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Décisions

CA Paris, 4e ch., 18 septembre 2002, n° D20020096

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

GROUPE BERCHET (SA)

Défendeur :

SIMBA T FRANCE (SARL)

T. com Paris, du 25 avr. 2000

25 avril 2000

FAITS ET PROCEDURE

La société GROUPE BERCHET, qui a pour activité la conception, fabrication, vente de jouets, a créé en 1997, un modèle de poupée dit " B DOUX " présenté dans un biberon, objet d'un dépôt de modèle international, visant la France, le 22 décembre 1997, sous le n° DM/042400.

Elle a également créé, pour sa collection 1997, un modèle de poupée, dite " BEBE DOUX ", vendu dans un sac transparent en forme de cloche.

Constatant que des poupées vendues sous les dénominations, BOTTLE BABY et NICKY B reprenaient les caractéristiques de ses modèles, la société GROUPE BERCHET, après avoir fait pratiquer, le 1er avril 1999, une première saisie contrefaçon à Paris au siège de la société SIMBA TOYS FRANCE, le 2 avril 1999, une seconde saisie contrefaçon à Voiron dans les locaux de la société GUEYDON, grossiste en jouets et un constat d'huissier dans le magasin BB TOYS à Nîmes, a assigné les sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et ARTEM devant le tribunal de commerce de Paris en contrefaçon et en concurrence déloyale.

Par jugement du 25 février 2000, le tribunal a :

- mis la société ARTEM, hors de cause,

- dit que la "société SIMBA" s'est rendue coupable de concurrence déloyale à l'encontre des " BEBE DOUX ",

- condamné solidairement les sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG à payer à la société GROUPE BERCHET la somme de 100 000 francs,

- prononcé des mesures d'interdiction,

- condamné solidairement les sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG à payer à la société GROUPE BERCHET la somme de 15 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Vu l'appel de cette décision interjeté le 11 avril 2000 par la société GROUPE BERCHET ;

Vu les dernières conclusions en date du 1er mars 2002 par lesquelles la société GROUPE BERCHET, poursuivant la réformation de la décision entreprise, demande à la cour de :

- dire que les sociétés ARTEM, SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG ont commis des actes de contrefaçon des droits d'auteur qu'elle détient sur ses modèles BEBE DOUX et B DOUX,

- dire que ces sociétés ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire,

- les condamner, sous astreinte définitive de 1 500 euros par infraction constatée, à cesser d'importer, de détenir, d'offrir à la vente, tout article reproduisant ses modèles,

- se réserver la liquidation de l'astreinte,

- condamner in solidum la société ARTEM, les sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG à lui payer la somme de 450 000 euros, sauf à parfaire par voie d'expertise,

- prononcer la confiscation et la destruction des articles litigieux et autoriser la publication de la décision à intervenir dans 10 journaux,

- condamner solidairement la société ARTEM, la société SIMBA TOYS GmbH & Co et la société SIMBA TOYS HONG KONG au paiement de 15.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Soutenant à cet effet que :

- la société ARTEM, par le seul fait de jouer un rôle d'intermédiaire dans la diffusion des articles litigieux a participé à leur commercialisation et à la contrefaçon,

- le modèle BABY DOUX, original et nouveau, est protégeable par le droit d'auteur et par le droit des modèles,

- le poupon BOTTLE B de la société SIMBA, ainsi que sa version modifiée, constitue la contrefaçon du modèle BABY DOUX,

- le modèle NICKY BABY de la société SIMBA, dont la vente en France est prouvée, constitue l'imitation illicite du modèle BEBE DOUX, présenté dans un sac original et nouveau,

- au-delà de la contrefaçon, les sociétés SIMBA ont commis des actes de concurrence déloyale en reprenant la gamme de ses produits et en cherchant à s'inscrire dans son sillage ;

Vu les dernières écritures en date du 15 février 2002 par lesquelles la société SIMBA TOYS GmbH & Co, la société SIMBA TOYS HONG KONG et la société SIMBA TOYS FRANCE, anciennement dénommée ARTEM, demandent à la cour de confirmer la décision entreprise, sauf en ce qu'elle a condamné les sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG à payer à la société GROUPE BERCHET la somme de 100.000 francs au titre de faits de concurrence déloyale et statuant à nouveau :

- de prononcer la nullité de la partie française du modèle n° DM-042 400,

- de condamner la société GROUPE BERCHET à leur payer la somme de 60 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle leur a fait subir et la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Et soutiennent que :

- la société SIMBA TOYS FRANCE, alors ARTEM, agent commercial en France de la société SIMBA TOYS HONG KONG, ne vend pas, ne détient pas des produits SIMBA en France,

