Cass. crim., 22 février 2011, n° 10-80.721
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Avocats :
SCP Didier et Pinet, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Waquet, Farge et Hazan
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 2 juillet 2004, les agents de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du Vaucluse ont effectué un contrôle dans les locaux de l'Union des coopératives Les Vignerons de l'Enclave des Papes à Valréas (Vaucluse) ; qu'ils ont établi un procès-verbal, en date du 15 février 2005, relevant que la marque " Enclave des Papes " et la présentation des bouteilles saisies étaient évocatrices de l'appellation d'origine contrôlée " Châteauneuf-du-Pape " et pouvaient donc entraîner une confusion dans l'esprit des consommateurs ; que ces agents ont notamment considéré que la marque " Enclave des papes " avait vocation à faire croire à l'acheteur qu'il existait une sous-région viticole dont serait issu le vin lui conférant une caractéristique particulière par rapport aux autres vins, que l'utilisation du terme " Pape " permettait d'exploiter la notoriété prestigieuse de l'AOC " Châteauneuf-du-Pape " et qu'une stratégie de communication et de publicité avait été construite autour de la marque visant un terroir avec des règles de production l'identifiant à une véritable appellation d'origine et entretenant une confusion entre les AOC Côtes-du-Rhône ; que M. X..., président de l'Union et directeur de la cave, a été poursuivi des chefs d'usurpation d'appellation d'origine, de publicité de nature à induire en erreur et commercialisation de vins sous une présentation de nature à créer une confusion ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 44 et 45 du règlement (CE) n° 479/ 2008 du 29 avril 2008, 19 § 3 du règlement (CE) n° 607/ 2009 du 14 juillet 2009, L. 115-16 du code de la consommation, L. 715-1, l. 721-1, l. 722-1 du code de la propriété intellectuelle, L. 671-5 du code rural, 112-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit d'usurpation d'appellation d'origine contrôlée, en répression, l'a condamné à la peine d'amende de 5 000 euros ainsi qu'à des mesures de publication et l'a condamné à payer des dommages-intérêts au Syndicat intercommunal de défense viticole de l'appellation d'origine contrôlée Châteauneuf-du-Pape, à la Fédération des syndicats de producteurs de Châteauneuf-du-Pape ainsi qu'à l'Institut national de l'origine et de la qualité ;
" aux motifs que, sur l'interprétation de l'article 41 § 2 et 3 du règlement CE n° 607/ 2009 de la commission du 14 juillet 2009, le règlement CE n° 607/ 2009 fixe certaines modalités d'application du règlement CE n° 479/ 2008 du Conseil en ce qui concerne les appellations d'origine protégées et les indications géographiques protégées, les mentions traditionnelles, l'étiquetage et la présentation de certains produits de secteur vitivinicole ; que le règlement CE n° 479/ 2008 du 29 avril 2008, pour sa part, porte sur l'organisation commune du marché vitivinicole, modifie les règlements CE n° 1493/ 1999, n° 1782/ 2003, n° 1290/ 2005 et n° 3/ 2008 et abroge les règlements CEE n° 2392/ 86 et CE n° 1493/ 1999 ; que l'article 41 a pour finalité de régler les conflits pouvant exister entre une marque commerciale et une mention traditionnelle ; que, tel n'est pas le cas en l'espèce en ce qu'il s'agit du conflit entre, d'une part, la dénomination Enclave des Papes, déposée à titre de marque, encore faut-il observer que la simple production de la copie du récépissé de renouvellement en 1998 de l'inscription auprès de l'OMPI ne suffit pas à établir que protection lui était due au moment des faits, d'autre part, une appellation d'origine contrôlée (AOC) qui n'a rien à voir avec une mention traditionnelle, notion définie à l'article 54 du règlement CE n° 479/ 2008 comme étant une indication relative notamment à la méthode de production ou de vieillissement, à la couleur, à un type de lieu particulier, soit par exemple les mots et expressions suivants : « Château », « Clos », « Cru bourgeois », « Primeur », « Ambré », « Vendanges tardives » ; qu'en l'état de ces énonciations, le renvoi préjudiciel en interprétation de l'article 41 § 2 et 3 du règlement CE n° 607/ 2009 du 14 juillet 2009 ne s'avère pas nécessaire ; qu'il se déduit de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu à application immédiate aux faits de l'espèce des dispositions des articles19 § 2 et 3 du règlement CE n° 607/ 2009 du 14 juillet 2009 ; que sur le délit d'usurpation d'appellation d'origine, qu'il résulte des dispositions des articles L. 115-5 du code de la consommation, reprenant les alinéas 3 et 4 de l'article L. 641-2 du code rural, et 48 du règlement CE n° 1493/ 1999 du 17 mai 1999, renvoyant à son annexe VII point F, tous textes alors applicables aux faits de l'espèce, que l'usurpation consiste :
