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Décisions

ADLC, 15 février 2022, n° 22-D-05

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à des pratiques mises en oeuvre edans le secteur du transport d'animaux vivants par fret aérien

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de Mme Alexandra Podlinski, rapporteure, et l’intervention de M. Thomas Piquereau, rapporteur général adjoint, par Mme Irène Luc, vice-présidente, présidente de séance et M. Savinien Grignon Dumoulin et M. Jerôme Pouyet, membres.

ADLC n° 22-D-05

15 février 2022

L’Autorité de la concurrence (section V),

Vu la décision n° 19-SO-12 du 6 septembre 2019, enregistrée sous le numéro 19/0048 F, par laquelle l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office de pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport d’animaux vivants par fret ;

Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 102 ; Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L. 420-2 ;

Vu le procès-verbal de transaction du 2 novembre 2021 signé par le rapporteur général adjoint et la société Goldenway International Pets en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce ;

Vu les observations présentées par la société Goldenway International Pets et le commissaire du Gouvernement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

La rapporteure, le rapporteur général adjoint, les représentants de la société Goldenway International Pets, et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 14 décembre 2021 ;

Adopte la décision suivante :

Résumé1

Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») sanctionne la société Goldenway International Pets (ci-après « GIP ») pour avoir mis en œuvre une pratique d’abus de position dominante dans le secteur du transport d’animaux vivants par fret aérien.

À la suite d’une enquête de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi d’Ile-de-France, l’Autorité s’est saisie d’office et, à la suite d’une instruction menée avec le concours de l’Autorité polynésienne de la concurrence en application du I de l’article 9 bis de l’ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017, a notifié un grief à la société GIP, sur le fondement des articles 102 TFUE et L.420-2 du code de commerce.

Il était reproché à la société GIP d’avoir abusé de sa position de monopole de fait sur le marché national des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française (les services de quarantaine), en liant ces prestations avec celles du transport routier de ces animaux entre la station de quarantaine du Grais dans l’Orne et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celles de l’organisation du transport par fret aérien desdits animaux entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et de Papeete.

Le monopole de fait de GIP sur le marché des services de quarantaine des animaux de compagnie à destination de la Polynésie française résultait du fait que l’unique moyen d’obtenir un certificat sanitaire permettant l’importation d’animaux de compagnie vers la Polynésie française depuis le territoire métropolitain était de placer les animaux dans la seule station de quarantaine habilitée par les autorités polynésiennes, à savoir, la station de GIP du Grais dans l’Orne.

La société mise en cause a sollicité de l’Autorité le bénéfice de la procédure de transaction, en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce. La mise en œuvre de cette procédure a donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal de transaction, signé par la représentante de la mise en cause et le rapporteur général adjoint, fixant le montant maximal et le montant minimal de la sanction pécuniaire qui pourrait être infligée par l’Autorité. GIP a par ailleurs proposé des engagements.

L’Autorité, après avoir examiné l’ensemble des faits du dossier, a estimé qu’il y avait lieu de prononcer une sanction de 65 000 euros, montant qui est compris dans la fourchette figurant dans le procès-verbal de transaction. Elle a par ailleurs rendu obligatoires les engagements proposés par GIP, à savoir, notamment :

- de publier et de diffuser des informations, comprenant notamment un résumé de la décision de l’Autorité, aux frais de l’entreprise, afin d’informer et d’appeler la vigilance des clients, des transporteurs aériens et des commissionnaires et transitaires de transport, ainsi que des autorités polynésiennes compétentes, sur l’illicéité des ventes liées pratiquées jusqu’ici ; et

- de présenter, sur son site internet, un résumé indiquant, d’une part, que la prestation de quarantaine seule peut être fournie par GIP séparément des autres prestations d’exportation de chiens et chats vers la Polynésie française et, d’autre part, que la réglementation polynésienne permet désormais aux consommateurs de bénéficier d’une solution alternative au placement de leurs chiens et chats en station de quarantaine, à savoir la réalisation d’un contrôle sanitaire par un vétérinaire habilité à l’aéroport au moment de leur chargement vers la Polynésie française, aboutissant à la délivrance d’un certificat sanitaire.

I. Constatations

A. LA PROCEDURE

1. Par courrier du 27 février 2019, le ministre de l’économie a transmis à l’Autorité de la concurrence (ci-après l’« Autorité ») un rapport administratif d’enquête établi par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (ci-après « DGCCRF »), relatif à la situation de la concurrence dans le secteur du transport par fret aérien d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française. Selon ce rapport, la société Goldenway International Pets (ci-après « GIP ») avait mis en œuvre des pratiques d’abus de position dominante contraires à l’article L. 420-2 du code de commerce.

2. Par une décision n° 19-SO-12 du 6 septembre 2019, enregistrée sous le numéro 19/0048 F, l’Autorité s’est saisie d’office de pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport d’animaux vivants par fret.

3. Par courrier du 9 octobre 2020, en application du I de l’article 9 bis de l’ordonnance n° 2017-157 du 9 février 20172, le rapporteur général de l’Autorité a sollicité le concours de la rapporteur générale de l’Autorité polynésienne de la concurrence, afin de procéder à divers actes d’enquête et de se faire communiquer des informations et documents détenus ou recueillis dans le cadre de ses compétences.

4. Par courrier du 23 octobre 2020, la rapporteur générale de l’Autorité polynésienne de la concurrence a communiqué au rapporteur général de l’Autorité plusieurs éléments de réponse aux demandes précitées. Ultérieurement, elle a transmis des éléments complémentaires par courriels des 25 février3, 2 mars4 et 12 avril 20215.

5. Le 3 août 2021, les services d’instruction ont adressé à GIP une notification des griefs portant sur des pratiques prohibées au titre de l’article L. 420-2 du code de commerce.

6. Par un procès-verbal signé le 2 novembre 2021, la société GIP s’est engagée à ne pas contester le grief qui lui a été notifié et a proposé plusieurs engagements qui ont été annexés au procès-verbal de transaction.

7. Lors de la séance du 14 décembre 2021, GIP a confirmé solennellement son accord avec les termes de la transaction.

B. LE SECTEUR CONCERNE

8. Le secteur d’activité concerné par les pratiques est celui du transport d’animaux vivants, et plus précisément, d’animaux de compagnie tels que des chiens et des chats, à destination de la Polynésie française, dont les propriétaires sont des particuliers souhaitant s’y rendre pour une longue durée (dans le cadre d’une expatriation, d’une mobilité professionnelle, d’une installation définitive, etc.).

9. Outre la prise en compte des particularités propres au secteur du transport des animaux vivants (1), des conditions strictes doivent être respectées, pour répondre aux exigences de la réglementation polynésienne, avant toute introduction d’un animal de compagnie depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.

10. Ces conditions sont relatives à la situation institutionnelle et géographique de la Polynésie française (2), à l’état sanitaire de l’animal (3), à l’agrément d’une station de quarantaine (4), au transport terrestre entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle

(5) et, enfin, au transport par fret aérien entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete en Polynésie française (6).

1. LES PARTICULARITES LIEES AU SECTEUR DU TRANSPORT DES ANIMAUX VIVANTS

a) Les particularités tenant au statut juridique de l’animal vivant

11. Les pratiques en cause concernent le secteur des animaux vivants6 situés sur le sol métropolitain et destinés à être importés sur le territoire de la Polynésie française après un transport par fret aérien.

12. Durant toute la durée du séjour d’un animal sur un territoire donné, l’intégralité des règles juridiques de ce territoire s’applique à lui. Il convient donc de rappeler les règles françaises et polynésiennes entourant la notion d’animal vivant.

13. En droit français, la définition de l’animal vivant a récemment été amendée à la suite de l’adoption de la loi n° 2015-177 du 16 février 20157. Désormais, le code civil définit en son article 515-14 l’animal comme un « être vivant doué de sensibilité ». Toutefois, il n’en a pas toujours été ainsi : auparavant, l’animal était uniquement défini de manière indirecte, comme une « chose » dans les dispositions du code civil traitant de la distinction entre les biens meubles et les biens immeubles. Enfin, le code rural et de la pêche maritime dispose, en son article L. 214-1, que l’animal « doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ».

14. Les règles applicables en Polynésie française8 prévoient une définition et un régime juridique proches. La délibération n° 2001-16 APF du 1er février 20019 dispose en effet en son article 1er que l’animal correspond à « tout être sensible [qui] doit être placé par la personne physique ou morale qui, à quelque fin que ce soit, l’élève, le garde ou le détient, dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ».

b) Les particularités liées aux prestations de transport aérien des animaux vivants

15. Du point de vue des transporteurs, l’animal est considéré comme une marchandise, par opposition aux personnes, considérées comme des voyageurs. Ce statut juridique particulier induit plusieurs conséquences pour la prise en charge des animaux vivants par les transporteurs aériens.

16. Tout d’abord, en ce qui concerne leur affrètement et comme pour toute marchandise, les animaux doivent être totalement prêts pour le transport. La réservation du vol doit ainsi avoir été préalablement effectuée et ils doivent être dans un état sanitaire conforme aux législations et réglementations du pays de destination10.

17. Ensuite, comme pour le transport de toute marchandise, les transporteurs aériens n’entretiennent aucune relation directe avec le(s) propriétaire(s) des animaux11. Les transporteurs se chargent en effet uniquement du transport, et délèguent toute la relation avec la clientèle à des commissionnaires ou transitaires de transport. Ces derniers sont chargés d’acheter des prestations de transport aux compagnies aériennes pour le compte des propriétaires d’animaux, et ne détiennent ni ne disposent, en principe, de flotte maritime, de flotte aérienne, ou de flotte routière12.

18. Les commissionnaires ou transitaires de transport réalisent par ailleurs, ou font réaliser, toutes les prestations nécessaires au transport (contrôles sanitaires, préparation de l’animal, etc.) qui doivent avoir lieu en amont13. À ce titre, ils doivent respecter un certain nombre de conditions générales et de conditions particulières propres aux destinations envisagées. Celles-ci sont reprises dans une norme sectorielle intitulée « The Air Cargo Tariff and Rules » (ci-après « TACT »), adoptée par l’Association internationale du transport aérien (ci-après « IATA ») 14.

2. LES PARTICULARITES TENANT A LA SITUATION INSTITUTIONNELLE ET GEOGRAPHIQUE DE LA POLYNESIE FRANÇAISE

a) Les particularités institutionnelles

19. En vertu de l’article 74 de la Constitution, la Polynésie française est une collectivité d’outre-mer (ci-après « COM ») de la République française.

20. Depuis 1984, année du début de la décentralisation Outre-Mer, la Polynésie française est dotée d’un régime d’autonomie conféré par la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 portant statut du territoire de la Polynésie française et renforcé par la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française.

14 Fondée en 1945, elle regroupe aujourd’hui près de 290 compagnies aériennes réparties dans 120 pays. Les membres de l’IATA assurent 82 % du trafic aérien mondial (cotes 3141 à 3143). L’objectif de l’association est de faire en sorte que les personnes, les marchandises et le courrier circulent sur le réseau aérien mondial aussi facilement et aussi librement que s’ils voyageaient au sein d’un même pays. L’agrément IATA détenu par un transitaire est à renouveler tous les deux ans, à l’issue d’une période de formation (cote 644).

21. En vertu de l’article 13 de la loi organique de 2004 précitée, ce statut dote la Polynésie française de compétences de droit commun, notamment en matière de développement économique et social, à l’exclusion de celles qui sont explicitement attribuées à l’État et aux communes.

22. Précisément, ce sont les institutions locales polynésiennes qui sont ainsi compétentes en matière d’introduction et d’importation d’animaux de compagnie en Polynésie française.

b) Les particularités géographiques

23. La Polynésie française occupe, dans le Pacifique sud, une vaste zone maritime. Sa superficie est comparable à celle de l'Europe (2,5 millions de km2). Elle compte 118 îles regroupées en cinq archipels. La distance entre Papeete et Hiva Oa (archipel des Marquises) est similaire à celle séparant Paris de Stockholm.

24. Le décalage horaire entre Tahiti et Paris est de onze heures en hiver et douze heures en été.

c) Les particularités liées aux transports reliant la Polynésie française au reste du monde

Les compagnies aériennes assurant des liaisons internationales de et/ou vers la Polynésie française

25. La Polynésie française dispose d’un seul aéroport international, situé sur la côte ouest de Tahiti, à Faa'a.

26. Les neuf compagnies aériennes suivantes assurent des vols directs et réguliers entre l’aéroport de Tahiti Faa’a et le reste du monde15 :

a. Air France : avec les États-Unis (Los Angeles) et la France (Paris)16 ;

b. Air New Zealand : avec la Nouvelle-Zélande (Auckland)17 ;

c. Air Tahiti : entre plusieurs îles de la Polynésie française et les îles Cook18 ;

d. Air Tahiti Nui : avec le Japon (Tokyo), la France (Paris), les États-Unis (Los Angeles), la Nouvelle-Zélande (Auckland) et le Canada (Vancouver)19 ;

e. Aircalin : avec la Nouvelle-Calédonie (Nouméa)20 ;

f. French Bee (filiale d’Air Caraïbes) : avec les États-Unis (San Francisco) et la France (Paris)21 ;

g. Hawaï Airlines : la compagnie opère des vols directs et réguliers avec les États-Unis (Honolulu – Hawaï)22 ;

h. LATAM : la compagnie assure des vols directs et réguliers avec le Chili (île de Pâques et Santiago)23 ;

i. United Airlines : la compagnie assure des vols directs et réguliers avec les États-Unis (San Francisco)24.

Le transport de voyageurs

27. S’agissant du transport de voyageurs, la ligne de Los Angeles demeure la plus fréquentée (40 % du total), suivie de Paris (20 %) et d'Auckland (20 %)25.

28. Le premier transporteur aérien de Polynésie française est Air Tahiti Nui. Il représente les deux tiers du trafic international de l’aéroport de Tahiti-Faa’a26. Le deuxième transporteur est Air France, qui a connu une hausse de 14 % du trafic de passagers en 2016, avec une liaison unique : Paris-Papeete à raison de trois vols par semaine.

29. De manière globale et avant la crise sanitaire liée à la Covid-1927, le transport aérien de passagers progressait chaque année (il a par exemple progressé de 3,2 % sur l’année 2016)28.

30. Dans l’Union européenne, les seuls aéroports acheminant des voyageurs vers la Polynésie française sont l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle à Paris, via les compagnies aériennes Air France et Air Tahiti Nui, et l’aéroport Paris Orly avec la compagnie FrenchBee.

31. Au départ de Paris, les vols vers Papeete comportent généralement une escale technique, permettant à l’avion de se ravitailler en carburant. À cette occasion, la compagnie aérienne, l’appareil et le numéro de vol sont inchangés. Avant la crise sanitaire liée à la Covid-19, ces escales techniques étaient habituellement réalisées à Los Angeles ou à San Francisco (États-Unis). La fermeture de l’espace aérien américain pendant la crise sanitaire a conduit nombre d’avions à effectuer leur escale à Vancouver (Canada) ou à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), et dans de rares cas, à ne réaliser aucune escale lorsque la présence de vents arrière le permettait 29.

32. Bien qu’effectuant une telle escale technique, ces vols sont considérés comme des vols directs au regard de la règlementation aérienne internationale, le numéro de vol étant inchangé30.

Le transport d’animaux vivants

33. S’agissant du transport d’animaux de compagnie depuis la France métropolitaine, il s’effectue essentiellement par voie aérienne depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. Le vol vers Papeete dure au minimum 22 heures. En raison des conditions et de la durée du transport, un transport des animaux par bateau est plus difficilement envisageable, puisqu’il durerait nécessairement plusieurs semaines et serait moins respectueux de leur santé et de leur bien-être, étant donné qu’ils sont transportés en cage31.

34. S’agissant du transport d’animaux vivants, l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle est par ailleurs le seul aéroport de l’Union européenne dont les liaisons aériennes desservent la Polynésie française via un vol direct32 (le plus souvent avec une escale technique qui n’occasionne pas un changement d’appareil pour l’animal).

35. Tout animal situé sur le territoire d’un État membre doit donc nécessairement réaliser une escale, soit à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, soit dans un aéroport situé en dehors de l’Union européenne, avant d’arriver à Papeete.

36. Deux compagnies aériennes assurent des liaisons entre Paris et Papeete s’agissant du transport d’animaux vivants : Air France et Air Tahiti Nui. À l’heure actuelle, FrenchBee, nouvelle compagnie récemment entrée sur le marché, ne prend pas en charge cette activité, n’acheminant que des voyageurs vers cette destination33.

37. Enfin, la majorité des animaux importés en Polynésie française sont originaires de France34.

3. LES CONDITIONS LIEES A L’ETAT SANITAIRE DE L’ANIMAL

a) Principes généraux

38. La Polynésie française est indemne de rage, de leishmaniose ainsi que de nombreuses maladies transmises par les tiques et les puces, et tient à conserver ce statut sanitaire favorable. En conséquence, l’introduction et l’importation des animaux dans le territoire douanier de la Polynésie française sont par principe interdites (cf. article 26 de la loi du pays n° 2013-12 du 6 mai 2013).

39. Néanmoins, par dérogation et à l’exception des espèces animales menaçant la biodiversité, des arrêtés pris en conseil des ministres peuvent autoriser, pour chaque espèce, l’introduction et l’importation d’animaux, dans le respect des normes et recommandations de l’Organisation mondiale de la santé animale (ci-après « OIE »).

40. S’agissant des chiens et des chats, leur importation en Polynésie française est encadrée par plusieurs arrêtés qui se sont succédé35.

41. En vertu du dernier arrêté entré en vigueur, à savoir l’arrêté n° 738 CM du 15 mai 2013 portant fixation des conditions zoosanitaires applicables lors de l’introduction et de l’importation des chiens et des chats, les conditions zoosanitaires suivantes doivent être respectées par l’animal pour pouvoir bénéficier d’un permis préalable lui permettant d’entrer sur le territoire de la Polynésie française :

a. l’identification de l’animal (électronique ou tatouage) ;

b. son suivi de vaccination (notamment la vaccination antirabique, qui doit être en cours de validité pendant les six mois précédant le chargement et le titrage antirabique, qui doit être au moins égal à 0,5 UI/ml, depuis plus de trois mois et moins d’un an sans rupture vaccinale, avant la date d’exportation) ;

c. la réalisation de traitements antiparasitaires dans les trente jours précédant leur chargement, à au moins quatorze jours d’intervalle, le second étant effectué dans les quatre jours précédant le chargement, dont notamment :

1. un traitement interne contre l’échinococcose,

2. un traitement externe contre les tiques et les puces ;

d. la réalisation d’un test de dépistage de Leishmania infantis dans les trente jours précédant le départ.

42. L’arrêté n° 738 CM précité instaure par ailleurs l’obligation de faire réaliser sur l’animal un examen approfondi par un vétérinaire sanitaire, dans une station de quarantaine agréée dans les quatre jours avant le départ (aboutissant à la délivrance d’un certificat labellisé

« PFAMCJUIL13 »36), ou à l’aéroport le jour du départ. Cette condition très spécifique et dont la teneur a évolué au fil du temps fera l’objet de développements aux paragraphes suivants.

b) Les conditions liées aux contrôles vétérinaires relatifs à l’état sanitaire de l’animal

43. Pour pénétrer sur le territoire polynésien, l’état sanitaire de l’animal doit préalablement être contrôlé par un vétérinaire. Dans les faits, un tel contrôle est réalisé lors d’un séjour en quarantaine de l’animal, à un moment précis, même si des solutions alternatives seraient théoriquement possibles.

L’obligation de fait d’un séjour en quarantaine

Principes applicables

44. Par mise en quarantaine, l’annexe à la loi du pays n° 2013-12 précitée entend « l’opération consistant à maintenir un groupe de plantes ou d'animaux en isolement, sans contact direct ou indirect avec d'autres individus, afin de les mettre en observation pendant une période de temps déterminée et, le cas échéant, de les soumettre à des épreuves diagnostiques ou à des traitements, comprenant le traitement approprié des eaux résiduaires ».

45. S’agissant spécifiquement de la condition relative à la quarantaine, la réglementation polynésienne a évolué au fil du temps, et notamment au cours de ces dix dernières années.

46. Par le passé, l’arrêté n° 605 CM du 9 avril 2010 relatif aux conditions sanitaires auxquelles doivent satisfaire les chiens et chats importés imposait à l’animal d’avoir séjourné au moins vingt-huit jours et jusqu’à son départ dans une station de quarantaine dès lors qu’il provenait d’un pays figurant sur la liste des pays et territoires dans lesquels la rage canine était absente ou bien contrôlée37. La France, mais aussi la grande majorité des États de l’Union européenne (à l’exception de l’Irlande, du Royaume-Uni (à l’époque) et de la Suède) figuraient sur cette liste38.

47. En 2013, l’arrêté n° 738 CM précité, remplaçant et abrogeant l’arrêté n° 605 CM précité – et qui est toujours en vigueur actuellement – a supprimé cette obligation de quarantaine. Désormais, l’animal doit seulement avoir subi, avant son entrée sur le territoire polynésien, un examen clinique approfondi et avoir été reconnu apte à voyager dans les quatre jours précédant son départ. Il ne doit, enfin, présenter aucun signe de maladie transmissible. Un vétérinaire officiel, c’est-à-dire un « un vétérinaire de l’administration chargé du contrôle de l’application de la réglementation zoosanitaire »39, employé par la Direction départementale de la protection des populations (ci-après « DDPP ») compétente, est chargé de réaliser ces contrôles sanitaires et de délivrer, le cas échéant, un certificat sanitaire reconnaissant que l’animal est apte à voyager.

48. En vertu de cet arrêté, ces contrôles peuvent être effectués soit à l’aéroport, le jour du départ de l’animal, soit au cours d’un séjour en quarantaine effectué dans une station prévue à cet effet, dans les quatre jours précédant le départ de l’animal40. Selon la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction polynésienne de la biosécurité, ce délai de quatre jours a été retenu non pour des raisons sanitaires mais pour s’assurer qu’un examen pourrait être réalisé par un vétérinaire, quand bien même l’entrée de l’animal en quarantaine aurait lieu juste avant le week-end41.

49. Enfin, à l’issue des contrôles sanitaires susmentionnés, la cage doit être scellée par le vétérinaire sanitaire au sein de la station de quarantaine et ne pourra être descellée qu’une fois l’animal arrivé en Polynésie française, lors d’une visite vétérinaire à l’aéroport de Papeete42.

Application de ces principes en France métropolitaine

50. À l’heure actuelle, la condition relative à la réalisation des contrôles sanitaires s’applique de manière très spécifique pour les animaux situés sur le sol métropolitain et en partance pour la Polynésie française. En effet, si la réglementation offre une alternative, en permettant à ces contrôles d’être effectués soit à l’aéroport le jour du départ, soit dans une station de quarantaine, dans les faits, cette alternative n’existe pas.

51. Ainsi, aucun contrôle vétérinaire n’est jamais effectué à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle le jour du départ de l’animal.

52. Les vétérinaires officiels compétents pour effectuer de tels contrôles relèvent du ressort de la DDPP de Seine-Saint-Denis (ci-après « DDPP 93 »). Or, comme l’a déclaré la cheffe du service Santé et Protection animales de la DDPP 93 : « il n’y a pas dans le département de la Seine-Saint-Denis de vétérinaire aéroportuaire ni de local dédié et adapté permettant un examen clinique des animaux à l’aéroport »43.

53. C’est également ce qu’a confirmé la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction polynésienne de la biosécurité : « Actuellement au départ de la Métropole, l’examen approfondi ne peut ni se faire sur le site de l’aéroport de Roissy-Charles De Gaulle ni dans les autres aéroports de province par les vétérinaires officiels, du fait notamment de l’absence d’infrastructures permettant ce contrôle sur place »44. Par conséquent, « A défaut d’avoir la possibilité de faire appliquer cette première option dans la pratique, les animaux sont placés jusqu’à présent, en quarantaine dans les jours précédant le départ vers la Polynésie française, et y restent isolés jusqu’à leur chargement »45.

54. De même, dans un courriel du 19 septembre 2018, une employée de la Direction générale de l’alimentation en France (ci-après « DGAL ») a indiqué que, si « en théorie, l’examen par un vétérinaire officiel à l’aéroport peut se substituer à la quarantaine (…) dans la pratique ce n’est pas possible » 46.

55. Il convient de noter que cette situation est une particularité propre à la France métropolitaine. Lors de l’instruction, la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire susmentionnée, a en effet expliqué que dans tous les autres pays, et notamment en Nouvelle-Zélande, en Nouvelle-Calédonie ou encore aux États-Unis, les contrôles vétérinaires s’effectuaient dans des locaux situés à l’aéroport ou à proximité le jour du départ de l’animal47.

