Cass. com., 24 mars 1980, n° 78-12.877
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vienne
Rapporteur :
M. Jonquères
Avocat général :
M. Toubas
Avocat :
M. Calon
SUR LES TROIS MOYENS REUNIS, PRIS EN LEURS DIVERSES BRANCHES :
ATTENDU QUE, SELON L'ARRET ATTAQUE (COLMAR, 11 AVRIL 1978), D'UNE PART, LA MARQUE MIGROS A ETE DEPOSEE LE 23 MAI 1928 SOUS LE N 135.521 A L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE (INPI) PAR LA SOCIETE MAX ET CHARLES LEVY QUI UTILISAIT CETTE DENOMINATION COMME ENSEIGNE DEPUIS 1923, QUE CE DEPOT A ETE RENOUVELE A L'INPI LES 8 MARS 1946 ET 26 MAI 1954, QUE CETTE SOCIETE, DEVENUE EN 1954 SOCIETE M. ET CH. LEVY-MIGROS, A FAIT APPORT, LE 31 DECEMBRE 1959, A LA SUITE D'UNE FUSION PAR ABSORPTION DE SES BIENS, A UNE SOCIETE ELLE-MEME ABSORBEE EN 1967 PAR LA SOCIETE HAERINGER-MIGROS-AGAM (HMA) , QUE LA MARQUE MIGROS, RESTEE ATTACHEE AU FONDS DE COMMERCE INITIAL, A SUIVI LE SORT DES SOCIETES ABSORBEES SANS QUE LE TRANSFERT DE CETTE MARQUE SOIT INSCRIT AU REGISTRE NATIONAL DES MARQUES, QUE LES 2 MARS ET 25 JUIN 1968, LA SOCIETE HMA A RENOUVELE LE DEPOT DE LA MARQUE AUPRES DE L'INPI EN INVOQUANT, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 35, ALINEA 3, DE LA LOI DU 31 DECEMBRE 1967, LES DROITS ANTERIEURS VENANT DE SON USAGE ET DE CELUI DE SES AUTEURS REMONTANT AU 23 MAI 1928, QUE, LE 7 AOUT 1970, LA HMA A FAIT INSCRIRE A L'INPI LES PRECEDENTES TRANSFORMATIONS DE SOCIETES ; QUE, D'AUTRE PART, LA SOCIETE DE DROIT SUISSE CREEE EN 1925 SOUS LADENOMINATION MIGROS A DEPOSE, LE 29 DECEMBRE 1931 AU REGISTRE INTERNATIONAL DES MARQUES, SOUS LE N 77.385 LA MARQUE MIGROS, QUE CETTE SOCIETE TRANSFORMEE EN 1941 EN UNION DE COOPERATIVES SOUS LE NOM FEDERATION DES COOPERATIVES MIGROS (FCM) A RENOUVELE LES 28 DECEMBRE 1951 ET 23 JUIN 1966 CE DEPOT AUDIT REGISTRE INTERNATIONAL, QU'APRES AVOIR CREE, EN 1968, DEUX SOCIETES FRANCAISES, LES SOCIETES ANONYME ET SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE MIGROS-FRANCE, LA FCM A DEPOSE LA MARQUE MIGROS POUR LA PREMIERE FOIS A L'INPI LE 22 AVRIL 1970, SOUS LE N 96.797 ET A CONCEDE L'EXPLOITATION DE CETTE MARQUE A CES DEUX SOCIETES, QU'ESTIMANT DEVOIR BENEFICIER DE L'ANTERIORITE DES DROITS SUR LA MARQUE MIGROS, LA FCM ET CES DEUX SOCIETES LICENCIEES ONT ASSIGNE, LE 21 MAI 1970, EN CONTREFACON DE MARQUE ET EN USURPATION DE NOM, LA SOCIETE HMA ET LA SOCIETE EUROPEENNE DES SUPERMARCHES, LA ROTONDE, CREE EN 1967 PAR CETTE DERNIERE AINSI QUE LA SOCIETE EUROPEENNE DES SUPERMARCHES QUI LES A ABSORBEES EN 1970 ;
ATTENDU QU'IL EST, EN PREMIER LIEU, REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DEBOUTE LA FCM AINSI QUE LES SOCIETE ANONYME ET SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE MIGROS-FRANCE DE LEURS DEMANDES, AUX MOTIFS QUE CES SOCIETES NE POUVAIENT INVOQUER, AU SOUTIEN DE LEUR ACTION EN USURPATION DE DENOMINATION MIGROS A TITRE DE MARQUE, DE NOM COMMERCIAL ET D'ENSEIGNE, UN DROIT ANTERIEUR ET OPPOSABLE A CELUI DE LA SOCIETE ETABLISSEMENTS HAERINGER-MIGROS-AGAM SUR CETTE MEME DENOMINATION, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, FAUTE D'UNE PUBLICITE DE LA FUSION-ABSORPTION INTERVENUE LE 31 DECEMBRE 1959 ENTRE LA SOCIETE MAX ET CHARLES LEVY ET LA SOCIETEALIMENTATION EN GROS HAERINGER ET CIE, CONFORME A L'ARTICLE 14 DE LA LOI DU 31 DECEMBRE 1964, LE DEPOT EFFECTUE LE 2 MARS 1968 NE POUVAIT VALOIR A L'EGARD DE LA FEDERATION DES COOPERATIVES MIGROS QUE COMME UN DEPOT INDEPENDANT NE CONFERANT AUX DEPOSANTS AUCUNE ANTERIORITE, AINSI QUE L'AVAIT FAIT VALOIR LA FEDERATION DES COOPERATIVES MIGROS DANS DES CONCLUSIONS DELAISSEES PAR L'ARRET ATTAQUE ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LE RENOUVELLEMENT DU DEPOT EFFECTUE LE 23 JUIN 1966 PAR LA FEDERATION DES COOPERATIVES MIGROS ETAIT SUFFISANT POUR CARACTERISER L'ANTERIORITE DE LA PROPRIETE DE LA MARQUE CONSIDEREE A LA DATE INTRODUCTIVE DE L'INSTANCE, SOIT LE 20 JUIN 1970 ; QU'IL EST, EN DEUXIEME LIEU, FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR STATUE COMME ELLE L'A FAIT, AUX MOTIFS QUE LES CONDITIONS DANS LESQUELLES ETAIT EXPLOITEE LA MARQUE LITIGIEUSE LUI IMPRIMAIENT LE CARACTERE D'UNE MARQUE COLLECTIVE ET QUE, DES LORS, MEME SIELLE ETAIT UTILISEE EN PARTIE COMME MARQUE ORDINAIRE, SON DEPOT, EFFECTUE A CE DERNIER TITRE SEULEMENT, ETAIT INOPERANT, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, IL RESULTE DES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA FEDERATION DES COOPERATIVES MIGROS LIVRE LES MARCHANDISES QU'ELLE PRODUIT A SES ADHERENTS EN VUE DE LEUR VENTE PAR CEUX-CI AUX CONSOMMATEURS ET QUE, DES LORS, MEME SI ELLE NE POURSUIT PAS UN BUT LUCRATIF, LA MARQUE DONT ELLE EST TITULAIRE NE POUVAIT ETRE CONSIDEREE COMME UNE MARQUE COLLECTIVE DONT LA CARACTERISTIQUE LEGALE EST D'APPARTENIR A UN GROUPEMENT QUI N'EXERCE PAS PAR LUI-MEME UN COMMERCE, UNE INDUSTRIE OU UNE ACTIVITE DE SERVICE, ALORS, D'AUTRE PART, ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE L'ARRET ATTAQUE CONTASTE QUE LA MARQUE ETAIT EGALEMENT UTILISEE COMME MARQUE ORDINAIRE, D'OU IL SUIVAIT QU'ELLE ETAIT, EN TANT QUE TELLE, PROTEGEE PAR SON DEPOT A CE TITRE, RIEN DANS LA LOI NE FAISANT PREVALOIR LE CARACTERE COLLECTIF DE LA MARQUE ET DEPENDRE L'EFFICACITE DE LA PROTECTION D'UNE MARQUE MIXTE, REGULIEREMENT DEPOSEE COMME MARQUE INDIVIDUELLE, DE L'ACCOMPLISSEMENT DES FORMALITES PROPRES AUX MARQUES COLLECTIVES ET ALORS, ENFIN, QUE LE DEPOT EN TANT QUE MARQUE COLLECTIVE NE CONSTITUE PAS UNE OBLIGATION ET QUE, DES LORS QUE LA MARQUE LITIGIEUSE ETAIT DEPOSEE EN TANT QUE MARQUE INDIVIDUELLE, LA COUR D'APPEL NE POUVAIT LUI REFUSER TOUTE PROTECTION ;
QU'IL EST, EN DERNIER LIEU, FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR DECIDE QUE LA MARQUE MIGROS DEPOSEE PAR LA FCM NE POUVAIT BENEFICIER DE LA PROTECTION DUE AUX MARQUES NOTOIRES ALORS QUE, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, UNE MARQUE ET SA NOTORIETE S'APPLIQUENT TOUT AUSSI BIEN AUX PRODUITS VENDUS QU'AUX SERVICES RENDUS PAR LE VENDEUR, ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA PROTECTION ACCORDEE AUX MARQUES NOTOIRES EST ACQUISE MEME EN L'ABSENCE DE TOUT ACTE D'EXPLOITATION DANS LE PAYS CONSIDERE, ET ALORS, ENFIN, QUE LE DELAI DE CINQ ANS NE S'APPLIQUE QUE SI LE DEPOT A ETE FAIT DE BONNE FOI, CE QUE NE CONSTATE PAS L'ARRET ATTAQUE, LA VOLONTE DE TIRER PROFIT DU RENOM N'ETANT PAS SEULE CONSTITUTIVE DE LA MAUVAISE FOI ;
MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR JUSTEMENT ENONCE QUE, SAUF STIPULATION CONTRAIRE, LA MARQUE EST CEDEE EN MEME TEMPS QUE LE FONDS DE COMMERCE DONT ELLE CONSTITUE L'UN DES ELEMENTS ESSENTIELS PERMETTANT DERALLIER LA CLIENTELE, LA COUR D'APPEL A RETENU, A BON DROIT, QU'EN ACQUERANT L'ENTREPRISE A LAQUELLE EST DEMEUREE ATTACHEE LA MARQUE MIGROS, DENOMINATION QUI LUI SERVAIT D'ENSEIGNE DEPUIS 1923 ET QUI A ETE DEPOSEE COMME MARQUE EN 1928, LA SOCIETE HMA AVAIT ACQUIS LES DROITS VENANT DE SON USAGE ET DE CELUI DE SES AUTEURS, ET, EN CONSEQUENCE, QUE LES PRECEDENTS ACTES DE TRANSFORMATION DE L'ENTREPRISE N'AVAIENT APPORTE AUCUNE MODIFICATION AU DROIT SUR LA MARQUE ; QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL N'A FAIT QU'APPLIQUER EXACTEMENT LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 35 ALINEA 3 DE LA LOI DU 31 DECEMBRE 1964 QUI BENEFICIENT AUSSI BIEN A L'USAGER QU'A SES AYANTS-CAUSE, EN DECIDANT QUE LA SOCIETE HMA QUI AVAIT EFFECTUE LE 2 MARS 1968 LE DEPOT DE LA MARQUE MIGROS DONT ELLE ETAIT TITULAIRE ET QUI AVAIT FAIT LE 25 JUIN 1968 UNE DECLARATION D'EXISTENCE DES DROITS ANTERIEURS SE REFERANT EXPRESSEMENT AU DEPOT DU 23 MAI 1928 AINSI QU'A SES RENOUVELLEMENTS DE 1946 ET 1954, AVAIT CONSERVE SES DROITS SUR CETTE MARQUE MALGRE LE DEPOT AU REGISTRE INTERNATIONAL DES MARQUES EFFECTUE EN 1931 PAR LA SOCIETE DE DROIT SUISSE MIGROS ; QUE PAR CES ENONCIATIONS, ET ABSTRACTION FAITE DES AUTRES MOTIFS CRITIQUES PAR LE POURVOI QUI SONT SURABONDANTS, LA COUR D'APPEL, QUI A REPONDU AUX CONCLUSIONS INVOQUEES, A JUSTIFIE SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 11 AVRIL 1978 PAR LA COUR D'APPEL DE COLMAR.