Cass. 3e civ., 7 juillet 2010, n° 09-14.579
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cachelot
Rapporteur :
M. Pronier
Avocat général :
M. Cuinat
Avocats :
Me Foussard, SCP Gaschignard
Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 3 décembre 2008 et 24 février 2009), que, par acte du 23 novembre 1981, la société Relix, aux droits de laquelle se trouve Mme X, a conclu avec la Société immobilière d'économie mixte de la ville de Paris (SIEMP), un bail à construction par lequel la société Relix, propriétaire d'un terrain le donnait en location à la SIEMP qui s'engageait à y édifier, à ses frais, après démolition des existants, un bâtiment de cinq étages pour partie à usage commercial et pour partie à usage d'habitation ou professionnel ; que le bail était consenti pour une durée de 23 ans commençant à courir le 1er janvier 1982 et au prix annuel de 58 540 francs payable par trimestre ; que le bailleur promettait de vendre le terrain à la SIEMP, à charge pour celle-ci de notifier son acceptation dans les six mois précédent le dernier trimestre du bail soit entre le 1er avril et le 30 septembre 2004, le prix de la vente, si elle se réalisait, étant fixé à dix années de loyer tel que ce loyer sera dû en fonction de la clause de révision pour chacune des deux dernières années du bail ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 septembre 2004, reçue par Mme X le 29 septembre 2004, la SIEMP a notifié son intention d'acquérir aux clauses et conditions prévues à l'acte du 23 novembre 1981 ; que Mme X a refusé la vente en se prévalant du caractère lésionnaire du prix ; que la SIEMP a assigné Mme X en réalisation forcée de la vente ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1674 du code civil, ensemble l'article 1675 du même code ;
Attendu que si le vendeur a été lésé de plus des sept douzièmes dans le prix d'un immeuble, il a le droit de demander la rescision de la vente, quand même il aurait expressément renoncé dans le contrat à la faculté de demander cette rescision, et qu'il aurait déclaré donner la plus-value ; que pour savoir s'il y a lésion de plus de sept douzièmes, il faut estimer l'immeuble suivant son état et sa valeur au moment de la vente ;
Attendu que pour déclarer parfaite la vente intervenue entre Mme X et la SIEMP au prix de 114 598,80 euros, ordonné la réitération de cette vente par acte authentique et débouter Mme X de ses demandes, l'arrêt retient que l'acte du 23 novembre 1981 comporte plusieurs conventions qui forment un ensemble indivisible, à savoir un bail permettant à la SIEMP, preneuse, de prendre la jouissance du terrain avec l'obligation d'en faire édifier un bâtiment, après démolition des anciennes constructions existant sur le terrain et, en fin de bail, une promesse de vente du terrain d'assiette, qu'il a été convenu que la vente, si elle se réalise, aura lieu moyennant un prix équivalent à dix années de loyers du bail à construction en sorte que le transfert de la propriété du terrain d'assiette quoique reportée en fin de bail serait payé sur la base des loyers réglés, cette clause rendant les deux opérations indissociables, et que le prix résiduel était calculé sur des loyers révisés, ce qui confère à la vente un caractère aléatoire interdisant l'application des articles 1674 et 1675 du code civil ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent à caractériser l'indivisibilité entre le bail à construction et la vente et alors que l'aléa doit s'apprécier au jour de la réalisation de la vente, soit en l'espèce au jour de la levée de l'option, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 décembre 2008 rectifié le 24 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.