- le modèle NICKY BABY, argué de contrefaçon du modèle BEBE DOUX, n'a pas été commercialisé en France,

- la société GROUPE BERCHET ne peut prétendre avoir créé une oeuvre de l'esprit originale en créant le modèle BEBE DOUX dans un sac PVC,

- son propre modèle créé en 1996, antériorise les particularités du modèle BEBE DOUX, tant en ce qui concerne le sac que le corps de la poupée,

- la société GROUPE BERCHET ne peut prétendre disposer de droits sur le modèle BABY DOUX qui est banal et antériorisé,

- les sociétés SIMBA T ont proposé à la vente, comme de nombreux acteurs de ce marché, un poupon dans un biberon et n'ont commis aucune faute engageant leur responsabilité délictuelle ;

DECISION

I - SUR LA MISE EN CAUSE DE LA SOCIETE SIMBA TOYS FRANCE :

Considérant que la société SIMBA TOYS FRANCE, anciennement dénommée ARTEM, soutient que n'étant que l'agent commercial en France de la société SIMBA TOYS HONG KONG, elle n'effectue aucune opération de vente ou d'importation et se contente de transmettre à son mandant les commandes susceptibles de lui être adressées par les clients français qu'elle souligne que l'huissier n'a d'ailleurs pu saisir dans ses locaux qu'un seul catalogue SIMBA 1999, édité par les sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG ; qu'elle conclut en conséquence à sa mise hors de cause ;

Considérant que lors des opérations de saisie contrefaçon, le représentant de la société ARTEM a déclaré à l'huissier ne posséder qu'un seul catalogue, ne disposer d'aucun stock, d'aucun échantillon, d'aucune comptabilité et amener les clients dans le showroom à Furth (Allemagne) ou à Hong Kong ;

Mais considérant que, figurant comme agent de la marque SIMBA, en dernière page du catalogue remis à l'huissier, cette société intervient, nécessairement, dans la diffusion des produits de cette marque en France, en participant à la mise sur le marché des produits des sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG ;

Que la décision entreprise doit être réformée en ce qu'elle a mis hors de cause la société ARTEM, aux droits de laquelle vient la société SIMBA TOYS FRANCE ;

II - SUR LA PROTECTION DU MODELE B DOUX :

Considérant que la société GROUPE BERCHET caractérise son modèle BABY DOUX par la combinaison des éléments suivants : une poupée de format moyen, de l'ordre de 20 cm, d'une consistance particulière (corps mou, tête et membres d'une matière dure), dotée d'une chevelure stylisée par un effet de moulage du crâne, sans aucun effet de mèche, revêtue d'un ensemble vestimentaire, constitué de façon systématique d'une grenouillère complète, couvrant les pieds, doté d'un col ou d'une collerette, et d'un bonnet, présentée, assise à l'intérieur d'un gros biberon en plastique transparent, de forme arrondie d'une vingtaine de centimètres de haut (avec couvercle) et environ la moitié de large, dont le couvercle, en forme de tétine, reprend la couleur principale des vêtements du poupon" ;

Qu'elle revendique principalement la protection de ce modèle par le droit d'auteur, le dépôt international du 22 décembre 1997, visant à protéger la forme du biberon et celle du poupon, n'étant invoqué qu'à titre complémentaire ;

Considérant que le modèle déposé représente un poupon souple vêtu d'un body blanc resserré au cou, couvrant le corps jusqu'aux épaules et le haut des cuisses, et un biberon transparent de forme arrondie dont le couvercle, en forme de tétine, est en couleur ;

Considérant que les sociétés SIMBA allèguent que la présentation d'une poupée dans un biberon n'était pas nouvelle, au jour du dépôt du modèle et opposent :

- le modèle " BOTTLE MIMI " proposé à la vente par la société LUCKY BELL dans ses catalogues 1988 et 1991 ; que cependant celui-ci se distingue du modèle de la société GROUPE BERCHET, notamment par la forme cylindrique du corps du biberon, l'aspect pointu de la tétine et la physionomie totalement différente de la poupée qui ne ressemble aucunement à un poupon ;

- les modèles FAO, MY B, MILK TIME, SALLY A et BABY D comportant un bébé présenté dans un biberon transparent avec une tétine colorée ; que cependant ces jouets n'ont aucune date certaine et n'antériorisent pas la création de la société GROUPE BERCHET

- la photographie d'une poupée contenue dans un biberon, ainsi qu'une facture établie à l'intention de la société Carrefour, le 22 octobre 1993, portant sur l'achat de 400 articles sous la dénomination BIBERON GEANT + BEBE ; que cependant il n'est pas démontré que l'article photographié corresponde à cette facture ;

