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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 6 janvier 2022, n° 18/09316

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

3F Filippi Targetti France (Sté)

Défendeur :

La Vente Moderne et Technique (SARL), Selarl de Saint Rapt-Bertholet (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Calloch

Conseiller :

Mme Berquet

Conseiller :

Mme Combrie

Avocats :

Me Reinaud, Me Villard, Me Imperatore , Me Joly

T. com. Aix-en-Provence, du 9 avr. 2018,…

9 avril 2018

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat d'agent commercial en date du 21 mars 2012, la société Targetti France (SAS) a concédé à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la représentation exclusive de produits électriques et d'éclairage selon une liste visée au contrat pour un territoire couvrant les départements 04, 05, 06, 13, 30, 83 et 84. Plusieurs avenants ont été signés par la suite. Ainsi, les deux départements de Corse ont été ajoutés à cette liste et d'autres produits ont été inclus au contrat d'agent commercial.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 octobre 2016 la société Targetti France (SAS) a notifié à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la rupture du contrat d'agent commercial qui les liait en invoquant une faute grave. Le contrat a ainsi pris fin le 31 janvier 2017 à la suite de la période de préavis.

Le 24 octobre 2016, la société La Vente Moderne et Technique (SARL) a contesté cette rupture et réclamé à la société Targetti France (SAS) la somme de 145.939 euros à titre d'indemnité de rupture, soit 24 mois de commissions.

En l'état du refus de la société Targetti France (SAS), la société La Vente Moderne et Technique (SARL) a saisi le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence le 29 mars 2017.

Par jugement en date du 9 avril 2018 le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a :

- Déclaré la demande d'incompétence territoriale de la société Targetti France (SAS) irrecevable et s'est déclaré compétent.

- Condamné la société Targetti France (SAS) à régler à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 110.776,50 euros au titre de l'indemnité de résiliation.

- Condamné la société Targetti France (SAS) à verser à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 11.019,63 euros hors taxe soit 13.235 euros toutes taxes comprises au titre des commissions dues.

- Débouté la société La Vente Moderne et Technique (SARL) de sa demande de condamnation sous astreinte de la société Targetti France (SAS).

- Débouté les parties de toutes les autres demandes.

- Condamné la société Targetti France (SAS) à payer à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.

- Prononcé l'exécution provisoire.

Le 15 mai 2018 le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a homologué le plan d'apurement du passif de la société La Vente Moderne et Technique (SARL), après avoir ouvert une procédure de redressement judiciaire le 6 octobre 2016.

Par déclaration en date du 4 juin 2018 la société Targetti France (SAS) a interjeté appel du jugement.

Par conclusions enregistrées le 15 octobre 2021, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Targetti France (SAS), devenue 3F Filippi Targetti, fait valoir que :

- La société La Vente Moderne et Technique (SARL) ne peut prétendre au bénéfice d'une indemnité légale au titre de la cessation du mandat d'agent commercial au regard de la faute grave commise; ainsi, dès l'année 2015 les objectifs fixés en matière de chiffre d'affaires n'ont pas été atteints et la situation n'a cessé de se dégrader, attestant d'une absence d'implication de la société La Vente Moderne et Technique (SARL) dans l'exécution du contrat d'agent commercial ; la société Targetti France (SAS) n'est pas responsable du départ de Mme X et pas davantage du recrutement de Monsieur Y, lequel s'est révélé incompétent ; l'établissement de multiples devis est insuffisant à justifier la réalité de l'activité de la société La Vente Moderne et Technique (SARL) ; les projets E, Ispace, A et Engie n'ont pas vocation à être intégrés au chiffre d'affaires de la société La Vente Moderne et Technique (SARL) ; IBA est un architecte.

- Subsidiairement, la société La Vente Moderne et Technique (SARL) ne démontre pas l'existence d'un préjudice justifiant une indemnité au visa de l'article L. 134-12 du code de commerce ; à tout le moins le préjudice est dérisoire ; contractuellement, la commission doit être fixée à 6,6 % du chiffre d'affaires et non 10 % en l'absence de salarié dédié.