56. Par conséquent, afin de respecter la condition sanitaire précitée, l’animal situé sur le territoire métropolitain et en partance pour la Polynésie française doit nécessairement effectuer un séjour en quarantaine. Sur le plan des formalités administratives, le modèle de certificat sanitaire tel qu’il est actuellement conçu n’est par ailleurs adapté qu’aux animaux séjournant en quarantaine, ainsi que l’a indiqué l’employée de la DDPP 93 précitée48.

57. Or, contrairement à la grande majorité des destinations mondiales, la Polynésie française ne dispose pas de station de quarantaine sur son territoire. Dès lors, l’animal en provenance du sol métropolitain doit nécessairement réaliser son séjour dans une station située en dehors de la Polynésie française, soit en métropole avant son départ, soit dans un autre pays dans lequel il serait en transit.

58. S’agissant de la métropole, il n’existe qu’une seule station de quarantaine sur le territoire : la station construite et exploitée par la société GIP, située au Grais, dans l’Orne, ainsi qu’il ressort des déclarations de l’entreprise mise en cause49, des vétérinaires officiels, employés de la direction polynésienne de la biosécurité50 et des transporteurs51.

59. Au cours de son séjour en quarantaine, l’animal fait l’objet d’inspections vétérinaires en deux temps. Dans un premier temps, à la demande de la société GIP, un vétérinaire sanitaire habilité52 se déplace dans la station de quarantaine du Grais pour soumettre l’animal à un certain nombre d’examens cliniques, avant de sceller sa cage – qui ne sera descellée qu’une fois parvenue sur le territoire polynésien. À la suite de cette visite, le vétérinaire sanitaire remplit le certificat sanitaire de l’animal puis le transmet aux vétérinaires officiels de la DDPP 93.

60. Dans un second temps, ces vétérinaires officiels sont chargés de vérifier que le vétérinaire sanitaire ayant effectué les examens cliniques détient l’habilitation nécessaire, que les 52 Un vétérinaire sanitaire habilité est un vétérinaire ayant obtenu une habilitation délivrée par la DDPP du département au sein duquel il a établi son domicile professionnel administratif, dans les conditions prévues par les articles L. 203-1 et R. 203-3 et suivants du code rural et de la pêche maritime. Au sein de chaque département, une liste de vétérinaires sanitaires en activité est dressée et est ainsi disponible sur le site internet de la préfecture. Cette liste mentionne l’activité du vétérinaire et les espèces qu’il est habilité à contrôler.

61. S’agissant de la réalisation d’un séjour en quarantaine dans le pays où l’animal serait en transit, elle sera abordée ci-après.

Les alternatives possibles au séjour en quarantaine

62. Plusieurs alternatives potentielles au séjour en quarantaine de l’animal dans la station du Grais sont décrites dans les paragraphes suivants, tant en dehors de France, lors d’un transit, qu’en France ou sur le territoire polynésien. L’instruction a toutefois révélé qu’elles sont très peu, voire pas, utilisées en pratique.

Alternatives en dehors de la France métropolitaine

63. À défaut d’effectuer sa quarantaine dans la station du Grais, un animal peut, en théorie, réaliser un tel séjour dans un autre pays, dans lequel il serait en transit, avant de franchir le territoire polynésien. Une seule condition doit être respectée : la station de quarantaine dans laquelle il effectue ce séjour doit être agréée par les autorités polynésiennes.

64. Selon un employé de la direction de la biosécurité polynésienne, tel est le cas par exemple de stations de quarantaine situées en Nouvelle-Zélande, en Nouvelle-Calédonie et en Australie54. La gérante de la société GIP a également fait mention d’Hawaï55.

65. S’agissant de la Nouvelle-Calédonie, il ressort de l’instruction que le recours à cette alternative n’a pas été possible entre le 23 juillet 201056, date de la fermeture de la station de quarantaine de Nouméa pour cause de travaux, et le 15 mars 2013, date de sa réouverture57. Jusqu’alors, la station, dont la capacité d’accueil était fixée à 20 animaux, accueillait en moyenne 5 animaux par mois, arrivant de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et ayant pour destination finale la Polynésie française58.

66. Depuis sa réouverture en 2013, la station accueille désormais en quarantaine plusieurs espèces animales (chiens, chats, chevaux, bovins, petits ruminants, oiseaux, lapins, etc.) tout en respectant les principes de sécurité sanitaire en vigueur59.

67. Toutefois, depuis 2013, le recours à cette alternative pour des animaux situés en France est resté extrêmement rare60. Elle présente en effet plusieurs inconvénients.

68. Tout d’abord, elle se révèle être d’une grande complexité sur le plan logistique. L’animal doit en effet être pris en charge par un transitaire entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Nouméa, avant d’être transféré par un autre prestataire, à son arrivée, dans la station de quarantaine de Nouméa pour un isolement de dix jours61. Il doit ensuite être pris en charge par un nouveau transitaire – local – afin d’être affrété vers l’aéroport de Papeete. Cela nécessite donc de s’adresser, en premier lieu, à un intermédiaire en Nouvelle-Calédonie qui se chargera du transfert de l’animal vers la station de quarantaine et, en second lieu, à un transitaire local à même d’organiser son affrètement vers Papeete. Une telle multiplication des intervenants n’est pas forcément aisée pour des propriétaires d’animaux situés en France métropolitaine. La logistique induite par cette alternative est donc beaucoup plus compliquée que celle offerte par la mise en quarantaine de l’animal dans la station de GIP, qui nécessite simplement de l’acheminer au Grais, GIP s’occupant alors de sa mise en quarantaine et de son affrètement, via un vol direct, vers la Polynésie française.

69. Ensuite, cette alternative nécessite l’accomplissement de nombreuses formalités administratives, deux demandes d’importation devant être introduites (l’une pour l’entrée de l’animal en Nouvelle-Calédonie, l’autre pour son entrée en Polynésie française). Ainsi que le déclarait en audition une responsable de l’entreprise Service Conseils Transport Interne Logistique (ci-après « SCTIL »), c’est donc « très compliqué à faire administrativement »62.

70. Par ailleurs, au plan tarifaire, cette solution occasionne des coûts supplémentaires pour le client. En effet, comme l’expliquait un responsable de la société First AirFrigo, en recourant à deux transitaires différents, « les coûts vont exploser donc commercialement on ne pourra pas vendre la prestation. Si on a un prestataire en plus à payer en Nouvelle-Calédonie, pour envoyer l’animal vers Tahiti, ça devient trop cher pour le client »63 [caractères gras ajoutés]. Cette analyse a été confirmée en audition par un responsable de la société Bagages du Monde : « On a étudié la possibilité de transporter des animaux de compagnie en Polynésie française en passant par Nouméa. La relation logistique et la faisabilité étaient possibles car on a un prestataire sur place qui aurait pu prendre en charge le transit mais les prix que l’on proposait n’étaient pas intéressants pour le client. On devait additionner deux trajets dont les coûts de transport aérien étaient importants donc on n’était pas concurrentiel. »64 [caractères gras ajoutés]. Or, le prix est un élément déterminant pour le propriétaire d’un animal de compagnie, comme en témoignent les nombreuses plaintes de consommateurs mentionnées dans les paragraphes ci-après. Économiquement, cette alternative n’est donc pas compétitive.

71. Enfin, s’agissant du bien-être et de la santé de l’animal, cette alternative présente un certain nombre de risques pour l’animal, celui-ci devant, d’une part, prendre deux avions différents, ce qui occasionne des temps de transport prolongés et, d’autre part, rester dix jours en quarantaine à Nouméa (contre huit jours dans la quarantaine de GIP et un seul avion en vol direct65). À ce propos, la responsable de la société SCTIL précitée a ainsi déclaré en audition : « on propose toujours cette prestation mais ce n’est pas entendable pour le particulier. Les gens sont réticents à faire passer [l’animal] par plusieurs compagnies aériennes. C’est mieux de passer par un vol direct pour le bien-être animal »66.

72. Pour toutes ces raisons, le recours à cette alternative ne s’avère pas crédible, ce que la situation factuelle confirme puisque le nombre de propriétaires y ayant eu recours depuis 2013 est extrêmement faible, ainsi que l’a déclaré la responsable de la société SCTIL, mentionnant avoir pu le faire « seulement à quelques reprises »67.

73. S’agissant de la Nouvelle-Zélande, le choix de cette solution n’apparaît pas non plus crédible, pour les raisons suivantes.

74. Tout d’abord, au plan logistique, comme pour la Nouvelle-Calédonie, cette alternative s’avère très compliquée. En effet, aucun vol direct n’existant entre Paris et Auckland, en Nouvelle-Zélande, l’animal doit nécessairement faire une ou plusieurs escales pour y parvenir, par exemple à Dubaï. Ainsi que l’expliquait la gérante de GIP, « lors de cette escale, l’animal attendr[a] au moins 6 heures dans sa cage, en raison des réglementations d’Emirates, avant de prendre un autre avion pour la Nouvelle-Zélande, pays dans lequel il effectuera sa quarantaine. Une fois la quarantaine effectuée, il prendra un autre avion pour Papeete. » 68. La logistique que le propriétaire d’un animal doit mettre en place pour lui faire réaliser sa quarantaine en Nouvelle-Zélande est donc encore plus compliquée et encore moins accessible que via la Nouvelle-Calédonie, ce qui rend le recours à cette alternative encore moins plausible.

75. Par ailleurs, la Nouvelle-Zélande présente les mêmes inconvénients que la Nouvelle-Calédonie (à savoir la complexité administrative, l’augmentation du prix de l’affrètement et les risques induits pour la santé et le bien-être de l’animal), avec une acuité encore plus importante en toute logique, puisque l’animal doit faire deux escales (la première à Dubaï par exemple, la seconde en Nouvelle-Zélande) avant d’atteindre la Polynésie française.

76. Une dernière contrainte doit enfin être prise en compte concernant cette alternative, de nature linguistique, le passage de l’animal dans le(s) pays de transit et en Nouvelle-Zélande nécessitant que les propriétaires possèdent notamment des compétences en anglais.

77. Le recours à cette alternative n’apparaît donc pas réaliste. Elle n’est, de ce fait, jamais mentionnée par les transitaires entendus en audition dans le cadre de la présente instruction (voir notamment les paragraphes 166 et suivants ci-dessous).

78. S’agissant des autres destinations, telles que l’Australie ou Hawaï, il ressort de l’instruction que les transitaires actifs dans le secteur du transport d’animaux de compagnie n’y recourent jamais. Ils ont en effet indiqué ne pas connaître suffisamment ces destinations pour pouvoir organiser la logistique nécessaire afin qu’un animal y fasse escale avant d’être affrété vers la Polynésie française69. Une responsable de la société SCTIL déclarait à ce titre : « On ne propose pas de passer par la Nouvelle- Zélande ni par l’Australie parce qu’on ne connaît pas »70.

79. Il résulte de ce qui précède que s’il existe, en théorie, des solutions alternatives au séjour en quarantaine de l’animal dans la station de quarantaine du Grais, celles-ci ne sont pas – ou extrêmement peu71 – mises en œuvre en pratique. Elles ne constituent donc pas des alternatives réelles et crédibles.

80. Cela est confirmé par la gérante de GIP elle-même, qui a indiqué en audition qu’« il y a une différence qualitative dans l’offre que nous proposons. Les alternatives que nous venons de citer (la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, etc.) existent donc mais sont moins performantes et moins qualitatives pour le propriétaire en termes de temps et pour l’animal en termes de bien-être »72.

Alternatives en France métropolitaine

81. Plusieurs alternatives à la quarantaine dans la station du Grais sont envisagées en France métropolitaine. Pour l’heure, elles ne sont toutefois qu’à l’état de projet.

82. Saisie à plusieurs reprises de plaintes de consommateurs mécontents des tarifs pratiqués par GIP, la direction de la biosécurité a engagé plusieurs démarches depuis 2013 pour « tirer toutes les conséquences de cet assouplissement de la réglementation [i.e. la suppression de la quarantaine obligatoire, telle que décrite ci-avant] et pour trouver une solution plus satisfaisante permettant notamment de réduire le coût de l’importation des animaux de compagnie, qui fait l’objet de nombreuses récriminations »73 [note ajoutée].

83. Premièrement, après l’entrée en vigueur de l’arrêté n° 738 CM précité (voir, pour une présentation complète de cet arrêté, les développements aux paragraphes 41 et suivants, ci-dessus), la direction de la biosécurité a demandé à la DGAL de permettre aux animaux en instance pour la Polynésie française d’être examinés dans le chenil officiel de Roissy. Toutefois, cette démarche n’a pas abouti « au motif que cette installation a essentiellement vocation à accueillir des animaux pour les importations et échanges intracommunautaires »74. Si les animaux destinés à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande peuvent être examinés dans ce chenil, en raison de leur faible nombre, tel n’est pas le cas pour les animaux destinés à la Polynésie française qui sont plus nombreux (environ une centaine par an)75.

84. Cette démarche entreprise auprès de la DGAL a été réitérée en septembre et octobre 2020. La direction de la biosécurité du ministère polynésien a en effet proposé à la DGAL un nouveau modèle de certificat sanitaire, prévoyant que l’examen final des animaux puisse être réalisé dans des chenils privés de l’aéroport de Roissy ou dans un chenil de Mougins. Toutefois, selon la vétérinaire officielle de la direction de la biosécurité, cette démarche n’a pas abouti76.

85. Deuxièmement, la direction de la biosécurité a récemment interrogé la société GIP afin de savoir si elle accepterait d’effectuer l’examen sanitaire des animaux à destination de la Polynésie française directement dans le chenil que la société possède à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle77. Toutefois, selon la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction polynésienne de la biosécurité, GIP a émis « des réticences à le faire pour l’instant, au motif que si des parasites étaient découverts à l’occasion d’un examen à l’aéroport, elle serait dans l’obligation de mobiliser ces places plus longuement, ne pourrait placer les animaux dans le vol prévu et perturberait ainsi son planning. Elle serait également davantage soumise aux pressions des propriétaires, qui souhaitent souvent prendre le même vol que leur animal. Le système actuel offre donc plus de visibilité et de simplicité, d’autant que la société a des habitudes de fonctionnement avec la DDPP de l’Orne ».

86. Comme le souligne la responsable précitée, « les explications de la société ne relèvent donc pas de questions sanitaires et de la biosécurité, mais de son organisation et de ses procédures internes. D’ailleurs, Goldenway utilise son chenil de Roissy pour des exportations pour d’autres destinations mais ne s’est pas décidée à le faire pour la Polynésie française. ».

87. Troisièmement, plus récemment et comme ultime alternative, la direction de la biosécurité a demandé à la société SCTIL, qui dispose d’un chenil à Roissy dans lequel sont réalisés des examens sanitaires, de lui fournir un récépissé de sa déclaration ICPE78, afin de lui délivrer les autorisations nécessaires pour que son chenil puisse abriter les contrôles sanitaires sur les animaux en partance pour la Polynésie. Au jour de l’audition de la responsable de la direction de la biosécurité précitée, la société SCTIL n’avait pas encore répondu79.

Alternative sur le territoire polynésien

88. Ainsi que précisé ci-avant, la Polynésie française est l’un des seuls territoires au monde à ne pas disposer de station de quarantaine, ce qui oblige les animaux de compagnie devant y entrer à effectuer un séjour en quarantaine, soit dans le pays de départ, soit dans un pays de transit.

89. À ce jour, la construction d’une quarantaine locale est un projet que les autorités polynésiennes souhaiteraient voir aboutir. Une ligne budgétaire a même été prévue pour financer le coût de sa construction et de son fonctionnement80.

90. Toutefois, à l’heure actuelle, cette solution n’a pu voir le jour, la réglementation applicable en matière de protection des animaux nécessitant que la station respecte des règles techniques extrêmement strictes. Ainsi, la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction polynésienne de la biosécurité susmentionnée a expliqué, en audition, qu’« aucun terrain disponible n’a à ce jour été trouvé. Seul le local provisoire d’Aéroport de Tahiti (ADT) est disponible à l’aéroport de Tahiti, mais il n’est pas conforme à la réglementation relative à la protection animale : notamment il n’est pas climatisé, l’écoulement des eaux usées ne se fait pas correctement alors que les mesures de nettoyage et de désinfection ont été renforcées car les chiens et chats peuvent être atteints de Covid 19 et excréter du virus, et ne peut donc pas accueillir les animaux sur une longue durée en cas de non-conformité. Une étude est en cours pour aménager de manière conforme le local de l’ancien bâtiment de la compagnie Air Tahiti Nui »81.

91. Cette alternative est donc, pour l’heure, uniquement à l’état de projet.

Conclusion intermédiaire sur les alternatives à la quarantaine à la station du Grais

92. Il ressort des développements qui précèdent qu’il n’existe à ce jour aucune alternative crédible à la station de quarantaine du Grais, détenue par la société GIP, pour ce qui concerne le transport d’un animal de compagnie depuis la France métropolitaine vers la Polynésie française.

93. En outre, si des efforts ont été mis en œuvre pour obtenir le développement d’alternatives en métropole comme en Polynésie française, ces démarches n’ont pour l’instant pas encore abouti, principalement en raison de barrières administratives, techniques et logistiques.

c) Moment des contrôles sanitaires

94. S’agissant du moment auquel les contrôles sanitaires doivent être effectués sur l’animal, l’article 5 – 9° de l’arrêté n° 738 CM précité dispose que celui-ci doit « avoir subi un examen clinique approfondi et ne présenter aucun signe de maladie transmissible et être reconnu à voyager dans les quatre jours précédant (son) chargement vers la Polynésie française ».

95. Les animaux séjournant dans une station de quarantaine doivent ainsi y rester au moins quatre jours avant leur départ vers la Polynésie française.

96. Dans les faits, la société GIP impose toutefois à tout animal à destination de la Polynésie française une période de quarantaine d’au moins huit jours. Ainsi, la gérante de la société GIP a indiqué à plusieurs reprises que « la Polynésie a établi quatre jours de quarantaine mais pour nous, ce n'est pas possible d'appliquer ces quatre jours pour des raisons de fermeture des administrations, de délais insuffisants pour le travail des vétérinaires et pour notre travail personnel. Nous avons établi un protocole sur huit jours qui a été validé par les autorités polynésiennes (…) Le passage de la quarantaine à quatre jours est un coup politique. Il ne tient pas compte de certaines contraintes, d’où le protocole »82.

4. CONDITIONS D’AGREMENT D’UNE STATION DE QUARANTAINE

a) Principes applicables

97. Pour être agréée par le ministère de l'agriculture polynésien, une station de quarantaine doit répondre aux exigences de l’arrêté n° 829 CM précité.

98. Par station de quarantaine, il faut entendre « l’ensemble des locaux devant assurer l’isolement des animaux placés en quarantaine » (article 2 de l’arrêté n° 829 CM précité).

99. La réglementation à laquelle doit se soumettre la station de quarantaine est exigeante, tant en termes de construction83 (clôture ou mur extérieur de séparation, hauteur minimale, gardes barbelés à fixer, distances de séparation à respecter, système de fermeture et de verrouillage automatique des portes, aires de repos et d’exercice, alimentation en eau potable, maximum deux entrées, etc.) que de surveillance (qui doit être assurée 24 heures sur 24, avec un logement sur place pour le gardien, etc.), de formation du personnel84, d’équipement (la station doit notamment disposer d’un véhicule aux caractéristiques spécifiques, préalablement autorisé par le vétérinaire officiel85, et d’une salle de soins vétérinaires équipée et aménagée pour des chirurgies86) ou de formalités administratives (tenue d’un registre des entrées et des sorties87, système d’identification de chaque animal et de son propriétaire88, etc.).

b) La station de quarantaine créée par GIP

100. En France métropolitaine, seule la société GIP a obtenu un agrément pour sa station du Grais. Elle a ainsi été autorisée à y réaliser la quarantaine des chiens, en vertu de l’agrément délivré le 20 décembre 201089, puis la quarantaine des chats, en vertu de l’agrément délivré le 8 décembre 201190.

101. Avant la construction de sa station, GIP exerçait déjà une activité de transitaire ou commissionnaire de transport d’animaux vivants à destination de la Polynésie française. Elle envoyait alors les animaux effectuer leur quarantaine dans une station en Angleterre, puis les faisait affréter vers la Polynésie française avec un vol au départ de Londres. Toutefois, ce vol a fini par être supprimé. La société GIP devait alors envoyer les animaux par voie routière et maritime de Paris à Londres pour qu’ils y effectuent leur quarantaine, avant de les faire revenir à Paris pour les faire embarquer à bord d’un vol pour Papeete91.

102. Afin de faciliter l’exportation des animaux notamment vers la Polynésie française, GIP a décidé de construire sa propre station de quarantaine92.

103. Sur le plan administratif, les démarches en vue d’obtenir les deux agréments précités se sont avérées particulièrement longues, ainsi qu’en atteste la société GIP en audition : « il a fallu attendre 3 ans pour obtenir l’agrément »93.

104. La gérante de GIP justifie ce délai par deux raisons principales. D’une part, elle a déclaré avoir mis un certain temps à remplir le dossier administratif d’agrément de sa station, le français n’étant pas sa langue maternelle. D’autre part, elle a indiqué que pour obtenir cet agrément, « il a fallu attendre un changement de loi sur le territoire métropolitain »94. Selon la gérante : « suite à notre demande, la loi a en effet été modifiée afin d’autoriser l’ouverture d’une station de quarantaine en France, afin que les animaux n’aient plus obligatoirement à passer par l’Angleterre »95.

105. D’autres éléments recueillis lors de la présente instruction révèlent qu’une partie des démarches nécessaires à l’obtention des agréments susmentionnés ont été entreprises quelques années plus tôt.

106. La société GIP a notamment déposé une déclaration et en a reçu récépissé en tant qu’établissement pratiquant des échanges nationaux et internationaux d’animaux vivants auprès de la préfecture de l’Orne le 26 décembre 200196. Cette déclaration lui a permis d’exporter des animaux vivants, en vertu des arrêtés des 9 juin 1994 et 8 août 1995 modifiés.

107. Par ailleurs, la gérante de la société GIP a déposé une déclaration au titre des installations classées pour la protection de l’environnement et en a reçu récépissé, pour l’exploitation d’un site de 50 chiens, auprès de la commune du Grais, le 3 juin 200397. En effet, en vertu de l’article 3 de l’arrêté n° 829 CM précité, si la capacité d’accueil de la station excède 20 chiens sevrés, le dossier de demande d’agrément doit alors nécessairement comporter une autorisation d’exploiter une installation classée pour la protection de l’environnement de 1ère classe délivrée par le ministère de l’environnement.

108. Par la suite, en 2008, la gérante de la société GIP a entretenu de nombreux échanges avec les autorités polynésiennes, à l’occasion desquels ces dernières lui ont rappelé les différentes normes techniques et sanitaires que le bâtiment abritant la quarantaine devait respecter afin que la station obtienne les agréments nécessaires98.

109. Les premières démarches entreprises par la société GIP pour obtenir les agréments précités datent donc de 2001.

110. Sur le plan logistique, la station de GIP a été construite dans un bâtiment existant qui abritait initialement un chenil, construit entre novembre 2004 et mi-2005. Par la suite, une partie de ce bâtiment a fait l’objet de nouveaux travaux, entre juillet et octobre 2010, en vue d’y abriter la station de quarantaine99.

111. Ces travaux ont fait suite à des échanges nombreux100, sur près de deux ans101, entre la société GIP et des vétérinaires officiels de la Polynésie française, afin de s’assurer que la future station en construction respecterait la réglementation applicable. Aujourd’hui, la société dispose de 8 boxes affectés à son activité de quarantaine, abritant notamment les animaux à destination de la Polynésie française, et de 22 boxes affectés à son activité de chenil102.

112. Si les travaux entrepris se sont révélés, dans un premier temps, conformes à la réglementation polynésienne concernant l’accueil des chiens, le rapport d’inspection mené par le préfet de l’Orne le 26 novembre 2010 révèle toutefois que « des non-conformités majeures existent en ce qui concerne les dispositions visant à éviter les fuites des chats »103. De ce fait, de nouvelles mesures ont dû être mises en œuvre par GIP pour se conformer aux normes prévues. La société a ainsi reçu ses agréments à un an d’intervalle : le 20 décembre 2010104 pour la quarantaine des chiens, puis le 8 décembre 2011105 pour la quarantaine des chats.

113. Depuis sa création et jusqu’à ce jour, cette station de quarantaine est la seule en France métropolitaine, ainsi que l’ont indiqué non seulement la société GIP106 mais en outre ses concurrents107, et deux vétérinaires officiels rattachés à la direction de la biosécurité de la Polynésie française108.

114. Outre la quarantaine, GIP assure également l’organisation du transport par fret aérien des animaux de compagnie. Si ce segment connaît une forte concurrence, il est ressorti de l’instruction que les concurrents de GIP n’envisagent pas de construire, de manière similaire à la société GIP, leur propre station de quarantaine109.