Qu'il s'ensuit que les sociétés SIMBA ne versent aux débats aucune antériorité de toutes pièces susceptibles de détruire la nouveauté du modèle déposé ;

Considérant, par ailleurs, qu'elles prétendent en vain que la forme du biberon serait dictée par sa fonction ; qu'en effet, ses proportions, la forme particulière du corps bombé de la bouteille et celle de la tétine ne sont pas imposées par la fonction utilitaire de l'objet et confèrent au biberon un caractère propre qui le distingue d'autres modèles ayant la même finalité ;

Considérant en conséquence que le modèle déposé bénéficie de la protection revendiquée au titre des dessins et modèles ;

Qu'au surplus la combinaison revendiquée est également protégeable par le droit d'auteur ;

Qu'en effet, que si les sociétés intimées soutiennent qu'il est usuel pour recréer l'univers de l'enfant, d'habiller des poupées comme des bébés avec des pyjamas ou des grenouillères, des bonnets, dans des couleurs claires assorties, il n'en demeure pas moins qu'en dépit du caractère banal de chacun de ses éléments, la combinaison adoptée par la société GROUPE BERCHET traduit une démarche créative portant l'empreinte de la personnalité de son auteur et confère au modèle son caractère original ;

Que le modèle BABY DOUX se distingue par une grenouillère complète couvrant les pieds des poupons, les différentes formes de bonnets utilisées, la reprise des mêmes motifs pour le tissu constituant les pieds de la grenouillère, la collerette ou le col, le bonnet ;

Qu'ainsi, le modèle rose habille la poupée d'une grenouillère rose avec des pieds et une collerette, dans un tissu Vichy blanc et rose, assortie d'une frise de dentelle, d'un bonnet cloche à revers rose sur lequel est cousu un noeud confectionné dans le même tissu que la collerette et les pieds ;

Que le modèle jaune a une grenouillère jaune avec des pieds et un col, bordé d'une dentelle, à carreaux blanc et bleus, des fleurs jaunes, un bonnet cloche jaune à revers, comportant également un noeud dont le tissu reprend les mêmes motifs que le col.

Que le modèle vert comporte une grenouillère verte avec des pieds et un col triangulaire dans un tissu rayé blanc et vert, bordé d'une dentelle, un bonnet de meunier confectionné pour partie dans le même tissu que les pieds et le col ;

Que le modèle bleu clair a une grenouillère de couleur ciel avec des pieds et une collerette en tissu Vichy blanc et bleu, un bonnet cloche comportant un noeud confectionné dans ce même coloris de Vichy ;

Que le modèle bleu foncé présente une grenouillère de cette couleur, avec un col assorti d'une dentelle et des pieds dans un tissu à carreaux bleu et blanc, un bonnet à double pointe bicolore reprenant en partie les mêmes carreaux ;

Considérant que le modèle BABY DOUX et ceux opposés par les sociétés intimées, (poupées de la société ZAPF en 1993, de la société COROLLE en 1996 et les propres créations des sociétés SIMBA T GmbH & Co et SIMBA T HONG KONG en 1994), offrent une impression d'ensemble propre à chacun qui permet de les distinguer les uns des autres, cette perception s'imposant d'évidence à l'examen des modèles en présence ;

Considérant en conséquence que la décision entreprise doit être réformée en ce qu'elle n'a pas retenu que le modèle BABY DOUX est protégeable par le droit d'auteur ;

III - SUR LA CONTREFAÇON DU MODELE B DOUX :

Considérant que le modèle mis sur le marché par les sociétés SIMBA sous la dénomination BOTTLE BABY, en dépit de quelques différences (en particulier la forme cylindrique du biberon), lesquelles ne sont pas immédiatement perceptibles et n'affectent pas l'impression d'ensemble qui s'en dégage, est la copie servile du modèle de la société GROUPE BERCHET dont il présente, dans une combinaison identique, l'ensemble des caractéristiques ci-dessus décrites ; que le modèle critiqué constitue la contrefaçon du modèle créé par la société GROUPE BERCHET ;

Considérant que les sociétés intimées soutiennent subsidiairement que ce produit n'a été commercialisé qu'en 2.400 exemplaires jusqu'au mois d'avril 1999, date à laquelle, par suite de l'assignation que lui a délivrée la société GROUPE BERCHET, sans que cela ne constitue un aveu de leur part, elles ont donné une nouvelle configuration à leur modèle BOTTLE BABY ; que la société GROUPE BERCHET réplique que les modifications mineures qui ont été apportées n'ont nullement fait cesser les actes de contrefaçon ;