- en l'utilisation de toute mention évoquant l'appellation d'origine ;
- en l'utilisation d'une indication susceptible de tromper le consommateur sur l'origine, la provenance, la qualité des vins ;
- en l'utilisation de toute indication susceptible d'être confondue dans l'esprit des tiers avec tout ou partie de la désignation d'un vin relevant d'une AOC ; que l'article L. 115-16 du code de la consommation, en sa rédaction en vigueur à l'époque, disposait : « Quiconque aura soit apposé, soit fait apparaître, par addition, retranchement ou par une altération quelconque, sur des produits, naturels ou fabriqués, mis en vente ou destinés à être mis en vente, des appellations d'origine qu'il savait inexactes, sera puni des peines prévues à l'article L. 213-1 » ; qu'il est de principe que l'utilisation d'un seul élément d'une appellation d'origine suffit à constituer une usurpation en ce qu'elle évoque l'appellation d'origine complète et est donc de nature à induire en erreur sur l'origine des produits commercialisés ; qu'en l'espèce, il est reproché au prévenu d'utiliser, lors des opérations de ventes des vins, la dénomination Enclave des Papes, évocatrice de l'AOC Châteauneuf-du-Pape ; qu'il est constant que l'AOC Châteauneuf-du-Pape, protégée par le décret du 2 novembre 1966, bénéficie au sein du monde vitivinicole d'une très grande notoriété tant en France qu'à l'étranger tenant à ses multiples caractéristiques ; qu'elle est la seule AOC de la vallée du Rhône à contenir le mot pape ; qu'il n'est pas contestable que ce mot, à lui seul, confère à cette AOC une spécificité individualisante et capitale, en particulier sur un plan commercial ; qu'en effet, s'il est vrai que dans le langage courant le mot pape recouvre un sens générique désignant le chef suprême de l'eglise catholique, sens qui, de ce fait, ne saurait être réduit de quelque façon que ce soit dans son utilisation, il n'en demeure pas moins que lorsqu'il est employé dans le secteur d'activité spécifique du vin et, de plus, dans un cadre géographique déterminant pour ledit secteur, ici la vallée du Rhône, le mot pape s'associe naturellement et immédiatement à l'AOC Châteauneuf-du-Pape ; qu'ainsi, ce dont M. Y..., adhérent de l'association, a parfaitement conscience compte tenu de ses compétences dans le domaine viticole, l'utilisation de la dénomination Enclave des Papes qui comporte le mot essentiel pape, économiquement porteur sur les marchés tant en France qu'à l'étranger, ne peut qu'évoquer non sans quelque finesse d'esprit, sinon de façon quelque peu merveilleuse, l'appellation prestigieuse Châteauneuf-du-Pape, semant dès lors la confusion dans l'esprit du consommateur plus ou moins aguerri en la matière, cela d'autant plus facilement si celui-ci est de nationalité étrangère, a priori pas à même de comprendre les subtilités de notre langue ; qu'eu égard au nombre de bouteilles vendues sous la dénomination Enclave des Papes, il ne saurait sérieusement être soutenu que l'utilisation de cette dénomination n'est que la traduction de l'attachement des vignerons du canton de Valreas au particularisme de leur terroir, savoir que les quatre localités le composant ont été possessions pontificales à l'époque où les papes vivaient en Avignon ; qu'il se déduit de ce qui précède que le délit d'usurpation est caractérisé en tous ses éléments à l'encontre de M. X... ;
" 1) alors que les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes ; qu'en application des dispositions prévues au chapitre IV du Titre III (applicables à partir du 1er août 2009) du Règlement (CE) n° 479/ 2008 du 29 avril 2008 « portant organisation commune du marché vitivinicole, modifiant les Règlements (CE) n° 1493/ 1999, (CE) n° 1782/ 2003, (CE) n° 1290/ 2005 et (CE) n° 3/ 2008, et abrogeant les Règlements (CEE) n° 2392/ 86 et (CE) n° 1493/ 1999 », les appellations d'origine et indications géographiques doivent, pour bénéficier d'une protection dans la communauté, être reconnues et enregistrées au niveau communautaire ; qu'en application de l'article 44 dudit Règlement (figurant au chapitre IV du Titre III), une marque enregistrée avant la date du dépôt auprès de la Commission de la demande de protection peut continuer d'être utilisée et renouvelée, nonobstant la protection d'une appellation d'origine, pourvu qu'aucun motif de nullité ou de déchéance au sens de la Directive 89/ 104/ CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ne pèse sur la marque ; que, dans ce cas, la marque peut être utilisée conjointement avec l'appellation d'origine quand bien même son utilisation relèverait d'une des situations visées à l'article 45 § 2 du même Règlement qui protège les appellations d'origine, notamment contre toute usurpation, imitation ou évocation ; qu'en l'espèce, la dénomination Enclave des Papes fait l'objet d'une marque collective enregistrée à l'INPI par l'Association des producteurs de vins de l'Enclave des Papes le 8 mai 1974 et régulièrement renouvelée en 1984, 1994 et 2004 ; que les agents de la DGCCRF ont dressé le 15 février 2005 un procès-verbal de délit à l'encontre de M. Y...pour usurpation d'appellation d'origine, en considérant que la marque Enclave des Papes était évocatrice de l'AOC Châteauneuf-du-Pape ; qu'en retenant qu'en faisant usage de la dénomination Enclave des Papes déposée à titre de marque par l'Association des producteurs de vins de l'Enclave des Papes, M. X... se serait rendu coupable du délit d'usurpation de l'appellation d'origine Châteauneuf-du-Pape, sans rechercher si l'article 44 du Règlement (CE) n° 479/ 2008 applicable à compter du 1er août 2009 n'autorisait pas l'usage de la marque Enclave des Papes conjointement avec l'appellation d'origine Châteauneuf-du-Pape, la cour d'appel n'a pas légalement caractérisé le délit retenu à la charge de M. X... ;
" 2) alors que la cour d'appel qui, tout en constatant qu'il s'agissait en l'espèce d'un « conflit entre, d'une part, la dénomination Enclave des Papes déposée à titre de marque » et, « d'autre part, une appellation d'origine contrôlée », a indiqué « observer que la simple production de la copie du récépissé de renouvellement en 1998 de l'inscription auprès de l'OMPI ne suffit pas à établir que la protection lui (à la marque) était due au moment des faits », sans constater de façon certaine que la dénomination Enclave des Papes ne ferait pas l'objet d'un dépôt de marque valable en France à l'époque des faits, a entaché sa décision de défaut de motifs et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
" 3) alors qu'en retenant que le litige porterait exclusivement sur l'usage des termes « enclave des papes » pris en tant que dénomination lors de la réalisation des ventes des vins et qu'il ne concerne en rien l'application du droit spécifique aux marques, tout en constatant que la dénomination « enclave des papes », ainsi qu'il résultait d'ailleurs du procès-verbal de délit dressé par la DGCCRF, était déposée à titre de marque et alors que M. X... indiquait faire usage de cette marque collective suivant les conditions édictées par le règlement de l'association ayant procédé au dépôt de cette marque, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation des textes susvisés ;