- La société La Vente Moderne et Technique (SARL) est mal fondée à solliciter les commissions prétendument dues sur les opérations E, A et Engie dès lors que ces opérations ne rentrent pas dans le champ d'application du contrat d'agent commercial.

- Il convient de confirmer le jugement s'agissant de la demande de communication des éléments comptables sollicitée par la société La Vente Moderne et Technique (SARL) puisque ces éléments portent sur des opérations ne relevant pas de la société La Vente Moderne et Technique (SARL) et que tous les éléments relatifs au calcul des commissions ont été communiqués ou mis à sa disposition.

Ainsi, la société 3F Filippi Targetti demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société La Vente Moderne et Technique (SARL) de sa demande de condamnation sous astreinte à lui communiquer les éléments comptables nécessaires à la vérification des commissions et l'infirmer pour le surplus.

Statuant à nouveau, la société 3F Filippi Targetti France demande à la cour de :

- Dire irrecevable la demande nouvelle de la société La Vente Moderne et Technique (SARL) au titre de la violation de la clause d'exclusivité et la dire mal fondée.

- Débouter la société La Vente Moderne et Technique (SARL) de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- Condamner la société La Vente Moderne et Technique (SARL) à verser à la société 3F Filippi Targetti France la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par conclusions enregistrées le 12 octobre 2021, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société La Vente Moderne et Technique (SARL) dite LVMT, fait valoir que :

- Elle n'a commis aucune faute grave susceptible de la priver du règlement de l'indemnité de cessation du mandat prévue à l'article L. 134-12 code de commerce ; au contraire, elle n'a jamais démérité dans l'exécution de sa mission d'agent commercial et est parvenue à maintenir un niveau d'activité satisfaisant en dépit d'un contexte difficile et de la violation par la société Targetti France (SAS) de son exclusivité ; la société Targetti France (SAS) est à l'origine du départ de Mme X et du recrutement de Monsieur Y et ne saurait dès lors lui en faire grief ; aucune baisse significative du chiffre d'affaires ne peut lui être reprochée, d'autant que plusieurs affaires doivent être réintégrées dans le calcul du chiffre d'affaires ; elle a signé en 2016, autant de devis (103) qu'en 2015 (100) ; seuls deux témoignages sur des centaines de clients font état d'un mécontentement.

- La société Targetti France (SAS) est à l'origine d'une violation de l'exclusivité qui lui a été consentie en laissant la société IBA Ingénierie procéder à de nombreuses ventes sur son secteur géographique, caractérisant ainsi sa déloyauté.

- Son droit à commission sur les affaires IBA Ingénierie, E et Engie est donc établi.

- Sa demande de communication de pièces est justifiée en l'état de la dissimulation par la société Targetti France (SAS) d'opérations ouvrant droit à commission ; elle demande donc communication des pièces relatives aux exercices 2013, 2014 et 2016, ce qui constitue un droit au visa de l'article R. 134-3 code de commerce.

- L'indemnité doit être calculée sur la base de deux années de commissions brutes perçues par l'agent et répare la perte d'une part de marché et non la clientèle créée ou préexistante ; cette indemnité doit intégrer les commissions restantes dues.

Ainsi, la société La Vente Moderne et Technique (SARL) demande à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Targetti France (SAS) à lui payer les sommes de 13.235 euros toutes taxes comprises au titre des commissions impayées et 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour le surplus, au titre de son appel incident, elle demande à la cour de :

- Réintégrer la somme de 11.019,63 euros dans l'assiette de calcul de l'indemnité légale de cessation du mandat qui sera dès lors portée à 156.958,63 euros et de condamner la société Targetti France (SAS) à lui régler cette somme.

- Condamner la société Targetti France (SAS) sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, à lui communiquer la copie de toutes les factures qu'elle a adressées à la clientèle de son secteur géographique depuis le 1er janvier 2015 accompagnée des comptes client correspondants.

- Lui donner acte de ce qu'elle se réserve de compléter ses demandes en indemnités ou en commissions dès lors que la société Targetti France (SAS) aura déféré à cette obligation.

- Condamner la société Targetti France (SAS) à lui régler la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel dont distraction.

La Selarl De Saint Rapt Bertholet, commissaire à l'exécution du plan de la société La Vente Moderne et Technique (SARL), assignée à personne morale les 14 août et 17 septembre 2018, n'a pas constitué avocat.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 18 octobre 2021 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 15 novembre 2021.

A cette date, l'affaire a été retenue et mise en délibéré au 6 janvier 2022.

MOTIFS

Sur l'indemnité de cessation du contrat d'agent commercial :

Aux termes des articles L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

Par exception, cette indemnité n'est pas due lorsque la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial, laquelle s'entend de celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel.

A cet égard, l'incapacité pour l'agent commercial de parvenir à atteindre les objectifs de chiffre d'affaires qui lui ont été impartis par le mandant, si elle caractérise un manquement aux obligations contractuelles justifiant la rupture du contrat, ne constitue pas en elle-même une faute grave, sauf à établir que la baisse du chiffre d'affaires est due à une carence manifeste de l'agent.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la société La Vente Moderne et Technique, agent commercial, n'est pas parvenue à compter de l'année 2015 à attendre le chiffre d'affaires qui avait été fixé dès lors qu'elle a obtenu un chiffre d'affaires de 480.575,24 euros au lieu des 737.000 euros prévus pour 2015. De même, au 30 septembre 2016, le chiffre d'affaires ramené prorata temporis, atteste qu'à cette date les objectifs n'étaient pas davantage atteints (256.864,65 euros au lieu de 487.500 euros).

Un avenant n° 4 au contrat de mandat avait d'ailleurs été convenu entre les parties afin de fixer l'objectif à la somme de 650.000 euros en 2016 eu égard aux difficultés de la société La Vente Moderne et Technique (SARL).

Pour autant, la société 3F Filippi Targetti France ne démontre pas que cette baisse du chiffre d'affaires serait due à un désintérêt manifeste et généralisé de la société La Vente Moderne et Technique dans l'exécution de son mandat et qui se serait traduit par une inertie totale dans le démarchage des clients ou dans le suivi des marchés.

La société La Vente Moderne et Technique démontre ainsi que le nombre de devis signé en 2016 est identique à celui signé en 2015, attestant d'une activité, sinon de conclusion de contrats mais à tout le moins de prospection et de démarchage. De même, la société 3F Filippi Targetti France ne peut se prévaloir d'un mécontentement de la clientèle en fournissant deux attestations, ces témoignages ne pouvant traduire à eux seuls un désintérêt manifeste de la part de l'agent commercial.

Au demeurant, la société 3F Filippi Targetti France impute essentiellement la baisse du chiffre d'affaires au départ de Madame X, salariée de la société La Vente Moderne et Technique en avril 2015, et remplacée par Monsieur Y, à propos duquel les parties s'accordent à reconnaître qu'il n'a pas donné satisfaction, justifiant son licenciement en août 2016.

En tout état de cause, cette circonstance ne caractérise pas l'existence d'une faute grave de la part de la société La Vente Moderne et Technique dès lors que les pièces produites établissent que le recrutement de Monsieur Y a été suscité par la société 3F Filippi Targetti France et validé par celle-ci, le seul grief imputable à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) étant en réalité de n'avoir pas remplacé immédiatement Monsieur Y afin de disposer d'un salarié spécialement dédié à la promotion et à la vente des produits de la société Targetti.

Néanmoins, ce grief doit être apprécié à la lumière de l'ancienneté des relations commerciales entre les parties et du fait qu'en dépit de cette absence, la société La Vente Moderne et Technique (SARL) a réussi à maintenir un chiffre d'affaires en 2016 quasiment similaire à celui de 2015. En outre, alors que Monsieur Y a été licencié en août 2016, la société 3F Filippi Targetti France a notifié la rupture du contrat d'agent dès le 10 octobre 2016, soit un laps de temps réduit après le départ du salarié.

La société La Vente Moderne et Technique excipe également de la violation de la clause d'exclusivité qui lui avait été consentie en faisant valoir que la société 3F Filippi Targetti France a laissé la société IBA réaliser des ventes sur son secteur géographique au titre d'une opération dénommée « Ispace pour A ».

Ce moyen de défense, en ce qu'il ne constitue pas une prétention nouvelle mais un moyen invoqué par la société La Vente Moderne et Technique en réponse à la faute grave qui lui est reprochée par la société 3F Filippi Targetti France, n'est pas irrecevable au visa des articles 564 et suivants du code de procédure civile.

Au demeurant, cette circonstance, outre qu'elle fonde la condamnation par les premiers juges au paiement des commissions dues à l'agent au titre des commandes passées sur les prescriptions du bureau d'études IBA, atteste également que partie du chiffre d'affaires n'a pas été intégré, non pas du fait de la société La Vente Moderne et Technique mais du fait de son mandant.

Enfin, la faute grave est incompatible avec la poursuite du mandat en ce qu'elle rend impossible le maintien du lien contractuel. Or, au cas particulier, le contrat s'est poursuivi jusqu'au 31 janvier 2017 en dépit de sa résiliation notifiée le 10 octobre 2016, étant observé de surcroît que la baisse du chiffre d'affaires, d'ores et déjà actée pour l'année 2015, n'a pas empêché la poursuite du contrat, attestant que si cette circonstance constitue un motif justifiant la rupture du contrat, elle ne caractérise pas pour autant une faute grave privant l'agent commercial de son droit à indemnité par suite de la cessation du contrat. Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur le montant de l'indemnité compensatrice :

Il résulte des usages que le montant de l'indemnité de rupture équivaut à deux ans de commissions brutes calculées sur la base des commissions perçues soit au cours des deux dernières années d'exécution du contrat, soit sur la moyenne des commissions des trois dernières années.

A cet égard, le tribunal de commerce, se basant sur les chiffres d'affaires effectués en 2014, 2015 et 2016 a retenu une indemnité égale à 110.776,50 euros.

La société La Vente Moderne et Technique conteste ce chiffre et sollicite un montant de 145.939 euros au titre des commissions perçue au cours des 24 derniers mois, à laquelle elle souhaite ajouter les commissions non intégrées et fixées à la somme de 11.019,63 euros hors taxe par le tribunal au titre des opérations IBA Ingénierie, E et Engie.

La société 3F Filippi Targetti France conteste la réalité du préjudice subi par la société La Vente Moderne et Technique et conteste la réintégration des trois opérations susvisées ainsi que le mode de calcul en invoquant un taux de 6,6 % et non de 10 % en l'absence de salarié dédié.

S'agissant du montant de l'indemnité de rupture hors commissions indirectes, il y a lieu de retenir le montant fixé par le tribunal de commerce dès lors que la société La Vente Moderne et Technique ne communique pas les modalités de calcul de l'indemnité qu'elle fixe à 145.939 euros.

En outre, aucune circonstance propre au litige ne justifie une minoration du calcul de l'indemnité telle qu'elle est définie par les usages, tenant compte des réalités inhérentes à la profession d'agent commercial.

S'agissant des commissions indirectes, il convient de rappeler qu'en application de l'article L. 134-6 du code de commerce « pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 lorsqu'elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre. Lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent commercial a également le droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ».

Ainsi, l'agent, dès lors qu'il est chargé d'un secteur géographique défini, a droit à la commission afférente aux opérations conclues avec des clients appartenant à ce secteur même si elles l'ont été sans son intervention.

Concernant les commandes passées par la société IBA Ingénierie, dont le siège social est à Nice (06), les premiers juges ont justement retenu que cette société, qui est un bureau d'études, était en réalité le prescripteur des produits commercialisés par la société Targetti, ce qui est confirmé par un mail adressé par Mme X à l'occasion de son départ, attestant que la société IBA, située sur le secteur géographique de la société La Vente Moderne et Technique, est bien à l'origine de la transaction. Il est ainsi justifié que les commissions soient réintégrées au bénéfice de l'agent commercial à hauteur de 5 % (livraison sur un autre secteur géographique : clause 3.2 du contrat d'agent commercial). Ainsi, la somme de 7.413,77 euros hors taxe sera réintégrée au titre des commissions dues.