Considérant que les nouveaux modèles proposés par les sociétés SIMBA, tels qu'ils figurent dans un catalogue du magasin CORA paru en septembre 1999, ont un bouchon en forme de canard au lieu d'une tétine ; que la tenue des poupons a été modifiée en ce que la collerette, le bonnet, les manches ou le bas du vêtement sont confectionnés dans un tissu à rayures associant la couleur principale avec du blanc, que le bébé est désormais pieds nus ;

Mais considérant que les modèles modifiés présentent toujours une collerette, un bonnet bicolore assortis à la couleur de l'habit du poupon, les mêmes coloris jaune, rose, bleu clair et vert, auxquels les sociétés SIMBA ont ajouté un coloris rouge et un coloris bleu foncé, lequel, au demeurant, était déjà commercialisé par la société GROUPE BERCHET ;

Que les seules modifications apportées ne sont pas de nature à exclure une ressemblance pour un consommateur d'attention moyenne, qui n'a pas les deux produits ensemble sous les yeux ; que loin de permettre de distinguer le modèle contrefaisant, elles lui donnent l'aspect d'une simple variante du modèle original ;

Que les sociétés intimées ne peuvent enfin prétendre que l'apposition d'une étiquette "canard" de couleur jaune, sur la version modifiée, aurait, à elle seule, permis de différencier les modèles, alors que la société GROUPE BERCHET commercialise ses jouets avec une étiquette à dominance jaune ;

Considérant qu'il s'ensuit que les sociétés SIMBA ont contrefait le modèle BABY DOUX de la société GROUPE BERCHET, en diffusant le modèle BOTTLE BABY tant dans sa version initiale que dans sa version modifiée ;

IV - SUR LA PROTECTION DU MODELE BEBE DOUX :

Considérant que la société GROUPE BERCHET caractérise son modèle créé en 1998, par la combinaison d'une poupée présentée dans un sac en plastique, en forme de cloche, presque aussi large que haut (20 cm) dont la partie supérieure est arrondie dans son ensemble et non pas seulement dans ses angles, aux contours recouverts d'un biais blanc cousu, disposant en partie avant, d'une ouverture signalée par le tissu et une fermeture à glissière de couleur blanche, et dont le dos comporte une pièce en carton empêchant de voir à travers le plastique, présentant un décor Vichy faisant écho au décor de la base, au sommet duquel est cousue une poignée confectionnée dans un tissu plus épais, de couleur pastel et doux au toucher ;

Considérant que les sociétés SIMBA soutiennent avoir créé et utilisé un sac en plastique transparent identique dès sa collection de 1997, lequel a fait l'objet d'une simple évolution pour la collection de jouets en 1999 ;

Mais considérant que le sac présenté en 1997, est caractérisé par un plastique translucide sur tous ses côtés, des bandes de couleurs vives (vert, jaune, rouge, bleu), de larges bretelles en tissu rouge et bleu au dos du sac, des poches rapportées sur le devant et sur le côté, à l'inverse du sac de la société GROUPE BERCHET qui ne comporte aucune poche, aucune bretelle et ne présente que des teintes pastels ; qu'il s'ensuit qu'il n'antériorise pas de toutes pièces le sac de la société GROUPE BERCHET, dont la combinaison revendiquée ne se retrouve dans aucun sac plastique transparent du même type, notamment ceux de la société ZAPF pour présenter la poupée HOLLY DOLLY, et ceux de la société COROLLE pour la présentation des poupées CIGOGNE et BABI C ;

Considérant que le modèle BEBE DOUX revêt un caractère original qui lui confère le statut d'une œuvre de l'esprit et permet à la société GROUPE BERCHET de se prévaloir de la protection instaurée par le Livre Ier du Code de la propriété intellectuelle ;

Que dès lors, la décision entreprise doit être réformée en ce qu'elle a estimé que ce modèle n'était pas protégeable sur le fondement du droit d'auteur ;

V - SUR LA CONTREFAÇON DU MODELE BEBE DOUX :

Considérant que le sac présenté par les sociétés SIMBA, référencé 5098730, dans le catalogue 1999 saisi dans les locaux de la société ARTEM, sous les dénominations NICKY-BABY, BEAN-BAG, reproduit toutes les caractéristiques du modèle de la société GROUPE BERCHET ;

Que pour s'opposer au grief de contrefaçon, ces sociétés prétendent ne pas avoir commercialisé en France le produit NICKY BABY ;

