Cass. 1re civ., 4 décembre 1973, n° 70-13.808
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pluyette
Rapporteur :
M. Joubrel
Avocat général :
M. Schmelck
SUR LE PREMIER MOYEN :
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE, LE 4 MARS 1965, L'EXPLOSION D'UNE BOUTEILLE DE CHLORE, APPARTENANT A LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE ET PLACEE DANS SES LOCAUX, PROVOQUA L'INTOXICATION DE PLUSIEURS EMPLOYES D'UNE ENTREPRISE VOISINE ;
QUE CETTE BOUTEILLE AVAIT ETE VENDUE EN 1946 PAR LA SOCIETE POULET, SON CONSTRUCTEUR ;
QUE LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE ASSIGNA LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE EN REMBOURSEMENT DES PRESTATIONS VERSEES PAR ELLE AUX VICTIMES ;
QUE CES DERNIERES, ASSIGNEES PAR LA CAISSE EN DECLARATION DU JUGEMENT COMMUN, SOLLICITERENT DE LEUR COTE, L'INDEMNISATION COMPLEMENTAIRE DE LEUR PREJUDICE ;
QUE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE APPELA EN GARANTIE LA SOCIETE POULET ;
QUE LA COUR D'APPEL A RETENU LA RESPONSABILITE DE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE ET DEBOUTE CELLE-CI DE SON RECOURS EN GARANTIE ;
ATTENDU QU'IL EST D'ABORD FAIT GRIEF A LA JURIDICTION DU SECOND DEGRE D'AVOIR DECLARE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE RESPONSABLE DE L'ACCIDENT, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE, DANS SES ECRITURES D'APPEL, QUI SERAIENT DEMEUREES SANS REPONSE, LADITE SOCIETE AVAIT INVOQUE LE DEDOUBLEMENT DE LA GARDE DE L'ENGIN DANGEREUX, LA GARDE DE LA STRUCTURE DE LA CHOSE DEMEURANT A LA CHARGE DU CONSTRUCTEUR, ET QUE LES JUGES D'APPEL, TOUT EN OMETTANT DE STATUER SUR LE MOYEN AINSI INVOQUE, AURAIENT FAIT UNE FAUSSE APPLICATION DE L'ARTICLE 1384, ALINEA 1ER, DU CODE CIVIL, EN METTANT A LA CHARGE DE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE, " LA FAVEUR DE CONSIDERATIONS D'ORDRE GENERAL NON APPROPRIEES A L'ESPECE ", UNE RESPONSABILITE DE GARDIENNE, BIEN QUE LES POUVOIRS DE DIRECTION ET DE CONTROLE DE LA STRUCTURE EUSSENT TOUJOURS ETE AUX MAINS DU FABRICANT, ET QUE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE N'AURAIT EU, POUR SA PART, QUE LA RESPONSABILITE DE LA MANIPULATION DE CETTE CHOSE, ET N'AURAIT PU, DE CE FAIT, ETRE DECLAREE RESPONSABLE DE DOMMAGES CAUSES PAR LA STRUCTURE DE CELLE-CI ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, QUI RELEVE NOTAMMENT QUE LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE, PROPRIETAIRE DE LA BOUTEILLE, EN AVAIT EGALEMENT "LA DETENTION MATERIELLE DANS SES LOCAUX", ET QUE, DE SURCROIT, "LA CHARGE DE L'EPREUVE DE L'APPAREIL N'INCOMBAIT PLUS AU CONSTRUCTEUR", EN A JUSTEMENT DEDUIT, REPONDANT AINSI AUX CONCLUSIONS INVOQUEES, QUE, AU MOMENT DE L'EXPLOSION, LADITE SOCIETE AVAIT, OUTRE LA PROPRIETE, "L'USAGE, LE CONTROLE ET LA DIRECTION" DE LA CHOSE ;
QUE, DES LORS, ELLE POUVAIT SEULE ETRE TENUE POUR LA CHOSE ;
QUE, DES LORS, ELLE POUVAIT SEULE ETRE TENUE POUR GARDIENNE ET ETAIT, EN CETTE QUALITE, ENTIEREMENT RESPONSABLE VIS-A-VIS DES VICTIMES ET DE LA SECURITE SOCIALE ;