115. Plusieurs raisons expliquent cet état de fait.

116. Premièrement, certaines entreprises – lesquelles sont des transitaires de métier – évoquent les difficultés techniques liées à la construction d’un bâtiment pour abriter les animaux. Ainsi, la société Bagages du monde a envisagé de construire, non pas une station de quarantaine, mais un bâtiment abritant une pension. Si les caractéristiques techniques à respecter étaient moins strictes que pour une station de quarantaine, les contraintes d’isolation spécifiques à la quarantaine n’étant pas obligatoires, le responsable de la société Bagages du monde a révélé, en audition, s’être « fait retoquer par la commune de Roissy-en-France sur le terrain pour 3 cm manquants. On a fait toutes les démarches administratives et elles n’ont pas abouti car il manquait 3 cm de distance par rapport au grillage. Elle [cette station] aurait été destinée à des animaux en transit que l’on fait garder aujourd’hui par une pension agréée du Val-d’Oise. »110[note ajoutée]. Pourtant, la société estime avoir respecté toutes les exigences administratives nécessaires à la construction de ce bâtiment. Le gérant de la société a notamment dû « pass[er] des diplômes pour pouvoir gérer une pension. Il existe en effet une formation de plusieurs jours, sanctionnée par un examen. »111. Les exigences liées à la construction d’une station de quarantaine étant plus nombreuses et plus difficiles à respecter, le gérant a par conséquent indiqué en audition qu’il n’envisageait pas, à plus ou moins brève échéance, de construire une telle station112.

117. Deuxièmement, pour d’autres entreprises, comme la société First AirFrigo, la construction d’une station de quarantaine n’est pas envisagée puisque la quarantaine n’est plus obligatoire de jure (voir l’arrêté n° 738 CM précité 113), même si elle l’est de facto. Le gérant de la société, auditionné le 16 septembre 2020, a ainsi déclaré : « étant donné qu’il n’est pas obligatoire de passer par une station de quarantaine [pour affréter un animal de compagnie à destination de la Polynésie française], nous n’avons pas envisagé d’en construire une. On ne va pas faire quelque chose si ce n’est pas obligatoire »114[note ajoutée].

118. Enfin, certaines entreprises ont expliqué que la gestion d’une station de quarantaine relève d’un métier spécifique, différent du métier de transitaire. Ainsi, la responsable des ventes de la société SCTIL, a déclaré en audition : « on n’est pas habilité pour effectuer des quarantaines. C’est un métier. Je reste sur ma prestation de transport. Ce n’est pas dans notre état d’esprit de vouloir faire une quarantaine. On est un simple transitaire »115.

119. À l’heure actuelle, la station de GIP est donc la seule station de quarantaine située en France métropolitaine accueillant des animaux de compagnie à destination de la Polynésie française.

5. CONDITIONS LIEES AU TRANSPORT TERRESTRE DES ANIMAUX DE COMPAGNIE ENTRE LA STATION DE QUARANTAINE DE ROISSY-CHARLES DE GAULLE

a) Principes applicables

120. La réglementation polynésienne ayant été initialement adoptée pour régir les stations de quarantaine situées en Polynésie française, elle ne spécifie pas les conditions dans lesquelles les animaux doivent voyager d’une station de quarantaine située en France métropolitaine vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, ni le statut du transporteur. Seules y sont précisées les conditions dans lesquelles l’animal doit être transporté, quel que soit le territoire sur lequel il est situé.

Les conditions de transport

121. Les conditions du transport routier d’un animal de compagnie entre une station de quarantaine située en France métropolitaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle découlent de plusieurs textes, d’origine polynésienne et métropolitaine.

122. S’agissant des conditions relatives au transporteur, sur le territoire métropolitain, le transport d’animaux vivants est régi par les articles L. 214-12 et R. 214-49 et suivants du code rural, qui imposent à toute personne transportant des animaux, dans un but lucratif, pour son compte ou celui d’un tiers, d’obtenir un agrément116 délivré par le préfet du département compétent et en pratique, par la DDPP compétente.

123. S’agissant des conditions dans lesquelles l’animal doit être transporté, la réglementation polynésienne en a précisé le cadre afin de préserver le statut sanitaire favorable de la Polynésie française et de ne pas introduire, sur son territoire, de maladies transmises par les animaux.

124. Ainsi, en vertu de l’article 17 de l’arrêté n° 829 CM précité, la station de quarantaine doit disposer d'un véhicule équipé d’un compartiment fermé, séparé du conducteur et muni d’une porte pouvant être verrouillée. Les matériaux de ce compartiment doivent être faciles à nettoyer et à désinfecter. Enfin, le véhicule doit être autorisé par le vétérinaire officiel.

125. L’article 23 de l’arrêté n° 829 précité impose, quant à lui, un certain nombre de règles à respecter lors du transport de l’animal, et notamment :

a. les animaux doivent être mis en cage dans le propre local d’hébergement et doivent être accompagnés d’un permis délivré par le vétérinaire officiel ;

b. ils doivent être transportés dans des cages autorisées par le vétérinaire officiel et munies de systèmes de fermeture efficaces ;

c. le responsable de la station de quarantaine ou son représentant doit accompagner les animaux jusqu'à leur arrivée dans leur local d'hébergement, étant entendu que les propriétaires des animaux ne sont pas autorisés à les transporter ;

d. enfin, pour être transportés ensemble, les animaux doivent avoir le même statut sanitaire.

Le statut de transporteur

126. Qu’il s’agisse des législations ou réglementations métropolitaines et polynésiennes, aucune n’encadre le statut du transporteur, ni ne précise en particulier s’il peut ou non s’agir d’un prestataire externe.

127. Il en découle qu’en principe, si le propriétaire d’une station de quarantaine peut réaliser cette prestation (du moment qu’il respecte les conditions de transport prévues), il en est de même d’un prestataire externe qui respecterait les mêmes conditions de transport.

b) Le transporteur actif depuis la station du Grais

 128. En l’espèce, le transport routier de l’animal entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle est effectué exclusivement par la société GIP, qui possède un véhicule en propre prévu à cet effet et qui ne recourt jamais à un prestataire extérieur117, ainsi que cela sera développé aux paragraphes 157 et suivants.

6. CONDITIONS LIEES AU TRANSPORT PAR FRET AERIEN D’ANIMAUX DE COMPAGNIE ENTRE ROISSY-CHARLES DE GAULLE ET PAPEETE

a) Principes applicables

 129. Comme évoqué précédemment au paragraphe 17, l’activité d’affrètement d’un animal de compagnie n’est pas exercée par les compagnies aériennes, qui n’entretiennent aucune relation directe avec les clients, mais est prise en charge par des transitaires ou commissionnaires de transport qui font office d’intermédiaires entre ces deux types d’acteurs.

130. Le transport d’animaux de compagnie nécessite par ailleurs une expertise particulière. Si tous les transitaires ou commissionnaires situés en France sont techniquement en mesure de réaliser pareille prestation, seuls interviennent dans les faits ceux qui sont soucieux de répondre à une demande qui s’avère, d’une part, très technique en raison des conditions sanitaires particulières à respecter pour transporter un animal et, d’autre part, très spécifique, du fait de la dimension affective de la relation qu’entretiennent les propriétaires avec leurs animaux de compagnie.

131. S’agissant des conditions techniques à respecter pour réaliser la prestation de transport par fret aérien d’un animal, la température en soute doit tout d’abord pouvoir être contrôlée et la soute doit être alimentée en oxygène. Cela engendre un coût supplémentaire en kérosène118.

132. En outre, la cage dans laquelle l’animal est transporté doit répondre aux normes IATA.

133. Par ailleurs, l’animal ne peut pas voyager avec n’importe quelle autre cargaison, ce qui nécessite de réserver des vols spécifiques119.

134. Ces contraintes s’imposent au transitaire ou au commissionnaire de transport qui achète une prestation de transport d’animal vivant à une compagnie aérienne.

135. S’agissant de la gestion de la relation commerciale, la relation affective entre l’animal et son propriétaire induit une relation commerciale particulière entre les transitaires et leurs clients, qui attendent d’être rassurés et d’avoir des nouvelles régulières de leurs animaux. Le transport des animaux de compagnie est, en ce sens, très différent du transport de meubles dans le cadre d’un déménagement, par exemple.

136. Comme l’a déclaré le représentant de la société Capwest en audition le 2 mai 2017, ce marché est ainsi très « contraignant à gérer au niveau des particuliers qui vont nous appeler 20 fois par jour pour savoir si l’animal va bien »120. Il poursuit : « C’est une clientèle très difficile à gérer »121.

137. En raison de ce fort lien affectif , les propriétaires sont par ailleurs prêts à accepter, quoi que non sans contestation, un choix réduit quant au prestataire réalisant l’affrètement, ainsi que des tarifs très élevés, comme en témoigne le courriel d’une consommatrice, Mme C..., le 27 janvier 2016, envoyé à la responsable de la société SCTIL à laquelle elle souhaitait avoir recours : « je suis très déçue de ne pouvoir transiter mes animaux par votre intermédiaire et de me trouver face à un mur... de plus de 5000 euros, dépassant largement le budget attribué à mon installation en Polynésie. Mais que ne ferait-on pas pour nos animaux de compagnie » [caractères gras ajoutés]122.

138. Pour toutes ces raisons, tant techniques que commerciales, certains transitaires envisagent cette activité comme une vitrine de leur savoir-faire en matière de transport. Un responsable de la société First AirFrigo a ainsi déclaré : « transporter un animal est une valeur ajoutée, (…) ça montre notre savoir-faire et nos compétences. Ça peut mettre indirectement en confiance le client puisque si on arrive à accomplir un service très technique, on arrivera a fortiori à accomplir des prestations plus simples »123.

139. À l’inverse, d’autres transitaires préfèrent ne pas intervenir dans le secteur du transport par fret aérien d’animaux vivants, le jugeant trop contraignant124.

b) Le transitaire actif vers la Polynésie française

 140. Au cas présent, seule la société GIP offre des prestations de transport par fret aérien d’animaux de compagnie entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et Papeete. Comme indiqué précédemment, une fois que les animaux ont achevé leur séjour en quarantaine dans la station du Grais, ils sont emmenés par voie routière par GIP vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, où ils sont alors pris en charge par les compagnies aériennes pour leur affrètement à destination de la Polynésie française.

141. Interrogée au cours de son audition sur la question de savoir pourquoi la société GIP prenait en charge de manière globale et sans les dissocier les prestations de quarantaine, de transport routier et d’organisation du transport aérien, la gérante de la société GIP a ainsi répondu :

« nous ne faisons pas la moitié ou le quart de travail. Notre travail est de prendre en charge l’animal de A à Z. L’animal est scellé dans une cage. On ne peut pas donner la cage à quelqu’un, car on ne peut pas prendre le risque que le scellage soit ôté. Le protocole est le même depuis 2010. C’est notre responsabilité. En outre, financièrement, on ne veut pas vendre une seule partie de notre prestation, et laisser ensuite le client passer par un autre transitaire. Nous aussi nous sommes transitaires. Il n’y aurait aucune raison de faire cela »125.

142. Les transitaires de transport concurrents de GIP sur les destinations mondiales hors Polynésie française ne réalisent jamais cette prestation lorsque les animaux de compagnie sont envoyés en Polynésie française, en raison du refus de GIP de dissocier la prestation de quarantaine des prestations de transport et d’affrètement (voir notamment les développements aux paragraphes 157 et suivants).

143. Cela ne résulte toutefois d’aucune contrainte juridique ni sanitaire, ainsi que l’a expliqué la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction polynésienne de la biosécurité susmentionnée, dans un courriel du 3 octobre 2017 : « Concernant l’affrètement, cela ne relève pas du contrôle zoosanitaire. Il faut que la cage de l’animal demeure scellée jusqu’à l’examen physique par un vétérinaire de la direction de la biosécurité à son arrivée à Tahiti »126. Ainsi, du moment que la cage reste scellée entre la station de quarantaine et l’arrivée en Polynésie française, tout opérateur est censé pouvoir affréter un animal de compagnie vers cette destination.

C. L’ENTREPRISE CONCERNEE

144. La société GIP, seule concernée par les pratiques, a été créée en France en mars 2009, sous la forme d’une société à responsabilité limitée (SARL).

145. Spécialisée dans le secteur de l’affrètement et de l’organisation des transports, GIP dispose d'un agrément lui permettant de transporter tout type de bien.

146. Toutefois, GIP a fait le choix de se spécialiser dans le transport des animaux de compagnie dans le monde entier.

147. La société dispose de deux établissements : l’un situé au Grais, qui s’occupe de l’activité de chenil (quarantaine et pension pour animaux), l’autre situé à Roissy, qui a pour activité l’organisation du transport par fret aérien des animaux vivants127.

148. Outre les agréments pour la quarantaine (voir paragraphe 145), la société dispose d’un agrément pour réaliser le transport terrestre des animaux, délivré le 2 février 2008 par la DDPP de Normandie (autorisation de type 1 pour le transport d’animaux vivants de moins de huit heures)128.

149. En tant que transitaire ou commissionnaire de transport129, GIP propose un service d’export d’animaux vivants tout inclus. S’agissant de la Polynésie française, sont comprises les prestations liées à la quarantaine (réservation de place, vérification des documents avant l’entrée en quarantaine, la garde d’animaux et la prestation de quarantaine en tant que telles) et les prestations liées à l’affrètement (réservation du vol aérien, scellage de la cage, livraison de l’animal à la compagnie aérienne pour le vol, gestion de l’arrivée à Papeete et organisation de la visite du vétérinaire officiel de la direction de la biosécurité au moment de son arrivée).

D. LES PRATIQUES CONSTATEES

150. Depuis la création de sa station du Grais, GIP refuse de dissocier la prestation de quarantaine des animaux de celles du transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et de l’organisation du transport par fret aérien vers Papeete.

151. En effet, tout consommateur souhaitant envoyer son animal de compagnie en Polynésie française depuis la métropole est de facto contraint de lui faire effectuer une quarantaine dans la station de GIP. L’entreprise liant ensuite à cette première prestation la prestation de transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celle de l’organisation du transport par fret aérien, les propriétaires d’animaux de compagnie n’ont pas d’autre choix que de recourir à GIP pour ces trois prestations.

152. Cette contrainte imposée aux clients empêche les concurrents potentiels de GIP d’offrir leurs propres services aux propriétaires d’animaux de compagnie, alors même qu’ils souhaitent pouvoir le faire.

153. Par conséquent, GIP ne souffre aucune concurrence ni sur le transport des animaux depuis Le Grais jusqu’à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle ni sur l’organisation du transport par fret aérien à destination de la Polynésie française. Le lien que cette entreprise impose entre ces différentes prestations crée ainsi un effet de levier entre son monopole de fait en matière de quarantaine et les prestations liées au transport, routier et aérien, ainsi que cela sera développé ultérieurement.

154. Plusieurs entreprises offrent des prestations de transport par route d’animaux de compagnie vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. De nombreuses entreprises sont également spécialisées dans l’offre de services liés à l’organisation du transport par fret aérien de ces mêmes animaux vers la Polynésie française.

155. Toutefois, malgré des demandes répétées de consommateurs et d’entreprises concurrentes, GIP a toujours refusé de dissocier les différentes prestations ce qui aurait permis à ses concurrents d’intervenir sur le transport des animaux à destination de la Polynésie française, en imposant à ses clients de recourir exclusivement à ses propres services après le passage des animaux dans sa station de quarantaine.

156. Ce comportement ressort des témoignages fournis par GIP (a), par ses concurrents potentiels (b) et par de nombreux consommateurs (c).

1. LES DECLARATIONS DE GIP

157. GIP déclare elle-même refuser de laisser des entreprises concurrentes, d’une part, acheminer les animaux de compagnie depuis sa station de quarantaine vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et, d’autre part, organiser leur affrètement vers la Polynésie française.

158. S’agissant plus particulièrement des trajets entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, la gérante a déclaré, lors de son audition du 1er octobre 2020 :

« c’est toujours nous qui effectuons les trajets (…) car on a un agrément et un protocole à suivre. Le protocole est agréé par la Polynésie française et il prévoit qu’on transporte nous-mêmes les animaux. Le véhicule appartient à la société. Le propriétaire n’est pas présent dans la voiture lors du transport de l’animal de la station de quarantaine vers l’aéroport de Roissy. Une fois que l’animal arrive à l’aéroport, on attend sur le quai jusqu’à ce que l’animal passe la sécurité sous douane (il passe sous rayons x). Il est ensuite pris en charge par la compagnie aérienne »130.

159. S’agissant ensuite de la prestation d’organisation du transport par fret entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete, la gérante a indiqué, lors de l’audition précitée : « Oui [nous recevons des demandes de clients potentiels désireux de n’obtenir qu’une prestation de quarantaine]. Mais nous ne faisons pas la moitié ou le quart de travail.

Notre travail est de prendre en charge l’animal de A à Z, entre notre station de quarantaine et Papeete. L’animal est scellé dans une cage. On ne peut pas donner la cage à quelqu’un, car on ne peut pas prendre le risque que le scellage soit ôté. Le protocole est le même depuis 2010. C’est notre responsabilité. En outre, financièrement on ne veut pas vendre une seule partie de notre prestation, et laisser ensuite le client passer par un autre transitaire. Nous aussi nous sommes transitaires. Il n’y aurait aucune raison de faire cela » 131 [note ajoutée].

160. Si les obligations réglementaires précitées doivent être respectées, elles ne sont toutefois pas de nature à imposer une prise en charge globale de l’animal par la même entreprise entre son entrée en quarantaine et son arrivée sur le sol polynésien. Elles ne s’opposent donc pas à ce que des entreprises autres que GIP prennent en charge la prestation de transport routier et/ou la prestation d’organisation du transport par fret aérien.

161. Ces éléments sont confirmés dans les déclarations de la vétérinaire officielle de la direction de la biosécurité de la Polynésie française.

162. S’agissant tout d’abord du transport routier de l’animal entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, selon cette vétérinaire officielle, les seules conditions sanitaires à respecter sont que « la cage soit scellée dans la quarantaine avant que le transporteur prenne l’animal, que le véhicule ait été nettoyé et désinfecté au préalable et que seuls des animaux de même statut sanitaire soient véhiculés ensemble (séparément dans leur cage). L’agrément délivré par la DDPP devrait suffire » 132.

163. Elle a ainsi indiqué que le fait que la prestation de transport routier soit actuellement prise en charge par GIP après le passage en quarantaine de l’animal dans sa station « n’est en rien une obligation légale. Rien dans le texte n’interdit que celui-ci soit réalisé par une autre société, dès lors qu’elle ferait également l’objet d’un agrément de ses véhicules (désinsectisés) et de ses procédures »133. L’enjeu est en effet « d’éviter toute possibilité de recontamination après l’examen du vétérinaire et le scellement de la cage. Il faut donc qu’[e le transport] soit réalisé dans un véhicule aux normes »134. Par ailleurs, en vertu de l’article 23 de l’arrêté n° 829 CM précité, « le responsable de la station de quarantaine ou son représentant devra accompagner les animaux jusqu'à leur arrivée dans leur local d'hébergement, étant entendu que les propriétaires des animaux ne sont pas autorisés à les transporter ». Tout transporteur routier détenant un véhicule agréé, répondant aux normes édictées par la réglementation polynésienne135 et détenant un pouvoir de représentation de la société GIP devrait donc pouvoir exercer cette prestation de transport.

164. S’agissant ensuite de l’organisation du transport par fret aérien entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete, selon la vétérinaire officielle précitée, « cela ne relève pas du contrôle zoosanitaire ». Par conséquent, la seule condition sanitaire à respecter est la suivante : « Il faut que la cage de l’animal demeure scellée jusqu’à l’examen physique par un vétérinaire de la direction de la biosécurité à son arrivée à Tahiti »136. Aussi, tout organisateur du transport par fret aérien devrait pouvoir acheminer des animaux à destination de la Polynésie française, après leur séjour en quarantaine dans la station de GIP, du moment qu’il s’assure que les cages contenant lesdits animaux demeurent scellées jusqu’aux contrôles sanitaires réalisés sur le territoire polynésien. 124

165. Il résulte de ce qui précède que, dès lors qu’elle prend en charge un animal à destination de la Polynésie française dans sa station de quarantaine, la société GIP impose aux consommateurs une offre globale comportant les trois prestations précitées, relative à la quarantaine, au transport routier et à l’organisation du transport par fret aérien.

2. LES DECLARATIONS DES TRANSITAIRES ET LES DEVIS DES TRANSPORTEURS ROUTIERS

166. De nombreux concurrents potentiels de GIP, tant pour l’organisation du transport par fret aérien que pour le transport par route d’animaux de compagnie à destination de Papeete sont dans l’impossibilité d’effectuer ces prestations du fait du comportement de GIP. Leurs témoignages sont repris ci-après, ainsi que des devis de transporteurs routiers.

a) La société Service Conseils Transport Interne Logistique (SCTIL)

167. SCTIL est une société spécialisée dans l’affrètement et l’organisation des transports de toutes marchandises.

168. Bien qu’elle affrète des animaux vivants vers toutes les destinations du monde, la société SCTIL ne réalise aucune activité économique vers la Polynésie française137.

169. N’étant notamment pas habilitée à exploiter une station de quarantaine, la responsable des ventes de la société SCTIL a indiqué, en audition, avoir tenté de trouver une solution pour remédier à cela, consistant à demander à GIP de bien vouloir prendre en charge l’animal dans sa station afin qu’il y effectue sa quarantaine, avant qu’il lui soit remis en vue de son affrètement vers la Polynésie française.

170. Cette responsable explique toutefois que GIP lui a opposé un refus : « Je n’ai jamais eu d’activité dans le transport d’animaux de compagnie en Polynésie française. En effet, nous ne sommes pas habilités (…). Il y a un service de quarantaine qui est obligatoire et Goldenway est le seul prestataire agréé à pouvoir faire la quarantaine. Goldenway en profite pour obliger les particuliers à faire le transport. Nous, nous ne pouvons donc pas intervenir. II y a 7-8 ans, un particulier est venu me voir pour me demander si je pouvais faire un devis pour affréter un animal vers la Polynésie française. J’ai communiqué un devis. Goldenway a toutefois refusé de nous donner les animaux. Air France est même intervenue pour m’indiquer que je ne pouvais pas effectuer la prestation. Nous n’avons pas pu récupérer les animaux donc nous n’avons jamais pu affréter cet animal vers la Polynésie française. »138.

171. Récemment, le 14 septembre 2020, la responsable des ventes a indiqué avoir réitéré auprès d’Air France une demande d’achat de prestation de transport par fret aérien pour un animal vers la Polynésie française : « Bonjour Nathalie, Merci me confirmer faisabilité pour : 1 CHIEN – TYPE B.ALLEMAND CDG/PPT DEBUT D’ANNEE PROCHAINE 1 CAGE 102X67X777 Merci me dire si on peut le faire ou bien devons-nous repasser par le transitaire GOLDEN WAY ?? »139.

172. La responsable « veille réglementaire et opération » sur le réseau Air France pour les animaux vivants lui a alors répondu, par courriel, le 16 septembre 2020 : « Bonjour (…) Le protocole sanitaire vers PPT [Papeete] n’a pas changé Et je ne peux te dire s’il évoluera prochainement A la date d’aujourd’hui nous continuons comme la réglementation nous l’impose Merci de ta compréhension »140.

173. À deux reprises il y a un peu plus de six ans, l’entreprise SCTIL a expliqué avoir réussi à s’affranchir de la réalisation d’une quarantaine dans la station de GIP en envoyant l’animal de compagnie en quarantaine à Nouméa (Nouvelle-Calédonie) pendant dix jours, avant qu’il soit pris en charge par un transitaire local afin de l’affréter vers Papeete141.

174. Cette démarche s’est toutefois révélée très « lourde administrativement » 142, deux demandes d’importation ayant dû être introduites (une au titre de l’entrée de l’animal en Nouvelle-Calédonie, l’autre au titre de son entrée en Polynésie française). Cette solution a par ailleurs nécessité le recours à deux transitaires différents, et s’est avérée moins respectueuse du bien-être animal en raison du temps de trajet qui s’en est trouvé augmenté. Selon SCTIL, cette démarche n’était donc pas « entendable pour le particulier »143, et il était préférable de « passer par un vol direct »144. Pour toutes ces raisons, la responsable des ventes de la société SCTIL a ainsi indiqué que l’envoi d’un animal en quarantaine à Nouméa n’était réalisé que très rarement145.

175. Pourtant, la demande d’affrètement d’animaux vivants à destination de la Polynésie française auprès de la société SCTIL existe bel et bien. Lors de son audition, la responsable des ventes a ainsi expliqué : « J’ai eu deux demandes la semaine dernière pour transporter des animaux de compagnie vers la Polynésie française. Ce sont des demandes récurrentes. »146. Le plus souvent, les particuliers ne s’adressent à la société SCTIL que dans un second temps, « pour faire baisser les tarifs » 147 selon la gérante, les autorités polynésiennes les orientant, dans un premier temps, vers la société GIP.

