Cass. 3e civ., 12 décembre 1990, n° 88-18.938
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Senselme
Rapporteur :
M. Chollet
Avocat général :
M. Marcelli
Avocats :
SCP Le Bret et Laugier, SCP Defrénois et Levis
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 juin 1988), que les consorts X..., propriétaires de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Eurodipad pour neuf ans à compter du 1er février 1978, ont, moyennant le versement d'une indemnité, autorisé la cession du bail au profit de la Société d'exploitation de la galerie de France (SEGF), avec modification de diverses clauses de cette convention ;
Attendu que la société SEGF fait grief à l'arrêt d'avoir écarté l'application des règles du plafonnement au loyer du bail renouvelé au 1er février 1987, alors, selon le moyen,
1°) que le changement de la destination des lieux loués, dûment accepté par le bailleur au cours du bail expiré et pour lequel le locataire a versé une indemnité, ne constitue pas une modification notable des éléments d'appréciation de la valeur locative ; qu'en se fondant pourtant sur cet élément afin d'exclure les règles du plafonnement, l'arrêt attaqué a violé les articles 23-6 et 23-2 du décret du 30 septembre 1953 ;
2°) que les améliorations apportées aux lieux loués ne peuvent être prises en considération pour justifier une dérogation aux règles du plafonnement que si le bailleur en a directement assuré la charge, notamment par l'acceptation d'un loyer réduit ; que dès lors, l'arrêt attaqué, faute de rechercher, compte tenu de l'importance des travaux réalisés par la société preneuse, si la renonciation du bailleur au recouvrement pendant deux ans des charges avait constitué une participation de nature à emporter dérogation aux règles du plafonnement, a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard des articles 23-6 et 23-3 du décret du 30 septembre 1953 ;
3°) que la renonciation préalable du bailleur à la prise en compte, lors de la fixation du bail à renouveler, des travaux accomplis par le preneur, a pour conséquence de reporter les effets de l'accession lors du second renouvellement ; qu'en retenant aussi que cette renonciation constituait un avantage, qui, dès le premier renouvellement, autorisait le déplafonnement, l'arrêt attaqué a violé par fausse application les articles 1134 du Code civil, 23-6 et 23-3 du décret du 30 septembre 1953 ensemble ;
4°) que l'arrêt attaqué, s'abstenant de préciser si les avantages résiduels constitués par un droit de priorité, en cas de vacance, sur une autre boutique du même immeuble et l'engagement du propriétaire d'interdire le stationnement des véhicules dans le couloir d'entrée de l'immeuble, constituaient à eux seuls une modification notable des obligations des parties devant emporter comme telle dérogation aux règles du plafonnement, a entaché encore sa décision d'un manque de base légale au regard des articles 23-6 et 23-3 du décret du 30 septembre 1953 ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la convention précédant la cession prévoyait, outre l'obtention par le cédant d'une autorisation de changement d'activité, l'engagement du bailleur à n'autoriser dans d'autres locaux aucune activité similaire à celle de la société SEGF, ainsi que la domiciliation dans les lieux loués de sociétés du même groupe, et que cette société avait effectué, en contrepartie, le versement d'une somme de 80 000 francs destinée au propriétaire, la cour d'appel, qui a retenu que l'acte de cession assurait à la locataire une priorité en cas de vacance d'une autre boutique dans le même immeuble, avec modification de sa destination par une extension similaire à l'autorisation donnée par le bailleur pour les locaux loués, et stipulait une interdiction de stationnement dans le couloir d'entrée de l'immeuble, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.