CA Nîmes, 4e ch. com., 19 janvier 2022, n° 20/01414
NÎMES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Christian Potier (SA), de Saint Rapt (ès qual.), Bertholet (ès qual.), Etude Balincourt (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gagnaux
Conseillers :
Mme Strunk, Mme Ougier
Avocats :
Me Mahjoub, Me Laplace Treyture , Me Vajou
Vu l'appel interjeté le 18 juin 2021 par M. X à l'encontre du jugement rendu le 11 octobre 2019 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n°201801493
Vu les dernières conclusions déposées le 1er décembre 2021 par l'appelant M. X et le bordereau de pièces qui y est annexé
Vu les dernières conclusions déposées le 8 décembre 2020 par la SA Christian Potier intimée et le bordereau de pièces qui y est annexé
Vu l'ordonnance de clôture de procédure à effet différé au 2 décembre 2021 en date du 17 novembre 2021
Vu les conclusions du Procureur Général en date du 18 novembre 2021 déclarant s'en rapporter à l'appréciation de la Cour
EXPOSE
M. X exerçait l'activité d'agent commercial multicartes, dont pour la SA Christian Potier ayant une activité de fabrication et commercialisation de produits alimentaires (sauces et préparations alimentaires pour faire des sauces) selon contrat d'agent commercial auprès de grandes surfaces du 1er juin 2016, avec notamment un secteur territoriale sur les départements de l'Ariège, la Haute Garonne, le Tarn, le Tarn et Garonne, le Gers partiellement, le Lot.
Aux termes de l'avenant signé le 30 juin 2017, l'agent commercial bénéficiait d'une extension territoriale étendue à d'autres départements : l'Aude, l'Aveyron, l'Hérault, le Lot et Garonne, les Pyrénées Atlantiques, les Pyrénées Orientales, le Tarn et le Tarn et Garonne.
M. X soutient avoir découvert que son secteur de clientèle défini contractuellement a été démarché par son mandant et avoir été informé de recrutement, à partir du 12 septembre 2017 de télévendeurs ainsi interférant avec les clients de son portefeuille en leur proposant les produits de la société ou d'organiser des rendez vous avec Monsieur A.
Il explique que par appel du 12 septembre 2017 puis mail du 13 septembre 2017, il a demandé que cette pratique prenne fin en demandant que lui soit communiquée la liste des prospects sollicités.
A défaut d'accord entre les parties, il soutient que selon « message vocal laissé sur le téléphone » il lui a été proposée une rupture amiable, et que par email en date du 9 octobre 2017 il aurait donné son accord à M. Y, dirigeant de la société Christian Potier, qui aurait répondu : « ok pour transaction amiable dans la mesure où la confiance n'y est plus n'y est plus je peux comprendre »
Mais par email du 30 octobre 2017, le président de la société mandant - Monsieur Z, informé de la situation, aurait sollicité des explications directement auprès de M. X, en lui indiquant qu'il n'y avait aucun problème, tandis que M. Y l'informe par mail le 6 décembre 2017 d'une convocation prévue le 12 décembre chez un client.
M. X se prévalait alors du principe selon lui acquis d'une résiliation amiable et annonçait ne pas donner suite à ce projet de rencontre chez un client.
Par mail du 8 décembre 2017, le président de la société Christian Potier mettait fin au contrat d'agent commercial pour faute grave.
Le 15 mai 2018, M. X a mis en demeure la société Christian Potier pour des factures selon lui impayées tout en sollicitant le règlement des indemnités de rupture de son contrat d'agent commercial.
Le 23 juillet 2018 M. X a assigné en paiement la société Christian Potier devant le tribunal de commerce d'Avignon.
Le tribunal de commerce d'Avignon le 18 juin 2021 a jugé :
« Condamne la société Christian Potier à payer la somme de 85,68€ à Monsieur X
Déboute Monsieur X du reste de ses demandes,
Condamne Monsieur X à payer la somme de 2 000 € à la société Christian Potier, à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à Monsieur X la charge des dépens, (...)