" 4) alors qu'en retenant que la dénomination Enclave des Papes évoquerait l'appellation d'origine contrôlée Châteauneuf-du-Pape et sèmerait « la confusion dans l'esprit du consommateur plus ou moins aguerri en la matière, cela d'autant plus facilement si celui-ci est de nationalité étrangère, a priori pas à même de comprendre les subtilités de notre langue », au motif qu'il ne serait pas contestable que le mot pape confère à lui seul à l'AOC Châteauneuf-du-Pape « une spécificité individualisante et capitale, en particulier sur un plan commercial » et que, employé « dans le secteur du vin et dans un cadre géographique déterminant pour ledit secteur, ici la Vallée du Rhône », le mot pape s'associe naturellement et immédiatement à l'AOC Châteauneuf-du-Pape sans prendre en compte ni la notoriété et l'ancienneté de la marque Enclave des Papes dont il est fait usage depuis près de 40 années sans que sa validité n'ait jamais été remise en cause, ni que les producteurs de Châteauneuf-du-Pape ou les deux syndicats de défense de cette AOC ne s'en sont jamais plaints auprès de l'administration des fraudes ou du parquet et sans rechercher si l'usage de la marque Enclave des Papes avait effectivement affecté le comportement économique des consommateurs, la cour d'appel a statué par voie de motifs généraux et abstraits et entaché sa décision de défaut de motifs ;
" 5) alors que, pour apprécier si une marque porte atteinte à une AOC au sens de l'article 45 du Règlement CE n° 479/ 2008 du 29 avril 2008 applicable en la cause en évoquant celle-ci ou en induisant le consommateur en erreur, il convient de prendre en considération l'attente présumée relative à la dénomination de la marque d'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ; qu'en retenant que la marque Enclave des Papes évoquerait l'appellation Châteauneuf-du-Pape et sèmerait « la confusion dans l'esprit du consommateur plus ou moins aguerri en la matière, cela d'autant plus facilement si celui-ci est de nationalité étrangère, a priori pas à même de comprendre les subtilités de notre langue », la cour d'appel, qui s'est ainsi référé à un consommateur qui n'est ni normalement informé ni raisonnablement attentif et avisé, a violé les textes susvisés ;
" 6) alors qu'en application de l'article 19 § 3 du Règlement (CE) n° 607/ 2009 du 14 juillet 2009, la protection d'une appellation d'origine s'applique à l'entière dénomination, y compris ses éléments constitutifs pour autant qu'ils soient distinctifs ; qu'en jugeant que la seule reprise du terme pape au sein de la marque Enclave des Papes
porterait atteinte à l'AOC Châteauneuf-du-Pape seule AOC de la vallée du Rhône à contenir le mot pape, sans rechercher si, pour des raisons notamment historiques, l'usage du mot pape n'était pas courant pour désigner des vins provenant de la basse vallée du Rhône, ancienne vallée des Papes, et si ce mot présentait un caractère distinctif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé " ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'usurpation d'appellation contrôlée, l'arrêt énonce que le mot " pape " confère à l'appellation d'origine contrôlée " Châteauneuf-du-Pape " une spécificité individualisante et capitale, notamment sur le plan commercial et, qu'employé dans le secteur d'activité du vin, de plus dans un cadre géographique déterminant, la vallée du Rhône, il s'associe naturellement et immédiatement à l'appellation d'origine contrôlée " Châteauneuf-du-Pape " ; que les juges ajoutent que l'utilisation de la dénomination " Enclave des Papes " ne peut qu'évoquer cette appellation, semant la confusion dans l'esprit du consommateur plus ou moins aguerri en la matière ; qu'enfin, ils retiennent que les documents publicitaires et les modalités de présentation des bouteilles attestent de la volonté réelle de renforcer les effets évocateurs de l'appellation d'origine contrôlée " Châteauneuf-du-Pape ", le constat étant fait de l'existence d'un volume très important de bouteilles vendues, surtout à l'exportation ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, nouveau et comme tel irrecevable en ses trois premières branches, doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation
des articles L. 214-1, L. 214-2 du code de la consommation, 9 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique en ce qui concerne la contravention connexe ;