176. Sur le plan économique, la responsable des ventes de l’entreprise a indiqué que la prise en charge de l’activité liée à l’affrètement d’animaux de compagnie vers la Polynésie française aurait un effet très positif sur son activité et permettrait « une augmentation substantielle »148 de son chiffre d’affaires. Elle serait donc très intéressée par son développement.

b) La société Hesnault

 177. La société Hesnault est spécialisée dans le secteur d'activité de l'affrètement et de l’organisation des transports.

178. Si la société Hesnault était « le premier transitaire par containers de groupage de métropole à installer des agences en propre en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie dans les années 1960 »149, la société n’affrète à ce jour et depuis environ cinq ans, aucun animal de compagnie en Polynésie française150.

179. La société a par ailleurs indiqué recevoir très peu de demandes de clients en ce sens. Selon le responsable de l’entreprise, cela pourrait notamment s’expliquer par le fait que « la DAVAR [Direction des Affaires Vétérinaires, Alimentaires et Rurales] expliquait [aux clients] que GoldenWayPet était la seule à avoir leur dérogation pour faire la quarantaine en France (6jours) » 151[notes ajoutées]. Quand malgré tout, l’entreprise reçoit des demandes émanant de particuliers, elle répond alors « soit qu’[elle] ne sait pas faire, soit (…) de se tourner vers Goldenway »152 [note ajoutée].

180. En audition, le directeur du département aérien a par ailleurs indiqué que la société Hesnault était intéressée par le développement de cette activité : « Nous souhaiterions travailler sur Papeete, d’autant que nous avons une filiale là-bas, mais aujourd’hui la contrainte de la quarantaine ne nous le permet pas.. (…) La Polynésie française est la seule destination qui nous bloque à cause de la quarantaine (…). Nous estimons que le marché de Papeete représente le même chiffre d’affaires que celui de Nouméa »153, étant précisé que Nouméa est à l’heure actuelle la destination vers laquelle la société exporte le plus d’animaux vivants, soit une soixantaine par an154.

c) La société Bagages du monde

 181. La société Bagages du monde est spécialisée dans les services auxiliaires des transports aériens.

182. L’activité de la société se décompose en deux branches. La première concerne le transport d’effets personnels et d’animaux vivants. Elle s’adresse principalement aux expatriés. La seconde concerne des services aux passagers en aéroport (prestations de type consignes à bagages)155.

183. Le principal apporteur d’affaires d’affrètement d’animaux vivants à travers le monde est le site internet de la société, dénommé « airtransportanimal.com »156. En 2020, la société a affrété principalement des animaux vivants vers la Nouvelle-Calédonie, les Émirats Arabes Unis, les États-Unis, l’Australie et le Canada157.

184. Si la société Bagages du monde affrète des animaux vivants vers plusieurs destinations mondiales, s’agissant de la Polynésie française, le directeur général délégué de la société a indiqué en audition, le 17 septembre 2020 : « on ne transporte pas d’animaux en Polynésie française car la destination est contrainte par une législation locale qui impose que l’animal soit mis en isolation (c’est-à-dire en quarantaine) avant le départ de métropole. Aujourd’hui, on n’est pas en mesure de faire cette isolation car on n’a pas les moyens pour. Le prestataire qui propose cette prestation est Goldenway. Jusqu’à présent, Goldenway a toujours refusé de scinder sa prestation de quarantaine et sa prestation de transport pour ne s’occuper que de la quarantaine. Nous ne pouvons donc pas transporter d’animaux de compagnie vers cette destination »158.

185. Pour autant, les demandes en la matière sont présentes et régulières159. Plus précisément, depuis 2013, la société a reçu 279 demandes écrites via les formulaires de demande en ligne de devis160, étant précisé que les appels téléphoniques et les demandes de contact n’ont pas pu être comptabilisés.

186. Comme l’a indiqué le responsable de la société en audition, la plupart des clients qui entrent en contact avec la société ont déjà obtenu un devis de la part de GIP pour affréter leur animal de compagnie en Polynésie, mais souhaiteraient scinder les prestations de quarantaine et de transport par fret aérien afin de diminuer le prix total. Afin de les satisfaire, l’entreprise a

« essayé de faire en sorte que la partie chenil pour la quarantaine soit assurée par Goldenway Pets et que [Bagages du monde] s’occupe de la partie transport, mais cette société a refusé. Elle ne veut faire la quarantaine qu’à condition qu’elle s’occupe du transport »161 [note ajoutée].

d) La société First Air Frigo

187. La société Fret International Rapide Serv Tran, dont le nom commercial est First AirFrigo est spécialisée dans l’affrètement et l’organisation des transports.

188. La Polynésie française est la seule collectivité d’outre-mer vers laquelle la société AirFrigo n’a aucune activité d’affrètement. En audition, l’un des responsables de cette société a ainsi déclaré, le 26 septembre 2017 : « concernant les chiens et les chats, nous arrivons à en envoyer dans le monde entier, sauf en Polynésie »162, en raison de la contrainte relative à la quarantaine.

189. S’agissant de la demande vers cette destination, le responsable précité a indiqué n’avoir quasiment aucune demande. Selon lui, cela peut s’expliquer par le fait que les particuliers recourent souvent à des forums en ligne pour connaître la marche à suivre pour acheminer un animal de compagnie vers la Polynésie française. Or, la société First AirFrigo n’y est pas référencée comme transitaire desservant cette destination en raison de la contrainte sanitaire qu’elle n’est pas capable de surmonter163.

190. Cette destination serait pourtant intéressante pour la société. L’un de ses responsables a en effet indiqué : « On aimerait faire la Polynésie française mais les contraintes sanitaires nous bloquent. La quarantaine n’est plus obligatoire mais l’est de fait puisqu’aucun vétérinaire officiel ne se déplace à l’aéroport. Chaque fois que les équipes ont contacté les vétérinaires de la DDPP, les vétérinaires ne voulaient pas se déplacer pour effectuer les contrôles sanitaires. Les animaux doivent donc passer par la quarantaine de Goldenway (…) La seule et unique contrainte pour transporter un animal en Polynésie est cette contrainte sanitaire »164.

e) Les devis émis par des transporteurs routiers

191. Le dossier comporte plusieurs devis émis par des transporteurs routiers compétents pour acheminer les animaux de compagnie depuis la station de quarantaine du Grais vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.

192. L’instruction a en effet permis d’identifier plusieurs sociétés agréées pouvant exercer ce type de transport. Ces sociétés sont notamment détentrices d’un agrément délivré par la DDPP compétente. À ce titre, peuvent être notamment mentionnées les entreprises suivantes :

a. Cador & Mistigri : société spécialisée dans le transport de chiens et de chats sur de longues distances (agrément de l’Essonne)165 ;

b. Tranidom Services : société spécialisée dans la pension familiale pour chiens et chats et services animaliers (agrément du Morbihan)166 ;

c. Soluce Animo : société spécialisée dans les services animaliers à domicile (taxi animalier, visites à domicile chat, promenades individuelles ou collectives) (agrément des Yvelines)167.

193. Le tarif qu’elles factureraient pour une prestation de transport d’un animal entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle (soit 256 km) ressort des devis demandés aux trois entreprises précitées en janvier 2021, qui mentionnent les sommes suivantes :

a. Cador & Mistigri : 602,40 euros TTC168 ;

b. Tranidom Services : 770,23 euros TTC169 ;

c. Soluce Animo : 412 euros TTC170.

194. Une offre potentielle existe donc bel et bien en la matière.

195. Néanmoins, GIP a toujours refusé que de telles entreprises prennent en charge les animaux après leur séjour en quarantaine dans sa station pour les transporter vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.

3. LES PLAINTES DE CONSOMMATEURS

a) Les plaintes de consommateurs ayant contacté la DIRECCTE de Basse-Normandie

Plainte de M. X... en 2015 concernant le transport de deux chiens

196. Le 3 novembre 2015171, la Brigade Interrégionale d’Enquête Concurrence (ci-après la

« BIEC ») a reçu un signalement de la DIRECCTE de Basse-Normandie, transmettant la plainte d’un consommateur, M. X....

197. Au printemps 2015, ce dernier souhaitait en effet faire transporter ses deux chiens vers la Polynésie française. Il s’est dans un premier temps tourné vers GIP pour en obtenir un devis172.

198. La société GIP a répondu à sa demande le 21 mai 2015173. Le devis était composé d’une seule offre globale, comprenant le service de quarantaine et l’organisation de l’affrètement de l’animal jusqu’en Polynésie française, pour un montant total de 5 108,30 euros pour ses deux chiens174.

199. Estimant ce montant trop élevé, M. X... a demandé à la société GIP de bien vouloir réviser le prix proposé175. Pour justifier sa requête, M. X... est revenu en détail sur le devis qui lui avait été soumis, contestant principalement trois éléments.

200. Premièrement, il conteste la durée de quarantaine que lui impose GIP, qui est de huit jours dans le devis alors que la législation et la réglementation polynésiennes n’en prévoient que quatre. Ainsi il précise « vous préconisez une mise en pension de mes chiens pour une durée de huit jours. Or, la Loi du pays n°2013-12 en date du 6 mai 2013, complétée par l’Arrêté N°738 CM en date du 15 mai 2013 n’en prévoit que 4 avant le départ. En effet, il m’est loisible de présenter mes animaux auprès d’un vétérinaire pour le premier examen clinique, de repartir avec eux et de les représenter quatre jours plus tard pour le second examen clinique, point de départ de l'examen approfondi. Ainsi, vous facturez quatre jours de mise en pension injustifiés »176.

201. Deuxièmement, M. X... conteste l’opacité tarifaire quant au transport des animaux depuis la station de quarantaine jusqu’à l’aéroport de Papeete, le devis comportant un tarif global non détaillé sur ce point. Il écrit notamment : « vous incluez dans votre devis le transport

« quarantaine - aéroport CDG - Papeete » pour un montant de 3 294,70 € sans aucun détail de montants des différents trajets, ni le nom de la compagnie aérienne en charge du fret et sans m’informer de ma possibilité d’embarquer sur ce même vol (tel que demandé lors de notre entretien téléphonique en date du 20 mai 2015) »177.

202. Enfin, M. X... conteste l’obligation qui lui est faite de choisir GIP pour la prestation d’affrètement des animaux vers la Polynésie française, dès lors qu’il choisit cette entreprise pour la prestation de quarantaine. « Il me semble important de vous rappeler que si vous bénéficiez d'un agrément ministériel vous conférant un monopole de police sanitaire en la matière, contestable sur le fond, cela ne vous confère aucun droit de m’imposer vos prestations de transports de frets pour lesquelles vous pratiquez des tarifs disproportionnés à l'aune des transporteurs concurrents »178.

203. Ne recevant aucune réponse de la part de GIP, le 5 juin 2015, M. X... a alors contacté par courriel la vétérinaire officielle du Département de la Qualité Alimentaire et de l’Action Vétérinaire, afin de connaître la démarche à accomplir pour obtenir un permis d’importation en Polynésie française pour ses deux chiens, dans l’hypothèse où ils effectueraient leur quarantaine dans la station de GIP et y seraient examinés par un vétérinaire officiel, mais seraient affrétés jusqu’en Polynésie par un autre transitaire. Il explique en effet qu’il « refuse que cette société [GIP] s’accapare la prestation commerciale de transport de fret, cette dernière pratiquant des tarifs exorbitants et injustifiés au regard de la concurrence. En effet, pour une même prestation, la compagnie Air France KLM Cargo, tout aussi compétente, propose des tarifs six fois moins élevés et m’offre la possibilité de voyager dans le même avion que mes chiens »179.

204. En réponse, la vétérinaire officielle lui a rappelé les conditions à respecter en vertu de la législation et de la réglementation polynésiennes pour que ses chiens obtiennent un permis d’importation. Elle l’a également informé du fait que le « transfert jusqu’à l'aéroport s’effectue donc en général par la GWP [acronyme utilisé par la vétérinaire officielle pour désigner GIP, note ajoutée] qui assure la continuité du service de quarantaine qu’elle offre. Il est important de comprendre que l’animal ne peut plus être en contact avec d’autres animaux, ni même tout simplement sorti de sa cage une fois celle-ci scellée. Les véhicules assurant le transit doivent être propres et exempts de parasites. La demande que vous formulez n’est par conséquent pas envisageable. Néanmoins, si vous ne voulez pas confier votre animal a la GWP, je peux vous conseiller de passer par le service de quarantaine de Nouvelle-Zélande (contactez les services vétérinaires du pays au mail suivant; http://mpi.govt.nz/importing/live-animals) ou de Nouvelle-Calédonie (contact : [email protected] ; site internet DAVAR : http://www.davar.gouv.nc/portnl/nage/porfal/davar/importations/aiiarantaine. Les démarches restent celles indiquées au lien précédemment cité dans le mail (*), mais la quarantaine a lieu ailleurs qu’en France »180.

205. Toutefois, les alternatives envisagées par la vétérinaire officielle dans son email ne sont ni crédibles, ni réelles, comme développé aux paragraphes 62 et suivants ci-dessus181.

206. Estimant que l’email de la vétérinaire officielle ne répondait pas à sa demande, M. X... lui a écrit, dans un courriel du 10 juin 2015, les éléments suivants : « il semble, à la lecture de votre mail, que vous n’avez pas cerné le problème soulevé. (…) La compagnie Air France KLM Cargo peut tout à fait réceptionner les cages scellées auprès de [Goldenway International Pets] à l’aéroport et les embarquer au sein de leurs avions dépourvus de tous parasites et de toutes maladies infectieuses. En outre, cette compagnie dispose d’une équipe compétente assurant la continuité de la quarantaine jusqu'à destination : l’animal reste placé dans sa cage scellée, est isolé de tout contact durant l’intégralité du voyage et fait l’objet d’une vérification par vos services à son arrivée sur le sol polynésien »182.

207. Dans un courriel du 10 juin 2015, la vétérinaire officielle a alors finalement confirmé auprès de M. X... qu’il n’y avait aucun obstacle législatif ou sanitaire à ce que la prestation de quarantaine et la prestation d’affrètement des animaux vers la Polynésie française soient scindées et prises en charge en partie par GIP puis en partie par un autre transitaire. Elle a ainsi répondu en ces termes : « Je vous ai transféré le mail envoyé au chef du département QAAV. Comme je lui disais, si elle n’y voit pas non plus d’entrave particulière et inhérente aux exigences de notre certificat sanitaire et de la loi de pays et arrêté CM 738, cela ne poserait pas de souci à notre niveau. Néanmoins est-ce que GWP accepterait de confier ce service à une autre société, rien n’est moins sûr »183.

208. À l’occasion de ce courriel, la vétérinaire officielle a joint, comme mentionné, le courriel qu’elle avait envoyé le jour même au chef du département QAAV : « Qu’en penses-tu ? De mon côté, cela me paraît tout à fait légitime. La question est : est-ce que Golden Way pets autorisera cette option puisqu’il y perd financièrement ? »184.

209. Fort de ces échanges, M. X... a recontacté la société GIP, le 23 juin 2015, afin d’obtenir un devis réactualisé destiné à lui permettre de recourir aux services de la société SCTIL concernant l’activité de transport par fret aérien de ses deux chiens à destination de la Polynésie française185.

210. Ne recevant aucune réponse satisfaisante de la part de GIP, M. X... a alors adressé une plainte aux services du ministère de l’économie186.

Plainte de Mme Y... en 2017 concernant le transport de deux chiens

211. Souhaitant également importer ses deux chiens en Polynésie française, et devant nécessairement passer par la société GIP dont elle trouvait le devis très élevé, Mme Y... a contacté la DIRECCTE afin de déposer une plainte187.

212. Dans celle-ci, elle indique avoir demandé à GIP premièrement de bien vouloir « détailler la ligne "Transport Quarantaine aéroport Paris CDG - PPT", à environ 2000 euros pour le transport chien » 188. Toutefois, en guise de réponse, GIP lui aurait répondu « avoir assez détaillé le devis »189.

213. Deuxièmement, Mme Y... mentionne avoir demandé à GIP de lui soumettre un nouveau devis, ne comportant que la prestation relative à la quarantaine et la prestation de transport routier de ses animaux entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. Elle souhaitait en effet que la société SCTIL se charge de la prestation d’affrètement de ses chiens vers la Polynésie française une fois qu’ils auraient été conduits par GIP dans leur cage scellée à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle190.

214. Elle précise à cet égard que : « le commissionnaire de transport SCTIL me propose un tarif de 1700 euros pour les 2 chiens, pour le transport aéroport Paris CDG- PPT. Alors que GOLDENWAY me propose environ 2800 euros pour les 2 chiens. pour le transport Quarantaine - aéroport Paris CDG – PPT. Le choix est vite fait, financièrement parlant »191.

215. En réponse, GIP a toutefois refusé, arguant que cela était « impossible, car la procédure de quarantaine empêche de fournir la (les) cage(s) à un tiers »192.

216. À l’appui de sa plainte, Mme Y... a transmis à la DIRECCTE un courriel envoyé par GIP, dans lequel cette dernière déclarait : « une fois que vos chiens nous sont remis, vous les retrouverez à l'arrivée de Papeete après leur visite vétérinaire. Vos animaux sont sous protocole de quarantaine et donc ne pourront pas être remis à un tiers »193.

217. Dans sa plainte à la DIRECCTE, Mme Y... en conclut : « ce que je comprends de toutes ces réponses, c'est que grosso modo GOLDENWAY m’impose de payer le package global "quarantaine + transport jusqu'à PPT" »194.

Plainte de Mme Z... en 2018 concernant le transport de deux chats et d’un chien

218. Le 28 mai 2018, Mme Z... a transmis à la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (ci-après « DDCSPP ») de l’Orne ainsi, qu’à l’association 30 millions d’amis195, un devis émis par GIP le 2 février 2018, d’un montant de 8 130,76 euros pour les prestations de quarantaine et d’affrètement vers la Polynésie française de deux chats nécessitant une cage de taille 2 et d’un chien nécessitant une cage de taille 6196.

219. Considérant que ce prix était très élevé, elle a pris attache avec la direction de la biosécurité du ministère polynésien afin d’obtenir directement auprès d’elle un permis d’importation pour ses animaux.

220. Le technicien vétérinaire lui a répondu par courriel, le 20 avril 2018, que pour obtenir un tel permis, elle devait, d’une part, fournir un certain nombre de documents dont il donne la liste, et d’autre part, transmettre un certain nombre d’autres documents à une station de quarantaine ou au pays de transit, en ajoutant qu’« actuellement, la seule quarantaine agréée en France se situe dans l’Orne : Goldenway International Pets. Vous pouvez également faire appels à des quarantaines agréées hors territoire français (Nouvelle-Zélande, Australie, Nouvelle-Calédonie) ou faire transiter votre animal par un pays dont le certificat sanitaire a déjà été négocié »197.

221. Dans un courriel du 23 avril 2018, Mme Z... lui a alors répondu : « Suis-je vraiment obligée de mettre mes animaux en quarantaine, car l’arrêté du 15 mai 2013, si les points A et F sont respectés, la quarantaine n’est plus obligatoire. En Californie la quarantaine n’est plus obligatoire. De plus, Goldenway International Pets m’a fait un devis et pour mes 3 animaux, il y en aurait pour 8130 euros soit 970 167,1 francs CFP. C’est du grand n’importe quoi ! Que dois-je faire ? »198.

222. Le 4 mai 2018, le technicien vétérinaire lui a alors fourni les éléments de réponse suivants :

« Bonjour, la quarantaine n’est pas obligatoire, toutefois et à ce jour, seule la quarantaine Goldenway agréée par l’administration française et la Polynésie française (Biosécurité) nous garantit l’isolement des animaux à quatre jours avant leur acheminement afin d’éviter toute contamination ou contact avec d’autres animaux malades »199.

223. Toutefois, les alternatives envisagées par la vétérinaire officielle dans son email ne sont ni crédibles, ni réelles, comme développé aux paragraphes 62 et suivants ci-dessus.

Plainte de Mme A…, exploitante de la société Jocelyne Hanias en 2018

224. Le 13 novembre 2018, via une plateforme de signalement permettant d’alerter sur une infraction ou un manquement, Mme A…, exploitante de la société Jocelyne Hanias (nom commercial : Ait Air International Transanimal) a prévenu en ces termes la DIRECCTE de Normandie des agissements de GIP : « ce transitaire oblige les propriétaires d’animaux au départ pour Tahiti à passer 1 semaine de quarantaine en Normandie // et oblige également les propriétaires à acheter les cages de transport aérien chez eux alors que ces personnes les ont en leur possession »200.

225. Une fois reçu, ce signalement a été transmis par la DIRECCTE à la DDCSPP de l’Orne par courriel du 20 novembre 2018201.

b) Les signalements de consommateurs auprès de plusieurs transitaires concurrents de GIP

226. Mécontents des tarifs pratiqués, un certain nombre de consommateurs ont exprimé leur insatisfaction auprès de l’entreprise SCTIL et de l’entreprise Hesnault, transitaires qui auraient potentiellement pu concurrencer GIP pour l’activité d’affrètement des animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, si cette prestation avait été dissociée de la quarantaine.

Signalement de Mme B... en 2016 concernant le transport d’un chien

227. Le premier courrier de consommateurs souhaitant importer leurs animaux en Polynésie française transmis à la société SCTIL date de février 2016. En l’espèce, Mme B... souhaitait faire voyager son chien vers cette destination.

228. La société SCTIL a transmis ladite plainte à la DGCCRF en ces termes : « le client me signale que sur le contrat GOLDEN WAY il n’est pas stipulé que le transport doit se faire obligatoirement avec GOLDEN WAY. C’est la 1ère réclamation que me font les clients car ils ne peuvent pas faire jouer la concurrence. Cordialement. NB – Il n’est pas non plus indiqué le nom de la compagnie aérienne ni même le détail des frais de transport »202.

229. La cliente, Mme B..., avait dans un premier temps contacté la société GIP pour affréter son chien en Polynésie française, mais estimait que le devis proposé par cette entreprise, d’un montant de 2762,40 euros203, était trop onéreux. C’est alors qu’elle s’est tournée vers la société SCTIL afin que celle-ci prenne en charge l’affrètement de son animal vers la Polynésie française. Toutefois, elle n’a pas pu obtenir satisfaction, GIP n’acceptant de se charger de la prestation liée à la quarantaine de l’animal qu’à condition de prendre également en charge la prestation liée à l’organisation du transport par fret aérien.

Signalement de Mme C... en 2016, concernant le transport d’un chat et d’un chien

230. De même, dans un courriel du 27 janvier 2016 reçu par la société SCTIL, Mme C... s’est plainte du comportement de GIP qu’elle estime abusif pour plusieurs raisons.

231. D’une part, elle considère que les tarifs pratiqués par GIP étaient « rédhibitoires et prohibitifs ». Les devis fournis par GIP affichaient en effet un prix de « 3592 euros pour le chat, 5200 euros pour le chien »204. Afin que l’acheminement de ses animaux de compagnie lui coûte moins cher, Mme C... aurait souhaité que la société SCTIL se charge de leur affrètement par voie aérienne : « je suis très déçue de ne pouvoir transiter mes animaux par votre intermédiaire et de me trouver face à un mur... de plus de 5000 € !, dépassant largement le budget attribué à mon installation en Polynésie »205.

232. D’autre part, Mme C... conteste, en ces termes, l’obligation de quarantaine qui lui était imposée : « Ainsi cette société de transit [GIP] impose une quarantaine dans son propre chenil (seul et unique habilité à faire la quarantaine en France en accord avec Tahiti) qu'alors la quarantaine n'est plus obligatoire pour les animaux en règle vétérinaire et sanitaire »206.

233. Enfin, Mme C... estime que les « contrats de prise en charge de l’animal [proposés par GIP] comportaient des clauses complètement abusives par rapport à la réglementation vétérinaire et sanitaire en cours en France ». En particulier, « ils imposent des dates butoir pour la validation des sérologies de la rage, alors que celles-ci, avérées correctes, sont valables à vie si l’animal est vacciné tous les ans (...) A cause de ce règlement abusif je ne pourrais pas partir avec mes animaux. Il me faudra attendre les trois mois nécessaires à la validation d'une deuxième sérologie, la première étant "périmée ! »207.

234. Finalement, Mme C... a indiqué avoir dû se résoudre à passer par GIP, « après deux mois d’investigations et de documentations pour trouver une autre solution », en vain208. Dans son courrier, elle en conclut toutefois qu’elle « ne compte pas en rester là et [qu’elle] va répandre [cette missive], afin que les autorités sanitaires et vétérinaires se rendent compte de cette escroquerie »209.

Signalement de M. D... en 2020, concernant le transport d’un chien

235. Par un courriel du 6 octobre 2020, la société SCTIL a transmis aux services d’instruction une conversation électronique entre M. D..., un particulier souhaitant introduire son chien en Polynésie française, et plusieurs employés de la direction de la biosécurité du ministère polynésien.