M. X - appelant demande à la Cour au dispositif de ses dernières écritures : (...)
Infirmer le jugement en ce qu'il a :
(rappel des condamnations défavorables
Statuant à nouveau :
- Condamner la société Christian Potier au paiement de la somme de 86,68 €uros correspondant à une facture impayée outre 40 €uros au titre des frais de recouvrement
- Constater que la durée de préavis raisonnable est de 2 MOIS ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de la somme de de 226,10 €uros correspondant à deux mois de commissions au titre du préavis de résiliation ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de dommages et intérêts au titre de la rupture brutale du contrat d'agent commercial pour un montant de 5 000 euros ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de la somme de 3 218, 24 €uros au titre d'indemnité compensatrice correspondant à deux années de commissions de l'agent commercial ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral et financier ayant découlé de cette résiliation abusive ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de 4 000 euros au titre de la violation de ces obligations contractuelles ;
- Condamner la société Christian Potier au paiement de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive à hauteur de 5 000 euros.
- Débouter la société Christian Potier de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires, outre appel incident.
M. X fait essentiellement valoir
- que demeure une facture d'un montant de 86, 68 €uros impayée, et qu'il est en droit de demander en outre 40 €uros pour les frais de recouvrement.
- qu'il y a bien une « violation de l'obligation de non concurrence » sanctionnable en droit au visa de l'article 1217 du Code civil et qu'il a un droit aux commissions auxquelles il aurait pu prétendre dans le secteur considéré défini contractuellement
- qu'en effet son contrat comportait la clause à l'article 2 selon laquelle le « mandant s'interdit de concurrencer l'action de l'agent dans l'univers ainsi défini, et ce, que ce soit de façon directe ou indirecte. »
- qu'il a rencontré un « trouble dans son activité » sans obtenir d'explication de son interlocuteur? Monsieur Y, agissant en qualité de Directeur Commercial et Marketing
- que son contrat a injustement été rompu sans respect du préavis de l'article L 134-11 du code de commerce
- qu'il a droit par ailleurs à une indemnité conformément à l'article L. 134-12 alinéa 1 du Code de commerce « en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. », toute clause contraire étant réputé non écrite en application de l'article L. 134-16 du Code du commerce
- qu'en fait les parties ont été liées par des relations commerciales régulières et suivies d'avril 2016 à décembre 2017 et un préavis de 2 mois est dû
- qu'il a droit aussi au versement d'une indemnité égale à deux années de commissions selon l'usage et calculé sauf à parfaire - en raison des commandes effectuées sur le secteur et auprès de la clientèle et - qui lui serait inconnues malgré sa demande »
- qu'il y a bien illégalité en la forme et au fond de la résiliation de son contrat d'agent commercial, sans faute de sa part et alors que la société mandant a violé son obligation de non concurrence
- qu'il ne peut lui être reproché de ne pas déférer à des injonctions alors que selon l'article L134-1 du code de commerce « l'agent commercial exerce une activité indépendante et, à ce titre, bénéficie de la liberté d'organisation propre à tout chef d'entreprise. »
- qu'il ne peut être considéré comme démissionnaire du seul fait de la perspective d'une rupture amiable qui lui avait été proposée
- qu'il avait annoncé refusé de participer au salon Socamil ne peut dès lors, « absence, intervenant dans un contexte tendu et de fin de contrat »
- que l'argumentation adverse invoque singulièrement un litige semblable avec un autre agent commercial M. B, ce qui démontre au contraire la mauvaise foi de la société qui en réalité l'a considéré in fine comme un salarié subordonné et a tenté d'imposer à Monsieur X une évolution de ses conditions d'organisation et d'exercice du mandat qui contrevient au principe d'indépendance de l'agent commercial alors même qu'il avait déjà une clientèle dans le secteur géographique et d'activité avant son contrat d'agent commercial
La société Christian Potier - intimée - avec les intervenants - Me Bertholet et Me Charles De Saint Rapt, Associés de la selarjl Selarl De Saint Rapt & Bertholet, ès qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la SA Christian Potier selon jugement du tribunal de commerce du 31 janvier 2020, domiciliée - Selarl Etude Balincourt représentée par Maître C, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Christian Potier selon jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 31 janvier 2020
Intervenants volontaires demandent à la Cour, en des écritures communes, au dispositif de ses dernières écritures en des termes qui suffisent en l'état au sens de l'article 455 du Code de procédure civile à exposer succinctement ses prétentions et moyens :
« Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,
Vu l'article 9 du Code de procédure civile,
Vu les articles L 134-4 et L 134-13 du Code de commerce,
Statuant sur l'appel formé par Monsieur X à l'encontre du jugement rendu le 11 octobre 2019 par le Tribunal de Commerce d'Avignon,
Déclarant recevable et bien fondée l'intervention volontaire de
Me Bertholet et Me Charles De Saint Rapt, Associés De La Selarl De Saint Rapt & Bertholet, ès qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la SA Christian Potier selon jugement du tribunal de commerce du 31 janvier 2020,
Selarl Etude Balincourt représentée par Maître C, ès qualités de mandataire judiciaire de la SA Christian Potier selon jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 31 janvier 2020.
Confirmer le jugement en ce qu'il a
- Condamné la société Christian Potier à payer la somme de 86,68 € à Monsieur X,
- Débouté Monsieur X du reste de ses demandes
- Condamné Monsieur X à payer la somme de 2 000,00 € à la société Christian Potier, à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Laissé à Monsieur X la charge des dépens, (...)
Débouter Monsieur X de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
Condamner Monsieur X à payer à la SA Christian Potier la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1re instance et d'appel.
La société intimée fait essentiellement valoir
- que l'exclusivité territoriale contractuelle ne signifiait pas qu'elle s'interdisait tout contact avec sa clientèle, notamment au regard notamment de l'article 4, b du contrat d'agent commercial
- que dans cet esprit le 28/08/2017 elle embauché Madame D chargée de relancer téléphoniquement des clients qui ne commandaient plus depuis plusieurs mois, en informant au préalable l'agent commercial pour des clients appartenant à son secteur
- qu'à ce titre Madame D a pris contact avec l'agent commercial tenu informé d'éventuelles initiatives à prendre « au soutien de l'activité de Monsieur X » qui d'ailleurs a en réponse communiqué « une liste de clients à relancer »
- que « Monsieur X a décidé de rompre tout dialogue, mais il a également décidé de ne plus honorer ses engagements » ainsi qu'il résulte de la production intégrale des correspondants échangées et reprises dans les conclusions et pièces versées aux débats
- que l'attitude de l'agent commercial cessant toute collaboration était constitutif d'une faute grave
- qu'il ressort de l'article 7 du contrat qu'en cas de résiliation par l'une ou l'autre des parties, un délai de préavis doit être observé mais que l'agent commercial est à l'origine de la rupture
- que M. X lui-même a reconnu dans son assignation initiale l'absence de toute rupture établie « En effet, Monsieur X était dans la croyance légitime que la fin des relations avec la société Christian Potier serait formalisée par une convention » mais « a rompu sa collaboration unilatéralement depuis le mois d'octobre 2017 »
- qu'en refusant tout contact et toute discussion tant avec Monsieur Y qu'avec le Président Directeur de la société Christian Potier, l'agent commercial « a manqué indubitablement à son obligation de loyauté et n'a pas exécuté son obligation en bon professionnel »
- qu'il n'y a eu d'actes de concurrence dans la mesure où l'exclusivité territoriale a garanti à Monsieur X le paiement d'une commission pour toutes les affaires traitées sur ledit territoire
- que M. X "dont le chiffre d'affaires était toujours très faible n'a pas été en mesure de tirer profit de ce soutien qui lui était apporté" et "ne s'est même pas soucié d'honorer les rendez-vous qui lui étaient adressés, laissant ainsi nombre de clients à leur propre sort"
- que sur le défaut de paiement de sommes dues M. X a demandé par son conseil le 15 mai 2018 le paiement de factures impayées adressées le 30 septembre 2017 mais il résulte des faits connus et des documents produits (notamment l'extrait de compte personnalisé) que l'agent commercial n'a jamais fourni de factures de juillet à septembre 2017, et aucune facture jusqu'au 31/12/2017 malgré plusieurs demandes (6 septembre 2017,12 octobre 2017)
- que seule une facture de 86.68 € datée du 30 septembre 2017 a été communiquée en cours de procédure judiciaire, qui a été jugée due et n'est pas contestée
Pour plus ample exposé des faits de la cause et le développement des moyens de droit ou de fait des parties au soutien de leurs prétentions, il est renvoyé à leurs dernières écritures exposées dans leurs développements essentiels infra par la Cour en la motivation du présent arrêt.
