveillance dans les conditions règlementaires de sécurité du centre commercial D B à Thonon les Bains.
Ce contrat qui a pris effet le 18 septembre 2016 a été conclu pour une durée de deux ans et prévoyait que tout renouvellement ferait l'objet d'un nouveau contrat.
La société Start Sécurité a présenté l'autorisation d'exercer délivrée par la commission locale d'agrément et de contrôle Sud Est.
Par lettre recommandée en date du 31 juillet 2017, la société Elyseum a informé la société Start Sécurité qu'elle mettait fin à son contrat à la date du 31 décembre 2017, qu'elle réalisait un appel d'offre auquel la société Start Sécurité pouvait participer en faisant parvenir sa proposition avant le 15 novembre 2017.
Le 7 décembre 2017, la société Elyseum informait la société Start Sécurité que son offre n'avait pas été retenue au profit de la société DF.
Le 28 décembre 2017 la société Start Sécurité adressait une lettre recommandée avec accusé de réception à la société Elyseum faisant valoir l'existence d'un vice de forme dans l'appel d'offre.
Par courrier du 3 janvier 2018, la société Elyseum rappelait les conditions de réalisation de l'appel d'offre et précisait à nouveau que le contrat de la société Start Sécurité était arrivé à échéance au 31 décembre 2017.
Le 16 janvier 2018, la société Start Sécurité adressait une sommation interpellative au gérant de la société Securitas concernant le débauchage de trois de ses salariés.
Par acte en date du 28 mars 2018, la société Start Sécurité a fait assigner la société DF et la société Elyseum devant le tribunal de commerce de Thonon les Bains aux fins de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 129 842 euros HT au titre de la valeur du contrat rompu unilatéralement et sans raison valable outre celle de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à son image et sa notoriété.
Par jugement en date du 6 novembre 2019, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Thonon les Bains a :
Débouté les sociétés Elyseum et DF de leur exception de nullité de l'assignation,
Dit l'assignation conforme,
Débouté la société Elyseum de sa demande de mise hors de cause,
Pris acte de la résiliation du contrat intervenue avant son terme,
Condamné solidairement les sociétés DF et Elyseum à payer à la société Start Sécurité la somme de 74 649,60 euros TTC, somme correspondant à la différence entre le montant total du contrat du 18 septembre 2016 au 18 septembre 2018 (186 624 euros TTC soit 7 776 euros par mois) et le montant compris entre 31 décembre 2017 et le 18 septembre 2018 soit 9 mois et 18 jours, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2018,
Condamné solidairement les sociétés DF et Elyseum à payer à la société Start Sécurité la somme de 15 000 euros au titre de leur responsabilité extra contractuelle,
Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
Condamné solidairement les sociétés DF et Elyseum à payer à la société Start Sécurité la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné solidairement les sociétés DF et Elyseum aux dépens.
Les sociétés DF et Elyseum ont interjeté appel de cette décision.
Par arrêt en date du 7 avril 2020, la première présidente de la présente cour a rejeté la demande de suspension de l'exécution provisoire présentée par les sociétés DF et Elyseum, rejeté la demande de consignation et de constitution de garantie ainsi que la demande reconventionnelle de la société Start Sécurité en radiation de l'appel.
Aux termes de ses conclusions en date du 1er juillet 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Elyseum demande à la cour de :
Vu les articles 56 et 455 du code de procédure civile,
Vu les articles L. 420-1 et s. et L. 442-6 du code de commerce,
Vu les articles 1103, 1212, 1193 du code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Déclarer la société Elyseum Advisory recevable en son appel et l'y déclarer bien fondée,
A titre principal,
Prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 28 mars 2018 par la société Start Sécurité sur le fondement de l'article 56 du code de procédure civile,
Annuler le jugement déféré, le tribunal n'ayant pas été régulièrement saisi,
A titre subsidiaire,
Annuler le jugement du tribunal de commerce de Thonon les Bains en date du 6 novembre 2019, celui ci étant incompétent rationae materiae en l'espèce,
En tant que de besoin, le réformer et déclarer la demande de la Sté Start Sécurité portée devant le tribunal de commerce de Thonon les Bains irrecevable,
Très subsidiairement,
Réformer le jugement déféré en ce qu'il a :
- débouté la concluante de sa demande d'exception de nullité,
- débouté la concluante de sa demande de mise hors de cause,
- pris acte de la résiliation du contrat avant son terme,
- condamné la Société Elyseum Advisory à payer à la société Start Sécurité les sommes de 74 649,60 euros TTC d'une part, et de 15 000 euros d'autre part, outre la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,
- débouté la concluante de sa demande de condamnation de la société Start Sécurité à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
Prononcer la mise hors de cause de la société Elyseum Advisory,
Débouter la société Start Sécurité de l'ensemble de ses demandes fins, et conclusions et, notamment, de toute ses demandes d'indemnisation, comme étant totalement injustifiées, tant sur le principe que dans leur quantum,
En tout état de cause,
Déclarer irrecevable l'appel en garantie de la Société DF à l'encontre de la Société Elyseum Advisory,
Condamner la société Start Sécurité à payer à la concluante une somme de 15 000 euros pour procédure abusive,
Condamner la société Start Sécurité à payer à la concluante une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens.