Mais considérant que cet article, dans sa version bleue, a été acquis, le 3 février 1999, par la société GROUPE BERCHET, au magasin WERY TOY à Saverne ; que par ailleurs, aux termes d'un procès-verbal établi par huissier le 2 avril 1999, il a été constaté l'achat d'un second modèle NICKY BABY SIMBA, de couleur rose, auprès du magasin de jouets BB TOYS à Nîmes ;

Qu'il s’ensuive que le modèle a bien été proposé à la vente en France ;

Considérant en conséquence, que les sociétés SIMBA ont engagé leur responsabilité ;

VI - SUR LES ACTES DE CONCURRENCE DELOYALE :

Considérant que la société GROUPE BERCHET soutient que les sociétés SIMBA ont réalisé une copie servile de ses modèles proposés à un prix inférieur, n'ont pas simplement reproduit un modèle de sa collection, mais se sont livrées à une imitation plus large de la gamme de ses produits, en cherchant à s'inscrire dans le sillage de ses efforts de création et de publicité ;

Considérant que le caractère servile de la contrefaçon, laquelle se définit comme la reproduction totale ou partielle d'une œuvre de l'esprit, s'il est susceptible d'aggraver le préjudice, ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale distinct ;

Que la vente réalisée à un prix inférieur ne peut davantage caractériser un fait distinct de concurrence déloyale ;

Considérant en revanche, que les sociétés SIMBA, en diffusant le modèle BOTTLE BABY, ont imité d'abord quatre, puis cinq des six produits de la gamme des poupons B DOUX de la société BERCHET ;

Qu'elles ont tenté par ailleurs de conserver la clientèle acquise grâce aux actes de contrefaçon, en lui offrant une présentation modifiée, mais restant dans l'esprit de la précédente ;

Qu'il s'ensuit que les sociétés SIMBA ont cherché à tirer profit des investissements réalisés par la société BERCHET et ont commis des actes de concurrence déloyale :

VII - SUR LES MESURES REPARATRICES :

Considérant que la mise sur le marché des articles contrefaisants a eu nécessairement pour effet de dévaloriser les modèles originaux, en les banalisant et d'inciter la clientèle à s'en détourner ;

Que le préjudice subi par la société GROUPE BERCHET du fait de l'atteinte à la valeur patrimoniale de ses modèles, des ventes manquées et au titre des actes de concurrence déloyale sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 50 000 euros ;

Que ces sommes seront mises à la charge in solidum des sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE ;

Considérant qu'afin de mettre un terme aux agissements délictueux, il convient de faire droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans les termes précisés au dispositif ; que la confiscation et la destruction sollicitées n'apparaissent pas justifiées ;

Que la publication du présent arrêt sera ordonné selon les modalités prévues au dispositif ;

VIII - SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE EN DOMMAGES ET INTERETS :

Considérant que les sociétés SIMBA ne rapportent pas la preuve que la société GROUPE BERCHET aurait commis un abus de droit en adressant à la société CORA, le 23 juillet 1999, une lettre rédigée en termes mesurées, afin de l'informer qu'une action judiciaire était en cours contre la société SIMBA ;

Qu'elle n'a pas commis de faute et manqué à la loyauté qui doit présider les débats judiciaires et les rapports commerciaux, en joignant à ce courrier une copie de l'assignation ;

Que la décision entreprise doit être confirmée en ce qu'elle a débouté les sociétés SIMBA de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à la société GROUPE BERCHET ; qu'il lui sera alloué à ce titre la somme de 10.000 euros ; que les sociétés SIMBA qui succombent en leurs prétentions doivent être déboutées de leur demande formée sur ce même fondement ;

PAR CES MOTIFS

Réforme la décision entreprise,

Statuant à nouveau :

Dit que sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE, en mettant sur le marché en France les articles BOTTLE B et NICKY B ont contrefait les modèles BABY DOUX et BEBE DOUX de la société GROUPE BERCHET,

Dit qu'elles ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société GROUPE BERCHET, en ce qui concerne la gamme des articles B DOUX,

Condamne in solidum les sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE à payer à la société GROUPE BERCHET la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

Interdit aux sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE de poursuivre toute diffusion d'articles reproduisant les modèles de la société GROUPE BERCHET, sous astreinte de 100 euros par infraction constatée, à compter de la signification du présent arrêt,

Se réserve la liquidation de l'astreinte,

Autorise la société GROUPE BERCHET à faire publier, en entier ou par extraits, le dispositif du présent arrêt, dans trois journaux ou revues, aux frais in solidum des sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE, sans que le coût de chaque insertion n'excède la somme de 3 000 euros,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne in solidum les sociétés SIMBA T GmbH & Co, SIMBA T HONG KONG et SIMBA T FRANCE à payer à la société GROUPE BERCHET la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Les condamne in solidum aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.