DISCUSSION
EN DROIT
L'article 1217 du code civil, cité par l'agent commercial et générique aux contrats dispose :
« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter. »
L'article L. 134-4 du Code de commerce, spécifique au statut de l'agent commercial dispose :
Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties.
Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information.
L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel ; le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat. »
L'article L. 134-11 du Code de commerce, spécifique au statut de l'agent commercial dispose :
« (...)
Lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. (...)
La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.
Les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts. Si elles conviennent de délais plus longs, le délai de préavis prévu pour le mandant ne doit pas être plus court que celui qui est prévu pour l'agent.
Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de l'une des parties ou de la survenance d'un cas de force majeure. »
L'article L. 134-12 du Code de commerce, spécifique au statut de l'agent commercial dispose
« En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits. » (...)
L'article L.134-13 du Code de commerce, spécifique au statut de l'agent commercial dispose
« La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants :
1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;
2° La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3° Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient (...) »
Sur les termes spécifiques du contrat d'agent commercial liant les parties
L'article 2 disposait :
(...) le mandant s'interdit de concurrencer l'action de l`agent dans l'univers ainsi défini, et ce, que ce soit de façon directe ou indirecte. (...)
L'article 4 disposait par ailleurs :
« Étant membre à part entière de la structure commerciale de son mandant, l'agent est le seul interlocuteur commercial de la clientèle de son secteur.
a) En conséquence, il fait tous les efforts requis par la diligence professionnelle pour promouvoir, le développement des ventes en tenant compte de la politique commerciale du mandant.
ll tient le mandant informé de l'état du marché, du comportement de la clientèle et des initiatives de la concurrence et de toute autre information qu'il jugera utile. Il met en œuvre tous les soins professionnels requis pour transmettre les informations qu'il recueillera sur la solvabilité des acheteurs et de leurs attentes. ll a toute liberté pour organiser les voies et moyens de son bureau, de sa prospection, notamment les visites de la clientèle et leur modalité- b) Le mandant donne à l'agent toutes informations permettant de conduire son action, en conformité avec sa politique commerciale et avec la défense de ses intérêts.
En particulier, il tient l'agent informé de tous contacts ou conditions intervenus sur son secteur et aussi en dehors de son secteur si des conséquences sont potentielles.
(...)
« Il [ le mandant] ne visite pas la clientèle sans être accompagné de l'agent ; toutefois si cela devait exceptionnellement se produire, il en informerait préalablement l'agent. (...) »
En l'espèce, il faut noter qu'au soutien de ses accusations et prétentions M. X - appelant produit très peu de pièces ( 8 dont le contrat et l'avenant, sa facture de fin septembre 2017, sa demande de paiement du 15 mai 2018 ; les 4 autres pièces sont - et exclusivement : un échange de mails avec la société, un échange de mail avec M. Y, un échange de mail avec le pdg Z, et la lettre de résiliation :
La lettre de résiliation n'est d'ailleurs que la fin de l'échange de mails avec Mr Z pdg dont on peut extraire in extenso
- le mail du 1er novembre 2017 de Mr Z à M. X
"Bonjour Monsieur X,
L'exclusivité territoriale, qui figure à votre contrat vous garantit sur le paiement d'une commission pour toutes les affaires qui se passeraient dans le dit territoire.