Aux termes de ses conclusions en date du 29 juin 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société DF Développement demande à la cour de :
Vu les articles 56 et 455 du code de procédure civile,
Vu les articles 1103, 1212, 1193 du code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Déclarer la Société DF Développement recevable en son appel et l'y déclarer bien fondée,
Réformer le jugement déféré en ce qu'il a :
- débouté la concluante de sa demande d'exception de nullité,
- pris acte de la résiliation du contrat avant son terme,
- condamné la Société DF Développement à payer à la société Start Sécurité les sommes de 74 649,60 euros TTC d'une part, et de 15 000 euros d'autre part, outre la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ; - débouté la concluante de sa demande de condamnation de la société Start Sécurité à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Confirmer le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau,
In limine litis, prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 28 mars 2018 par la société Start Sécurité sur le fondement de l'article 56 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire, pour le cas où l'assignation devait ne pas être annulée,
Constater que la société DF Développement n'a commis aucune faute à l'égard de la société Start Sécurité et partant, débouter cette dernière de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Constater l'accord des parties pour modifier la date d'échéance du contrat, ramenée au 31 décembre 2017,
Constater que le contrat s'est poursuivi jusqu'à son échéance contractuelle,
Débouter la société Start Sécurité de l'ensemble de ses demandes fins, et conclusions et, notamment, de ses demandes d'indemnisation,
A titre infiniment subsidiaire, et pour le cas où, par extraordinaire, la juridiction de céans venait à considérer que le contrat a couru jusqu'au 18 septembre 2018,
Débouter la société Start Sécurité de toute ses demandes d'indemnisation, comme étant totalement injustifiées, tant sur le principe que dans leur quantum,
A titre très infiniment subsidiaire,
Condamner la société Elyseum Advisory à relever et garantir la société DF Développement de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son égard,
En tout état de cause,
Condamner la société Start Sécurité à payer à la concluante une somme de 7.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens avec application au profit de Me Dormeval, avocat, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamner la société Start Sécurité à payer à la concluante une somme de 10.000 euros pour procédure abusive.
Aux termes de ses conclusions en date du 7 septembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Start Sécurité demande à la cour de :
Vu les articles 56, 74 , 114 alinéas 1 et 2 , 561 et suivants du code de procédure civile,
Vu les articles 1103, 1104, 1134 (1240), 1137, 1241 et suivants du code civil,
Vu le contrat de surveillance et de gardiennage passé entre Start Sécurité et DF le 2 août 2016 pour deux ans,
Vu l'appel d'offres projeté le 31 juillet 2017,
Vu les éléments inhérents à cet appel d'offres communiqués en date du 26 novembre 2017,
Vu la sommation interpellative délivrée à la société E, agence d'Annecy, le 16 janvier 2018,
Vu le jugement déféré,
Vu l'exception rationae materiae soulevée en cause de conclusions en réponse n° 2 par Elyseum Advisory,
Rejeter l'exception dont il s'agit comme étant tardivement soulevée pour être encore une demande nouvelle contraire aux dispositions des articles 74, 564 et suivants du code de procédure civile,
Confirmer le jugement déféré en l'ensemble de ses dispositions principales,
Dire l'organisation de l'appel d'offres destinée à évincer la société Start Sécurité de toute participation,
Dire, dès alors, la rupture unilatérale et sans raison valable du contrat passé et liant les parties jusqu'au 18 septembre 2018,
A ce faisant, en voie de condamnation à l'encontre des sociétés D. F. et Elyseum Advisory dans les termes retenus par le tribunal de commerce de Thonon les Bains,
Condamner solidairement et à titre conjoint les sociétés D. F. et Elyseum Advisory à payer à la société Start Sécurité la somme de 74 649,60 euros TTC à titre de dommages et intérêts du chef de la responsabilité contractuelle,
Condamner solidairement et à titre conjoint les sociétés D. F. et Elyseum Advisory à payer à la société Start Sécurité la somme 15 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de l'attitude imprudente et dolosive des deux sociétés précitées,
Y ajoutant,
Condamner au titre de la même responsabilité extracontractuelle les sociétés D. F. et Elyseum Advisory à titre conjoint et solidaire à payer à la société Start Sécurité la somme de 35 000 euros à titre de dommage et intérêts au titre de l'atteinte à son image et à sa notoriété,
Dire l'intérêt judiciaire à courir sur les sommes liées à la réparation contractuelle à compter du 31 juillet 2017,
Condamner les sociétés précitées à titre conjoint et solidaire à la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Leur laisser à charge les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est en date du 27 septembre 2021.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité de l'assignation
Selon l'article 56 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce :
« L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :
1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier.