236. Cette conversation a débuté par un premier courriel, du 2 octobre 2020, dans lequel M. D... envoie à la direction de la biosécurité une demande d’importation dûment remplie concernant son chien210.

237. Le même jour, un employé de la direction de la biosécurité, lui a indiqué, par retour d’email, les conditions à remplir pour obtenir la délivrance d’un permis d’importation pour animaux, avant de préciser « actuellement, la seule quarantaine agréée en France se situe dans l’Orne Goldenway International Pets »211.

238. M. D... a alors demandé à cet employé s’il était « possible de trouver une alternative ». Il indique en effet, d’une part, que « le chien sera fermé dans la cage qui elle-même sera scellée en Normandie. L'animal sera donc enfermé bien avant le départ du vol qui est déjà très long, sans boire ni faire ses besoins, ce qui [lui] parait très difficile pour les animaux ». D’autre part, il indique s’être renseigné, et qu’« Air France facture autour des 2800€ le transport du chien, Goldenway le facture à 4400€ avec le transport depuis Normandie. [S]on devis s'élève à 6063€ voir ci-joint. Cette somme est très élevée ». Or, il explique que « [s]on chien a voyagé plusieurs fois en transatlantiques, à Nouméa, (il) n'a jamais vu des tarifs aussi élevés ». Comme solutions alternatives, il évoque notamment le recours, pour la prestation de transport par fret aérien, aux sociétés SCTIL et Nice Pet Travel212.

239. En réponse, la vétérinaire officielle, cheffe adjointe de la cellule zoosanitaire de la direction de la biosécurité du ministère de l’agriculture, lui a indiqué dans un courriel du 5 octobre 2020 : « Bonjour Monsieur, oui, je confirme que des négo-ciations sont en cours avec la direction générale de l’alimentation du ministère de l’agriculture métropolitaine à ce sujet mais, pour l’instant, nous n’avons pas d’information relative au délai de mise en œuvre, d’où la réponse de [l’employé de la direction de biosécurité]. La station de quarantaine de Goldenway International Pets est la seule aujourd’hui à être agréée pour la Polynésie française. Etant donné que vous êtes déjà en relation avec les chenils pour lesquels nous avons demandé à la DGAL de voir s’ils pouvaient être utilisés comme lieu d’inspection des animaux avant embarquement vers la PF, je suppose qu’ils vous contacteront dès qu’ils pourront s’occuper de votre chien »213.

240. S’il pouvait être envisagé que de nouveaux chenils soient agréés par la suite, tel n’était pas le cas214 au jour de l’audition de la vétérinaire officielle précitée, le 19 octobre 2020, la seule option pour les particuliers restant les services de quarantaine proposés par la société GIP.

Signalement de M. E... en 2019 concernant le transport de deux chats et d’un chien

241. Le 21 février 2019, M. E… a contacté par courriel la société Hesnault afin d’obtenir « un devis pour 2 chats de gouttière (européens) respectivement de 5 et 6kg et de 1 berger blanc suisse de 25kg ». Il précisait à cette occasion qu’il fournira le matériel nécessaire215.

242. Dans son courriel, M. E... indique s’être rapproché dans un premier temps de GIP. Toutefois,

« GW [abréviation utilisée par M. E... pour désigner GIP, note ajoutée] facture 7724€ pour les 2 chats et le chien, en dissociant, les devis sont respectivement de 4013€ pour le chien seul et 6017€ pour les 2 chats... soit un total non pas de 7700€ mais de 10’000€... ça se passe de commentaire »216. Dans son courriel, M. E... ajoutait : « si nous trouvons une solution économique viable, il va de soi qu’un blog sera consacré à ce processus d’envoi et de la publicité gratuite vous sera faite tellement la demande de shunter [court-circuiter] Goldenway Pets International est forte »217.

243. Ce particulier conclut enfin son courriel de la manière suivante : « si possible, j’aimerai des variantes [des devis] : 1 seul puis chats seuls. Car, comme je vous l’ai expliqué, je représente plusieurs demandeurs qui attendent une solution avec impatience pour pouvoir importer leurs animaux (certains étant déjà sur la Polynésie) »218.

244. Dans un devis émis le 21 février 2019, la société Hesnault a alors proposé à ce particulier l’affrètement de ses animaux vers la Nouvelle-Calédonie pour un montant total de 5 480,36 euros. Un devis ultérieur lui a vraisemblablement été fourni pour l’affrètement des animaux de Nouméa vers la Polynésie française, sans qu’il ait toutefois pu être versé au dossier219.

c) Les plaintes de consommateurs transmises par l’autorité polynésienne de la concurrence

245. En réponse à la demande de coopération qui leur avait été adressée le 9 octobre 2020 (voir les paragraphes 3 et 4 ci-dessus), les services d’instruction de l’autorité polynésienne de concurrence ont transmis, en application de l’ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017 précitée, plusieurs plaintes de consommateurs à l’encontre de la société GIP.

Plainte de M. F... en 2021 pour le transport d’un chien

246. Souhaitant faire voyager ses deux chiens vers la Polynésie française entre le 19 et le 27 octobre 2020, Mme G… a obtenu un devis de la part de GIP, pour un montant total de 9 395,16 euros TTC220, comprenant les prestations liées à la quarantaine des animaux, au transport routier entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et à l’organisation du transport par fret aérien. Plus particulièrement, les prestations liées au transport routier et à l’organisation du transport par fret aérien s’élevaient à la somme de 7 501,36 euros.

247. Le mardi 26 janvier 2021221, estimant ces prix « exorbitants », Mme G... a demandé à la société GIP de bien vouloir réaliser un nouveau devis, comprenant les coûts liés à la visite d’un vétérinaire officiel déclarant l’animal apte à voyager le jour du départ et les coûts liés à l’organisation du transport par fret aérien, la mise en quarantaine de l’animal n’étant plus exigée par la réglementation polynésienne. La date de départ souhaitée était entre le 11 et le 21 février 2021.

248. Dans l’hypothèse où GIP persisterait à imposer « une quarantaine non obligatoire » et « un prix exorbitant sans aucune justification plausible », Mme G... indiquait qu’elle dénoncerait ces pratiques à la DGCCRF, à la Présidence de la Polynésie française et à tout média intéressé par ce sujet, à l’instar de la chaîne de télévision Polynésie Première, ayant déjà récemment couvert le sujet222.

249. En réponse, une employée de GIP lui a indiqué, dans un courriel du 27 février 2021, qu’elle n’était pas obligée d’accepter le devis proposé et de recourir aux services de cette société, que des règles sanitaires très strictes étaient appliquées en Polynésie française et plus généralement dans tout le bassin océanique, et que les frais de vols en cargo vers cette destination étaient très élevés223.

250. Le 27 janvier 2021, le compagnon de Mme G... a adressé un courriel à la société GIP en demandant de bien vouloir détailler le poste de dépenses « transport quarantaine – aéroport CFG PPT » d’un montant de 7 501,35 euros, indiquant que,« la compagnie ATN (…) facture pour sa part environ 300 euros pour le transport d’un chien » 224.

251. En effet, selon lui, « il reste donc 6 900 euros (!) à justifier, pour …

- Transport depuis le lieu de quarantaine jusqu’à l’aéroport ; (nous vous avions d’ailleurs proposé d’assurer nous-mêmes ce transport, pour amener les chiens à Roissy)

- Et ???... je ne vois pas quoi, puisque les frais avant départ de pension, vétérinaire, etc… sont déjà exposés dans les autres lignes de votre devis, et qu’il y a aucune prestation en Polynésie (pas de quarantaine à l’arrivée) »225.

252. N’ayant reçu aucune réponse de la part de GIP, M. F... a relancé cette société par courriel le 8 février 2021226 puis le 18 février 2021227.

253. Dans ce dernier courriel, M. F... explique à GIP que sa compagne l’a rejoint à Tahiti « sans pouvoir lancer au préalable avec vous la procédure nécessaire au départ de nos chiens. Et nous avons dû trouver en urgence des solutions provisoires pour eux en métropole, qui ne sont satisfaisantes ni moralement ni financièrement » 228. Il en concluait ainsi qu’« outre qu’il dénote une gêne manifeste, votre retard discourtois à répondre nous a déjà posé un préjudice sérieux, qui ne cesse d’augmenter » 229.

254. M. F... conclut son courriel en précisant qu’il s’agit d’une mise en demeure et qu’un délai de trois jours francs est accordé à la société GIP pour répondre à ses différentes questions. À défaut, M. F... indique qu’il sera contraint d’envisager une procédure en justice pour abus de position dominante à l’encontre de la société, et de saisir les autorités de contrôle compétentes. En effet, il estime que la société n’a pas « le droit de pratiquer des tarifs exorbitants et de prendre les usagers et leurs animaux en otage » 230.

255. Ne recevant toujours aucune réponse de la part de GIP, M. F... a contacté le directeur de la biosécurité et la Rapporteure générale de l’Autorité de la concurrence de la Polynésie française par courriel le 24 février 2021, afin de les alerter sur la situation231.

256. Par courriel du 25 février 2021, une employée de la direction de la biosécurité lui a indiqué que si, en effet, la quarantaine n’était plus obligatoire, « actuellement au départ de la Métropole, l’examen approfondi ne peut ni se faire sur le site de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle ni dans les autres aéroports de province par les vétérinaires officiels, du fait notamment de l’absence d’infrastructures permettant ce contrôle sur place. Les voyageurs sont alors contraints de recourir à une mise en station de quarantaine de leurs animaux »232, en l’espèce dans la seule station de quarantaine agréée à l’heure actuelle : celle de GIP.

257. Cette employée précisait toutefois qu’« afin de tenter de remédier à cette problématique qui monopolise toute notre attention actuellement, nous travaillons avec notre homologue métropolitain (la Direction Générale de l’Alimentation) pour la mise en place d’autres protocoles de certification. A terme, ceux-ci devront permettre d’offrir aux usagers un panel de plusieurs prestations à l’export, tout en gardant les garanties sanitaires des animaux importés en Polynésie française.

Pour les animaux qui devront toutefois passer par une quarantaine, nous étudions les possibilités de reconnaissance d’autres structures autorisant l’accueil des chiens et des chats avant transport vers la Polynésie française, afin d’augmenter le nombre de prestataires et permettre ainsi une plus grande diversité d’offre de service. Cependant, nous tenons à rappeler que l’éventuelle mise en place de ces protocoles ne serait pas immédiate car dépendante des différents acteurs impliqués (DBS, DGAL, Gouvernement de Polynésie française, installations aéroportuaires françaises, transporteurs/transitaires animaliers).

Il est impossible pour la BDS à l’heure d’aujourd’hui de garantir la mise en place effective de ce protocole envisagé ni même de fournir une échéance »233.

258. Insatisfait de cette réponse, M. F... a demandé, dans son courriel du 26 février 2021, de bien vouloir lui indiquer « certains éléments sur le cahier des charges auquel doit se conformer Goldenway, et les engagements auxquels ils ont souscrit pour obtenir cet agrément ? Et en particulier y a-t-il des clauses financières, tarifaires dans ces engagements ? Des obligations de services aux clients ? Votre Direction les a-t-elle saisis officiellement de ce problème tarifaire ? »234. En effet, dans son courriel, M. F... insistait sur le fait que « ce qui est choquant, c’est que [GIP] abuse sans vergogne de cette situation, avec des tarifs délirants, et un mépris total pour les clients qui leur posent des questions »235.

259. Une autre employée de la direction de la biosécurité a alors réitéré, auprès de

M. F..., par courriel du 26 février 2021, les propos initiaux précédemment tenus, en précisant toutefois que cette direction travaillait en étroite collaboration avec l’autorité polynésienne de la concurrence concernant cette problématique236.

260. Par un courriel en réponse du 26 février 2021, M. F... a pris acte de cette réponse tout en indiquant que ses questions relatives aux obligations auxquelles seraient tenues GIP demeuraient sans réponse237.

Plainte de Mme H... en 2021 pour le transport d’un chien

261. Par un courriel du 12 avril 2021, Mme H... a manifesté son mécontentement à la Rapporteure générale de l’Autorité polynésienne de la concurrence en raison des prix pratiqués par GIP, dont les prestations seraient « 22 fois plus cher[es] »238 [note ajoutée] que celles de ses potentiels concurrents pour le transport de son chiot depuis Paris vers la Polynésie française.

262. Dans son courriel, Mme H... explique en effet détenir un devis de GIP selon lequel le montant des prestations de transport routier entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy- Charles de Gaulle et d’organisation du transport par fret aérien s’élève à 4 369,68 euros, alors qu’elle dispose parallèlement d’un devis fourni par une autre société indiquant que « le billet d’avion pour un chiot similaire et sa cage en soute en bagage accompagné serait de 23.870 XPF », soit environ 199 euros239.

263. Par ailleurs, Mme H... explique que les compagnies Air France et ATN ont refusé de lui fournir des devis pour des prestations de transport aérien et renvoient systématiquement vers l’entreprise GIP, « la seule société agréée par le gouvernement polynésien ». Pourtant,

« d’autres entreprises sont disposées à (…) proposer cette prestation qu’ils offrent déjà sur le monde entier, y compris DOM/TOM à l’exclusion de la Polynésie, monopole incontournable GOLDEN WAY par décision gouvernementale… »240.

E. CONCLUSION GÉNÉRALE

264. Les constatations qui précèdent établissent que depuis l’adoption de l’arrêté n° 738 CM, un animal de compagnie (chat ou chien) n’est pas obligé de réaliser préalablement un séjour en quarantaine pour entrer sur le territoire polynésien.

265. Désormais, l’animal doit avoir subi, avant son entrée sur le territoire polynésien, un examen clinique approfondi et doit avoir été reconnu apte à voyager par un certificat sanitaire, dans les quatre jours précédant son départ. D’après cette réglementation, ce certificat peut être délivré par un vétérinaire officiel à deux occasions : soit à l’issue d’un contrôle à l’aéroport le jour du départ de l’animal, soit au cours d’un séjour en quarantaine effectué dans une station prévue à cet effet, dans les quatre jours précédant le départ de l’animal (voir notamment le paragraphe 42 ci-dessus).

266. Il a toutefois été démontré que, dans les faits, l’alternative offerte par la réglementation polynésienne n’existe pas pour les animaux au départ de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle (seul aéroport européen à disposer, s’agissant du transport d’animaux vivants, d’une offre de vols directs vers la Polynésie française). L’animal doit donc nécessairement effectuer un séjour en quarantaine, afin d’obtenir un certificat sanitaire le déclarant apte à voyager vers la Polynésie française (voir notamment les paragraphes 43 et suivants ci-dessus).

267. À cet égard, il a été relevé qu’une seule station de quarantaine est en activité sur le territoire métropolitain, à savoir la station de quarantaine détenue et exploitée par GIP et située au Grais dans l’Orne. Cette entreprise ne propose qu’une prise en charge complète, comprenant le séjour en quarantaine de l’animal, son transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et son affrètement aérien vers la Polynésie française (voir notamment les paragraphes 154 et suivants ci-dessus).

268. La société GIP justifie cette prise en charge complète par des considérations d’ordre sanitaire, dont il a été démontré qu’elles ne sont pas valables, la direction de la biosécurité du ministère polynésien expliquant que les prestations de transport routier et d’organisation du transport par fret aérien des animaux pouvaient être réalisées par d’autres entreprises que GIP, du moment que les conditions sanitaires et réglementaires étaient respectées (voir les paragraphes 160 et suivants ci-dessus).

269. Parallèlement, il n’existe pas d’alternative crédible à l’offre de GIP. En effet, les alternatives théoriques (transit par la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, Hawaï, l’Australie ou le Japon) sont exclues en pratique, pour diverses raisons. Premièrement, elles impliquent toutes que l’animal réalise une escale, ce qui rallonge son temps de trajet et présente un risque pour sa santé et son bien-être, et sont donc exclues par un grand nombre de consommateurs. Deuxièmement, elles représentent une charge administrative plus importante, les formalités devant être réalisées dans tous les pays dans lequel l’animal fait escale. Troisièmement, elles entraînent un surcroit de logistique, l’animal devant être récupéré à la sortie de l’avion dans le pays de transit pour être mis en quarantaine dans la station de ce pays, puis être affrété par un transitaire local vers la Polynésie française. Cette logistique ne peut parfois pas être prise en charge par les transitaires affrétant l’animal au départ de Paris, faute de contacts dans le pays d’escale, laissant alors les propriétaires des animaux s’en charger. Quatrièmement, quand bien même cette contrainte logistique serait surmontée, elle engendrerait des coûts supplémentaires, parfois très élevés pour les propriétaires des animaux, du fait d’un nombre plus élevé de prestataires intervenant pour l’affrètement. Cinquièmement, elles impliquent que les démarches soient effectuées dans d’autres langues que le français pour les stations situées en Nouvelle-Zélande, à Hawaï, en Australie et au Japon, ce qui peut constituer un obstacle pour certains consommateurs (voir notamment les paragraphes 62 et suivants ci-dessus).

270. Les propriétaires d’animaux de compagnie souhaitant les envoyer en Polynésie française depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle se retrouvent par conséquent contraints de recourir à la seule offre globale de GIP. Or, il a été démontré que cette offre a donné lieu à de nombreuses plaintes de consommateurs (voir notamment les paragraphes 196 et suivants ci-dessus).

271. L’absence d’alternatives réelles aux services proposés par GIP explique que les autorités polynésiennes réfléchissent aux moyens de répondre aux préoccupations des propriétaires d’animaux de compagnie souhaitant les envoyer en Polynésie française. Toutefois, ces réflexions sont en cours et aucune solution concrète n’a pour l’heure été retenue (voir notamment les paragraphes 88 et suivants ci-dessus).

272. Dans l’attente de ces alternatives, tout animal à destination de la Polynésie française reste donc contraint de réaliser un séjour en quarantaine dans la station du Grais exploitée par GIP (voir notamment les paragraphes 92 et 93 ci-dessus).

273. Les plaintes susmentionnées dénoncent les tarifs jugés trop élevés pratiqués par ce prestataire qui lie les prestations de quarantaine à celle du transport routier entre la station du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celle de l’organisation du transport par fret aérien de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle vers l’aéroport de Papeete (voir notamment les paragraphes 196 et suivants ci-dessus).

274. Enfin, il a été relevé que plusieurs entreprises concurrentes accepteraient de réaliser, à des tarifs plus avantageux que ceux imposés par GIP, la prestation de transport routier, et/ou la prestation d’organisation du transport par fret aérien, une fois que l’animal aurait effectué sa quarantaine dans la station exploitée par GIP (voir notamment les paragraphes 166 et suivants ci-dessus).

F. LES GRIEFS NOTIFIES

275. Le 3 août 2021, GIP s’est vu notifier des griefs relatifs à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport d'animaux vivants par fret aérien :

« Il est fait grief à la société Goldenway International Pets (RCS d'Alençon 511 157 596) 241 d’avoir abusé de la position dominante qu’elle détient sur le marché national des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en liant ces prestations avec celles du transport routier de ces animaux entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celles de l’organisation du transport par fret aérien desdits animaux entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et de Papeete.

La vente liée a pris la forme de devis globaux liant les prestations de quarantaine et celles du transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et de l’organisation du transport par fret aérien, la société Goldenway International Pets refusant d’effectuer les seules prestations liées à la quarantaine pour les consommateurs qui en font la demande.

Cette pratique de vente liée a eu pour effet, d’une part, d’étendre et/ou de renforcer la position dominante de Goldenway International Pets sur les marchés nationaux du transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et de l’organisation du transport par fret aérien d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en excluant toute concurrence sur ces marchés, et, d’autre part, d’empêcher les consommateurs de recourir aux prestations offertes par les concurrents de Goldenway International Pets présents sur ces deux marchés connexes.

Les pratiques ont été initiées le 20 décembre 2010 concernant les chiens, et le 8 décembre 2011 concernant les chats, et continuent à ce jour.

Elles sont contraires à l’article L. 420-2 du code de commerce et à l’article 102 du TFUE ».

II. Discussion

276. Seront successivement examinés la mise en œuvre de la procédure de transaction (A), l’applicabilité du droit de l’Union (B), les marchés pertinents (C), la position dominante (D), le bien-fondé des griefs notifiés (E), et les sanctions (F).

A. SUR LA MISE EN ΠUVRE DE LA PROCEDURE DE TRANSACTION

277. Le III de l’article L. 464-2 du code de commerce dispose : « [l]orsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l'entreprise ou l'organisme s'engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l'organisme ou l'entreprise donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l'Autorité de la concurrence, qui entend l'entreprise ou l'organisme et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I dans les limites fixées par la transaction ».

278. En outre, le point 23 du communiqué de procédure de l’Autorité relatif à la procédure de transaction (ci-après « communiqué transaction ») du 21 décembre 2018 prévoit : « Dans le cas où l’entreprise en cause a, en outre, proposé des engagements, il appartient au rapporteur général d’apprécier s’il est pertinent de les prendre en compte au regard des circonstances particulières de l’affaire et, notamment, de la nature des griefs retenus. Si tel est le cas, le rapporteur général s’assure ensuite du caractère substantiel, crédible et vérifiable des engagements proposés ». Le point 27 du communiqué transaction précise que : « S’il estime pertinent de proposer à l’Autorité de rendre obligatoire les engagements présentés par l’entreprise, le rapporteur général en tient également compte dans sa proposition de transaction ».

279. Les parties qui entrent en procédure de transaction se doivent d’apporter toutes les garanties suffisantes, notamment en termes de délais de mise en conformité, afin que les pratiques qui font l’objet des griefs notifiés cessent dans les meilleurs délais242. La mise en conformité avec le droit de la concurrence, qui est la conséquence nécessaire d’une décision de sanction retenant des griefs comme établis, ne saurait ainsi faire l’objet d’une rétribution spécifique dans le cadre d’une procédure de transaction.

280. Il est toutefois loisible au rapporteur général, dans le cas où l’entreprise en cause a, dans le cadre de la procédure de transaction, proposé en outre des engagements comportementaux, de les annexer au procès-verbal de transaction s’il les estime pertinents au regard des circonstances particulières de l’affaire et lorsqu’ils sont substantiels, crédibles et vérifiables.

281. En l’espèce, par un procès-verbal signé le 2 novembre 2021, en raison de circonstances qui lui sont propres, et sans pour autant reconnaître sa culpabilité, la société GIP s’est engagée à ne pas contester les griefs qui lui ont été notifiés. En conséquence, les griefs exposés au paragraphe 275 de la présente décision sont établis à l’égard de la société GIP.

282. Par ailleurs, la société GIP a proposé un engagement de publication et de diffusion du contenu de la décision de l’Autorité, aux frais de l’entreprise, afin d’informer et d’attirer la vigilance des clients, mais aussi des transporteurs aériens et des commissionnaires et transitaires de transport concernés, ainsi que des autorités polynésiennes compétentes, sur l’illicéité des ventes liées pratiquées jusqu’ici. GIP s’est également engagée à informer l’Autorité de l’accomplissement des diligences de publication et de diffusion précitées. Ces engagements, qui ont été annexés au procès-verbal de transaction, sont joints à la présente décision.

283. Lors de la séance du 14 décembre 2021, GIP a confirmé solennellement son accord avec les termes de la transaction dont elle a accepté, en toute connaissance de cause, les conséquences juridiques, notamment en ce qui concerne le montant de la sanction pécuniaire.

284. Les pratiques n’ayant pas été contestées, l’Autorité se bornera, après avoir examiné l’applicabilité du droit de l’union, les marchés pertinents et la position occupée par GIP sur ces marchés, aux développements suivants.

B. SUR L’APPLICABILITE DU DROIT DE L’UNION

285. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et la communication de la Commission européenne portant lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après « TFUE »), trois éléments doivent être établis pour que des pratiques soient susceptibles d’affecter sensiblement le commerce entre États membres de l’Union : l’existence d’un courant d’échanges entre les États membres portant sur les produits en cause, l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges et le caractère sensible de cette affectation.

286. S’agissant du dernier critère rappelé ci-dessus relatif au caractère sensible de l’affectation, le point 96 des lignes directrices de la Commission mentionne qu’il faut « tenir compte du fait que la présence de l’entreprise dominante couvrant l’ensemble d’un État membre est susceptible de rendre la pénétration du marché plus difficile. Toute pratique abusive qui rend plus difficile l’entrée sur le marché national doit donc être considérée comme affectant sensiblement le commerce ».

287. En l’espèce, tout propriétaire d’animal situé dans l’Union européenne et souhaitant l’envoyer en Polynésie française au départ de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle devra recourir à l’ensemble des prestations de GIP, en raison des pratiques de vente liée que cette dernière met en œuvre. En outre, les pratiques poursuivies couvrent la totalité du territoire métropolitain et sont susceptibles de rendre la pénétration des marchés nationaux du transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et de l’organisation du transport par fret aérien d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française plus difficile, tant pour les entreprises françaises qu’européennes.

