Cass. com., 7 janvier 2014, n° 12-28.883
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Mandel
Avocat général :
M. Debacq
Avocats :
SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite son action en revendication et d'avoir, en conséquence, rejeté toutes ses demandes et moyens, alors, selon le moyen :
1°) que s'il ne vise pas les dernières conclusions des parties avec l'indication de leur date, le jugement doit exposer, serait-ce succinctement, leurs prétentions respectives et leurs moyens essentiels ; qu'en statuant sans viser les dernières conclusions du revendiquant reçues par le greffe le 17 juin 2011, ni exposer ses différentes prétentions et moyens, notamment ses demandes tendant à la réformation partielle du jugement entrepris et aux conséquences complémentaires qui devaient être tirées du succès de son action en revendication, ainsi que ses prétentions formulées à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le jugement serait infirmé et que la convention litigieuse du 21 avril 1998 serait jugée valable ou que l'action en revendication serait jugée prescrite, qui étaient relatives à la résiliation de la convention précitée et à la nullité du brevet européen, et ses prétentions ayant trait à la mention de sa qualité d'inventeur, la cour d'appel a méconnu les articles 455, 458 et 954 du code de procédure civile ;
2°) qu' en toute hypothèse le revendiquant demandait la confirmation partielle du jugement et, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le jugement serait infirmé et que l'action en revendication serait jugée prescrite, que la nullité du brevet européen soit prononcée, outre la mention de sa qualité d'inventeur qui était indépendante du débat relatif à la propriété des brevets ; qu'en retenant néanmoins que le revendiquant sollicitait seulement la confirmation du jugement entrepris et que toutes ses demandes et moyens en étaient les développements, pour en déduire que l'infirmation du jugement devait entraîner le rejet de toutes ces demandes, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de l'exposant, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'aucun texte ne détermine la forme dans laquelle la décision doit mentionner les prétentions et moyens des parties ; qu'il ne peut être fait grief à l'arrêt d'avoir statué sans avoir repris les prétentions et moyens exposés par M. Y... dans ses conclusions dès lors que la cour d'appel a, dans le corps de sa décision, indiqué succinctement en les réfutant les moyens et demandes de celui-ci ;
Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel a relevé que M. Y... concluait à la confirmation du jugement entrepris mais déclarait reprendre « en conséquence » de multiples demandes qui n'avaient pas été accueillies par le premier juge ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que le second moyen, pris en sa quatrième branche, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 611-8 et L. 614-13 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 2 et 64 de la convention de Munich sur le brevet européen ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action en revendication du brevet européen n° EP 0 952 293, l'arrêt retient que le délai pour agir avait commencé à courir à compter du jour de la délivrance du brevet français ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le brevet européen, en ce qu'il désigne la France, s'étant substitué totalement au brevet français à compter du 3 avril 2003, soit antérieurement à l'introduction de l'action en revendication, le délai de prescription triennale pour agir en revendication du titre européen n'a commencé à courir qu'à compter du 3 juillet 2002, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille quatorze.