QUE LE MOYEN NE PEUT DONC ETRE ACCUEILLI EN AUCUN DE SES GRIEFS ;
ET SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REJETE LE RECOURS EN GARANTIE EXERCE PAR LA SOCIETE DES EAUX DE MARSEILLE A L'ENCONTRE DE LA SOCIETE POULET, ALORS QUE, LES DISPOSITIONS DU CODE CIVIL RELATIVES A LA GARANTIE DES VICES CACHES N'IMPOSANT AUCUN DELAI PARTICULIER A L'ACQUEREUR POUR METTRE EN OEUVRE LA GARANTIE DU VENDEUR, CE DERNIER NE BENEFICIE D'AUCUNE PRESOMPTION D'IRRESPONSABILITE VINGT ANS APRES LA VENTE DE L'OBJET, ET QUE LA COUR D'APPEL N'AURAIT PU, SANS ENTACHER SA DECISION D'UNE CONTRADICTION DE MOTIFS, DECIDER, D'APRES LE MOYEN, "QUE L'ACCIDENT AVAIT ETE EXCLUSIVEMENT PRODUIT PAR LES CORROSIONS CONSTATEES", BIEN QU'ELLE AIT ELLE-MEME RELEVE QUE L'EXAMEN DE LA BOUTEILLE AVAIT MONTRE CERTAINES INSUFFISANCES ET QUE LA CHARGE DE L'EPREUVE DE L'APPAREIL, QUI INCOMBAIT A L'UTILISATEUR, AVAIT ETE REGULIEREMENT EXECUTEE PAR CELUI-CI, SANS QUE, POUR AUTANT, L'USURE APPARAISSE DE FACON A ENTRAINER LA MISE HORS DE SERVICE ;
QU'IL EST EGALEMENT SOUTENU QUE, S'AGISSANT D'UN RECOURS EN GARANTIE POUR VICES CACHES DE LA BOUTEILLE, IL N'Y AVAIT PAS A RECHERCHER UNE FAUTE DE LA PART DE LA SOCIETE POULET ET QUE LA SIMPLE CONSTATATION DE DEFAUTS INHERENTS A LA STRUCTURE DE LA CHOSE VENDUE AURAIT DU SUFFIRE A ENTRAINER LE JEU DE CETTE GARANTIE ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, QUI N'A PAS DECLARE LE RECOURS EN GARANTIE IRRECEVABLE, FAUTE D'AVOIR ETE EXERCE AVANT L'EXPIRATION DU BREF DELAI EDICTE PAR L'ARTICLE 1648 DU CODE CIVIL, N'A FAIT ETAT DE LA TRES LONGUE UTILISATION DE L'APPAREIL APRES SA VENTE QUE POUR RETENIR, SUR LE FOND, QUE SI "L'EXAMEN DE LA BOUTEILLE A MONTRE DES INSUFFISANCES, NOTAMMENT DANS LA QUALITE DE LA SOUDURE ON A EGALEMENT OBSERVE DES CORROSIONS NOTABLES, QUI ONT PU FAVORISER LA RUPTURE", ET QUE "DE TELLES CORROSIONS PEUVENT PROVENIR DE L'USAGE DE LA BOUTEILLE DURANT AUTANT D'ANNEES", LADITE BOUTEILLE AYANT, "PENDANT PLUS DE DIX-HUIT ANS REMPLI EXACTEMENT SON ROLE" ET AYANT, EN OUTRE, ETE VERIFIEE SEPT FOIS ;
QUE LA JURIDICTION DU SECOND DEGRE ENONCE EGALEMENT QUE L'EXPLOSION POURRAIT ETRE IMPUTABLE A "L'EXCES DE REMPLISSAGE DE LA BOUTEILLE, EXECUTE PAR UNE ENTREPRISE, NON EN CAUSE", OU A UNE "EXPOSITION PROLONGEE AU SOLEIL", LES DIFFERENTES CAUSES POSSIBLES AYANT D'AILLEURS "PU CONCOURIR AU DOMMAGE" ;
QUE, PAR DE TELS MOTIFS, LES JUGES D'APPEL, QUI NE SE SONT NULLEMENT CONTREDITS, ONT PU ESTIMER QUE LA PREUVE DU LIEN DE CAUSALITE ENTRE LE VICE ORIGINAIRE DE LA CHOSE ET LE DOMMAGE N'ETAIT PAS ETABLIE, ET ONT, DES LORS, LEGALEMENT JUSTIFIE LEUR DECISION, ABSTRACTION FAITE DU MOTIF SURABONDANT CRITIQUE PAR LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN ;
QU'IL S'ENSUIT QUE LE SECOND MOYEN N'EST PAS MIEUX FONDE QUE LE PREMIER ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 3 JUILLET 1970 PAR LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE.