Cass. 1re civ., 6 mars 2013, n° 12-13.340
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pluyette
Avocats :
Me Bouthors, Me Copper-Royer, SCP Yves et Blaise Capron
Sur le moyen unique pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par actes des 12 avril 2000 et 29 juin 2002, M et Mme Jean X... ont donné à leur fille Mme Anne-Marie X... diverses parcelles sises à Saint Jean Poutge (Gers), ces deux actes comportant une clause d'inaliénabilité et prévoyant un droit de retour au donateur en cas de pré-décès du donataire ; que ces biens ont fait l'objet d'une saisie immobilière au profit de la banque populaire occitane, la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées Gascogne étant un créancier inscrit ; que, par jugement du 27 juillet 2011, le juge de l'exécution a autorisé la vente des biens saisis et ordonné leur vente forcée ;
Attendu que, pour confirmer ce jugement, l'arrêt retient que Mme X... ne développant un moyen qu'en rapport avec le bien cadastré section A n° 762, passant sous silence les quatre parcelles faisant l'objet de la donation du 29 juin 2002 et qui sont pourtant concernées par la procédure de saisie immobilière, n'allègue donc pas et a fortiori ne prouve pas d'intérêt sérieux et légitime pour la validité de la clause d'inaliénabilité afférente à ces quatre parcelles et que, pour établir cet intérêt relativement au cinquième bien concerné par la procédure, elle soutient que "la maison" cadastrée section A n° 762 est enclavée dans la propriété agricole familiale, raison pour laquelle les donateurs ont prévu un droit de retour sur le fondement de l'article 951 du code civil, cette argumentation sur la raison d'être du droit de retour ou autrement présenté sur l'intérêt sérieux et légitime des donateurs justifiant la clause d'inaliénabilité étant manifestement infondée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions d'appel déposées le 22 septembre 2011, Mme X... faisait état des deux actes de donation rappelant le descriptif de toutes les parcelles concernées et après avoir invoqué l'état d'enclave d'une parcelle et l'existence d'une servitude de passage énonçait que : "les clauses d'inaliénabilité ont donc pour fonction d'assurer l'efficacité du droit de retour et les rendre ainsi légitimes et valables", la cour d'appel a dénaturé les termes clairs de ce document ;
Sur le moyen unique pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 900-1 du code civil ;
Attendu que, pour autoriser la vente de l'ensemble immobilier, l'arrêt retient, par motif adopté, que Mme X... n'alléguait aucun intérêt légitime et sérieux justifiant le maintien actuel de la clause d'inaliénabilité ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'intérêt de cette clause s'apprécie au jour où elle a été stipulée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 951 du code civil ;
Attendu que, pour faire droit à la demande des créanciers, l'arrêt retient encore que Mme X... qui se prévaut des clauses d'inaliénabilité et de droit de retour conventionnel au donateur doit démontrer que ces clauses sont justifiées par un intérêt sérieux et légitime, dès lors qu'elles dérogent au principe de la libre disposition des biens ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la validité de la clause prévoyant un droit de retour conventionnel au donateur n'est pas soumise à l'existence d'un intérêt sérieux et légitime, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en nullité de l'hypothèque et de la procédure de saisie immobilière pour l'ensemble immobilier sis à Saint Jean Poutge, autorise la vente de cette ensemble et en ordonne la vente forcée, l'arrêt rendu le 30 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.