Là, à ma connaissance, il n'a jamais été question de vous spoiler d'une quelconque commission ou de vous cacher une quelconque relation commerciale mais bien au contraire
Nous avons intégré dans nos équipes commerciales, une télé prospectrice à fin d'assister les commerciaux internes. Ou externes à dans leurs actions, Prendre des rendez-vous, relancer des clients n'ayant pas commandé depuis un temps certain. C'est dans cet esprit que les choses se sont faites. Il m'a semblé que vous aviez donné à Y et à D une liste de clients à rappeler
Vous êtes apparemment le seul qui refuse l'aide d'un commettant sur le terrain.
ll me semblait aussi, comme le prouve l'avenant que nous avons signé ensemble, que nous étions dans une dynamique de développement
J'ai à ce propos beaucoup de mal à comprendre votre revirement, même si j'ai qu'en même une petite idée.
C'est pour cela que je souhaitais échanger avec vous par téléphone.
Je ne suis pas pour l'heure dans une démarche procédurière.
Je me permets de réitérer ma demande concernant discussion de vive voix avec vous,
Dans cette attente Et bien cordialement"
Z
- le mail de fin de contrat du 8 décembre 2017 de M. Z à M. X
« Cher Monsieur,
Il n'a jamais été question d'une rupture amiable entre nos deux sociétés, vous avez argué d'une fallacieuse faute grave, non consécutive à un préjudice puisque bien au contraire l'action menée par la téléprospectrice et avec votre accord avait pour but de développer l'activité sur votre secteur, ce qui pour le moins aurait pu augmenter le montant des commissions versées.
J'ai essayé par tous les moyens possibles, téléphone, messagerie, sms, courriels de rentrer en contact avec vous afin d'échanger sur ces éléments.
Vous n'avez pas souhaité répondre à mes sollicitations.
Par contre, vous avez de façon unilatérale cessé toute action de représentation de nos produits dans votre secteur. et réduit l'activité à zéro en cette période de fêtes.
Ce qui par contre nous est préjudiciable et consécutif d'une faute grave avérée.
En conséquence, je m'estime complètement désengagé du contrat qui nous liait au bénéfice d'aucune indemnité à votre profit et reprend de plein droit le secteur initialement confié (...) »
Le Tribunal a en sa motivation essentiellement retenu
Le contrat d'agent commercial, daté du 1er juin 2016 et son avenant du 30 juin de la même année, détaille les obligations de chacun et fixe le périmètre d'exclusivité, octroyant ainsi à Monsieur X une zone d'achalandage de plus de 4 500 000 de consommateurs.
Le tribunal remarque qu'il est également spécifié les différents réseaux de distributions tant la GMS, grossistes, RHF et réseau traditionnel.
L'article 4 du contrat fixe les obligations et les diligences de chacun.
À ce stade, le mandant doit tenir informé son agent de tous contacts intervenus sur le secteur désigné [paragraphe 2 du b)].
(...)
Les chiffres d'affaires remis font état d'un montant sur 12 mois de 25 818,86€.
La faiblesse du chiffre d'affaires au regard de l'achalanclage du secteur en question, a induit de la part de la société Christian Potier la mise en place d'un collaborateur chargé de solliciter les clients et de faire de la prospection sans pour autant retirer à Monsieur X ses droits à commissions à venir
Il ressort des pièces fournies que la proposition commerciale faite par D, employée de la société Christian Potier, est une offre tenant plus de l'échantillonnage et du référencement du client potentiel, que d'une offre de vente directe qui puisse être interprétée comme un acte éventuel de concurrence.
