Livv
Décisions

ADLC, 23 février 2022, n° 22-D-06

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à des pratiques mises en œuvre par la société EDF dans le secteur de l’électricité

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de Mme Juliette Ogez et M. Alexis Brunelle, rapporteurs, et l’intervention de Mme Laure Gauthier, rapporteure générale adjointe, par L. Emmanuel Combe, vice-président, président de séance, Mme Fabienne Siredey-Garnier, Mme Irène Luc, M. Henri Piffaut, vice-présidents, et Mme Catherine Prieto, membre.

ADLC n° 22-D-06

22 février 2022

L’Autorité de la concurrence (section IA),

Vu la lettre enregistrée le 19 juin 2017 sous le numéro 17/0188 F, par laquelle la société Engie a saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Électricité de France dans le secteur de l’électricité ;

Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 102 ; Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article 420-2 ;

Vu la délibération de la Commission de Régulation de l’Énergie en date du 3 décembre 2018 ;

Vu le procès-verbal de transaction du 20 septembre 2021 signé par la rapporteure générale adjointe et les sociétés Électricité de France, Dalkia, Dalkia Smart Building, Citelum, et CHAM en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce ;

Vu les observations présentées par les sociétés Électricité de France, Dalkia, Dalkia Smart Building, Citelum, CHAM, Engie, et le commissaire du Gouvernement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, les représentants des sociétés Électricité de France, Dalkia, Dalkia Smart Building, Citelum, CHAM, Engie et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 16 novembre 2021 ;

Adopte la décision suivante :

Résumé1

Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») sanctionne la société EDF et ses filiales Dalkia Smart Building, Dalkia, Citelum et CHAM pour avoir mis en œuvre des pratiques d’abus de position dominante contraires aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

Les pratiques sanctionnées portent sur l’exploitation abusive des moyens dont dispose EDF grâce à son statut d’opérateur chargé de la mission de fourniture d’électricité au tarif réglementé de vente (ci-après « TRV »).

L’utilisation des moyens liés à ce statut, qui a conféré à EDF un avantage non reproductible par ses concurrents, visait, dans un contexte d’ouverture à la concurrence, à conforter la position d’EDF sur les marchés de la fourniture d’électricité et à se développer sur un ensemble de marchés connexes du secteur de l’énergie.

Ainsi, EDF a utilisé les données issues des fichiers de ses clients éligibles au TRV, ainsi que les infrastructures commerciales dédiées à la gestion des contrats au TRV, afin de développer la commercialisation de ses offres de marché – notamment de gaz et de services énergétiques.

EDF et ses filiales ont sollicité de l’Autorité le bénéfice de la procédure de transaction, en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce. La mise en œuvre de la procédure de transaction a donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal de transaction signé avec le rapporteur général, fixant le montant maximal et le montant minimal de la sanction pécuniaire encourue.

Lors des échanges avec le rapporteur général dans le cadre de la transaction, EDF a par ailleurs soumis des engagements portant, d’une part, sur la mise à disposition de son fichier clients au TRV « Bleu » aux fournisseurs alternatifs d’électricité, et, d’autre part, sur la séparation des parcours de souscription des clients au TRV « Bleu » et en offre de marché.

Après en avoir pris connaissance, l’Autorité a décidé de rendre ces engagements obligatoires pour une durée de trois ans à compter de la date de notification de la décision.

L’Autorité, après avoir examiné l’ensemble des faits du dossier, a estimé qu’il y avait lieu de prononcer une sanction de 300 millions d’euros, ce montant étant compris dans les limites de la fourchette fixée par le procès-verbal de transaction.

I. Constatations

A. PROCEDURE

1. LA SAISINE DE LA SOCIETE ENGIE

1. Le 19 juin 2017, la société Engie a déposé une saisine, enregistrée sous le numéro 17/0188 F, afin de dénoncer de potentielles pratiques anticoncurrentielles de la part d’Électricité de France (ci-après « EDF ») sur le marché de la fourniture au détail d’électricité en France.

2. Dans sa saisine, la société Engie reproche notamment à EDF :

- d’avoir utilisé de manière abusive ses fichiers historiques relatifs aux tarifs réglementés de vente (ci-après « TRV ») à des fins de conquête des clients en offres de marché électricité et gaz ;

- d’avoir refusé de communiquer aux fournisseurs alternatifs son fichier des clients TRV au tarif Bleu ;

- d’avoir volontairement dégradé la qualité des informations du fichier des clients TRV aux tarifs Jaune et Vert transmis aux fournisseurs alternatifs au moment de la fin de ces tarifs.

2. LE VERSEMENT DE PIECES ISSUES DES OPERATIONS DE VISITE ET SAISIE  DU 22 NOVEMBRE 2016

3. En janvier 2015, les services d’instruction de l’Autorité ont décidé d’ouvrir une enquête « dans le secteur de l'énergie », enregistrée sous le numéro 15/0010 E.

4. Le 22 novembre 2016, l’Autorité a procédé à des opérations de visite et saisie au sein des locaux d’EDF et de certaines de ses filiales. Ces opérations de visite et saisie ont été conduites dans le cadre de la « demande d’enquête en date du 21 octobre 2016 relative aux pratiques susceptibles d’être relevées dans le secteur des services énergétiques et de la fourniture d’énergie » et ont été autorisées par l’ordonnance principale du juge des libertés et de la détention (« JLD ») du tribunal de grande instance de Nanterre, du 17 novembre 20162.