288. Il résulte de ce qui précède que les pratiques constatées sont susceptibles d’affecter sensiblement le commerce entre États membres et d’être qualifiées au regard de l’article 102 du TFUE.

C. SUR LA DEFINITION DES MARCHES PERTINENTS

1. LES MARCHES DE SERVICE

a) Principes applicables

289. La définition des marchés de produits et des marchés géographiques, dans le cadre de l’application des articles 102 TFUE et L. 420-2 du code de commerce, est effectuée pour déterminer si l’entreprise concernée occupe une position dominante et si celle-ci lui permet d’empêcher le maintien d’une concurrence effective sur le marché pertinent, en lui donnant le pouvoir de se comporter, dans une mesure appréciable, indépendamment de ses concurrents, de ses clients, et in fine, des consommateurs.

290. Le concept de marché pertinent implique qu’il puisse y avoir une concurrence effective entre les produits et services qui appartiennent à ce marché. Cela présuppose qu’il y ait un degré suffisant de substituabilité entre tous les produits et services appartenant au même marché relativement à un usage spécifique de ceux-ci243.

291. Pour réaliser cette appréciation, il y a lieu de prendre en compte, non seulement les caractéristiques objectives des produits et services concernés, mais aussi les conditions de concurrence et la structure de l’offre et de la demande244.

292. L’identification de marchés de produits pertinents découle de l’existence de contraintes concurrentielles. À cet égard, les entreprises sont soumises à trois sources de contraintes concurrentielles : la substituabilité du côté de la demande, la substituabilité au niveau de l'offre, et la concurrence potentielle. D’un point de vue économique, pour la définition du marché pertinent, la substituabilité de la demande constitue le facteur de discipline le plus immédiat et le plus efficace vis-à-vis des fournisseurs d’un produit donné245.

293. La substituabilité de l’offre peut aussi être prise en compte dans le cadre de la définition du marché, dans les situations où ses effets sont équivalents à ceux de la substituabilité de la demande en termes d’effectivité et d’immédiateté. Il y a une substituabilité de l’offre lorsque les fournisseurs peuvent réorienter la production vers les produits ou services en cause et les commercialiser à court terme sans avoir à supporter ni coût ni risque supplémentaire substantiel en réponse à des variations légères, mais permanentes, des prix relatifs. Lorsque ces conditions sont remplies, le supplément de production qui est ainsi mis sur le marché devrait exercer un effet de discipline sur le comportement concurrentiel des entreprises en cause246.

b) Application à l’espèce

Le marché des prestations liées à la quarantaine

294. Les services de quarantaine de la station du Grais comprennent, d’une part, la garde des animaux de compagnie à destination de la Polynésie française et, d’autre part, l’organisation des contrôles sanitaires de ces animaux par des vétérinaires.

295. L’existence d’un seul et même marché en la matière découle de certaines contraintes issues de la réglementation polynésienne et de leurs modalités d’application concrètes sur le territoire métropolitain.

296. En effet, en vertu de l’arrêté n° 738 CM précité, les animaux de compagnie en partance pour la Polynésie française doivent avoir subi un examen clinique approfondi et être reconnus aptes à voyager par un vétérinaire officiel dans les quatre jours précédents leur départ. Pour effectuer ces contrôles, le vétérinaire peut soit être dépêché à l’aéroport le jour du départ des animaux, soit se rendre dans une station de quarantaine.

243 Voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour de justice du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche contre Commission85/76, paragraphe 28. Voir aussi la Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (“Communication de la Commission”), JO C 372, 9.12.1997, paragraphe 5.

297. Or, en l’espèce, comme cela a été exposé aux paragraphes 50 et suivants ci-dessus, au jour de l’établissement de la notification des griefs, aucun vétérinaire, qu’il soit sanitaire ou officiel, ne se déplace jamais à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle le jour du départ des animaux pour les soumettre à un examen clinique et les déclarer aptes à voyager vers la Polynésie française, du fait notamment de l’absence d’infrastructure permettant un tel contrôle sur place247. Par conséquent, la seule manière d’obtenir un certificat sanitaire permettant l’importation des animaux en Polynésie française est de les envoyer en quarantaine dans une station, dans laquelle ils seront examinés cliniquement par un vétérinaire.

298. Il découle de ce qui précède que le marché des services liés à la quarantaine en vue de l’exportation d’animaux de l’Union européenne vers la Polynésie française constitue un marché en tant que tel.

Le marché du transport routier des animaux vivants entre une station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle

299. Plusieurs éléments attestent de l’existence d’un marché pertinent du transport routier des animaux vivants entre une station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, pour les animaux à destination de la Polynésie française.

300. En premier lieu, s’agissant de l’offre, elle peut en principe émaner de tout transporteur agréé par l’autorité compétente248, du moment qu’il respecte un certain nombre de conditions techniques spécifiques pour transporter l’animal, découlant de l’article 23 de l’arrêté n° 829 CM précité. Ces conditions comportent notamment, d’une part, la détention d’un agrément249 qui implique de disposer d’un pouvoir de représentation de GIP (voir le paragraphe 163) et, d’autre part, l’observation d’exigences techniques250 pendant le transport de l’animal jusqu’à sa remise au transporteur de fret.

301. À l’heure actuelle, comme développé aux paragraphes 191 et suivants ci-dessus, plusieurs transporteurs routiers remplissent les conditions requises, s’agissant tant de la détention de l’agrément que du respect des conditions de transport des animaux vivants. Ils pourraient assurer des prestations de transport routier entre la station du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, sous réserve de détenir un pouvoir de représentation de la société GIP.

302. Les transporteurs routiers susceptibles de prendre en charge cette prestation pourraient notamment être les sociétés Cador & Mistrigri transport251, Tranidom Services252 et Soluce Animo253.

303. Les devis recueillis auprès de ces professionnels de transport routier pour animaux au cours de l’instruction démontrent en effet qu’une offre potentielle existe en la matière.

304. En second lieu, s’agissant de la demande, elle émane principalement de particuliers souhaitant importer leur animal de compagnie en Polynésie française, une fois que l’animal a effectué son séjour en quarantaine dans la station de GIP. Il convient à cet égard de se référer aux nombreuses plaintes de consommateurs exposées ci-dessus (voir paragraphes 196 et suivants ci-dessus), qui témoignent de l’existence d’une demande potentielle.

305. Il découle de ce qui précède que la prestation de transport routier des animaux de compagnie entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle constitue un marché de services distinct de ceux relatifs à la quarantaine et à l’organisation du transport par fret aérien. Rien ne s’oppose par ailleurs à ce que cette prestation soit effectuée par un autre prestataire que le gestionnaire de la station de quarantaine, du moment que les spécificités exposées précédemment sont respectées.

306. Cette prestation constitue dès lors un deuxième marché pertinent, situé en aval du marché de la quarantaine, susmentionné.

Le marché de l’organisation du transport par fret aérien d’animaux vivants depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle vers l’aéroport de Papeete

307. Plusieurs éléments au dossier démontrent que l’organisation du transport par fret aérien d’animaux vivants depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, seul aéroport français à destination de la Polynésie française, vers l’aéroport de Papeete constitue un troisième marché pertinent. Ce marché est situé en aval des deux premiers marchés de la quarantaine et du transport routier, susmentionnés.

308. S’agissant de l’offre relative à cette prestation d’organisation du transport par fret aérien, elle est fournie par les commissionnaires et transitaires de transport, c’est-à-dire des entreprises spécialisées dans la prise en charge administrative et sanitaire du transport d’animaux de compagnie. Les compagnies aériennes refusent en effet de traiter directement avec les particuliers et exigent qu’ils aient recours à des transitaires ou commissionnaires spécialisés254.

309. Ainsi, du côté de l’offre, il existe plusieurs transitaires disposés à effectuer ces prestations. Toutefois, en raison des pratiques constatées, ils ne constituent qu’une offre potentielle à ce jour.

310. Pourtant, la Polynésie française constituerait une destination intéressante pour les transitaires. Selon l’entreprise SCTIL, la prise en charge de l’affrètement par voie aérienne d’animaux de compagnie vers cette destination aurait un effet très positif sur son activité. Elle permettrait même « une augmentation substantielle »255 de son chiffre d’affaires. Le directeur du département aérien de la société Hesnault estime quant à lui « que le marché de Papeete représente le même chiffre d’affaires que celui de Nouméa »256, étant précisé que Nouméa est à l’heure actuelle la destination vers laquelle cette société transporte le plus d’animaux vivants, soit une soixantaine par an257. De même, un responsable de la société First AirFrigo a indiqué : « on aimerait faire la Polynésie mais les contraintes sanitaires nous bloquent »258.

311. S’agissant de la demande, elle émane des particuliers, c’est-à-dire des propriétaires d’animaux souhaitant les envoyer depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle vers l’aéroport de Papeete.

312. Il a été établi que de nombreux consommateurs souhaiteraient pouvoir accéder à une offre diversifiée de transitaires, comme en attestent entre autres les plaintes de consommateurs référencées aux paragraphes 196 et suivants ci-dessus. En outre, plusieurs transitaires ont eux-mêmes reçu de telles demandes de consommateurs. Ainsi, SCTIL a déclaré : « ce sont des demandes récurrentes »259. De son côté, la société Bagages du monde chiffre à 279 le nombre de demandes en ce sens transmises depuis 2013, via les formulaires en ligne de demandes de devis260.

313. Il peut en conséquence être conclu que la prestation d’organisation du transport aérien des animaux de compagnie entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete constitue un marché pertinent distinct, situé en aval de ceux de la quarantaine et du transport routier entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport Charles de Gaulle.

2. LA DIMENSION GEOGRAPHIQUE DES MARCHES EN CAUSE

a) Principes applicables

314. Dans sa communication précitée, la Commission européenne a précisé que « [l]e marché géographique en cause comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l’offre des biens et des services en cause, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui peut être distingué de zones géographiques voisines parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable » (point 8).

315. L’Autorité a par ailleurs retenu à plusieurs reprises qu’un marché se définit d’un point de vue géographique comme « la zone géographique sur laquelle un pouvoir de monopole pourrait effectivement être exercé, sans être exposé à la concurrence d’autres offreurs situés dans d’autres zones géographiques ou à celle d’autres biens ou services » (voir en particulier la décision n° 06-D-18 du 28 juin 2006 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité cinématographique, paragraphe 144).

b) Application en l’espèce

316. En l’espèce, la dimension géographique des marchés de la quarantaine, du transport routier et de l’organisation du transport par fret aérien précités est nationale.

317. En effet, il a été exposé que tous les propriétaires d’animaux souhaitant envoyer leurs animaux de compagnie en Polynésie française depuis l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle doivent faire séjourner leur animal dans la station du Grais.

318. Cette contrainte est le résultat de la réglementation française, ainsi que d’une organisation du contrôle sanitaire et d’un contexte factuel propres à la France. Elle entraîne par ailleurs la nécessité de l’organisation d’un transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, activité qui n’existerait pas si les contrôles pouvaient être effectués audit aéroport.

319. La dimension nationale des marchés est également liée aux règlementations auxquelles sont soumis les transporteurs routiers et les transitaires. Celles-ci revêtent en effet une dimension nationale qui peut donc différer d’un État membre à un autre.

320. Par conséquent, il doit être conclu que les trois marchés de services préalablement identifiés sont de dimension nationale.

3. CONCLUSION SUR LES MARCHES PERTINENTS EN CAUSE

321. Par conséquent, dans la présente espèce, les trois marchés pertinents aux fins de l’analyse concurrentielle sont donc :

a. le marché national de la garde et de l’organisation des contrôles sanitaires des animaux à destination de la Polynésie française, autrement dit le marché de la quarantaine ;

b. le marché national du transport routier entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle ; et

c. le marché national de l’organisation du transport par fret aérien entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete.

322. Ces trois marchés sont des marchés connexes, les deux derniers étant situés en aval du premier, le marché de la quarantaine.

D. SUR LA POSITION DOMINANTE DE GIP

1. PRINCIPES APPLICABLES

323. Selon une jurisprudence constante de la Cour de justice, la position dominante visée par l’article 102 du TFUE concerne une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective sur le marché en cause, en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants, dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients, et finalement des consommateurs261.

324. Dans son arrêt précité du 18 décembre 2014, la cour d’appel a relevé que « l’existence d’une position dominante résulte en général de la réunion de facteurs divers, qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants mais qui traduisent ensemble la puissance économique requise par la jurisprudence »262. L’Autorité a rappelé, dans sa décision n° 13-D-11 du 14 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur pharmaceutique, qu’« une telle position peut résulter de différents facteurs caractérisant le marché lui-même ou l’entreprise, comme la détention, soit d’un monopole légal ou de fait sur une activité, soit de parts de marché substantielles. Une telle position peut aussi résulter de l’appartenance à un groupe de grande envergure, de la faiblesse des concurrents, de la détention d’une avance technologique ou d’un savoir-faire spécifique » (paragraphe 311).

325. L’appréciation de la position dominante d’une entreprise s’effectue donc à partir d’un faisceau de critères qui prend en compte des données d’ordre structurel, comme les parts de marché de l’entreprise et celles de ses principaux concurrents, mais aussi des éléments qui sont de nature à donner un avantage concurrentiel à l’entreprise concernée, comme l’appartenance à un groupe puissant ou la détention d’une avance technologique ou encore l’existence de barrières à l’entrée ou à l’expansion.

326. En ce qui concerne les facteurs structurels, l’Autorité a rappelé à plusieurs reprises que la détention d’un monopole, de droit ou de fait, suffit à établir la position dominante de son titulaire263. Pour sa part, la Cour de justice considère que la possession, dans la durée, d’une part de marché extrêmement importante constitue, sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l’existence d’une position dominante, et que tel est le cas d’une part de marché de plus de 50 %264.

327. De plus, dans ses Orientations sur les priorités retenues pour l’application de l’article 82 du traité CE [article 102 du TFUE] aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes (2009/C 45/02), la Commission européenne considère que « l’appréciation de la position dominante tiendra compte de la structure concurrentielle du marché, et notamment (…) des contraintes constituées à la menace crédible d’une future expansion des concurrents actuels ou de l’entrée de concurrents potentiels (expansion et entrée). Une entreprise peut être dissuadée de relever les prix si l'expansion ou l'entrée sont probables, interviennent en temps utile et sont suffisantes. Pour que la Commission considère que l‘expansion ou l'entrée sont probables, il faut qu'elles soient suffisamment profitables pour le concurrent ou le nouvel arrivant, en prenant en considération des facteurs tels que les obstacles à l'expansion ou à l'entrée, les réactions probables de l'entreprise dominante présumée et des autres concurrents, ainsi que les risques et les coûts d'un échec » (page 3, point 16).

328. S’agissant spécifiquement des barrières à l’expansion ou à l’entrée, la Commission poursuit :

« [elles] peuvent revêtir diverses formes. Il peut s'agir de barrières juridiques, telles que les droits de douane ou les contingents, ou encore d’avantages dont jouit spécifiquement l'entreprise dominante, tels que les économies d'échelle et de gamme, un accès privilégié à des intrants essentiels ou à des ressources naturelles, à des technologies importantes (2) ou à un réseau de distribution et de vente bien établi (3). Il peut également s’agir de coûts et d'autres entraves, résultant par exemple d’effets de réseau, auxquels sont confrontés les clients lorsqu’ils veulent changer de fournisseur. Le comportement de l’entreprise dominante peut également élever des barrières l’entrée, notamment lorsqu'elle a réalisé des investissements importants que les nouveaux arrivants ou les concurrents devront égaler (4), ou lorsqu'elle a conclu avec ses clients des contrats à long terme qui ont des effets d'éviction. Départs de marché qui se maintiennent à un niveau élevé peuvent être des indices de l'existence d'entraves à l'entrée et à l'expansion. » (page 3, point 17).

2. APPLICATION A L’ESPECE

329. Au cas d’espèce, la position dominante de l’entreprise GIP doit être analysée sur les trois marchés cités précédemment.

a) Le marché de la quarantaine

330. Sur le marché de la quarantaine, GIP est la seule société en France métropolitaine à détenir un agrément pour exploiter une station de quarantaine pour chiens et chats et à proposer des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie en partance pour la Polynésie française.

331. Ainsi, depuis le 20 décembre 2010265, s’agissant de la quarantaine des chiens, et depuis le 8 décembre 2011266, s’agissant de la quarantaine des chats, la totalité des animaux de compagnie introduits en Polynésie française depuis l’aéroport de Paris ont bénéficié des services de quarantaine offerts par la société GIP267.

332. La société GIP exerce donc un monopole de fait sur le marché de la quarantaine. Elle détient par ailleurs une capacité certaine à se comporter de façon indépendante, comme explicité dans la jurisprudence.

333. En premier lieu, cette capacité résulte d’un constat simple : comme exposé précédemment, GIP impose une quarantaine de huit jours aux propriétaires d’animaux, au lieu des quatre jours requis par la réglementation (voir notamment le paragraphe 96 ci-dessus).

334. Si GIP avait craint l’entrée de concurrents plus performants sur le marché, elle n’aurait très vraisemblablement pas imposé un allongement aussi significatif du temps de quarantaine, ce qui tend à attester du fait qu’elle est véritablement en mesure de se comporter de façon indépendante.

335. En second lieu, les pièces au dossier mettent en évidence l’existence de trois types de barrières à l’entrée de concurrents sur ce marché : techniques, administratives et, enfin, économiques, lesquelles sont également de nature à attester et à renforcer la capacité de GIP à se comporter de façon indépendante.

Les barrières techniques

336. Au cas présent, les barrières techniques ont trait non seulement aux caractéristiques spécifiques à respecter en vertu de la réglementation polynésienne pour construire une station de quarantaine, mais encore aux compétences professionnelles particulières que requiert l’exercice de l’activité de garde et d’organisation des contrôles sanitaires des animaux de compagnie.

337. En premier lieu, s’agissant des caractéristiques spécifiques à respecter, la réglementation polynésienne à laquelle doit obéir une station de quarantaine abritant des animaux à destination de la Polynésie française est très exigeante, tant en termes de construction268 (distances minimales à respecter, système de verrouillage spécifique, etc.) que de surveillance (qui doit notamment être assurée 24 heures sur 24), de formation du personnel269, d’équipement (la station doit notamment disposer d’un véhicule aux caractéristiques spécifiques, préalablement autorisé par le vétérinaire officiel270, et d’une salle de soins vétérinaires équipée et aménagée pour des chirurgies271) et de formalités administratives (tenue d’un registre des entrées et des sorties272, système d’identification de chaque animal et de son propriétaire273, etc.), ainsi que cela est exposé ci-dessus.

338. La particularité et la complexité de ces normes sont telles que même les autorités polynésiennes, en dépit de leur nombreux mois de recherche, n’ont pas trouvé de terrain disponible à ce jour permettant d’accueillir une station de quarantaine sur le territoire polynésien, ainsi que cela a été exposé aux paragraphes 88 à 91 ci-dessus. Une ligne budgétaire a pourtant été prévue pour financer le coût de sa construction et de son fonctionnement274, mais ces deniers publics restent pour l’heure inutilisés.

339. Pareillement, l’entreprise Bagages du monde, dont le projet était de construire une station de quarantaine sur le territoire métropolitain, y a finalement renoncé, après s’être « fait retoquer par la commune de Roissy-en-France sur le terrain pour 3 cm manquant (…) de distance par rapport au grillage », ainsi que cela est mentionné au paragraphe 116 ci-dessus. Pourtant, la société estime avoir respecté toutes les exigences administratives nécessaires à la construction de ce bâtiment, le gérant ayant notamment obtenu un diplôme pour gérer une telle pension275.

340. En second lieu, les compétences professionnelles qu’exige l’activité de quarantaine et d’organisation des contrôles sanitaires des animaux sont très spécifiques et ne sont équivalentes ni à celles attendues pour l’exploitation d’un chenil sans station de quarantaine, ni à celles attendues pour l’exercice de l’activité d’affrètement d’animaux de compagnie par voie aérienne.

341. Pour toutes ces raisons, il existe de fortes barrières techniques à l’entrée sur le marché de la quarantaine.

Les barrières administratives

342. Sur le plan administratif, une station de quarantaine ne peut accueillir des animaux de compagnie à destination de la Polynésie française qu’à condition d’avoir obtenu les agréments adéquats, ainsi que cela est expliqué aux paragraphes 97 et suivants ci-dessus.

343. Or, l’obtention de ces agréments est soumise à de nombreuses démarches qui doivent être entreprises sur plusieurs années.

344. Comme le révèlent les éléments recueillis dans le cadre de l’instruction et mentionnés aux paragraphes 103 à 109 ci-dessus, en vue de lancer son activité fin 2001, GIP a dû déposer (i) une déclaration en tant qu’établissement pratiquant des échanges nationaux et internationaux d’animaux vivants auprès de la préfecture de l’Orne, lui permettant ainsi de transporter des animaux vivants et (ii) une déclaration au titre des installations classées pour la protection de l’environnement.

345. Pour la création de sa station de quarantaine, GIP a dès 2008 entretenu de nombreux échanges avec les autorités polynésiennes, à l’occasion desquels ces dernières lui ont rappelé les différentes normes techniques et sanitaires que le bâtiment abritant la quarantaine devrait respecter afin que la station obtienne les agréments nécessaires276.

346. Si les travaux entrepris par GIP lui ont permis d’obtenir dans un premier temps l’agrément pour la quarantaine de chiens le 20 décembre 2010277, elle n’a obtenu l’agrément pour la quarantaine de chats que le 8 décembre 2011278, après de nouveaux travaux de mise aux normes exigés par les autorités polynésiennes.

347. En somme, entre le début des démarches entreprises par GIP et l’obtention effective des agréments, des durées respectives de dix ans pour l’agrément relatif aux chiens et de onze ans pour l’agrément relatif aux chats se sont écoulées.

348. Le fait que l’entreprise mise en cause ait déclaré, en audition, qu’il avait « fallu attendre 3 ans pour obtenir l’agrément »279 confirme cette analyse, d’autant plus que dans cette déclaration, la société GIP ne fait référence qu’au dépôt effectif de la demande d’agrément, en faisant l’impasse sur toutes les démarches antérieures qui doivent pourtant être nécessairement accomplies afin d’obtenir cet agrément et sans lesquelles le dossier aurait été incomplet.

349. En conséquence, les barrières administratives susmentionnées continuent de subsister et sont très importantes.

Les barrières économiques

350. Afin d’évaluer les barrières économiques que tout nouvel acteur souhaitant entrer sur le marché de la quarantaine devrait surmonter, un exercice de comparaison entre, d’une part, certains coûts, tels que le niveau des investissements nécessaires, et, d’autre part, les revenus générés par cette activité, peut être réalisé.

351. Deux cas de figure doivent dès lors être distingués en la matière : celui d’un opérateur économique qui souhaiterait entrer sur le marché de la quarantaine des animaux à destination de la Polynésie française et qui ne disposerait pas d’un chenil au préalable, et celui d’un opérateur économique qui, à l’inverse, en disposerait.

352. S’agissant du premier cas de figure, il pourrait notamment s’agir de transitaires, concurrents de GIP sur le marché du transport d’animaux vivants par fret aérien toutes destinations confondues, qui souhaiteraient dorénavant desservir la Polynésie française, destination qui leur est jusqu’à présent fermée en raison des exigences sanitaires et du comportement de GIP consistant à lier ses services de quarantaine et ses prestations de transport et de transit pour la Polynésie française.

353. La construction d’une station de quarantaine nécessiterait des investissements importants280, au regard de la rentabilité d’une telle activité dans un contexte concurrentiel.

354. Un transitaire intervenant sur le marché du transport d’animaux vivants par fret aérien toutes destinations confondues, hors Polynésie française, et souhaitant entrer sur le marché du transport d’animaux vers cette destination devrait donc supporter les mêmes coûts d’investissement que ceux supportés par GIP, et ce alors même que la concurrence entre les deux opérateurs de quarantaine conduira à une réduction des prix et du nombre de prestations de quarantaine et d’organisation de l’affrètement aérien réalisées par chaque opérateur.

355. Pour apprécier de manière plus précise la viabilité d’un nouvel entrant sur le marché, des simulations, basées sur plusieurs hypothèses, ont été réalisée par les services d’instruction281.

356. Les résultats de ces simulations, présentés en fonction du plafond des coûts fixes nécessaires pour entrer sur le marché, c’est-à-dire en fonction de la part du coût de construction du chenil qui ne dépend pas du volume d’activité, montrent alors que, sous ces hypothèses, la rentabilité de l’entrée sera très vraisemblablement négative.

357. Au demeurant, aucun autre transitaire n’est jamais entré sur le marché de la quarantaine, depuis l’agrément de GIP, malgré une réelle volonté de leur part de pénétrer ce marché.

