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Décisions

Cass. com., 5 mai 1982, n° 80-11.490

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauvageot

Rapporteur :

M. Bonnefous

Avocat général :

M. Laroque

Avocat :

Me Riché

Paris, ch. 1 A, du 27 févr. 1980

27 février 1980

SUR LES TROIS MOYENS, PRIS EN LEURS DIVERSES BRANCHES REUNIES :

ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 27 FEVRIER 1980) QUE LA SOCIETE AMERICAN TOBACCO, AUX DROITS DE LAQUELLE SE TROUVE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS, A DEPOSE EN FRANCE, LE 9 DECEMBRE 1919, LA MARQUE PALL Z... POUR DESIGNER LES TABACS ;

QUE, PRETENDANT QUE L'USAGE DE SA MARQUE REMONTAIT AU DEBUT DU 20EME SIECLE, LA SOCIETE AMERICAN BRANDS A ASSIGNE EN DOMMAGES-INTERETS, POUR CONTREFACON, LA SOCIETE ROTHMANS OF PALL Z... (LA SOCIETE ROTHMANS) TITULAIRE DE LA MARQUE ROTHMANS OF PALL Z... X... EN FRANCE LE 4 JUIN 1919 ET DE DIVERSES AUTRES MARQUES INTERNATIONALES COMPORTANT LES TERMES PALL Z... Y... DE 1965 A 1968 ;

QUE LA SOCIETE ROTHMANS ET SES LICENCIEES, LA SOCIETE TURMAC TOBACCO ET LA SOCIETE INTERNATIONAL SALES AND IMPORT CORPORATION BV ONT CONTESTE L'ANTERIORITE DES DROITS DE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS ET, FAISANT ETAT DE CONVENTIONS INTERVENUES ENTRE LA SOCIETE AMERICAN TOBACCO OU LA SOCIETE AMERICAN BRANDS ET LA SOCIETE BRITISH AMERICAN TOBACCO (LA SOCIETE BAT), ONT DEMANDE LE RENVOI DE L'AFFAIRE POUR INTERPRETATION, DEVANT LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES ;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR ACCUEILLI LA DEMANDE DE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS, EN PREMIER LIEU, AUX MOTIFS, SELON LE POURVOI, QUE LE LITIGE CONCERNE EXCLUSIVEMENT LA PROPRIETE EN FRANCE DE LA MARQUE PALL Z... ET QUE L'ILLICEITE DONT POURRAIENT ETRE ENTACHEES AU REGARD DU TRAITE DE ROME LES DIVERS ACCORDS INTERVENUS ENTRE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS ET LA SOCIETE BAT NE POURRAIT EN AUCUN CAS AVOIR POUR EFFET DE MODIFIER AU BENEFICE DE LA SOCIETE ROTHMANS L'APPLICATION DES REGLES DU DROIT FRANCAIS DES MARQUES DE FABRIQUE, ET QUE LES ACCORDS LITIGIEUX, SE PRESENTANT COMME UNE TRANSACTION AYANT CONDUIT A UNE CESSION DE MARQUE POUR LA FRANCE APPARAISSENT COMME UNE OPERATION PARFAITEMENT LEGITIME DANS SON OBJET, ALORS, D'UNE PART, QUE L'ILLICEITE DONT POUVAIENT ETRE ENTACHES AU REGARD DU TRAITE DE ROME LES ACCORDS SERVANT DE FONDEMENT AUX DROITS INVOQUES PAR LA SOCIETE AMERICAN BRANDS SUR LADITE MARQUE ETAIT AU CONTRAIRE DE NATURE A AFFECTER CES DROITS EN EUX-MEMES, QU'EN EFFET L'ARTICLE 85-1 DUDIT TRAITE L'EMPORTE SUR LA LEGISLATION FRANCAISE ET DECLARE NULS DE PLEIN DROIT, NOTAMMENT, LES ACCORDS RELATIFS A UN DROIT DE MARQUE SUSCEPTIBLES D'AVOIR POUR EFFET DE CLOISONNER LE MARCHE COMMUN, QU'EN ECARTANT PAR PRINCIPE, EN L'ESPECE, LES CONSEQUENCES EVENTUELLES DE CETTE ILLICEITE, LA COUR D'APPEL A VIOLE CET ARTICLE 85-1 DU TRAITE, ALORS, D'AUTRE PART, QU'INDEPENDAMMENT DE LEUR OBJET, DES ACCORDS PEUVENT ETRE ILLICITES AU REGARD DE L'ARTICLE 85 DU TRAITE DE ROME DU SEUL FAIT QU'ILS ONT UN EFFET SENSIBLE SUR LE JEU DE LA CONCURRENCE A L'INTERIEUR DU MARCHE COMMUN, QU'EN S'ATTACHANT UNIQUEMENT A L'OBJET DES ACCORDS LITIGIEUX, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SON ARRET, FACE AUX EXIGENCES DUDIT TEXTE, ET ALORS QUE, DE SURCROIT, EN VERTU DE L'ARTICLE 85, PARAGRAPHE 3, DU TRAITE DE ROME ET DE L'ARTICLE 9, ALINEA 1ER DU REGLEMENT CEE-17 DU CONSEIL EN DATE DU 6 FEVRIER 1962, LA COMMISSION EST SEULE COMPETENTE POUR APPRECIER DANS LEUR OBJET MEME LA LICEITE ET LA LEGITIMITE DES ACCORDS DE LA NATURE DE CEUX QUI SE RENCONTRAIENT EN L'ESPECE, QU'EN SE LIVRANT ELLE-MEME A CETTE APPRECIATION, LA COUR D'APPEL A ENCORE MECONNU CET ARTICLE 85-3 DU TRAITE DE ROME ET CE REGLEMENT, EN DEUXIEME LIEU, AU MOTIF QUE LE DROIT DE LA SOCIETE BAT AURAIT EN TOUTE HYPOTHESE FAIT OBSTACLE AUX PRETENTIONS ACTUELLES DE LA SOCIETE ROTHMANS, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE LA COUR D'APPEL NE POUVAIT, SANS VIOLER LA LOI DU 23 JUIN 1857 ET LA LOI DU 31 DECEMBRE 1964, OPPOSER A LA SOCIETE ROTHMANS AU PROFIT DE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS DES DROITS DE MARQUE QUI AURAIENT ETE DETENUS PAR UN TIERS ;

ET, EN TROISIEME LIEU, AUX MOTIFS QUE LES DOCUMENTS VERSES AUX DEBATS CONSTITUENT LA PREUVE DE LA REALITE ET DE LA TENEUR DE LA CONVENTION DU 30 AVRIL 1913 PAR LAQUELLE LA SOCIETE BUTLER AND BUTLER A, LORS DE SA DISSOLUTION, CEDE TOUS SES ACTIFS A LA SOCIETE AMERICAN TOBACCO (AUX DROITS DE QUI EST LA SOCIETE AMERICAN BRANDS) AINSI QUE DE L'ACTE DU MEME JOUR OPERANT TRANSFERT DE LA MARQUE PALL Z... SANS AUCUNE RESTRICTION NI RESERVE ET QUE CE TRANSFERT, INTERVENU AVANT QUE SOIT ORGANISE EN FRANCE UN SYSTEME SPECIAL DE PUBLICITE, Y ETAIT OPPOSABLE AUX TIERS SANS AUCUNE FORMALITE, DES LORS QU'IL NE CONSTITUAIT PAS L'ACCESSOIRE DE LA CESSION D'UN FONDS DE COMMERCE EXPLOITE SUR LE TERRITOIRE FRANCAIS, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QUE LA COUR D'APPEL NE POUVAIT SANS CONTRADICTION ENONCER QUE LA CONVENTION DU 30 AVRIL 1913 NE CORRESPONDAIT PAS A LA CESSION D'UN FONDS DE COMMERCE ET CONSTATER EN MEME TEMPS QUE, PAR CETTE CESSION, L'UNE DES SOCIETES COMMERCIALES EN PRESENCE CEDAIT TOUS SES ACTIFS A L'AUTRE, QUE, PAR CETTE CONTRADICTION, L'ARRET VIOLE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 455 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LES MEMES MOTIFS, PAR LEUR DEFAUT DE COHERENCE, NE PERMETTENT PAS EN TOUT CAS A LA COUR DE CASSATION D'EXERCER SON CONTROLE SUR LA NATURE EXACTE DE LA CESSION LITIGIEUSE ET PARTANT SUR LE RESPECT EN L'ESPECE DES DISPOSITIONS DE LA LOI DU 17 MARS 1909 COMPLETEE PAR LE DECRET DU 28 AOUT 1909 S'AGISSANT DE L'OPPOSABILITE AUX TIERS DE CETTE MEME CESSION ET S'AGISSANT DE LA MARQUE COMPRISE DANS CELLE-CI ;