Elle comprend en outre l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.
Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
Elle vaut conclusions. »
En l'espèce, aux termes de l'assignation délivrée à la requête de la société Start Sécurité, cette dernière a formé une demande indemnitaire pour rupture abusive et anticipée du contrat de surveillance la liant à la société DF, en faisant valoir l'irrégularité de l'appel d'offre formée par cette dernière fin 2017, en se fondant d'une part sur les dispositions du code de la consommation, d'autre part sur les règles régissant les marchés publics.
Dès lors, les conditions requises par l'article 56 précité ayant été réunies, c'est à bon droit que les premiers juges qui ont retenu que les sociétés DF et Elyseum ne justifiaient d'aucun préjudice dans la préparation de leur défense, a rejeté cette exception, étant relevé au surplus qu'une prétention fondée sur des textes erronés ou non applicables, n'est pas nulle mais conduit au rejet de cette dernière.
Sur la nullité du jugement et l'incompétence rationae matériae de la présente cour
Il résulte des dispositions de l'article L. 442-6, devenu L. 420-7, du code de commerce ainsi que de l'article D. 442-3 du même code, ainsi que de la jurisprudence que :
Seules les juridictions du premier degré spécialement désignées par le deuxième texte sont investies du pouvoir de statuer sur les litiges relatifs à l'application du premier,
La méconnaissance de ces dispositions est sanctionnée par une fin de non recevoir qui doit être relevée d'office,
Seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées par l'article D. 442-3 du code de commerce sont portés devant la cour d'appel de Paris;
Les recours formés contre les décisions rendues par des juridictions non spécialement désignées, quand bien même elles auraient statué sur de tels litiges, sont portés devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle ces juridictions sont situées, conformément aux dispositions de l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire
Il incombe à la cour d'appel, saisie conformément à ces règles, d'examiner la recevabilité des demandes formées devant le tribunal, puis, le cas échéant, de statuer dans les limites de son propre pouvoir juridictionnel qu'il lui appartient, ainsi, de relever d'office, le cas échéant, la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel du premier juge pour statuer sur un litige relatif à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce et l'irrecevabilité des demandes formées devant ce juge, en résultant.
Toute cour d'appel autre que celle de Paris est dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour connaître de demandes fondées sur l'article L. 442-6 du code de commerce.
Ces règles s'appliquent de la même manière en présence de demandes fondées sur les articles L. 420-1 à L. 420-5 du code de commerce lesquelles relèvent de juridictions spécialisées application de l'article L. 420-7 du même code.
En l'espèce, force est de constater que ni la société Start Sécurité, ni la société Elyseum qui se prévaut de cette fin de non-recevoir recevable en tout état de cause, n'explicitent pas en quoi le litige porterait sur des pratiques anticoncurrentielles, en les décrivant et en visant les textes applicables.