358. S’agissant du second cas de figure mentionné au paragraphe 351 ci-dessus, il pourrait s’agir d’un opérateur disposant déjà d’un chenil, qui souhaiterait entrer sur le marché de la quarantaine, en aménageant des boxes dont il dispose, au titre de son activité de chenil, en boxes destinés à abriter des animaux pour leur séjour en quarantaine.

359. Cependant, il résulte des analyses menées par les services d’instruction dans la notification de griefs282 que pour des sociétés exploitant des chenils, une telle stratégie paraît peu probable en raison des investissements (coûts de recherche, analyse de marché, coûts de formation du personnel, coûts administratifs ou encore coûts de marketing) et des compétences nouvelles nécessaires pour développer une station de quarantaine. Il peut d’ailleurs être observé qu’une telle stratégie d’entrée n’a pas eu lieu.

360. Il résulte de ce qui précède que des barrières économiques à l’entrée existent sur le marché de la quarantaine.

361. Enfin, si des alternatives théoriques à l’international existent, comme indiqué aux paragraphes 62 et suivants ci-dessus, consistant pour les particuliers à envoyer leur animal dans les stations de quarantaine situées en Nouvelle-Zélande, en Nouvelle-Calédonie, à Hawaï, en Californie, au Japon ou en Australie, elles sont trop faiblement substituables aux services de quarantaine en France pour constituer une alternative crédible sur la liaison Paris-Papeete. Ces alternatives sont en effet exclues par les consommateurs parce qu’elles sont notamment très coûteuses, très lourdes administrativement, complexes logistiquement et parfois linguistiquement, et plus dangereuses pour la santé et le bien-être de l’animal. Pour rappel, sur ce point, la gérante de la société GIP a elle-même déclaré : « Il y a une différence qualitative dans l’offre que nous proposons. Les alternatives que nous venons de citer (la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, etc.) existent donc mais sont moins performantes et moins qualitatives pour le propriétaire en termes de temps et pour l’animal en termes de bien-être »283 (voir notamment le paragraphe 80 ci-dessus).

Conclusion sur la position dominante de GIP sur le marché de la quarantaine

362. Il résulte de ce qui précède que la société GIP se trouve en position dominante sur le marché de la quarantaine, tant en raison du monopole de fait dont elle dispose que des importantes barrières à l’entrée qui existent, non seulement sur le plan technique, mais également administratif et, dans certains cas, économique, et qui en limitent très fortement la contestabilité.

363. Prises dans leur ensemble, ces barrières renforcent ainsi le pouvoir de marché de l’entreprise GIP et sa capacité à se comporter de manière indépendante sur le marché.

b) Le marché du transport routier entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle

364. En théorie, comme exposé aux paragraphes 160 ci-dessus, tout transporteur agréé par la DDPP compétente devrait pouvoir entrer sur ce marché et y exercer son activité, du moment qu’il respecte les conditions de transport des animaux imposées par la législation et par la réglementation, afin d’éviter que les animaux ne soient contaminés au cours de leur transport.

365. Toutefois, en l’espèce, seule la société GIP est présente sur ce marché, en raison de son refus de scinder sa prestation de quarantaine et sa prestation de transport routier entre sa station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. La gérante de GIP déclarait ainsi en audition : « C’est toujours nous qui effectuons les trajets » entre la station de quarantaine et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle284.

366. La société GIP se trouve ainsi en situation de monopole de fait sur ce marché, sans craindre une concurrence quelconque d’une autre entreprise.

c) Le marché de l’organisation du transport par fret aérien

367. Sur le marché de l’organisation du transport par fret aérien des animaux de compagnie vers la Polynésie française, GIP est également la seule société présente.

368. Ainsi qu’indiqué aux paragraphes 140 et suivants ci-dessus, aucun autre transitaire ou commissionnaire spécialisé dans l’affrètement d’animaux de compagnie n’intervient sur ce marché, GIP refusant de n’effectuer que la seule prestation de quarantaine et de laisser ensuite les animaux être pris en charge par un autre opérateur pour la prestation d’organisation du transport par fret aérien.

369. Il résulte de ce qui précède que la société GIP se trouve, ici encore, en situation de monopole de fait sur ce marché et ne risque pas d’être confrontée à la concurrence d’une autre entreprise.

3. CONCLUSION SUR LA POSITION DOMINANTE DE L’ENTREPRISE GIP

370. Eu égard à la pratique décisionnelle et à la jurisprudence précitées, il découle de ce qui précède que GIP est en position dominante individuelle sur le marché amont de la quarantaine et sur les deux marchés avals du transport routier et de l’organisation du transport par fret aérien précités, pendant la période de commission des pratiques.

E. QUALIFICATION DES PRATIQUES RELEVEES

1. PRINCIPES APPLICABLES

371. Il résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne que la notion d'« exploitation abusive » est une notion objective qui vise les comportements d'une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d'un marché où, à la suite précisément de la présence de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou des services sur la base de prestations des opérateurs économiques, au maintien d'une concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence285.

372. Une entreprise en position dominante sur le marché pertinent a ainsi une responsabilité particulière au titre du droit de la concurrence286.

373. En particulier, l’article L. 420-2 du code de commerce prohibe l’exploitation abusive d’une position dominante consistant en des ventes liées, au même titre que l’article 102, alinéa 2, sous d), du TFUE.

374. La vente liée ou le couplage est une pratique consistant à lier la fourniture de deux produits distincts ou de deux prestations de service distinctes ou d’en subordonner réciproquement la fourniture de l’une à l’autre. Elle est interdite si elle tend à restreindre la concurrence.

375. La jurisprudence constante de l’Union indique que la caractérisation d’une vente liée abusive repose sur quatre éléments cumulatifs : « premièrement, le produit liant et le produit lié sont deux produits distincts ; deuxièmement, l'entreprise concernée détient une position dominante sur le marché du produit liant ; troisièmement, ladite entreprise ne donne pas aux consommateurs le choix d'obtenir le produit liant sans le produit lié ; quatrièmement, la pratique en cause restreint la concurrence »287.

376. S’agissant de la quatrième condition précitée, le Tribunal a eu l’occasion de préciser que « Même s’il est vrai que ni l’article 82, second alinéa, sous d), CE ni, plus généralement, l'article 82 CE ne contiennent une référence à l’effet anticoncurrentiel de la pratique visée, il n’en demeure pas moins que, par principe, un comportement ne sera considéré comme abusif que s’il est susceptible de restreindre la concurrence. Aux fins de l’application de l’article 82 CE en matière de ventes liées, la Commission peut examiner les effets concrets qu’une vente liée a eus sur le marché ainsi que la manière dont celui-ci est appelé à évoluer, plutôt que de se contenter de considérer – comme elle le fait normalement dans les affaires en matière de ventes liées abusives – que ladite vente liée a un effet d'exclusion sur le marché per se, cela ne signifiant pas qu'elle a adopté une nouvelle théorie juridique. »288.

377. Selon la Commission européenne, un certain nombre de facteurs permettent d’apprécier les effets potentiels ou réels d’un comportement présumé abusif d’une entreprise289.

378. En premier lieu figure la position de l’entreprise dominante. Selon la Commission, en effet,« un comportement protégeant une position dominante risque d’autant plus d’entraîner une éviction anticoncurrentielle que cette position est forte ».

379. La Commission mentionne ensuite les conditions régnant sur le marché en cause, et notamment les conditions d’entrée ou d’expansion sur le marché. Sur ce point, l’Autorité a eu l’occasion de préciser que, dans l’analyse des abus de position dominante, les barrières à l’entrée constituent un élément essentiel à la conduite de son analyse pour l’appréciation des effets potentiels ou réels de la pratique abusive. Plus les barrières à l’entrée sont élevées, plus les pratiques mises en œuvre sont susceptibles de restreindre la concurrence. Le facteur temps est également essentiel dans l’analyse. Plus la pratique dure longtemps, plus elle constitue une barrière à l’entrée pour les nouveaux entrants290.

380. En outre, dans les Orientations précitées, la Commission évoque « la portée du comportement abusif présumé: d'une manière générale, un effet d'éviction est d'autant plus probable que le pourcentage des ventes totales sur le marché en cause qui sont affectées par le comportement est élevé, que ce comportement est de longue durée et qu'il est appliqué avec régularité »291.

381. Enfin, au titre de l’analyse des effets anticoncurrentiels, la Commission mentionne comme éléments à prendre en compte, d’une part, « les preuves éventuelles d’une éviction réelle : si le comportement est suffisamment ancien, la performance sur le marché de l'entreprise dominante et de ses concurrents peut constituer une preuve directe d'une éviction anticoncurrentielle. Pour des raisons imputables au comportement prétendument abusif, la part de marché de l'entreprise dominante peut avoir augmenté ou son recul avoir été ralenti. Pour des raisons similaires, il se peut que les concurrents actuels aient été marginalisés ou aient quitté le marché, ou que des concurrents potentiels aient cherché à pénétrer sur le marché sans y parvenir. » ; d’autre part, les « preuves directes d’une stratégie d’éviction: il peut s'agir notamment de documents internes contenant des preuves directes d’une stratégie visant à évincer les concurrents, comme un plan détaillé de se livrer à certaines pratiques de manière à évincer un concurrent, d’empêcher l'entrée sur un marché ou de prévenir l’émergence d’un marché, ou encore de preuves de menaces concrètes de mesures d'éviction. Ces preuves directes peuvent être utiles pour interpréter le comportement de l'entreprise dominante »292.

382. Par ailleurs, le fait que le comportement abusif d’une entreprise en position dominante produise ses effets anticoncurrentiels sur un marché distinct de celui sur lequel celle-ci est dominante n’exclut pas l’application de l’article 102 du TFUE293.

383. Enfin, comme l’a souligné la Cour de justice dans l’affaire Tetra Pak II, « la vente liée de deux produits (…) peut (…) constituer un abus au sens de l’article [102], à moins qu’elle ne soit objectivement justifiée »294. Ainsi, la combinaison de deux produits peut être nécessaire pour des raisons de sécurité295.

2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE

384. Au cas d’espèce, le marché du produit liant correspond au marché amont de la quarantaine, tandis que les marchés de produits liés sont au nombre de deux, et correspondent, d’une part, au marché aval du transport routier entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et, d’autre part, au marché aval de l’organisation du transport aérien entre l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et l’aéroport de Papeete.

385. Premièrement, le service de quarantaine constitue un service distinct des deux services de transport routier et d’organisation du transport par fret aérien.

386. Cela émane non seulement des nombreuses plaintes de consommateurs, désireux de n’obtenir de GIP que la prestation de quarantaine296, mais aussi des témoignages ou devis des potentiels concurrents de GIP sur les marchés avals, intéressés par la pénétration de ces marchés297. En outre, selon les déclarations de la vétérinaire officielle de la direction de la biosécurité de la Polynésie française, il n’y a pas d’obstacle sanitaire ni réglementaire à ce qu’un transporteur animalier, puis un transitaire ou commissionnaire, interviennent après la mise en quarantaine de l’animal pour réaliser son transport par route vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle puis son affrètement vers la Polynésie française. Les seules conditions à respecter seraient, concernant le transport routier, que « la cage soit scellée dans la quarantaine avant que le transporteur prenne l’animal, que le véhicule ait été nettoyé et désinfecté au préalable et que seuls des animaux de même statut sanitaire soient véhiculés ensemble (séparément dans leur cage). L’agrément délivré par la DDPP devrait suffire »298. Concernant l’affrètement, la vétérinaire officielle susmentionnée a indiqué que « cela ne relève pas du contrôle zoosanitaire. Il faut [simplement] que la cage de l’animal demeure scellée jusqu’à l’examen physique par un vétérinaire de la direction de la biosécurité à son arrivée à Tahiti »299. Il en résulte que ces prestations peuvent tout à fait être distinguées. D’ailleurs, la société GIP reconnaît elle-même qu’à tout le moins, les prestations de quarantaine sont détachables de celles du transport au sens large, comprenant le transport routier et l’organisation du transport aérien, puisqu’elle prend la peine de les distinguer dans ses devis300.

387. Deuxièmement, GIP détient une position dominante sur le marché du produit liant, c’est-à-dire sur le marché de la quarantaine, ainsi que cela a été démontré aux paragraphes 330 à 363 ci-dessus.

388. Troisièmement, il ressort à la fois des propos tenus par la gérante de GIP en audition (voir notamment les paragraphes 157 et suivants ci-dessus), des déclarations des entreprises potentiellement concurrentes de GIP notamment sur le marché de l’organisation du transport par fret aérien (voir notamment les paragraphes 166 et suivants ci-dessus), et des plaintes des consommateurs (voir notamment les paragraphes 196 et suivants ci-dessus), que le GIP ne permet pas aux clients d’obtenir le produit liant sans le produit lié. La condition relative à la liaison du service liant et des services liés est ainsi clairement établie.

389. Quatrièmement, concernant enfin la condition selon laquelle la vente liée doit être susceptible de restreindre la concurrence, plusieurs facteurs doivent être pris en compte.

390. S’agissant, tout d’abord, de la position de l’entreprise dominante, la société GIP est en situation de monopole sur les trois marchés précités, ainsi que cela a été démontré aux paragraphes 330 à 370 ci-dessus. L’éviction concurrentielle induite par le comportement qu’elle a mis en œuvre, consistant en une double vente liée, est donc d’autant plus grande que ce comportement a pour effet de lui assurer un monopole sur les deux marchés avals du transport routier vers l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle et de l’organisation du transport par fret aérien (effet de levier) vers Papeete.

391. S’agissant, ensuite, des conditions régnant sur le marché de la quarantaine, comme mentionné aux paragraphes 335 et suivants ci-dessus, le cumul de barrières techniques, administratives et, dans certaines hypothèses, économiques sur le marché amont, rend très difficile l’entrée de tout nouvel opérateur économique aussi bien sur le marché amont de la quarantaine que sur les deux marchés avals, l’activité sur ces marchés avals étant conditionnée à l’entrée sur le marché de la quarantaine. Ce constat est, par ailleurs, renforcé par la durée particulièrement longue des pratiques de vente liée mises en œuvre par GIP, qui ont débuté dès le 20 décembre 2010301, concernant les prestations relatives aux chiens, et dès le 8 décembre 2011302, concernant celles relatives aux chats, dates auxquelles GIP a été agréée par les autorités polynésiennes pour exercer son activité de quarantaine.

392. S’agissant, enfin, de la portée du comportement abusif, les pratiques de vente liée ont concerné l’intégralité des ventes intervenues depuis 2010 pour les chiens et depuis 2011 pour les chats sur les trois marchés précités. L’effet d’éviction de ces pratiques sur les marchés avals du transport routier et de l’organisation du transport par fret aérien y est donc total, aucun concurrent ne parvenant à exercer une activité sur ces marchés.

393. Le fait que la société GIP soit en situation de monopole sur les trois marchés précités depuis plus de dix ans est une preuve directe de l’éviction anticoncurrentielle à laquelle sa pratique a conduit. Aucun concurrent n’a en effet, depuis lors, réussi à pénétrer les deux marchés avals du transport routier et de l’organisation du transport par fret aérien. Ce n’est pourtant pas faute, pour certains opérateurs économiques présents sur les marchés du transport routier et de l’organisation du transport par fret aérien, de s’être déclarés intéressés et/ou d’avoir essayé d’y entrer, soit en prenant directement contact avec la société GIP, à l’instar des sociétés SCTIL303 et Bagages du monde304 (afin que les animaux ayant terminé leur séjour en quarantaine leur soit remis), soit en se rapprochant d’Air France, à l’instar de la société SCTIL305.

394. Il ressort de l’instruction que l’entreprise GIP a sciemment mis en œuvre les pratiques de vente liée qui lui sont reprochées, ses représentantes ayant par exemple déclaré : « on ne veut pas vendre une seule partie de notre prestation, et laisser ensuite le client passer par un autre transitaire. Nous aussi nous sommes transitaires. Il n’y aurait aucune raison de faire cela »306. Par cette pratique, GIP souhaitait ainsi empêcher l’entrée de nouveaux opérateurs sur les deux marchés avals à son marché amont de la quarantaine.

395. S’agissant de l’existence de justifications objectives aux pratiques en cause, GIP a cherché au cours de l’instruction à justifier son comportement par des considérations d’ordre sanitaire, à savoir éviter que la prise en charge par d’autres prestataires entraîne une recontamination des animaux.

396. Toutefois, ces considérations doivent être appréciées au regard des normes applicables en la matière, ainsi que de leur application par les autorités compétentes pour en connaître.

397. Or, la vétérinaire officielle de la direction de la biosécurité susmentionnée a confirmé qu’aucune disposition d’ordre sanitaire ne s’oppose à la scission des prestations. Les seules conditions à respecter seraient, concernant le transport routier, que « la cage soit scellée dans la quarantaine avant que le transporteur prenne l’animal, que le véhicule ait été nettoyé et désinfecté au préalable et que seuls des animaux de même statut sanitaire soient véhiculés ensemble (séparément dans leur cage). L’agrément délivré par la DDPP devrait suffire », et que la société détienne un pouvoir de représentation de la société GIP » 307. Concernant l’affrètement, la vétérinaire officielle susmentionnée a indiqué que « cela ne relève pas du contrôle zoosanitaire. Il faut [simplement] que la cage de l’animal demeure scellée jusqu’à l’examen physique par un vétérinaire de la direction de la biosécurité à son arrivée à Tahiti »308 [note ajoutée].

398. En d’autres termes, rien ne s’oppose, du point de vue sanitaire, à ce que les cages scellées contenant les animaux ayant effectué la quarantaine au sein de la station de GIP soient remises à d’autres prestataires, qu’il s’agisse de transporteurs routier ou de transitaires.

399. Ces transporteurs et transitaires sont par ailleurs eux-mêmes soumis à des réglementations et contrôles et engagent leur propre responsabilité pour les prestations qu’ils exercent. Il s’agit d’entreprises expérimentées et par conséquent habituées à exercer ce type de prestations. Enfin, les pièces au dossier ne comportent à cet égard aucun élément permettant de douter de la qualité de leurs services, comparativement à ceux offerts par GIP.

400. La justification apportée par GIP n’apparaît donc pas recevable au regard du comportement mis en œuvre, l’entreprise ne pouvant au surplus se substituer aux autorités sanitaires compétentes pour connaître de ces préoccupations. Le comportement n’est dès lors pas objectivement justifié.

3. CONCLUSION GENERALE

401. Il ressort de ce qui précède que GIP a abusé de sa position dominante sur le marché national des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en liant ces prestations au transport routier de ces animaux jusqu’à l’aéroport CDG et à l’organisation du transport par fret aérien de CDG jusqu’à Papeete.

402. La vente liée a pris la forme de devis globaux liant les prestations de quarantaine, de transport routier et d’organisation du transport par fret aérien, la société GIP refusant d’effectuer les seules prestations liées à la quarantaine pour les consommateurs qui en font la demande.

403. Cette pratique de vente liée a eu pour effet, d’une part, d’étendre et/ou de renforcer la position dominante de GIP sur les marchés nationaux du transport routier vers l’aéroport CDG et de l’organisation du transport par fret aérien d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en excluant toute concurrence sur ces marchés, et d’autre part, d’empêcher les consommateurs de recourir aux prestations potentiellement offertes par les concurrents de GIP présents sur ces deux marchés connexes.

F. SUR LES SANCTIONS

1. SUR LES PRINCIPES RELATIFS A LA DETERMINATION DES SANCTIONS ET A L’ACCEPTATION DES ENGAGEMENTS

a) Sur les sanctions

404. Le I de l’article L. 464-2 du code de commerce habilite l’Autorité à imposer des sanctions pécuniaires aux entreprises et aux organismes qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles interdites par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce.

405. Dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, le cinquième alinéa du I de l’article L. 464-2 du même code prévoit que : « Les sanctions pécuniaires sont appréciées au regard de la gravité et de la durée de l'infraction, de la situation de l'association d'entreprises ou de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et de l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le (titre VI du livre IV du code de commerce). Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. ».

406. Aux termes du sixième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, « Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante ».

407. Le III de l'article L. 464-2 du code de commerce dispose : « Lorsqu'une association d'entreprises ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l'entreprise ou l'association d'entreprises s'engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l'entreprise ou l'association d'entreprises donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l'Autorité de la concurrence, qui entend l'entreprise ou l'association d'entreprises et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I dans les limites fixées par la transaction ».

408. En outre, les circonstances particulières résultant de la mise en œuvre, en l’espèce, de la procédure de transaction fondée sur les dispositions précitées du III de l’article L. 464-2 du code de commerce justifient que les sanctions prononcées ne soient pas motivées par référence à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires énoncée dans le communiqué du 30 juillet 2021 de l’Autorité (le « communiqué sanctions »)309.

b) Sur les engagements

409. Aux termes du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, il est loisible à une entreprise qui souhaite recourir à la procédure de transaction de s’engager à modifier son comportement. Dans ce cas, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction.

410. Si le rapporteur général accepte d’inclure les engagements dans la proposition de transaction, il en tient compte, le cas échéant, pour déterminer le montant minimal et maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque le collège de l’Autorité examine l’affaire, il détermine si les engagements proposés par l’entreprise sont de nature à favoriser le retour à la conformité pour l’entreprise concernée et à avoir un effet positif sur le fonctionnement concurrentiel du marché.

2. SUR LA GRAVITE DES PRATIQUES

411. Lorsqu’elle apprécie la gravité d’une infraction, l’Autorité tient compte notamment de la nature des pratiques qu’elle poursuit, de la nature des secteurs en cause, des personnes susceptibles d’être affectées et des caractéristiques objectives de l’infraction (caractère secret ou non, degré de sophistication, existence de mécanismes de police ou de mesures de représailles, détournement d’une législation, etc.)310.

412. Les pratiques mises en œuvre par GIP ont consisté en un abus de position dominante tendant à évincer ses concurrents sur les deux marchés avals identifiés.

413. En vertu d’une pratique décisionnelle et d’une jurisprudence nationale constantes, elles revêtent un degré certain de gravité en ce qu’elles tendent à élever les barrières à l’entrée et à empêcher les concurrents de se développer sur ces marchés en dépit de leurs mérites propres311. La jurisprudence de l’Union est également constante, en rappelant que des pratiques d’éviction commises par des entreprises dominantes constituent des infractions graves312.

414. S’agissant des personnes susceptibles d’être affectées par ces pratiques, il s’agit d’une part, des entreprises actives sur les marchés du transport routier vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et, d’autre part, de celles actives sur le marché de l’organisation du transport par fret aérien d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française. Elles ont en effet été empêchées d’entrer et de se développer sur ces marchés, ce qui aurait pourtant représenté une opportunité financière intéressante, voire parfois « substantielle »313.

415. Il s’agit, également, des consommateurs finaux, et principalement de ressortissants français ou européens souhaitant se rendre en Polynésie française pour de longs séjours occasionnant leur déménagement et l’importation de leurs animaux de compagnie. En raison du fort lien affectif qui les unit à leurs animaux, ces clients n’ont pas eu d’autres solutions, pour les importer, que d’accepter les conditions et tarifications imposées par l’entreprise GIP, les autres solutions (notamment la réalisation d’un séjour en quarantaine en Nouvelle-Calédonie, en Nouvelle-Zélande ou à Hawaï par exemple), s’avérant peu réalisables et plus dangereuses pour le bien-être et la santé de l’animal, comme indiqué aux paragraphes 62 et suivants ci-dessus.

416. Cela les a parfois conduits à verser des sommes importantes, voire supérieures au coût de leur installation en Polynésie (voir paragraphe 231 ci-dessus). D’autres consommateurs ont dû renoncer, au moins provisoirement, à emmener leurs animaux de compagnie en Polynésie (voir paragraphe 253).

417. S’agissant des caractéristiques concrètes de l’infraction, il convient de noter que les pratiques reprochées ont été sciemment mises en œuvre par la société GIP, visant à se réserver la totalité des parts des marchés avals de la quarantaine, comme expliqué au paragraphe 384 et suivants ci-dessus.

418. GIP fait valoir qu’elle n’avait pas connaissance du caractère infractionnel de son comportement, du fait de la validation par les pouvoirs publics du protocole sanitaire qu’elle leur avait proposé et qui prévoyait de lier les prestations concernées. Elle aurait donc été légitimement convaincue de l’obligation d’appliquer scrupuleusement ce protocole, afin de ne pas perdre son agrément.

419. Toutefois, il ressort des déclarations de la vétérinaire officielle de la direction de la biosécurité de la Polynésie française, qu’il n’y a pas d’obstacle sanitaire ni réglementaire à ce qu’un transporteur animalier, puis un transitaire ou commissionnaire, interviennent après la mise en quarantaine de l’animal pour réaliser son transport par route vers l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle puis son affrètement vers la Polynésie française (voir paragraphes 160 et suivants ci-dessus). Par conséquent, le fait que la société GIP ait mis en place un protocole sanitaire prenant en charge l’animal entre son entrée dans la station de quarantaine et son arrivée sur le territoire polynésien et la circonstance que les autorités polynésiennes aient validé ce protocole en lui délivrant l’agrément afférent n’induisent pas que ces prestations doivent nécessairement être prises en charge par un seul et même prestataire. En effet, il n’existe aucun obstacle règlementaire ou matériel à ce qu’un autre protocole puisse être instauré, dans lequel plusieurs entreprises interviendraient successivement314.