" aux motifs que, sur la contravention, M. X... expose que le procès-verbal rédigé par les inspecteurs de la DGCCRF est daté du 15 février 2005, que le procureur de la République a décidé de l'ouverture d'une enquête préliminaire le 30 mars 2005, que les militaires de la gendarmerie chargés de l'enquête n'ont procédé qu'à un seul acte de poursuite, savoir son audition le 22 août 2005, que ces derniers ont établi leur procès-verbal de synthèse le 15 septembre 2005, que la citation à comparaître n'a été délivrée que le 19 octobre 2006, et soutenant qu'aucun acte de procédure n'a été accompli entre ces deux dernières dates, espacées de plus d'un an, conclut à l'extinction de l'action publique par voie de prescription, les griefs articulés à son encontre sur le fondement de l'article L. 214-2 du code de la consommation étant de nature contraventionnelle ; que, cependant, par soit-transmis en date du 21 septembre 2005, le procureur de la République a demandé au directeur départemental de la DGCCRF de lui faire part de ses observations au vu des déclarations du mis en cause et, dans le cas où l'infraction apparaîtrait caractérisée, de son avis sur l'opportunité des poursuites ; qu'en l'état de sa rédaction, ce soit-transmis doit être tenu par acte interruptif de prescription jusqu'à réception de l'avis sollicité ; que, par note datée du 20 décembre 2005, enregistrée le 21 décembre 2005 suivant, la direction départementale de l'administration susvisée, en réponse au soit-transmis, a fait connaître au procureur de la République qu'il estimait nécessaire l'engagement de poursuites devant le tribunal ; qu'ainsi, alors qu'entre cette dernière date et celle de l'établissement du mandement de citation, il ne s'est pas écoulé une année pleine, le moyen tiré de la prescription de l'action publique ne saurait valablement prospérer ;
" 1) alors que ne constitue pas un acte de poursuite interruptif de prescription un soit-transmis du procureur de la République demandant au directeur départemental de la DGCCRF de lui faire part de ses observations au vu des déclarations des mis en cause et, dans le cas où l'infraction apparaîtrait caractérisée, de son avis sur l'opportunité des poursuites ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2) alors que ne constitue pas en toute hypothèse un acte de poursuite interruptif de prescription une note établie par la direction départementale de la DGCCRF faisant connaître au procureur de la République qu'il estimait nécessaire l'engagement de poursuites devant le tribunal ; qu'en admettant même que le soit-transmis du procureur de la République, en date du 21 septembre 2005, ait pu interrompre la prescription, plus d'un an s'est écoulé entre cet acte et la citation à comparaître délivrée le 19 octobre sans que la note datée de la DGCCRF du 20 décembre 2005 ait pu interrompre la prescription ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de prescription de l'action publique relative à la contravention de présentation de nature à induire en erreur dont le prévenu a été déclaré coupable, l'arrêt énonce que le soit-transmis, en date du 21 septembre 2005, par lequel le procureur de la République a demandé au directeur départemental de la DGCCRF de lui faire part de ses observations et de son avis sur l'opportunité de poursuites, doit être considéré comme un acte interruptif de prescription jusqu'à réception de l'avis sollicité, lequel est parvenu à son destinataire le 21 décembre 2005 et a été suivi d'une citation à comparaître, en date du 19 octobre 2006 ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1, L. 214-1 et L. 214-2 du code de la consommation, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de publicité de nature à induire en erreur et de la contravention connexe de commercialisation de vins sous une présentation de nature à créer une confusion, en répression, l'a condamné à deux amendes de 5 000 et 400 euros ainsi qu'à des mesures de publication et l'a condamné à payer des dommages-intérêts au Syndicat intercommunal de défense viticole de l'appellation d'origine contrôlée Châteauneuf-du-Pape, à la Fédération des Syndicats de producteurs de Châteauneuf-du-Pape ainsi qu'à l'Institut national de l'origine et de la qualité ;
" aux motifs que, sur le délit de publicité de nature à induire en erreur, aux termes de l'article L. 121-1 du code de la consommation, est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs éléments ci-après :
existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la publicité ; qu'en l'espèce, il est plus précisément reproché au prévenu, sur le fondement du texte précité, d'avoir « effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur
en proposant des vins en laissant croire qu'ils provenaient d'une aire géographique protégée et en évoquant une appellation d'origine contrôlée à laquelle ils ne pouvaient prétendre » ; que l'examen des étiquettes, contre étiquettes et collerettes apposées sur les principales références commercialisées, annexées au dossier d'enquête de la DGCCRF permet de constater :
- que, sur les étiquettes et contre étiquettes, la dénomination « Enclave des Papes » est mise en évidence par l'utilisation de gros caractères et d'une couleur les distinguant nettement des autres mentions, notamment de celle réglementaire, Côtes-du-Rhone, alors placée seulement au-dessous de la première ;
- que certaines contre étiquettes ne portent que la mention Enclave des Papes pour désigner le vin ;
- que certaines contre étiquettes portent, outre la mention litigieuse, la représentation d'une carte correspondant exactement aux territoires des quatre communes de l'Enclave de Valreas et explication de quelques données historiques, à savoir par exemple : « JEAN XXII avait fait du vin de ce terroir
En achetant notre vignoble en 1317, il a constitué une propriété papale
» ou encore : « En 1317, JEAN XII, Pape d'Avignon, séduit par les vins de Valreas, en acquit les droits seigneuriaux, créant ainsi une enclave pontificale dans le royaume de France ;
- que la collerette placée sur l'une des références reprend en gros caractères la dénomination Enclave des Papes et porte mention suivante : « terroir silico-calcaire avec des sols issus d'anciennes moraines ;
que ces mêmes informations et indications sont reprises dans les fiches techniques utilisées lors des opérations de présentation des produits, notamment par les commerciaux, lesdites fiches, figurant également en annexe du dossier d'enquête, contenant en outre les mots très évocateurs de canton, de territoire, de terroir ; qu'il s'agit là à l'évidence de la manifestation d'une volonté bien affirmée d'amener le consommateur à croire que les vins portant la dénomination Enclave des Papes sont issus d'un terroir spécifique, d'une zone géographique bien déterminée ; que, par ailleurs, à la lecture des documents de promotion et de présentation de la vente des vins pour « l'union des vignerons de l'Enclave des Papes également annexés au dossier d'enquête, il peut être relevé, notamment :
- que diverses indications tendent à démontrer que la dénomination Enclave des Papes correspond non seulement à un terroir viticole déterminé mais aussi à une qualité spécifique des vins, fruit d'une discipline collectivement acceptée s'exprimant en ces termes : « Les vignerons de l'Enclave en sont tellement conscients (N. B : du souci de qualité) qu'ils ont délibérément défini, durci et contrôlé leurs propres règles de production (régies depuis 1937 au sein des Côtes-du-Rhône) pour garantir une qualité Enclave des Papes grâce à l'association des producteurs de l'Enclave des Papes ;
- qu'il y est insisté sur les critères que doivent présenter les vins pour mériter la dénomination Enclave des Papes, à savoir : « être d'appellation d'origine contrôlée, provenir exclusivement du vignoble de l'Enclave des Papes, à savoir les communes de Valreas, Visan, RicherencheS et Grillon, être élaborés et mis en bouteilles à l'intérieur de l'Enclave des Papes par les adhérents du groupement des producteurs de vins de l'Enclave des Papes, répondre à des mesures analytiques strictes, avoir subi avec succès l'épreuve du comité de dégustation du groupement, assisté obligatoirement des autorités professionnelles compétentes ;
- que l'association des producteurs de l'Enclave des Papes joue un rôle essentiel lors de la procédure de délivrance du label Enclave des Papes, celle-ci intervenant après vérification du respect d'un cahier des charges strict et sélection par trois jurys ; qu'il s'agit là encore d'une volonté affirmée de faire croire au consommateur que les vins commercialisés sous la dénomination Enclave des Papes répondent aux critères, notamment de qualité, exigés habituellement lors de l'octroi d'une AOC, que cette dénomination correspond à un territoire viticole bien délimité disposant de son appellation d'origine propre, celle-ci ayant reçu certification par l'Association des producteurs de l'Enclave des Papes, alors qu'en réalité, et le prévenu le sait parfaitement, il ne peut en être ainsi, l'Union des vignerons ayant été en effet invitée à plusieurs reprises mais en vain, en dernier lieu, en 2002, dans le cadre d'une médiation organisée par le procureur de la République de Carpentras, à régulariser enfin sa situation au regard de la réglementation relative aux AOC et l'Association ne pouvant délivrer de certification car n'étant pas reconnue comme organisme de certification officiel, un tel organisme au demeurant n'ayant pas à intervenir, les vins à AOC étant exclus de la procédure de certification de conformité ; qu'en l'état de toutes ces énonciations, le délit de publicité de nature à induire en erreur est caractérisé à l'encontre de M. X... ; que sur la contravention, que M. X..., exposant que le procès-verbal rédigé par les inspecteurs de la DGCCRF est daté du 15 février 2005, que le procureur de la République a décidé de l'ouverture d'une enquête préliminaire le 30 mars 2005, que les militaires de la gendarmerie chargés de l'enquête n'ont procédé qu'à un seul acte de poursuite, savoir son audition le 22 août 2005, que ces derniers ont établi leur procès-verbal de synthèse le 15 septembre 2005, que la citation à comparaître n'a été délivrée que le 19 octobre 2006, et soutenant qu'aucun acte de procédure n'a été accompli entre ces deux dernières dates, espacées de plus d'un an, conclut à l'extinction de l'action publique par voie de prescription, les griefs articulés à son encontre sur le fondement de l'article L. 214-2 du code de la consommation étant de nature contraventionnelle ; que, cependant, par soit-transmis, en date du 21 septembre 2005, le procureur de la République a demandé au directeur départemental de la DGCCRF de lui faire part de ses observations au vu des déclarations du mis en cause et, dans le cas où l'infraction apparaîtrait caractérisée, de son avis sur l'opportunité des poursuites ; qu'en l'état de sa rédaction, ce soit-transmis doit être tenu par acte interruptif de prescription jusqu'à réception de l'avis sollicité ; que, par note datée du 20 décembre 2005, enregistrée le 21 décembre 2005 suivant, la direction départementale de l'administration susvisée, en réponse au soit-transmis, a fait connaître au procureur de la République qu'il estimait nécessaire l'engagement de poursuites devant le tribunal ; qu'ainsi, alors qu'entre cette dernière date et celle de l'établissement du mandement de citation, il ne s'est pas écoulé une année pleine, le moyen tiré de la prescription de l'action publique ne saurait valablement prospérer ; que les faits de commercialisation de vins sous une présentation de nature à créer une confusion sont caractérisés à l'encontre de M. X... au constat qu'il a été procédé pour l'exercice considéré à la vente de 982 603 bouteilles sur lesquelles étaient apposées les étiquettes, contre étiquettes et collerettes retenues ci-avant comme supports d'une publicité de nature à induire en erreur ;
" alors qu'en affirmant qu'il aurait été procédé pour l'exercice considéré à la vente de 982 603 bouteilles sur lesquelles étaient apposées les étiquettes, contre étiquettes et collerettes supports d'une publicité de nature à induire en erreur » et en faisant référence à des documents de promotion et de représentation de la vente des vins pour l'Union des vignerons de l'Enclave des Papes, sans répondre aux conclusions du demandeur faisant valoir que les documents litigieux fondant les poursuites pour publicité trompeuse n'étaient plus disponibles sur le marché au moment du contrôle, s'agissant d'archives stockées dans les bureaux du Cellier de l'Enclave des Papes, dont M. X... était le président, que ces documents n'ont plus été mis à la disposition des consommateurs après l'année 2000 et que, de plus, les mentions apportées sur une contre étiquette saisie dans les archives (et non apposée sur une bouteille commercialisée au moment du contrôle) ont cessé d'être utilisées à partir de 1999 suite à une recommandation de la répression des fraudes, la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de motifs " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments le délit et la contravention dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.