5. L’autorisation et le déroulement des opérations de visite et saisie ont fait l’objet de recours de la part des sociétés EDF, Dalkia, EDF Optimal Solutions et Domofinance (cette dernière ayant introduit un recours seulement contre le déroulement). Par ordonnance du 29 mars 2018, le délégué du premier président de la cour d’appel de Paris a constaté le désistement de la société Domofinance de son recours. Par ordonnance du 12 avril 2018, celui-ci a confirmé les ordonnances du JLD ayant autorisé les opérations de visite et saisie. Par ordonnance du 10 janvier 2019, il a rejeté les recours contre les opérations de visite et saisie. Enfin, par un arrêt du 20 juin 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation a constaté la déchéance du pourvoi formé par les sociétés EDF, Dalkia et EDF Optimal Solutions contre l’ordonnance du 12 avril 2018.

6. Par procès-verbal du 1er septembre 20203, les rapporteurs ont constaté l’existence de pièces concernant le secteur de la fourniture d'électricité en France figurant dans le dossier n° 15/0010 E. Ces pièces pouvant se révéler utiles à la poursuite de l’instruction de l’affaire n° 17/0188 F, elles ont été versées dans ce dossier.

3. L’AVIS DE LA CRE

7. Consultée dans le cadre de la présente affaire sur le fondement de l’article R. 463-9 du code de commerce, la Commission de régulation de l’énergie (ci-après la « CRE ») a rendu, le 3 décembre 2018, la délibération n° 2018-248 (ci-après « l’avis de la CRE »).

4. LA PROCEDURE DE TRANSACTION

8. Le 25 mai 2021, les services d’instruction ont adressé à EDF, ainsi qu’aux sociétés Dalkia, Dalkia Smart Building, Citelum et CHAM (ci-après, « les sociétés du groupe EDF »), une notification des griefs portant sur des pratiques prohibées au titre de l’article 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (« TFUE ») et de l’article L. 420-2 du code de commerce.

9. Par un procès-verbal du 20 septembre 2021, les sociétés du groupe EDF se sont engagées à ne pas contester les griefs qui leur ont été notifiés et ont proposé des engagements qui ont été annexés au procès-verbal de la transaction.

10. Lors de la séance du 16 novembre 2021, les sociétés du groupe EDF ont confirmé, solennellement et en toute connaissance de cause, leur plein accord avec les termes de la transaction.

B. LE SECTEUR CONCERNE

11. Les pratiques qui font l’objet de la présente affaire concernent un très grand nombre de marchés de détail, couvrant l’ensemble des relations entre les fournisseurs d’énergie, d’une part, et les clients finals, d’autre part : fourniture d’électricité et de gaz, mais également services énergétiques, travaux de rénovation, offres d’effacement, domotique, etc. Elles s’inscrivent dans un contexte de libéralisation du secteur de l’énergie.

12. Seront successivement décrits les éléments de contexte réglementaire et économique relatifs à la fourniture d’électricité (1.), à la fourniture de gaz (2.), aux certificats d’économie d’énergie (3.), et aux services énergétiques (4.), ainsi que l’importance des données de consommation (5.).

1. LA FOURNITURE D’ELECTRICITE

a) Le cadre réglementaire de la fourniture d’électricité au client final en France

L’ouverture du marché de l’électricité en France

13. L’ouverture à la concurrence du marché français de l’électricité a débuté avec la directive 96/92/CE et s’est poursuivie de manière progressive4, d’abord pour les grandes entreprises puis pour l’ensemble des consommateurs, professionnels comme particuliers, selon la chronologie suivante :

 

Sans titre.png

 

14. Ainsi, à compter du 1er juillet 2007 et jusqu’au 1er janvier 2016, tous les consommateurs d’électricité français, qu’il s’agisse des clients résidentiels – c’est-à-dire des particuliers – ou non résidentiels, pouvaient choisir librement de conclure soit :

- un contrat au tarif règlementé de vente (TRV) : ce type de contrat est exclusivement proposé par EDF ainsi que par les entreprises locales de distribution (ci-après les

« ELD ») sur leurs zones respectives de desserte ;

- un contrat en offre de marché (ci-après « OM ») : ce type de contrat peut être proposé tant par EDF (ou les ELD) que par les fournisseurs alternatifs.

15. Conformément à l’article L. 121-5 du code de l’énergie, la mission de fournir l’électricité au tarif réglementé constitue une obligation de service public. Cette mission incombe à EDF ainsi que, dans leur zone de desserte, aux ELD chargées de la fourniture.

16. Du 1er juillet 2007 au 1er janvier 2016, les TRV comprenaient (i) le TRV Vert, destiné aux usines et autres entreprises à très forte consommation, (ii) le TRV Jaune destiné aux entreprises équipées de compteurs électriques dont la puissance souscrite était comprise entre 36 kVA et 250 kVA, et (iii) le TRV Bleu, à destination des particuliers et des petits professionnels.

 

La fin des TRV Jaune et Vert

17. La loi n° 2010-1488 du 7 décembre 20105 a prévu, à compter du 1er janvier 2016, la disparition des TRV Jaune et Vert, afin notamment de se conformer aux engagements pris devant la Commission européenne par le gouvernement français6.