3. SUR LA DUREE DES PRATIQUES

420. Au cas présent, les pratiques reprochées ont été mises en œuvre sur une période particulièrement longue, puisqu’elles ont débuté le 20 décembre 2010315 concernant les chiens et le 8 décembre 2011316 concernant les chats et étaient toujours en cours le 3 août 2021, date d’envoi de la notification de griefs.

4. SUR L’EVOLUTION DU CADRE REGLEMENTAIRE

421. GIP soutient que son activité de quarantaine est appelée à connaître un bouleversement, à la suite de l’évolution des modalités d’importations des chiens et des chats en Polynésie. Selon GIP, le consommateur bénéficie aujourd’hui d’une véritable alternative à leur placement en station de quarantaine, dans la mesure où il est désormais possible de faire réaliser les contrôles vétérinaires physiques sur leurs animaux à l’aéroport le jour de leur départ vers la Polynésie sous le contrôle d’une personne chargée de leur transport (compagnie aérienne, transitaire, prestataire de transport animalier), dans ses locaux ou tout autre espace dédié à l’examen des animaux. Ce contrôle physique pourra être réalisé soit par des vétérinaires officiels de la DDPP 93, soit par des vétérinaires sanitaires habilités317. Dans ce dernier cas, les vétérinaires officiels pourront ne procéder qu’à des contrôles documentaires318, comme c’est déjà le cas lorsque l’animal réalise une quarantaine dans la station de GIP. La nouveauté de ce dispositif réglementaire réside donc dans la possibilité, pour les vétérinaires habilités, de réaliser des contrôles sanitaires physiques des animaux à l’aéroport le jour de leur départ, et non plus seulement dans la station de quarantaine de GIP située dans l’Orne.

422. À cet égard, le compte-rendu du conseil des ministres du gouvernement polynésien du 29 septembre 2021 indique que : « L’importation des chiens et chats depuis la métropole impliquait depuis de nombreuses années le placement en quarantaine des animaux avant leur départ vers la Polynésie française. Ce placement en quarantaine impliquait de nombreux frais et désagréments pour les usagers.

Le Gouvernement de la Polynésie française a récemment pu négocier avec son homologue métropolitain un certificat sanitaire permettant la réalisation de l’examen final à l’aéroport. De ce fait, le passage en station de quarantaine des chiens et chats n’est plus obligatoire.

Les administrés vont donc bénéficier d’une réduction substantielle du coût (jusqu’à plusieurs milliers d’euros) et des délais d’importation de leurs animaux de compagnie. L’arrêté adopté par le Conseil des ministres vient préciser la procédure d’examen à l’aéroport afin de s’assurer du respect du protocole négocié entre la Direction de la Biosécurité et la Direction générale de l’Alimentation »319.

423. GIP souligne que le passage des animaux par sa station de quarantaine en vue de leur importation vers la Polynésie française ne sera donc plus de facto obligatoire, occasionnant une perte significative du chiffre d’affaires lié à cette activité pour l’entreprise, alors même qu’elle a été la seule entreprise à investir pour créer une station de quarantaine et à solliciter l’agrément des autorités polynésiennes. GIP ajoute qu’elle est actuellement dans une phase de restructuration de son activité pour s’adapter à ces nouvelles modalités de contrôle, notamment en matière logistique.

424. Si l’évolution de la réglementation polynésienne, postérieure à la fin des pratiques, n’est pas de nature à atténuer leur gravité, l’Autorité peut néanmoins prendre cette circonstance en considération pour individualiser le montant des sanctions pécuniaires en l’espèce.

5. SUR LES ENGAGEMENTS

425. GIP a proposé deux engagements lors des échanges avec le rapporteur général sur la procédure de transaction, comme le permet le III de l’article L. 464-2 du code de commerce qui prévoit que : « lorsque l’entreprise (…) s’engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction ».

426. En premier lieu, GIP s’est engagée à accomplir plusieurs diligences en matière de communication (Engagement n°1) dans les deux mois suivant la notification de la présence décision.

427. À l’égard des clients et prospects, GIP s’est ainsi engagée à publier sur la page d’accueil de son site internet, pendant une durée d’un mois, un résumé de l’affaire ainsi libellé :

« L’Autorité de la concurrence a sanctionné la société Goldenway International Pet (ci-après « GIP ») pour avoir abusé de la position dominante qu’elle détient sur le marché national des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en violation des articles 102 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.

L’infraction sanctionnée a consisté à lier ces prestations avec celles du transport routier de ces animaux entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celles de l’organisation du transport par fret aérien desdits animaux entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et de Papeete.

GIP a renoncé à contester le grief. Elle a ainsi bénéficié de la procédure de transaction.

Dans ce cadre, l’Autorité a prononcé, à l’encontre de GIP une sanction pécuniaire d’un montant de 65 000 euros. ».

428. GIP s’est également engagée à préciser, dans un encadré et en caractères très apparents sur la page de son site internet dédiée à la destination de la Polynésie française, les informations suivantes :

« Les principales conditions sanitaires fixées par l’arrêté n°738 CM du 15 mai 2013 modifié fixant les conditions d’introduction et d’importation des chiens et des chats en Polynésie Française sont les suivantes :

- Le placement d’un chien ou d’un chat en station de quarantaine avant le départ de France métropolitaine vers la Polynésie Française constitue une option et non une obligation.

- L’autre option qui s’ouvre aux propriétaires pour l’exportation de chiens et chats vers la Polynésie française sans placement dans une station de quarantaine, est la réalisation d’un contrôle sanitaire par un vétérinaire habilité à l’aéroport au moment de leur chargement vers la Polynésie française, aboutissant à la délivrance d’un certificat sanitaire.

- Cet examen doit avoir lieu immédiatement avant leur placement dans une cage scellée règlementaire, sous le contrôle d’une personne chargée de leur transport (compagnie aérienne, transitaire, prestataire de transport animalier), dans ses locaux ou un espace dédié à l’examen des animaux.

Il ressort en outre d’une décision de l’Autorité de la concurrence que :

- La prestation de quarantaine seule peut être fournie par la société Goldenway Pets International séparément des autres prestations d’exportation de chiens et chats vers la Polynésie Française, et en particulier des prestations de transport terrestre et d’organisation du transport par fret aérien. »

429. Enfin, GIP s’est engagée à procéder à la publication des informations figurant au paragraphe 428 ci-dessus sur deux forums de discussions de consommateurs : en l’occurrence, la page Facebook, « les français en Polynésie » et la page dédiée du forum du site du guide Le Routard.

430. À l’égard des entreprises du secteur et des autorités polynésiennes, GIP s’est engagée à faire connaître le résumé de l’affaire figurant au paragraphe 427 et les informations mentionnées au paragraphe 428 ci-dessus aux sociétés Air Tahiti Nui, Air France Cargo, SCTIL, Hesnault, Bagage du monde, Fret International Rapide Serv Tran (First Air Frigo), ainsi qu’à la direction de la biosécurité de la Polynésie française et à l’Autorité polynésienne de la concurrence.

431. En deuxième lieu, GIP s’est engagée à transmettre à l’Autorité (Engagement n°2) :

a. la preuve de l’accomplissement des diligences de publication et de diffusion induites par l’Engagement n° 1 au plus tard le 15ème jour du mois suivant celui de l’expiration du délai de deux mois fixé pour la réalisation de cet engagement ;

b. toute modification de la page de son site internet mentionnée au paragraphe 428 ci- dessus postérieure à celle induite par l’Engagement n°1, et ce pendant une durée de cinq ans suivant la notification de la présente décision.

432. L’Autorité prend acte des engagements de GIP, qui contribueront à la bonne information des professionnels et des consommateurs sur les pratiques prohibées et sur la possibilité de bénéficier d’une solution alternative à la quarantaine, et les rend obligatoires.

6. SUR LE MONTANT DES SANCTIONS

433. Au vu de l’ensemble de ces éléments et dans le respect des termes de la transaction, le montant de la sanction infligée à GIP est fixé à 65 000 euros.

434. Ce montant est inférieur au plafond légal de sanction prévu par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce.

DÉCISION

Article 1er : Il est établi que la société Goldenway International Pets a enfreint les dispositions des articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce, en abusant de la position dominante qu’elle détient sur le marché national des services de garde et d’organisation des contrôles sanitaires d’animaux de compagnie à destination de la Polynésie française, en liant ces prestations avec celles du transport routier de ces animaux entre la station de quarantaine du Grais et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celles de l’organisation du transport par fret aérien desdits animaux entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et de Papeete.

Article 2 : Est infligée, au titre des pratiques visées à l’article 1er, une sanction pécuniaire de 65 000 euros à la société Goldenway International Pets.

Article 3 : L’Autorité de la concurrence rend obligatoires les engagements pris par la société Goldenway International Pets, qui font partie intégrante de la présente décision, à laquelle ils sont annexés.

NOTES :

1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.

2 Ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017 étendant et adaptant à la Polynésie française certaines dispositions du livre IV du code de commerce relatives aux contrôles et aux sanctions en matière de concurrence (issu de la loi n° 2018-643 du 23 juillet 2018 – art 2).

3 Cotes 3164 – 3174.

4 Cotes 3175 à 3182.

5 Cotes 3227 à 3234.

6 Par opposition au secteur des animaux morts, dont la réglementation obéit à un régime juridique différent.

7 Loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

8 Pour rappel, ces dispositions doivent être respectées par l’animal dès qu’il entre sur le territoire polynésien.

9 Délibération n° 2001-16 APF du 1er février 2001 relative à la protection des animaux domestiques et des animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité (cote 1015).

10 Cote 390.

11 Cote 3234.

12 Cote 629.

13 Cote 390.

15 Cote 3247.

16 Cote 3249.

17 Cote 3251.

18 Cotes 3253 et 3255.

19 Cote 3257.

20 Cote 3259.

21 Cote 3261.

22 Cote 3263.

23 Cote 3265.

24 Cote 3267.

25 Cote 18.

26 Cote 18.

27 Cote 641.

28 Cote 18.

29 Cotes 3343 à 3356.

30 Cf. notamment la définition fournie par le Manuel de la réglementation du transport aérien international élaboré par l’Organisation de l’aviation civile internationale : « service aérien direct (appelé aussi service transdirect) : assuré entre deux points par un seul aéronef avec des arrêts intermédiaires mais sans changement de numéro de vol », à opposer à un vol sans escale : « service sans escale : assuré entre deux

points sans arrêt intermédiaire (pas même une escale technique) », point 5.3-2, page 192 du Manuel précité, cote 3549.

31 Cote 49.

32 Cote 157, et paragraphes 25 et suivants précités.

33 Le 14 octobre 2020, son site internet (https://www.frenchbee.com/fr/bf-faq) indiquait ainsi, dans la Foire aux questions : « Puis-je voyager avec mon animal ? Ce service n'est pas disponible à destination et au départ de Papeete, Tahiti »33, cote 3273.

34 Cote 1009.

35 Les deux derniers arrêtés en vigueur étant l’arrêté n° 605 CM précité, auquel a succédé l’arrêté n° 738 CM précité.

36 Cote 1096 et cotes 1107 à 1110.

37 Article 4, 3 ° de l’arrêté n° 605 CM précité. 38 Annexe I, B de l’arrêté n° 605 CM précité. 39 Article 2 de l’arrêté n° 829 CM précité.

40 Article 5 alinéa 6° de l’arrêté n° 738 CM précité.

41 Cote 1009.

42 Article 2 de l’arrêté n° 738 CM précité : « La cage devra être scellée au départ par l’autorité compétente par une marque officielle reproduite sur le certificat sanitaire d’accompagnement de l’animal ».

43 Cote 1096.

44 Cote 3181.

45 Cote 3179.

46 Cote 975.

47 Cotes 1009 et 1010.

48 Cote 1097.

49 Cote 658.

50 Cote 244 et cote 1009.

51 Cotes 630, 639, 646 et 653.

53 Cote 1096.

54 Cote 577.

55 Cote 658.

56 Cote 3271.

57 Cote 3269.

58 Cote 375.

59 Cote 3269.

60 Cotes 312 et 639.

61 Cote 647 et cote 3269.

62 Cote 312.

63 Cote 631.

64 Cote 639.

65 Voir le paragraphe 96 ci-après et le paragraphe 33 ci-avant.

66 Cote 647.

67 Cote 312. Des propos similaires sont également tenus dans la cote 639.

68 Cote 658.

69 Cotes 639 et 647.

70 Cote 647.

71 Cotes 312 et 639.

72 Cote 658.

73 Cote 1010.

74 Ibid.

75 Cotes 1010 et 1011.

76 Cote 1011.

77 Cotes 1010 et 1011.

78 En effet, en vertu de l’article 3 de l’arrêté n° 829 CM précité, si la capacité d’accueil de la station excède 20 chiens sevrés, le dossier de demande d’agrément doit alors comporter une autorisation d’exploiter une installation classée pour la protection de l’environnement de 1ère classe délivrée par le ministère de l’environnement.

79 Cote 1011.

80 Cote 1010.

81 Ibid.

82 Audition du 21 avril 2017 (cote 156). La gérante a réitéré ces propos lors de son audition du 1er octobre 2020 (cote 659).

83 Article 10 de l’arrêté n° 829 CM précité.

84 Article 20 de l’arrêté précité.

85 Article 17 de l’arrêté précité.

86 Article 18 de l’arrêté précité.

87 Article 21 de l’arrêté précité.

88 Article 25 de l’arrêté précité.

89 Cote 1030.

90 Cote 1043.

91 Cote 658.

92 Ibid.

93 Cote 157.

94 Cote 658.

95 Ibid.

96 Cote 1853.

97 Cote 1815.

98 Cotes 1848 à 1861.

99 Cote 1725.

100 Cotes 1848, 1849, 1855, 1858 à 1861.

101 Entre le 27 mars 2008 et le 10 décembre 2009.

102 Cote 1726.

103 Cotes 1865 à 1870.

104 Cote 1030.

105 Cote 1043.

106 Cote 658.

107 Cotes 630, 639, 646 et 653.

108 Cote 244.

109 Cotes 639 et 653.

110 Cote 639.

111 Cote 639.

112 Cote 639.

113 Même si la quarantaine reste obligatoire dans les faits.

114 Cote 631.

115 Cote 646.

116 Tant dans sa version antérieure aux modifications induites par l’article 3 de l’ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 que dans sa version postérieure.

117 Cote 660.

118 Cote 11.

119 Cote 11.

120 Cote 382.

121 Ibid.

122 Cote 328.

123 Cote 630.

124 Cote 382.

125 Cote 660.

126 Cote 422.

127 Cote 155.

128 Cote 172.

129 Le transitaire est chargé de rechercher et de réserver la prestation de transport correspondant aux attentes de son client final, qui le mandate à cet effet. Il n’est toutefois tenu qu’à une obligation de moyens, contrairement au commissionnaire qui est tenu à une obligation de son client.

130 Cote 660.

131 Cote 660.

132 Cote 422.

133 Cote 1011.

134 Cote 1012.

135 Comme mentionné aux paragraphes 124 et suivants ci-dessus.

136 Cote 422.

137 Cote 645.

138 Cote 645.

139 Cote 971.

140 Cote 970.

141 Cote 647.

142 Ibid.

143 Ibid.

144 Ibid.

145 Ibid.

146 Cote 645.

147 Ibid.

148 Cote 645.

149 Cote 652.

150 Cotes 653, 994 et 995.

151 Cote 994.

152 Cote 653.

153 Cote 375.

154 Cote 653.

155 Cote 637.

156 Ibid.

157 Cote 638.

158 Cote 638.

159 Cote 639.

160 Cote 886.

161 Cote 353.

162 Cote 361.

163 Cote 631.

164 Cotes 630 et 631.

165 Cote 2811.

166 Cote 2793.

167 Cote 2804.

168 Cote 2814.

169 Cotes 2799 et 2800 ; le montant plus important de cette prestation s’explique notamment par le fait que le véhicule transportant l’animal étant basé à Credin (56580), dans le Morbihan, la facturation de la prestation prend en compte, outre les 256 km entre la station de quarantaine et l’aéroport, la distance entre Credin et la station de quarantaine, soit 232 km supplémentaires.

170 Cote 2806.

171 Cote 26 et cotes 231 et suivantes.

172 Cotes 234 à 236.

173 Cotes 234 à 236.

174 Cote 236.

175 Cotes 233 et 234.

176 Ibid.

177 Cote 233.

178 Cote 233.

179 Cote 241.

180 Cote 244.

181 Cotes 312 et 639.

182 Cote 245.

183 Cote 247.

184 Cote 248.

185 Cote 240.

186 Cotes 231 et 232 et cote 26.

187 Cotes 254 et 255.

188 Cotes 254 et 255.

189 Cotes 254 et 255.

190 Cotes 254 et 255.

191 Cotes 254 et 255.

192 Cote 254.

193 Cote 279.

194 Cotes 254 et 255.

195 Cote 572.

196 Cote 565.

197 Cote 577.

198 Cote 576.

199 Cotes 575 et 576.

200 Cote 585.

201 Cote 584.

202 Cote 338.

203 Cote 343.

204 Cote 327.

205 Cote 328.

206 Ibid.

207 Ibid.

208 Ibid.

209 Cote 327 ; cote 328.

210 Cote 895.

211 Cotes 893 et 894 ; cote 895.

212 Cote 892 ; cote 893.

213 Cote 892.

214 Cote 1011.

215 Cote 999.

216 Cote 999.

217 Cote 999.

218 Cote 999.

232 Cote 3180 ; cote 3181.

233 Cote 3182.

234 Cote 3180.

235 Cote 3180.

236 Cote 3179.

237 Cote 3177.

238 Cote 3234.

239 Cote 3233.

240 Cote 3234.

241 Kbis de la société GIP du 14 octobre 2020, cote 959.

242 Décision n° 19-D-21 du 28 octobre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport routier de marchandises, paragraphe 71.

244 Voir, en ce sens, les arrêts de la Cour de justice du 9 novembre 1983, Nederlandsche Banden Industrie Michelin contre Commission, 322/81, paragraphe 37 et du Tribunal du 25 mars 2015, du Slovenská pošta contre Commission, T-556/08, paragraphe 112.

245 Voir les paragraphes 13 et suivants de la Communication ci-avant mentionnée.

246 Voir la communication de la Commission européenne sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence, 9 décembre 1997, paragraphe 20.

247 Cote 3163.

248 Tant dans sa version antérieure aux modifications induites par l’article 3 de l’ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 que dans sa version postérieure.

249 Tel que décrit supra au paragraphe122.

250 Telles que décrites supra aux paragraphes123 à 125.

251 Cote 2814.

252 Cotes 2799 et 2800 ; le montant plus important de cette prestation s’explique notamment par le fait que le véhicule transportant l’animal étant basé à Credin (56580), dans le Morbihan, la facturation de la prestation prend en compte, outre les 256 km entre la station de quarantaine et l’aéroport, la distance entre Credin et la station de quarantaine, soit 232 km supplémentaires.

253 Cote 2806.

254 Cote 390.

255 Cote 645.

256 Cote 375.

257 Cote 653.

258 Cotes 630 et 631.

259 Cote 645.

260 Cote 886.

261  Arrêts du 13 février 1979, Hoffman-La Roche/Commission, 85/76, Rec. p. 461, point 38, et du  6 décembre 2012, AstraZeneca e.a./Commission, C-457/10 P, point 175, voir également arrêt de la cour d’appel de Paris du 18 décembre 2014, n° 2013/12370.

262 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 18 décembre 2014, n° 2013/12370.

263 Voir, notamment, décisions n° 10-D-14 du 16 avril 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la valorisation électrique du biogaz et n° 10-D-34 du 9 décembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la gestion de droits d’auteurs d’œuvres audiovisuelles.

264 Arrêts Hoffmann-La Roche/Commission, précité, point 41, du 3 juillet 1991, Akzo/Commission, C-62/86, Rec. p. I-3359, point 60, et AstraZeneca e.a./Commission, précité, point 176.

265 Cote 1030.

266 Cote 1043.

267 Cote 658.

268 Article 10 de l’arrêté n° 829 CM précité.

269 Article 20 de l’arrêté précité.

270 Article 17 de l’arrêté précité.

271 Article 18 de l’arrêté précité.

272 Article 21 de l’arrêté précité.

273 Article 25 de l’arrêté précité.

274 Cote 1010.

275 Cote 639.

276 Cotes 1848 à 1861.

277 Cote 1030.

278 Cote 1043.

279 Cote 157.

280 Cotes 1725 à 1730.

281 Cote 3688.

282 Notification de griefs, paragraphes 444 à 450.

283 Cote 658.

284 Cote 660.

285 Arrêts de la Cour de justice, Hoffman-La Roche, précité, point 91 ; du 3 juillet 1991Akzo/Commission, C-62/86, point 69, et du 17 février 2011, TeliaSonera Sverige, C-52/09, point 27.

286 Arrêts du Tribunal de l’UE du 9 novembre 1983, Michelin contre Commission, 322/81, paragraphe 57 et du 17 septembre 2007, Microsoft contre Commission, T-201/04, paragraphe 229.

287 Arrêt du Tribunal de l’UE, Microsoft Corp. / Commission, précité, points 842, 843 et 859.

288 Ibid, point 18.

289 Orientations de la Commission européenne sur les priorités retenues pour l’application de l’article 82 du traité CE [article 102 du TFUE] aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes (2009/C 45/02), point 20.

290 Décision n° 12-D-29 du 21 décembre 2012 relative à des pratiques relevées dans le secteur de la distribution d’assurances complémentaires à destination des joueurs de golf, paragraphes 132 à 136

291 Orientations de la Commission européenne sur les priorités retenues pour l’application de l’article 82 du traité CE [article 102 du TFUE] aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes (2009/C 45/02), point 20.

292 Orientations de la Commission européenne sur les priorités retenues pour l’application de l’article 82 du traité CE [article 102 du TFUE] aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes (2009/C 45/02), point 20.

293 Arrêt de la Cour de justice du 14 novembre 1996, Tetra Pak International contre Commission (II), C-333/94 P, point 25.

294 Arrêt de la Cour de justice Tetra Pak contre Commission, précité, point 37.

295 Arrêt du Tribunal de l’UE du 12 décembre 1991 Hilti AG contre Commission, T-30/89.

296 Voir supra les paragraphes 196 à 263.

297 Voir supra le paragraphe 166.

298 Cote 422.

299 Cote 422.

300 Exemple d’un devis cote 35.

301 Cote 1030.

302 Cote 1043.

303 Cote 645.

304 Cote 638 et cote 353.

305 Cotes 970 et 971.

306 Cote 660.

307 Cote 422.

308 Cote 422.

309 Voir la décision n° 17-D-20 du 18 octobre 2017 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des revêtements de sols résilients, paragraphe 452 ; le Communiqué de procédure du 21 décembre 2018 relatif à la procédure de transaction, paragraphe 37 et l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 juin 2019, Alcyon SA,  n° 18/20229.

310 Communiqué de l’Autorité de la concurrence relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires du 30 juillet 2021, paragraphe 28.

311 Cf. la décision n° 09-D-36 de l’Autorité du 9 décembre 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par Orange Caraïbe et France Télécom sur différents marchés de services de communications électroniques dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane, paragraphe 446 ; décision n° 12-D-25 du 18 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport ferroviaire de marchandises, paragraphe 677 ; décision n° 16-D-14 du 23 juin 2016 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du zinc laminé et des produits ouvrés en zinc destinés au bâtiment, paragraphe 960 ; Cour de cassation, 27 septembre 2017, EDF, n° U 15-20.087 et R 15-20.291.

312 Arrêt de la Cour de justice du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom précité, point 275.

313 Cf. notamment le paragraphe 176 ci-avant.

314 Cotes 247 et 248 ; cote 1011.

315 Cote 1030.

316 Cote 1043.

317 Un vétérinaire sanitaire habilité est un vétérinaire ayant obtenu une habilitation délivrée par la DDPP du département au sein duquel il a établi son domicile professionnel administratif, dans les conditions prévues par les articles L. 203-1 et R. 203-3 et suivants du code rural et de la pêche maritime. Au sein de chaque département, une liste de vétérinaires sanitaires en activité est dressée et est ainsi disponible sur le site internet de la préfecture. Cette liste mentionne l’activité du vétérinaire et les espèces qu’il est habilité à contrôler.

318 Voir la note de direction de la biosécurité polynésienne du 3 septembre 2021 et l’arrêté n° 2219 CM du 1er octobre 2021 portant modification de l’arrêté n° 738 CM du 15 mai 2013.

319 https://www.presidence.pf/conseil_ministres/conseil-des-ministres-du-29-septembre-2021/.