MAIS ATTENDU QU'AYANT CONSTATE QUE, PAR UN USAGE PROLONGE ET CONSTANT, LA SOCIETE AMERICAINE BUTLER AND BUTLER AVAIT ACQUIS A COMPTER DE L'ANNEE 1910 LA PROPRIETE DE LA MARQUE PALL Z... ET QUE CETTE SOCIETE AVAIT, PAR CONVENTION DU 30 AVRIL 1913, CEDE TOUS SES ACTIFS A LA SOCIETE AMERICAN TOBACCO, PUIS, PAR ACTE DU MEME JOUR, TRANSFERE A LA MEME SOCIETE LA MARQUE PALL Z... SANS AUCUNE RESTRICTION NI RESERVE, LA COUR D'APPEL, QUI N'A PAS ENONCE QUE LA CONVENTION DU 30 AVRIL 1913 NE CORRESPONDAIT PAS A LA CESSION D'UN FONDS DE COMMERCE, NE S'EST PAS CONTREDITE DES LORS QU'ELLE A RELEVE SEULEMENT QUE LE TRANSFERT DE LA MARQUE NE CONSTITUAIT PAS L'ACCESSOIRE DE LA CESSION D'UN FONDS DE COMMERCE EXPLOITE SUR LE TERRITOIRE FRANCAIS ;

QU'ELLE A DEDUIT A BON DROIT DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS, ABSTRACTION FAITE DE TOUS AUTRES MOTIFS SURABONDANTS, QUE LE TRANSFERT DE LA MARQUE, INTERVENU AVANT QUE SOIT ORGANISE EN FRANCE UN SYSTEME SPECIAL DE PUBLICITE, Y ETAIT OPPOSABLE AUX TIERS SANS AUCUNE FORMALITE ET QUE LE DROIT DE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS SUR SA MARQUE PRIMAIT CELUI QUE LA SOCIETE ROTHMANS PRETENDAIT TIRER DE SON DEPOT DU 4 JUIN 1919 ;

ATTENDU, EN OUTRE, QU'AYANT JUSTIFIE SA DECISION PORTANT SUR L'ANTERIORITE DE LA MARQUE DE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS PAR LES SEULES CONVENTIONS PASSEES ENTRE LA SOCIETE BUTLER AND BUTLER ET LA SOCIETE AMERICAN TOBACCO, LA COUR D'APPEL, EN ENONCANT QUE L'ILLICEITE, DONT POURRAIENT ETRE ENTACHES, AU REGARD DU TRAITE DE ROME, LES DIVERS ACCORDS INTERVENUS ENTRE LA SOCIETE AMERICAN BRANDS ET LA SOCIETE BAT, NE POURRAIT EN AUCUN CAS AVOIR POUR EFFET DE MODIFIER AU BENEFICE DE LA SOCIETE ROTHMANS L'APPLICATION DES REGLES DU DROIT FRANCAIS DES MARQUES DE FABRIQUE, N'A FAIT, DANS LES LIMITES DE SA COMPETENCE, ET ABSTRACTION FAITE DE TOUS AUTRES MOTIFS SURABONDANTS, QUE TIRER LES CONSEQUENCES DE SA DECISION SUR L'ANTERIORITE ET A PU EN DEDUIRE QU'IL N'EXISTAIT PAS DE DIFFICULTE SERIEUSE RENDANT UTILE UNE CONSULTATION DE LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES ;

QUE LES MOYENS NE SONT FONDES EN AUCUNE DE LEURS BRANCHES ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 27 FEVRIER 1980 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.