18. Le nombre de sites concernés par cette disparition était d’environ 450 0007.

19. Au 1er janvier 2016, environ 100 000 sites n’ayant pas encore souscrit une offre de marché ont basculé sur une offre par défaut, dite « offre transitoire », pour une durée maximale de six mois. À la fin du mois de juin 2016, environ 31 000 sites, représentant 3 TWh de volume, étaient encore en offre transitoire. Les clients n’ayant toujours pas fait le choix d’un fournisseur et d’une offre de marché à la fin de la période transitoire ont ensuite basculé dans le dispositif « post offre transitoire ».

 

Les évolutions des TRV Bleu

20. La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat  (ci-après

« loi Énergie Climat ») a prévu l’extinction progressive du TRV Bleu pour certaines catégories de consommateurs. Ainsi, conformément au I du nouvel article L. 337-7 du code de l’énergie, à compter du 31 décembre 2020, les tarifs réglementés d’électricité sont maintenus uniquement :

- pour les particuliers ;

- pour les propriétaires uniques et les copropriétés d’un immeuble unique à usage d’habitation ;

- pour les TPE et les petites structures publiques, à condition qu’elles emploient moins de 10 personnes et que leur chiffre d’affaires, leurs recettes ou le total de leur bilan annuel ne dépasse pas 2 millions d’euros.

21. Par ailleurs, la loi Énergie Climat a introduit l’obligation, à la charge des fournisseurs historiques (EDF et les ELD), d’accorder, gratuitement et à tout fournisseur alternatif qui en ferait la demande, l’accès aux données de contact et de consommation de leurs clients qui ne sont plus éligibles aux TRV8. Pour ce faire, les opérateurs historiques étaient tenus de s’assurer préalablement de l’absence d’opposition des clients concernés à la transmission de leurs données à caractère personnel9.

Synthèse

22. Le graphique ci-dessous synthétise les différentes étapes de la libéralisation du marché de la fourniture d’électricité qui ont été décrites plus haut.

Sans titre1.png

b) Le contexte économique de la fourniture d’électricité en France

23. Les dynamiques concurrentielles sur le marché de la fourniture d’électricité ont évolué au gré des ruptures réglementaires que représentent les différentes phases de fin des TRV, et divergent selon les segments de consommateurs.

24. S’agissant des professionnels concernés par la fin des tarifs réglementés au 1er janvier 2016, la CRE note que ce segment était fin 2014 « très peu ouvert à la concurrence », puisque 91 % des sites pouvant bénéficier du tarif « Vert » et 95 % des sites et du volume pouvant bénéficier du tarif « Jaune » étaient au TRV10. Fin 2016, le bilan de la fin des TRV était contrasté selon les segments de clientèle11. La pénétration concurrentielle n’a réellement eu lieu qu’à partir de 2018, soit 2 ans après la fin officielle des TRV12.

25. Sur le segment des petits sites non résidentiels, la dynamique concurrentielle a été moindre jusqu’à la fin de l’année 2020, en raison du maintien du TRV Bleu. En nombre de sites ce dernier représentait encore 66 % des offres souscrites au 31 décembre 2019, avant la fin des TRV pour cette catégorie de clients13.

26. Sur le segment des sites résidentiels, les opérateurs historiques, EDF et les ELD, ont conservé une position particulièrement forte en dépit de l’ouverture à la concurrence depuis 2007. Ainsi, selon la CRE, la part de marché d’EDF était encore de 82 % en nombre de sites et 84 % en volume de consommation à la fin de l’année 201714. Au 30 septembre 2020, les offres au TRV représentaient toujours environ 70 % du marché (en nombre de sites et en volume) et les fournisseurs alternatifs disposaient d’une part de marché de 25 % environ15.

27. La position particulière d’EDF dans le paysage français de l’électricité est reflétée par le fait que, toujours selon la CRE, EDF, ainsi que, dans une moindre mesure, les ELD, continuent toujours d’assurer la grande majorité des mises en service d’électricité pour les clients résidentiels, « les fournisseurs historiques semblant être contactés de façon préférentielle par les clients lors des mises en service (création de nouveaux sites ou emménagement d’un nouveau client sur un site existant) »16.

2. LA FOURNITURE DE GAZ

a) Le cadre réglementaire de la fourniture de gaz au client final en France

28. À l’instar du secteur de l’électricité, la transposition progressive des directives 98/30/CE du 22 juin 1998, 2003/55/CE du 26 juin 2003 et 2009/73/CE du 13 juillet 200917 s’est traduite par une ouverture par étapes de l’activité de fourniture de gaz au détail à la concurrence d’opérateurs autorisés. Cette ouverture a été effective pour tous les clients, résidentiels et non résidentiels, au 1er juillet 2007.

29. Jusqu’au 19 juin 2014, tous les consommateurs de gaz naturel français, qu’ils soient ou non résidentiels, ont pu choisir librement de conclure :

- un contrat au TRV, exclusivement proposé par les fournisseurs historiques (Engie et les ELD) ; ou

- un contrat en offre de marché, proposé à la fois par les opérateurs historiques gaziers mais également par les nouveaux fournisseurs de gaz naturel, appelés fournisseurs alternatifs.

30. Les TRV gaz sont appelés à être progressivement supprimés, en cinq étapes :

- au 19 juin 2014, pour les très gros consommateurs raccordés au réseau de transport et les entreprises locales de distribution dont le niveau de consommation est supérieur à 100 000 MWh par an ;

- au 1er janvier 2015, pour les consommateurs non résidentiels et les immeubles d’habitation consommant plus de 200 MWh par an ;

- au 1er janvier 2016, pour les consommateurs non résidentiels consommant plus de 30 MWh, les immeubles d’habitation qui consomment plus de 150 MWh par an et les entreprises locales de distribution consommant moins de 100 000 MWh par an ;

- au 1er décembre 2020, pour les consommateurs finals non domestiques ayant une consommation annuelle de référence inférieure à 30 MWh ;

- au 1er juillet 2023, pour les consommateurs finals domestiques ayant une consommation annuelle de référence inférieure à 30 MWh, les propriétaires uniques d’un immeuble à usage principal d’habitation consommant moins de 150 MWh par an et les syndicats des copropriétaires d’un tel immeuble.

Sans titre2.png

b) Le contexte économique de la fourniture de gaz aux clients finals en France

31. Contrairement au marché de l’électricité, le marché du gaz a connu une vive dynamique concurrentielle, et ce dès les deux premières vagues de fin des TRV (respectivement en 2014 puis en 2016). Ainsi, parmi les sites non résidentiels ayant souscrit une offre de marché, 79 % l’ont fait chez un fournisseur historique au cours de l’année 2015 contre seulement 39 % au cours de l’année 201618.

32. Sur le segment résidentiel, il apparaît qu’EDF est devenu le deuxième fournisseur de gaz19. À cet égard, la CRE indique qu’EDF acquiert la majorité de ses clients au travers d’offres bi-énergie, souscrites lors de la mise en service d’un contrat d’électricité au TRV20.

3. LES CERTIFICATS D’ECONOMIE D’ENERGIE

33. Dans une optique de transition énergétique et de maîtrise de la demande énergétique, la France a mis en place en 200521 le dispositif des certificats d’économies d’énergie (ci-après

« CEE »). Ce dispositif repose sur une obligation triennale de réalisation d’économies d’énergie en CEE (1 CEE = 1 kWh cumac22 d’énergie finale) imposée par les pouvoirs publics aux fournisseurs d’énergie appelés les « obligés » (électricité, gaz, GPL, chaleur et froid, fioul domestique et carburants pour automobiles). Ceux-ci sont ainsi incités à promouvoir activement l’efficacité énergétique auprès des consommateurs d’énergie : ménages, collectivités territoriales ou professionnels. Un objectif pluriannuel est défini et réparti entre les opérateurs en fonction de leurs volumes de ventes. En cas de non-respect de leurs obligations, les obligés sont tenus de verser une pénalité libératoire pour chaque kWhc manquant23.

34. Comme indiqué par la Cour des comptes dans son rapport sur les CEE du 16 octobre 201324, trois modes d’action sont disponibles pour les obligés :

- inciter les clients (particuliers, entreprises et collectivités) à réaliser des opérations d’économies d’énergie ;

- contribuer financièrement à des programmes éligibles aux CEE tendant à la maîtrise d’énergie (information, formation, innovation, lutte contre la précarité énergétique) ;

- acheter des certificats tenus sur un registre dématérialisé, sur un marché de gré à gré.

35. Le dispositif est par ailleurs ouvert à d’autres acteurs, appelés « éligibles », qui peuvent mener des actions d’économies d’énergie et les valoriser en certificats, qu’ils revendent le cas échéant aux obligés dans le cadre du marché de gré à gré.

36. Toutefois, dans son rapport précité, la Cour des comptes soulignait que l’essentiel des opérations de CEE a été réalisé directement par les obligés (92,7 % du volume TWh cumac pour 411 obligés), ce qui n’a pas encouragé les éligibles à se mobiliser fortement. Cette situation n’a pas permis un développement significatif du marché des certificats dans la mesure où les obligés ont généralement préféré avoir des relations directes avec les éligibles ainsi qu’avec les bénéficiaires potentiels et les professionnels afin de réaliser des opérations donnant lieu à la délivrance de CEE25.

37. Il convient de relever à cet égard que la capacité des acteurs obligés à développer un schéma compétitif de production des CEE est cruciale, dans la mesure où les coûts liés aux CEE sont répercutés dans la tarification des offres d’énergie26.

38. Enfin, le bon fonctionnement du dispositif des CEE exige la possibilité pour les différents acteurs de pouvoir échanger leurs certificats27. Le registre Emmy permet d’enregistrer les transactions portant sur les CEE, transactions effectuées de gré à gré.

39. Le schéma ci-dessous, issu du rapport précité de la Cour des comptes, résume l’organisation du régime des CEE en France :

Sans titre3.png

4. LES SERVICES ENERGETIQUES

a) Le cadre réglementaire de l’offre de services énergétiques

40. Comme l’indique une étude réalisée pour l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ci-après « ADEME ») publiée en juin 201428, la notion de « services énergétiques » regroupe un grand nombre de prestations de nature et d’ampleur très différentes, constituant ensemble une filière structurée de l’amont vers l’aval. Ces services peuvent être divisés entre :

- d’une part, les services d’efficacité énergétique intervenant directement sur les consommations énergétiques (travaux d’exploitation et de maintenance des équipements thermiques, tels que les chaufferies collectives, les réseaux de chaleur, les cogénérations industrielles ou l’éclairage public) ;

- d’autre part, les services annexes contribuant à l’efficacité énergétique (services amont et aval contributeurs à l’efficacité énergétique, tels que le diagnostic de performance énergétique, le conseil en orientation énergétique et l’ensemble des études d’ingénierie et de financement pouvant intervenir avant ou après la réalisation des travaux)29.

41. L’ADEME synthétise l’ensemble de ces services de la manière suivante :

Sans titre4.png

42. Pour les collectivités et pour les entreprises souhaitant s’engager dans une démarche structurée de gestion et de maîtrise de l’énergie, différents services énergétiques peuvent être combinés dans un seul « contrat de performance énergétique » (ci-après « CPE »)30.

b) Le contexte économique de l’offre de services énergétiques

43. La particularité du secteur des services énergétiques est que, pour ce type d’activités, EDF ne se trouve pas uniquement en concurrence avec d’autres entreprises du secteur de l’énergie. En effet, en raison de la très grande diversité des services concernés, les entreprises intervenantes dans ce domaine sont très nombreuses et peuvent provenir de différents secteurs. La concurrence, actuelle ou potentielle, à laquelle EDF est soumise provient notamment d’entreprises du bâtiment, de gestionnaires d’installation, d’équipementiers électriques, d’éditeurs de logiciels ou d’entreprises du numérique31.

44. Au sein même du groupe EDF, plusieurs filiales actives dans le domaine des services énergétiques, dont Dalkia, proposent des prestations globales incluant toutes les étapes du projet, du financement à l’installation et la maintenance32.

5. LA PLACE DES DONNEES DE CONSOMMATION D’ENERGIE

a) Le statut juridique des données de consommation

45. Dans le domaine de l’énergie, la question de la gestion des données générées par la fourniture et la consommation d’électricité ou de gaz présente des particularités, notamment du fait de la séparation entre, d’une part, les gestionnaires de transport et de distribution, qui contrôlent la consommation réelle des sites reliés au réseau et, d’autre part, les entreprises de commercialisation, qui gèrent la relation avec les clients finals.

46. Au terme de l’article L. 111-73 du code de l’énergie, les gestionnaires des réseaux de distribution (ci-après « GRD ») sont tenus de préserver la confidentialité des informations dites commercialement sensibles dont la communication serait de nature à porter atteinte aux règles de concurrence libre et loyale et de non-discrimination. Les données de consommation d’électricité des consommateurs finals entrent dans cette catégorie d’informations commercialement sensibles.

47. Toutefois, l’article R. 111-27 du code de l’énergie dispose que « les gestionnaires des réseaux publics de distribution sont autorisés à communiquer à tout fournisseur ayant conclu avec un client final, pour un site de consommation, un contrat portant à la fois sur la fourniture d'énergie électrique et l'accès aux réseaux publics de distribution, et garantissant disposer d'une autorisation expresse de son client :

1° L'historique disponible des puissances souscrites et des données de consommation sur ce site des clients domestiques ;

2° L'historique disponible des puissances souscrites et des données de consommation sur ce site du client, s'il n'est pas un client domestique. (…)»

48. Concernant les questions liées au respect de la protection des données personnelles, l’article 2 de la loi informatique et libertés, dans sa version applicable à l’époque des pratiques en cause, prévoyait que : « Constitue une donnée à caractère personnel toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d'identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres ». L’article 4 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 (« RGPD ») adopte une définition similaire.

b) L’importance des données pour la commercialisation d’offres d’énergie

49. Comme indiqué par la CRE dans l’avis rendu dans la présente affaire33, les données de consommation, les caractéristiques techniques d’un site ou les données de contact sont très importantes pour permettre aux fournisseurs d’électricité de faire des propositions commerciales adaptées aux besoins des consommateurs.

50. La CRE rappelle que, selon elle, la possession de fichiers clients aux TRV donne un avantage aux fournisseurs historiques sur leurs territoires respectifs, qui ne peut être contrebalancé par l’accès aux seules données détenues par le GRD. Ainsi, l’accès aux données des GRD est insuffisant car il nécessite pour le fournisseur de connaître l’identité du consommateur et de disposer de son autorisation pour accéder aux historiques de sa consommation (en vertu des règles de confidentialité relatives aux informations commercialement sensibles). La CRE souligne ainsi le risque d’une captation des clients en offre de marché par les fournisseurs historiques34.

51. Dans ce contexte, il convient de souligner que les fournisseurs alternatifs ne peuvent recueillir ce type de données que par le biais de requêtes d’information individuelles formulées auprès du GRD et après avoir obtenu l’autorisation préalable de chaque client pour accéder à leurs données historiques de consommation. En ayant recours à ces requêtes individuelles, les fournisseurs alternatifs ne peuvent pas disposer d’une vue globale du parc de consommation d’électricité qui leur permettrait de développer une analyse générale des comportements de consommation.

52. À l’inverse, en tant qu’opérateur historique en charge du monopole légal de fourniture d’électricité au TRV, EDF détient les données de contact et de consommation de ses clients au TRV qui constituent donc une base quasi exhaustive (car elle couvre la quasi-totalité de la clientèle résidentielle aujourd’hui encore), détaillée, régulièrement actualisée et dont les coûts de constitution et d’entretien sont financés directement par les TRV.

C. LES ENTREPRISES CONCERNEES

1. LE GROUPE EDF

53. EDF est l’opérateur historique de l’électricité en France, présent sur l’ensemble des métiers de l’électricité : la production, le transport, la distribution et la fourniture d’électricité.

54. EDF commercialise depuis 1946 des offres de fourniture d’électricité sur environ 95 % du territoire métropolitain continental (zone Enedis), ainsi que sur le territoire de certaines ELD.

55. Le groupe EDF comporte également de nombreuses filiales actives dans l’ensemble du secteur de l’énergie, en France et à l’international35.

56. En 2019, le groupe EDF a réalisé un chiffre d’affaires mondial de 71,3 milliards d’euros36.

a) Portefeuille d’activités du groupe EDF

Commercialisation au détail d’électricité

57. EDF commercialise des offres de fourniture d’électricité au TRV, ainsi que des offres de marché (OM, également appelées « nouvelles offres » ou « NO »). Le groupe EDF commercialise des OM au détail sur tous les segments définis par la CRE (résidentiels, petits, moyens et grands sites non résidentiels).

58. Pour les sites résidentiels, si les offres OM et TRV coexistent depuis 2007, EDF indique n’être entré que « très progressivement sur le marché des OM électricité »37, sans en faire la promotion active ou de manière extrêmement limitée.

Commercialisation au détail de gaz naturel

59. EDF commercialise des OM gaz sur les zones desservies par GRDF depuis 2004 pour les clients non résidentiels et depuis 2007 pour les clients résidentiels.

Les services de suivi de consommation et de conseils en économie d’énergie proposés par EDF à ses clients

60. Outre la fourniture d’électricité et de gaz, EDF propose à ses clients, tant résidentiels que non résidentiels, des services supplémentaires de suivi et d’analyse de la consommation, qui peuvent être complétés par des conseils en économie d’énergie.

Pour les clients résidentiels

61. Pour les clients résidentiels, EDF a proposé de 2007 à 2015 un service payant de suivi de la consommation nommé « Suivi Conso »38.

62. Depuis 2015, EDF propose « e.quilibre », une solution gratuite comprenant diverses fonctionnalités de suivi de la consommation mensuelle, comparatifs avec d’autres foyers, et estimation du coût moyen de consommation des équipements39.

 

Pour les clients non résidentiels

63. Pour les clients non résidentiels, EDF propose depuis 2010 un ensemble de services réunis sous la gamme « Télésuivi Courbe de Charge ». Les services de la gamme « Télésuivi courbe de charge » sont produits pour le groupe EDF par la société Netseenergy, filiale spécialisée dans les téléservices d’efficacité énergétique40.

64. Par ailleurs, EDF propose depuis 2015 sous forme électronique, mais depuis bien avant sous format papier, un service dit « Di@lège/SIC » qui permet un suivi détaillé de la consommation en électricité et qui est destiné à tous les clients Entreprises et Collectivités disposant de plus de 20 sites41.

 

Les activités d’EDF et de ses filiales dans les services énergétiques

65. Le groupe EDF s’est développé au fur et à mesure des années dans le domaine des services énergétiques, au travers de filiales dédiées, mais également dans le cadre de prestations proposées par EDF Commerce.

Dalkia

66. Dalkia est une filiale à 100 % d’EDF, spécialisée dans la gestion de réseau de chaleur et les services d’optimisation énergétique pour les bâtiments et les installations industrielles42. En 2014, au moment de son acquisition par EDF, Dalkia proposait notamment un ensemble de prestations intégrées telles que des contrats de performance énergétique, incluant également la fourniture primaire d’énergie43.

Citelum

67. Citelum est un opérateur centré sur l’éclairage public et les infrastructures urbaines électriques (signalisation, vidéo-surveillance, mise en lumière de bâtiments, etc.)44. Citelum propose une chaîne complète de services liés à ces prestations, allant de la conception aux travaux et à la maintenance. Citelum propose également un ensemble de services comparables pour les bâtiments industriels et tertiaires45.

EDF Optimal Solutions (désormais Dalkia Smart Building)

68. EDF Optimal Solutions (ci-après « EOS ») est une filiale à 100 % du groupe EDF qui propose des prestations dans le domaine des réseaux de chaleur, de la performance énergétique des bâtiments, de la production et la récupération d’énergie, et enfin des activités « multitechniques » (pompes à chaleur, génie électrique, génie climatique, etc.)46.

69. Au moment de l’entrée de Dalkia dans le groupe EDF, EOS a été intégrée dans Dalkia47. EOS s’appelle désormais Dalkia Smart Building.

CHAM

70. CHAM est une entreprise spécialisée dans la vente, l’entretien et la maintenance d’installations de chauffage (chaudière au gaz, pompe à chaleur, chauffe-eau solaire, etc.). CHAM est une filiale à 100 % d’EDF depuis 200648.

Les services énergétiques proposés directement par EDF Commerce

71. Enfin, la division EDF Commerce propose elle-même un ensemble de services énergétiques. Il s’agit essentiellement d’audits, de diagnostics et d’études sur les usages énergétiques et les réseaux électriques et d’aide à la gestion de la consommation d’énergie49.

L’organisation commerciale mise en place pour la production et la remontée de CEE auprès des clients résidentiels

72. Comme indiqué dans le rapport précité de 2013 de la Cour des comptes50, pour remplir ses obligations en matière de CEE, EDF a choisi un modèle qui repose essentiellement sur la création et l’animation d’un réseau de partenaires professionnels. En particulier, concernant les clients résidentiels, EDF a fait le choix d’un modèle dit « B-to-B-to-C », c’est-à-dire de relation entre EDF et des entreprises de travaux ou de rénovation, elles-mêmes en relation avec des particuliers.

73. Pour ce faire, EDF a tout d’abord mis en place au sein de ses équipes commerciales des

« pôles projets » dont la fonction était de contribuer à la création de CEE et également vendre des offres spécifiques d’estimation des travaux pertinents pour les clients d’EDF51.

74. Cette organisation a ensuite été structurée autour d’un ensemble de marques à destination des clients résidentiels, et dédiées à l’univers de l’efficacité énergétique et de la rénovation52 :

- 2007 : lancement de la marque « Bleu Ciel d’EDF », recouvrant l’ensemble des offres commerciales de fourniture de produits et services à destination des clients résidentiels d’EDF ;

- 2008 : lancement de la marque distincte « Partenaire Bleu Ciel d’EDF », visant les entreprises désirant devenir des partenaires d’EDF pour la réalisation de travaux d’économie d’énergie ;

- 2012-2014 : abandon progressif de la marque « Bleu Ciel d’EDF » ;

- 2016 : abandon de la marque « Partenaire Bleu Ciel d’EDF » et lancement de la marque

« Partenaire Solutions Habitat d’EDF ». En parallèle, le site « Ma Maison Bleu Ciel » est « débaptisé » et réintégré dans un espace « travaux » spécifique sur le site edf.fr ;

- 2020 : abandon de la marque « Partenaire Solutions Habitat d’EDF » et lancement de la marque « Partenaire Economies d’Energie d’EDF ».

75. EDF a également mis en place le numéro 3929, un numéro court indiqué sur l’ensemble des documents promotionnels et factures des clients résidentiels53. Le système était ainsi décrit sur ces documents :

« Les opérateurs du 3929 assurent des premiers conseils gratuits relatifs aux économies d’énergie, à l’amélioration du confort du domicile des clients et aux énergies renouvelables.

Si le client est intéressé, il peut être orienté vers deux types d’offres distinctes : d’une part, des offres de conseils ou de diagnostic payants (Estimation Travaux ou Objectif Travaux ou encore le Diagnostic Sécurité Électricité), d’autre part des offres de travaux (Travaux Énergie Clé en Main, Coordination Travaux Énergie, Étude Travaux Énergie).

L’ensemble de ces offres peut aboutir à une mise en relation du client avec un professionnel, qu’il s’agisse d’une direction d’EDF, d’une filiale d’EDF (dans le cadre d’un contrat d’apport rémunéré comme par exemple EDF ENR), ou d’un tiers Partenaire Bleu Ciel d’EDF. »

76. En outre : « Les télé opérateurs du 3929 ont accès au fichier historique d’EDF et nous avons compris qu’il était d’un intérêt stratégique qu’ils puissent conserver cet accès. Par ailleurs, le 3929 est indiqué sur toutes les factures d’EDF, même celles au tarif réglementé, ainsi que sur la Lettre Bleu Ciel d’EDF jointe à la facture »54.

77. S’agissant du réseau « Partenaire Bleu Ciel d’EDF », la Cour des comptes indiquait, en 201355, que « le réseau des partenaires Bleu Ciel est composé de 5500 entreprises (métiers : chaudière, chauffage bois, chauffage électrique, eau chaude solaire et électrosolaire, isolation, ouvrants et pompe à chaleur), (…) EDF met à leur disposition sa marque (Partenaires Bleu Ciel d’EDF), un référentiel technique et des formations, des supports de communication, un numéro d’appel, un espace projet dans les boutiques EDF, un site internet spécifique ». La Cour des comptes ajoutait : « Mais surtout, elle les intègre dans la base de contacts d’EDF qui joue le rôle d’apporteur d’affaires puisqu’elle regroupe les coordonnées des clients ayant demandé à EDF d’être mis en contact avec des professionnels pour faire des travaux d’économie d’énergie ».

78. En décembre 2011, la « Base Contact », c’est-à-dire la base de données contenant les coordonnées des prospects ayant demandé à être mis en relation avec des partenaires du réseau Bleu Ciel, constituait l’un des principaux leviers de recrutement de ceux-ci56. Une étude de satisfaction du 16 juillet 2012 réalisée par EDF montre que la « Base Contact » constituait un élément déterminant de la décision d’une entreprise de travaux ou de rénovation de rejoindre le réseau Bleu Ciel, et ce même si cette base de données était jugée de mauvaise qualité par près d’un tiers des professionnels interrogés 57.

L’organisation commerciale mise en place pour la production et la remontée de CEE auprès des clients non résidentiels

79. S’agissant de la collecte des CEE auprès des clients non résidentiels, EDF a également développé un modèle d’apports d’affaires consistant à ce que les professionnels de la rénovation en charge de réaliser des travaux auprès d’entreprises collectent des CEE et les remontent à EDF, contre rémunération, appelée « incitation commerciale »58.

80. Les prestations réalisées par des filiales spécialisées d’EDF pouvaient également donner lieu à une remontée de CEE dans le cadre de conventions spécifiques59.

b) Organisation de l’action commerciale d’EDF

81. Depuis l’ouverture des marchés de l’électricité à la concurrence, l’action commerciale d’EDF est organisée au sein de la direction Commerce d’EDF (ci-après « DCO »).

Organisation générale de la DCO

82. La DCO est organisée entre, d’une part, les directions de marché (dont la Direction de Marché des Clients Particuliers, ou « DMCP », dédiée aux sites résidentiels, et la Direction relative aux clients du Marché d’Affaires, ou « DMAFF », qui couvre les entreprises et entités publiques)60 et, d’autre part, les entités opérationnelles. Les directions de marché établissent le contenu des offres et définissent la politique marketing, les objectifs commerciaux et les modes opératoires à suivre par les équipes de vente. Les entités opérationnelles, et notamment les huit directions commerciales régionales (ci-après

« DCR »)61 sont en charge des actions effectives de commercialisation (activités de vente et relation client)62.