D'autre part, M. X n'apporte aucun élément de propositions commerciales, de protestations de clients mécontents, d'appels téléphoniques émanant de la société Christian Potier
Cette absence d'éléments concrets et l'engagement de la société Christian Potier de payer les commissions en cas de commande directe d'un client ne sont donc pas constitutifs d'une atteinte à exclusivité (...).
Depuis les échanges, à partir du 13 septembre 2017, il apparaît clairement que Monsieur X n'a pas voulu, malgré plusieurs appels et messages, entrer en contact avec son mandant afin de corriger ou d'adapter au mieux la collaboration entre le cocontractant.
M. X le 19 septembre 2017, annonce qu'il ne sera pas présent sur le salon, au motif d'« une mauvaise volonté » de la part de son mandant.
S'il apparaît un accord d'une rupture conventionnelle le 10 octobre 2017 entre Monsieur N, directeur commercial et M. X, le président de la société, Monsieur Z, demande le 30 octobre à parler de vive voix avec son agent, la rupture n'étant plus d'actualité. il précise, n'ayant pu parler à Monsieur X, la position de sa société à l'égard du contrat d'exclusivité et confirme sa loyauté sur ce dernier point et réitère sa demande de conversation de vive voix.
Le 6 décembre la société (...) avise son agent d'un rendez vous avec une centrale d'achat et prie Monsieur X de confirmer sa présence.
Monsieur X, le soir même, répond par la menace d’une procédure si son mandant ne propose pas une rupture conventionnelle sous 48 heures.
La réponse de la société (...), datée du 8 décembre, est la conséquence directe, d'une part, du refus de Monsieur X de communiquer avec son mandant depuis des mois et, d'autre part, de la menace de procédure si la rupture conventionnelle n'est pas actée.
En conséquence, le tribunal ne saurait retenir une rupture brutale de la part de la société (...), cette rupture étant du fait de la position déloyale de M. I S l'égard de son mandant.
La société (...) argue d'une faute grave de la part de son agent pour rompre le contrat, celui-ci ayant cessé toute action de représentation ».
(...)
Également, le tribunal relève que Monsieur X a refusé de se rendre sur un salon au mois de septembre pour y rencontrer des clients potentiels et n'a pas répondu favorablement à la demande de sa présence le 12 décembre pour les négociations avec une centrale d'achat.
Or, il est de principe, en droit, que l'agent commercial qui manifeste un désintérêt dans I'exécution de son mandat, comme la participation à des réunions et clés salons, manque gravement à ses obligations contractuelles et rend impossible le maintien de leurs relations.
Il convient d'approuver les termes du jugement quant d'une part de considérer que l'agent commercial est à l'origine fautive d'une rupture du contrat, pour avoir - ce qu'il ne conteste pas d'ailleurs vraiment en ses écritures - accusé à tort son mandant de violation de ses droits, suggéré une rupture amiable que M. Y avait cru devoir juger un temps inévitable en l'absence de « confiance réciproque », avant de considérer une rupture amiable [aux modalités non définies et refusée par le pdg ] comme acquise, au point de se désinteresser immédiatement et irremédiablement de sa mission, de refuser toute collaboration pour le « mandat d'intérêt commun » qui se poursuivait, alors au préjudice de la société Christian Potier, sans plus aucun minimum de collaboration contractuel de l'agent commercial
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé.
Sur la commission
Il faut remarquer que la facture d'un montant minime est apparue tardivement à l'occasion du conflit et après rupture du contrat, qu'elle n'est pas contestée et que la société Christian Potier demande la confirmation du jugement sur ce point.
Sur les frais et dépens
En l'état d'une confirmation intégrale du jugement entrepris les dépens d'appel demeureront à la charge de M. X, sans qu'il y ait lieu à application complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Déboute les parties de leurs autres ou plus amples prétentions notamment au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. X aux dépens d'appel.