En effet, la société Start Sécurité ne s'est jamais fondée sur les dispositions du code de commerce sus visées pour réclamer réparation du préjudice qu'elle invoque et la société Elyseum se contente d'indiquer dans ses conclusions qu'il est recherché la responsabilité civile des appelantes « trouvant sa source dans un prétendu défaut de respect des articles L 420-1 et suivants du code de commerce relatives aux pratiques anticoncurrentielles ce que le tribunal de commerce de Thonon les Bains prend soin de rappeler. »
Force est de constater qu'à aucun moment les premiers juges ne se sont référés à ces dispositions spécifiques pour rejeter la demande de nullité de l'appel d'offre de la société Start Sécurité, étant précisé que cet appel d'offres n'est que la conséquence de la résiliation anticipée du contrat initial signé entre DF et Start Sécurité, et qu'il convient de déterminer au préalable si cette résiliation résulte d'un accord entre les parties ou d'une décision unilatérale de la part de la société DF.
Il résulte de ces éléments, d'une part que le jugement de tribunal de Thonon les Bains ne peut faire l'objet d'une annulation, d'autre part que la présente cour est compétente pour statuer dans les limites de son propre pouvoir juridictionnel.
La fin de non-recevoir excipée par la société Elyseum sera rejetée.
Sur la mise hors de cause de la société Elyseum vis-à-vis de la société Start Sécurité
La société Elyséum n'a agi que comme mandataire de la société DF, et il n'existe aucun lien contractuel entre elle et la société Start Sécurité, de sorte que c'est à tort que le premier juge, considérant qu'elle avait représenté la société DF et agi pour le compte de cette dernière, non seulement a rejeté sa demande de mise hors de cause et mais plus encore l'a condamnée in solidum avec son mandant à payer des dommages et intérêts à la société Start Sécurité.
Le jugement ne peut qu'être infirmé ce chef.
Sur la rupture anticipée du contrat signé le 2 août 2016
L'article 1103 du code civil dispose que « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui qui les ont faits. »
Par ailleurs l'article 1193 du même code énonce :
« Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties ou pour les causes que la loi autorise ».
L'accord révocatoire n'est soumis à aucune condition de forme. Il peut être tacite et résulter des circonstances dont l'appréciation appartient aux juges du fond.
En l'espèce le contrat singé entre les sociétés FD et Start Sécurité d'une durée déterminée de deux ans a pris effet à compter du 18 septembre 2016 soit jusqu'au 18 septembre 2018, et il était précisé que tout renouvellement devait faire l'objet d'un nouveau contrat.
Le 24 janvier 2017, M. A dont les différents courriels produits montrent qu'il agissait pour le compte de la société FD écrivait au représentants de la société Start Sécurité, en indiquant être surpris de n'avoir pas eu de réponse à l'annonce de sa présence à Shoping Léman, afin d'établir le nouveau contrat pour 2017. Il proposait deux dates les 31 janvier et 1er février 2017.
En réponse par courriel du 25 janvier 2017, le représentant de Start Sécurité écrivait :
« Voici le contrat c'est bizarre je vous l'avais envoyé par courrier le vous le mets en pièce jointe et on le signera quand vous venez. Je reste à votre disposition. Bonne journée. »
Etait joint un contrat de de surveillance et de gardiennage concernant la surveillance du X de Thonon les Bains. S'agissant de la durée il était mentionné que le contrat prendrait effet à compter du 1er janvier 2017 pour une période d'un an (soit jusqu'au 31 décembre 2017) et que tout renouvellement ferait l'objet d'un nouveau contrat.
S'agissant de la définition de la prestation et de la rémunération, les modalités étaient similaires à celles prévue dans le contrat initial signé le 2 août 2016 soit :
- Deux agents SSIAP de 8h à 20 h du lundi au samedi au taux horaire suivant :
- Agent SSIAP 1 : 18,50 euros HT
- Agent SSIAP 2 : 21,50 euros HT.
Il sera noté que le nouveau contrat porte l'en tête de la société Start Sécurité ce dont il résulte qu'il a été élaboré par ladite société.
Ce contrat mentionne comme parties la société Start Sécurité et la société Hart Partners, étant précisé que ce nom correspond à l'enseigne de la société Elyseum (pièce n° 3 Start Sécurité).
Par courrier recommandé avec accusé de réception, et lettre simple en date du 31 juillet 2017, la société Elyséum agissant pour le syndic écrivait :
« Vous êtes actuellement titulaire d'un contrat Y.
Dans le cadre de la réglementation des syndics nous mettons fin à votre contrat le 31 décembre 2017.
A cet effet, nous réalisons un appel d'offre dont vous pouvez participer en souhaitant que votre proposition nous parvienne avant le 15 novembre 2017.