Par ailleurs, les commandes passées par Engie directement avec la société Targetti ont également vocation à être réintégrées dans les commissions dues à la société La Vente Moderne et Technique considérant que la société Engie est domiciliée à Aix-en-Provence (13) et que la livraison était prévue à Gap (05) soit dans les secteurs géographiques de l'agent commercial. Les commandes ayant été passées en février 2016, soit avant le départ de Monsieur Y en août 2016, il n'y a pas lieu de réduire la commission de 10 à 6,60 %. La somme de 1.945,08 euros hors taxe est dès lors bien fondée.

Au demeurant, bien que ces commissions n'aient pas été intégrées dans le calcul revenant à la société La Vente Moderne et Technique, les deux mails visés par les premiers juges (16 février 2016 et 27 juillet 2016) attestent que l'agent commercial était informé des commandes dans la mesure où il a été mis en copie par l'intermédiaire de Monsieur W.

En revanche, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'opération dite « E » dès lors qu'il est établi que les produits commercialisés sous le nom Beta et Penta ne ressortent pas des produits expressément visés par le contrat d'agent commercial, ni dans sa version initiale ni au travers de ses avenants, nonobstant le fait que la société La Vente Moderne et Technique a pu intervenir ponctuellement sur ce type d'éclairages.

Ainsi, la somme totale de 9358,85 euros hors taxe (11.230,62 euros toutes taxes comprises) reste due à la société La Vente Moderne et Technique (SARL).

Le jugement est donc partiellement confirmé de ce chef.

Sur la communication de pièces sous astreinte :

Aux termes de l'article R. 134-3 du code de commerce le mandant remet à l'agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé.

L'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.

En l'espèce, il ressort des échanges de mails entre les parties que les agents commerciaux prenaient connaissance des projets créés sur leur secteur géographique par l'intermédiaire d'un outil dénommé « SalesForce » et qu'à compter du mois d'octobre 2016, il a été prévu en outre que « chaque utilisateur puisse voir les comptes acteurs et les projets sur tout le réseau national ».

Ainsi, il résulte de ces éléments que d'une part, les projets passés sur son secteur géographique étaient à la disposition de la société La Vente Moderne et Technique pendant toute la durée du contrat, ce qui n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune contestation antérieure entre 2012 et 2016, et que d'autre part, le principe posé par l'article L. 134-6 du code de commerce est celui de l'obtention d'une commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant au secteur géographique de l'agent, de sorte que la conclusion de contrats avec des sociétés ou personnes physiques ressortant d'un autre secteur géographique que celui confié en exclusivité à l'agent commercial ne lui ouvre pas droit en principe à commission.

En tout état de cause, considérant que le contrat d'agent commercial a pris fin le 31 janvier 2017 et que le service national de SalesForce a été effectif en octobre 2016, la société La Vente Moderne et Technique a été mise en mesure d'accéder aux pièces lui permettant de vérifier le montant des commissions dues, étant rappelé que les commissions indirectes réintégrées aux sommes dues à l'agent commercial n'ont pas fait l'objet de dissimulation, l'agent commercial ayant été mis en copie des commandes effectuées et même invité à suivre la commande s'agissant du projet A.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef.

Sur les frais et dépens :

La société 3F Filippi Targetti France, anciennement la société Targetti France (SAS), partie succombant à titre principal, conservera la charge des dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

En outre la société 3F Filippi Targetti France sera tenue de payer à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 9 avril 2018 par le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, sauf en ce qu'il a fixé le montant des commissions restant dues à la somme de 11.019,63 euros hors taxe soit 13.235 euros toutes taxes comprises.

Statuant à nouveau,

Condamne la société 3F Filippi Targetti France, anciennement la société Targetti France (SAS), à payer à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 9.358,85 euros hors taxe soit 11.230,62 euros toutes taxes comprises au titre des commissions.

Y ajoutant,

Condamne la société 3F Filippi Targetti France, anciennement la société Targetti France (SAS), aux entiers dépens de la procédure d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Condamne la société 3F Filippi Targetti France, anciennement la société Targetti France (SAS), à payer à la société La Vente Moderne et Technique (SARL) la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel.