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Décisions

Cass. com., 11 juin 1991, n° 89-19.872

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Hatoux

Rapporteur :

Mme Pasturel

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

Me Blanc, Me Choucroy

Aix-en-Provence, du 1 juill. 1989

1 juillet 1989

Attendu selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 mai 1989), que la société Promo 06 est devenue sous-locataire d'un local commercial dont la société Tosello était locataire principale ; que celle-ci, en vertu de la clause du bail suivant laquelle les locaux étaient destinés à l'exploitation d'un magasin à rayons multiples pour la vente de certains produits déterminés, toutes autres activités étant interdites, et notamment la vente de meubles et cassettes, a fait sommation à la société Promo 06 le 16 février 1987, de supprimer les rayons proposant à la vente ces deux catégories d'articles dont la présence avait été constatée par huissier, ladite sommation visant en outre la clause résolutoire insérée au bail ; que par ailleurs elle a, le 24 février 1987, en visant également la clause résolutoire, délivré à sa sous-locataire un commandement de payer une certaine somme à titre de loyers arriérés ; que par ordonnance du 23 juillet 1987, le juge des référés, retenant les deux infractions au bail, a constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de la location en ordonnant l'expulsion de la sous-locataire ; que celle-ci, qui avait été mise en redressement judiciaire le18 septembre 1987 après avoir fait appel de l'ordonnance susvisée, a soutenu que la demande de la société Tosello était irrecevable eu égard à l'ouverture de la procédure collective ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches ;

Attendu que la société Tosello fait grief à l'arrêt d'avoir, par infirmation de la décision entreprise, déclaré irrecevable la demande en constatation de la résiliation du bail en tant qu'elle reposait sur le défaut de paiement des loyers ; alors, selon le pourvoi, d'une part, que si l'article 25 du décret du 30 septembre 1953 prévoit qu'au cas où un commandement de payer le loyer visant une clause résolutoire de plein droit est demeurée infructueux passé le délai d'un mois, le juge, saisi d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues par l'article 1244 du Code civil, peut suspendre la réalisation et les effets de la clause de résiliation en accordant des délais au preneur, manque de base légale au regard de ce texte, l'arrêt qui, se bornant à rappeler la règle légale et n'accordant aucun délai de paiement à la société Promo 06, considère que la résiliation du bail litigieux n'était pas acquise dès l'expiration du délai d'un mois de la signification par la bailleresse du commandement de payer demeuré infructueux ; alors, d'autre part, que viole les dispositions de l'article 38 de la loi du 25 janvier 1985, l'arrêt qui en fait application à une hypothèse où les effets d'une clause résolutoire de plein droit étaient acquis avant le prononcé du jugement déclaratif de redressement judiciaire ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu que le commandement de payer avait pour cause des loyers échus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de sorte que l'action tendant à la constatation de la résiliation du bail, qui n'avait pas encore fait l'objet, à la date de cette ouverture, d'une décision passée en force de chose jugée, ne pouvait plus être poursuivie ; qu'elle a, ainsi, abstraction faite des motifs surabondants que critique la première branche, justifie légalement sa décision du chef critiqué ; D'où il suit que, le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches ;

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir, par infirmation de l'ordonnance entreprise, débouté la société Tosello de sa demande tendant à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire en raison de l'infraction commise par le sous-locataire aux dispositions du contrat relatives à la destination des lieux, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le bail litigieux ayant été conclu pour l'exploitation d'un fonds de commerce de magasin, à rayons multiples de vêtements, chaussures, papeterie, librairie, livres, bazar, produits de beauté, colifichets, articles de Paris, tous produits et accessoires nécessaires à la parure de l'homme, de la femme ou de l'enfant, et pendant les fêtes de bibelots et chocolats, avec la précision qu'étaient expressément interdites les activités concernant notamment la vente de meubles, et de matériels audiovisuels, lesquelles ne sont indiscutablement ni connexes, ni complémentaires de celles autorisées, ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 848 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel qui, statuant en référé, ne s'estime pas compétente pour vérifier si étaient acquis les effets de la clause résolutoire figurant au bail du fait de l'exercice par le preneur des deux activités interdites sus-mentionnées ; et alors, d'autre part, qu'en statuant ainsi, l'arrêt manque aussi de base légale au regard des dispositions des articles 25, 34 et 35 du décret du 30 septembre 1953 ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions que la méconnaissance de la procédure prévue à l'article 34, alinéa 2, du décret du 30 septembre 1953 ait été invoquée ; qu'en cet état du litige, l'arrêt a retenu que la stipulation du bail prohibant l'exercice de toute activité autre que celle de magasin à rayons multiples pour la vente de certaines catégories de produits se heurtait à l'article 35 du décret du 30 septembre 1953, qui édicte la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions de l'article 34 du même décret relatives à la possibilité pour le locataire d'adjoindre à l'activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires ; que, dès lors, la cour d'appel a pu décider que l'obligation à laquelle la société Promo 06 s'était vu reprocher d'avoir manqué, ce qui avait entraîné la mise en oeuvre par la société Tosello de la clause résolutoire, était sérieusement contestable ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS ;

REJETTE le pourvoi.