Restant à votre disposition pour tout complément d'information, vous pouvez contacter C au : <n° de téléphone>. »
Le 17 octobre 2017, le gérant de la société Start Sécurité adressait aux représentants des sociétés Elyseum et DF un courriel rédigé en ces termes :
« Suite à votre courrier du 31 juillet 2017, je vous recontacte pour avoir les documents pour répondre à l'appel d'offre. »
Par courriel du 26 novembre 2017 la société DF faisant suite son courrier mettant fin au contrat « qui nous lie jusqu'au 31 décembre 2017 » et, « afin de respecter la réglementation des syndics » adressait à Start Sécurité, l'appel d'offre, le règlement intérieur et un plan du site, demandant à ce qu'elle lui adresse le chiffrage du contrat pour 2018.
Le 28 novembre 2017, il était demandé à Start Sécurité d'adresser par retour le montant de sa facturation prévu pour 2018 soit le montant annuel de la prestation HT avec le coût horaire de chaque agent ainsi qu'une proposition pour 12 ouvertures exceptionnelles.
Par courriel du 30 novembre M. A représentant la société Elyseum indiquait :
« Suite à nos différents entretiens, je me permets de vous rappeler qu'il nous faut impérativement au moins votre chiffrage pour 2018 ce jour à midi. »
Et précisait dans un courrier du même jour :
« Lundi matin, il sera trop tard. La demande date de plusieurs jours. Maintenez-vous au moins vos prix pour 2018 »
Le 4 décembre 2017 la société Start Sécurité adressait un devis d'un montant HT de 236 224 euros.
Par courrier recommandée avec AR en date du 7 décembre 2017, le syndic adressait à Start Sécurité le courrier suivant :
« Comme suite à notre courrier LRAR de juillet concernant la fin du contrat qui vous liait à D C le 31 décembre 2017 et nos différents courriers concernant l'appel d'offre concernant la mission sûreté sécurité de Shoppin Léman.
Nous sommes au regret de vous informer que la poursuite de votre contrat n'a pas été retenue.
De ce fait la société lauréate, E prendra contact avec vous afin d'être en conformité avec la réglementation du fait des éléments à fournir lors d'une passation. Merci de pouvoir y répondre. »
Le 12 décembre la société Start Sécurité répondait en ces termes :
« Suite à notre conversation téléphonique, je tenais à vous informer que la base de notre devis portait sur 3 agents par jour comme depuis janvier 2017, début de notre contrat.
Or je pense que vous avez fait faire deux estimations à deux agents aux sociétés concurrentes d'où l'écart de prix qui est énorme. »
Faisant valoir qu'elle était une entreprise locale implantée dans le Chablais depuis de nombreuses années et que la laisser choir pour un prix équivalent serait préjudiciable pour tout le monde, elle indiquait être prête à revoir son devis sur la base de deux agents et demandait à ce que son offre soit revue.
En réponse par courriel du même jour la société Elyseum répondait que :
- Le même document avait été remis à plusieurs sociétés, chacune d'entre elle devant étudier le dossier en proposant la meilleure solution pour le client.
- Sur 3 sociétés consultées dont Start Sécurité, elle avait reçu les réponses dans les délais requis pour deux d'entre elles et elle avait dû relancer Start Sécurité à deux reprise avant d'obtenir sa réponse le matin même du rendez vous fixé avec le client,
- Les deux autres sociétés ont remis des dossiers très complets tenant compte la formation du personnel, la prise en charge de divers matériels et faisant un point complet sur l'évolution de la réglementation, sur laquelle ils ont calqué leur proposition tarifaire, ce qui explique la diminution importante du coût du contrat.
En sa qualité de professionnel, Start Sécurité n'était pas censé ignorer cette évolution et il était surprenant que son offre n'en ait pas tenu compte.
Le choix définitif a été guidé par la recherche de la meilleure prestation au meilleur coût.
En réponse, par courrier non daté, la société Start Sécurité indiquait contester la procédure d'appel d'offre en faisant valoir que l'appel d'offre assorti des documents ne lui avait été adressé que par courriel du 26 novembre 2017 alors que sa proposition était attendue pour le 15 novembre 2017. Elle précisait ; « vous comprendrez dans ces conditions que de ce fait vous m'écartez de ladite procédure bien que je sois titulaire d'un contrat de prestataire jusqu'au 31 décembre 2017. »
En réponse, par courrier recommandé avec accusé de réception la société Elyseum rappelait que Start Sécurité s'était vue proposer de participer à une consultation, qu'en sa qualité de prestataire elle avait tous les éléments nécessaires lui permettant de répondre de façon précise et dans les délais requis, que sans retour de sa part une relance lui avait été adressée par courriel du 26 novembre 2017 accompagné de documents complémentaires, que sa réponse reçue le 4 décembre au matin proposait la poursuite de sa mission dans les mêmes termes et conditions sans tenir compte de la nouvelle législation qui permet de réduire les effectifs et par conséquent les coûts et que le contrat étant arrivé à son terme, le client avait librement choisi une nouvelle société.
