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Décisions

Cass. com., 29 septembre 2021, n° 20-12.208

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

SCP Foussard et Froger, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Gouz-Fitoussi

Metz, du 21 nov. 2019

21 novembre 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 21 novembre 2019), la société Pham a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 12 novembre 2014 qui a été infirmé par un arrêt du 12 janvier 2016 prononçant le redressement judiciaire de la société et désignant la société [V] [C] [Q] en qualité de mandataire judiciaire. Un plan de redressement a été arrêté le 11 janvier 2017, la société [V] [C] [Q] étant désignée commissaire à l'exécution du plan.

2. L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Lorraine (l'URSSAF) a déclaré à la procédure une créance de 8 276,63 euros à titre privilégié et 31 212,51 euros à titre chirographaire, qui a été admise.

Examen du moyen unique du pourvoi principal

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société Pham fait grief à l'arrêt d'admettre la créance, alors « que les créances des organismes sociaux qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire au moment de leur déclaration ne sont admises qu'à titre provisionnel et doivent, sous peine de forclusion, être définitivement établies, par la délivrance d'un titre exécutoire, dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour dresser la liste des créances ; qu'à défaut de titre exécutoire délivré dans ce délai, la créance déclarée ne peut être définitivement admise au passif ; qu'en admettant définitivement la créance de l'URSSAF à hauteur de 296 765, 60 euros, alors que l'URSSAF ne produisait aucune contrainte, la cour d'appel a violé les articles L. 622-24 et L. 624-1 du code de commerce. »

Recevabilité du moyen

4. L'URSSAF conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est incompatible avec les conclusions d'appel de la société Pham, aux termes desquelles cette société, estimant sa contestation sérieuse, demandait à la cour d'appel d'inviter la créancière à recalculer le montant de ses créances et, à défaut, de se déclarer incompétente et d'inviter les parties à saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale. L'URSSAF en déduit que la société Pham ne peut, dès lors, soutenir, devant la Cour de cassation, que la cour d'appel aurait dû retenir la forclusion de la créance.

5. Cependant, il n'est pas incompatible de soutenir devant la cour d'appel que le montant de la créance déclarée par l'URSSAF était erroné et devait être recalculé par cet organisme ou fixé par le tribunal des affaires de sécurité sociale puis de faire valoir devant la Cour de cassation qu'en tout état de cause la forclusion est acquise, faute d'établissement définitif de la créance de l'URSSAF dans le délai de la vérification du passif.

6. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 622-24, alinéa 4, du code de commerce et L. 244-9 du code de la sécurité sociale :

7. Il résulte de ces textes que les créances des organismes de sécurité sociale, qui n'ont pas, au moment de leur déclaration, fait l'objet d'un titre exécutoire, constitué par une contrainte, ne peuvent être admises qu'à titre provisionnel pour leur montant déclaré, à charge pour l'organisme créancier d'établir définitivement sa créance, à peine de forclusion, dans le délai fixé par le tribunal, en application de l'article L. 624-1 du code de commerce, pour l'établissement de la liste des créances déclarées.

8. Pour admettre à titre définitif la créance de l'URSSAF pour son montant déclaré, l'arrêt relève qu'à l'appui de sa demande d'admission l'URSSAF a transmis au mandataire judiciaire un bordereau de déclaration de créances faisant état de cotisations sociales restant dues et que la société Pham ne ne fait valoir aucune contestation sérieuse.

9. En statuant ainsi, sans constater qu'une contrainte avait été décernée et signifiée ou notifiée à la société redevable, dans le délai imparti au mandataire judiciaire pour la vérification du passif, la contrainte pouvant seule constituer le titre exécutoire permettant l'admission définitive de la créance de cotisations sociales, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, ni sur le pourvoi provoqué, la Cour. 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.