Cass. com., 21 juin 1994, n° 92-16.332
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bezard
Avocat général :
M. de Gouttès
Avocats :
Me Choucroy, Me Thomas-Raquin
Sur le pourvoi formé par la société Nortène, société anonyme, dont le siège est ... (Nord), en cassation d'un arrêt rendu le 26 mars 1992 par la cour d'appel de Paris (4ème chambre section B), au profit de Mme Irène Y..., épouse X..., exerçant son activité sous la désignation commerciale Etablissements Carsec dont le siège est ... (17ème), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 mai 1994, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Gomez, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Gomez, les observations de Me Thomas-Raquin, avocat de la société Nortène, de Me Choucroy, avocat de Mme X..., les conclusions de M. de Gouttès, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 1992), que la société Nortene, titulaire de la marque figurative Balis, déposée le 15 octobre 1982, enregistrée sous le numéro 1 326 852, pour désigner dans les classes 17 et 19, la matière plastique sous forme de feuille, plaque, nappe, film, grille, grillage, filet, baguette, tige ou profilé et la matière d'emballage en plastique industriel, a assigné, pour contrefaçon, les établissements Carsec, dénomination sous laquelle Madame Y... exerce son activité commerciale, qui offraient à la vente et vendaient des grillages en matière plastique sous les dénominations Balises et Balisfort ;
Attendu que la société Nortene fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande fondée sur la contrefaçon alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'une dénomination faite de l'abréviation d'un terme usuel est de nature à constituer une marque valable même si elle évoque aux yeux de l'acheteur ce terme usuel, et qu'en déclarant nulle en l'espèce la marque Balis, du seul fait que le lecteur de ce signe peut y reconnaître, s'agissant des produits concernés, l'abréviation du terme balise, l'arrêt viole les articles 1 et 3 de la loi du 31 décembre 1964 ; alors, d'autre part, que, dans des motifs précédents, la cour d'appel avait relevé qu'au nombre des produits vendus par Madame Y... sous les dénominations incriminées figure "notamment" les "clôtures d'herbage agricoles", et qu'au vu du catalogue de vente de ladite dame Y..., les produits de balisage ne correspondent qu'à "l'emploi le plus courant" qui n'est à l'origine que "d'une bonne part des ventes", qu'en l'état de ces constatations qui impliquent une mise en vente par Madame Y... sous les vocables litigieux de produits autres que les produits de balisage telle qu'elle les définit, la cour d'appel ne pouvait ensuite sans contradiction retenir à l'appui de sa décision que seuls les produits de balisage sur lesquels elle concentre son analyse étaient mis en vente par l'intéressée ; que l'arrêt viole par cette contradiction l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
alors, enfin, qu'après avoir ainsi constaté que Madame Y... mettait en vente sous les dénominations qui lui étaient reprochées des produits auxquels elle n'applique pas la nullité de la marque qu'elle prononce, la cour d'appel ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations et viole les articles 1, 3, 27 et suivant de la loi du 31 décembre 1964 en rejetant dans son intégralité l'action en contrefaçon de la société Nortene ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt, après avoir énoncé, à bon droit, que, pour être distinctif, un signe ne doit pas être nécessaire, générique ou descriptif, retient que le terme balise, par une dérivation de son sens originel est, actuellement, utilisé, de manière usuelle, pour désigner des objets signalant un endroit dangereux, comme des grillages, plaques ou treillis en matière plastique de couleur vive ; que la cour d'appel qui a estimé, souverainement, que le terme Balise n'empêchait pas le lecteur d'y reconnaître le terme Balise, a pu en déduire qu'il ne pouvait pas être utilisé au titre de la marque pour désigner des produits correspondant à la définition admise dans le public ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient, sans contradiction, que les termes Balisfort et Balisco, qui étaient utilisés par la société Y... pour désigner des grillages, clôtures plaques et bandes en matière plastique, ce qui impliquait les clôtures d'élevage agricoles et non d'herbage ainsi que le mentionne le moyen dans sa deuxième branche, ne pouvaient pas constituer la contrefaçon de la marque Balis, dès lors que la société Nortene ne pouvait pas invoquer un droit privatif de propriété industrielle sur ce terme ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel, qui avait rappelé que la société Y... ne demandait pas que soit prononcée la nullité de la marque, mais invoquait l'exception de nullité, n'avait pas à prononcer cette mesure ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.