Il résulte très clairement de ces échanges de courrier, que si le projet de contrat adressé par Start Sécurité n'a pas été signé, les parties ont convenu de modifier la durée du contrat initial qui les liait pour une échéance au 31 décembre 2017.
Cette échéance du 31 décembre 2017 est à plusieurs reprises rappelée par la société Start Sécurité dans ses écrits.
En outre, si elle avait estimé être toujours titulaire du contrat jusqu'en décembre 2018 comme initialement prévu, elle n'aurait, bien évidemment pas accepté de participer à la procédure d'appel d'offre qui consacrait la fin des relations contractuelles entre les parties au 31 décembre 2017.
C'est donc à tort que les premiers juges ont considéré qu'il y avait eu rupture unilatérale, anticipée et et abusive du contrat par les sociétés DF et Elyseum et le jugement qui a alloué à la société Start Sécurité des dommages et intérêts en réparation du préjudice en résultant sera infirmé.
Sur l'appel d'offres
Ainsi que l'a rappelé à bon droit le premier juge, il ne s'agit pas en l'espèce d'un appel d'offre relatif à un marché public et les sociétés DF et Elyseum avait le choix dans les conditions de consultation des diverses entreprises.
Il sera ajouté que la société Start Sécurité fait valoir vainement que son éviction résulterait de la procédure d'appel d'offres alors que :
Cette dernière à qui il a été proposé de candidater en juillet 2017 a attendu le 15 octobre 2017 pour s'intéresser à cet appel d'offre en réclamant les documents relatifs à ce dernier.
Le terme du 15 novembre 2017 n'était pas un terme impératif puisqu'il était « souhaité » que sa proposition soit adressée avant cette date.
Les sociétés Elyseum et DF ont d'ailleurs pris en compte son offre reçue le 4 décembre 2017 et les raisons du refus tiennent au fait que son devis était trop élevé et ne tenait pas compte de la diminution des coûts résultant de la nouvelle réglementation qu'en sa qualité de professionnelle, elle était censée connaître.
Le jugement qui a rejeté la demande de nullité de l'appel d'offre sera confirmé.
Sur la demande en garantie formée par la société DF à l'encontre de la société Elyseum
Compte du rejet des demandes principales de la société Start Sécurité, il n'y a pas lieu d'examiner ni la recevabilité ni le bien fondé de cet appel en garantie devenu sans objet.
Sur la demande indemnitaire des sociétés DF et Elyseum pour procédure abusive
L 'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute, et l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action ne dégénère en abus que lorsqu'elle révèle une faute ou une erreur grave dont la commission a entraîné un préjudice pour le défendeur, ce qui n'est pas établi en l'espèce.
Au surplus, une action en justice ainsi que la défense à une action, ne peuvent sauf circonstances particulières qu'il appartient au juge de spécifier, constituer un abus de droit lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré.
La demande sera donc rejetée.
Sur les demandes accessoires
L'équité commande de faire application au profit des sociétés DF et Elyseum des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Start Sécurité sera tenue aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme partiellement le jugement entrepris,
Mais statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension de la décision,
Déboute les sociétés DF Développement et Elyseum de leurs demandes en nullité de l'assignation,
Rejette la fin de non-recevoir et la demande en nullité du jugement excipées par la société Elyséum
Met hors de cause la société Elyseum relativement aux demandes formées par la société Start Sécurité à son encontre,
Déboute la société Start Sécurité de l'intégralité de ses demandes,
Constate que la demande en garantie de la société DF développement à l'encontre de la société Elyseum est sans objet,
Déboute les sociétés Elyseum et DF développement de leurs demandes indemnitaires pour procédure abusive,
Condamne la société Start Sécurité à payer aux société DF développement et Elyséum chacune la somme de de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Start Sécurité aux dépens de première instance et d'appel.