83. Par ailleurs, au-delà de ses propres effectifs de conseillers clientèle, EDF fait régulièrement appel à des prestataires externes pour les activités de relation clientèle63.

L’absence de séparation des équipes commerciales d’EDF en fonction des offres

84. Depuis l’ouverture à la concurrence du secteur de l’électricité, EDF n’a jamais opéré de distinction entre des équipes en charge des TRV et d’autres en charge des OM64. De même, il n’existe pas de séparation entre l’électricité et le gaz s’agissant de la relation clientèle65.

85. Dans son avis rendu dans la présente affaire66, la CRE note qu’« à l’occasion de l’ouverture du marché à la concurrence, EDF s’est appuyé sur ses infrastructures commerciales préexistantes pour commercialiser les offres de marché de gaz naturel et d’électricité. La Direction Commerce d’EDF prend ainsi en charge l’ensemble de la commercialisation des offres de fourniture d’EDF : TRV, offres de marché en électricité et offres de marché en gaz naturel ».

86. Toutefois, EDF indique avoir mis en place un ensemble de procédures internes permettant la distinction entre les offres au TRV et les OM (électricité et gaz), et notamment des numéros téléphoniques séparés ainsi que des parcours Internet également distincts67.

87. En particulier, pour les sites résidentiels, il existe différents types de canaux téléphoniques :

- le 09 69 32 15 15, dédié à la mise en service d’une offre au TRV et à la relation courante pour les clients au TRV (il figure sur la facture des clients bénéficiant d’un TRV) ;

- le 3004, créé en octobre 2017, destiné à la commercialisation d’OM électricité et gaz auprès de prospects ;

- le numéro 09 70 82 15 51, créé en avril 2019, et destiné à la relation courante pour les clients aux OM (ce numéro figure sur la facture des clients bénéficiant d’une OM) 68.

Le système d’information d’EDF Commerce

88. Le système d’information d’EDF Commerce (ci-après « le SI » ou « le SI Commerce ») constitue le cœur de l’activité d’EDF Commerce, au point d’être considéré en interne comme un « outil industriel » qu’il s’agit de préserver69. En juin 2016, EDF estimait ainsi que « le SI DCO est l’usine incontournable de production dont dépend directement la performance commerciale »70.

Histoire récente du SI Commerce

89. Le SI d’EDF Commerce est issu du système d’information du service commun d’EDF-GDF qui, jusqu’à l’ouverture à la concurrence, était en charge à la fois de la distribution d’électricité et de gaz, et de la contractualisation des clients au TRV. Au moment de l’ouverture à la concurrence, le fichier commun a été divisé entre EDF et GDF. EDF s’est donc retrouvée en possession du fichier complet des clients historiques au TRV électricité.

90. Dès 2004, EDF a alors lancé un ambitieux processus de migration des données des fichiers historiques vers de nouveaux SI de la direction Commerce distincts pour les résidentiels et les professionnels71. Le fichier des clients particuliers a été transféré vers une base nommée SIMM, tandis que le fichier des clients aux tarifs Jaune et Vert, ainsi qu’un certain nombre de clients au tarif Bleu, ont été transférés d’une base dite « Clio » vers un outil intitulé « CLOE ».

Les outils de gestion de clientèle du SI Commerce

91. Le SI est désormais constitué d’un ensemble de systèmes d’information, organisés en trois catégories : (i) les systèmes d’information spécifiques au Marché d’Affaires, (ii) les systèmes d’information spécifiques au Marché Résidentiel et (iii) les systèmes d’information communs aux deux marchés. Chaque sous-ensemble est construit autour de plusieurs applications et entrepôts de données72.

¨ CLOE

92. CLOE est l’application principale de relation client pour les Marchés d’Affaires d’EDF. Elle permet aux conseillers clientèle d’EDF de gérer l’ensemble de la relation client : accueil, vente et gestion courante des contrats. Elle contient un ensemble de données relatives à chaque client : identification du client, lieu, type de contrat, point de livraison (ci-après

« PDL »), éléments techniques du compteur et historique des échanges avec le client73.

93. Les données contenues dans CLOE sont essentiellement entrées par les conseillers de clientèle, lors de la discussion avec le client. CLOE contient également des informations de consommation qui sont communiquées par le client et qui servent à la relation courante. Comme indiqué par EDF en audition, ces informations sont « notamment celles qui servent à caler l’offre »74.

¨ FELIX

94. FELIX est l’application de facturation et de recouvrement pour les Marchés d’Affaires d’EDF Commerce. Elle contient un ensemble de données nécessaires à la facturation (adresse de facturation, modalités de paiement, factures, consommations facturées, etc.) ainsi que des données de relation client nécessaires au recouvrement75. En particulier, la personne à laquelle sont adressées les factures est identifiée dans FELIX comme « interlocuteur payeur »76.

¨ SIMM

95. SIMM est l’outil principal de relation client utilisé par les équipes commerciales d’EDF en relation avec les clients résidentiels. SIMM a été créé en 200777 au moment de l’ouverture à la concurrence des clients résidentiels, et a progressivement été alimenté par la migration des clients résidentiels de l’ancien système d’information historique du service commun EDF/GDF, appelé QE78.

96. SIMM est un outil complet de relation client qui gère l’ensemble des demandes des clients, qu’il s’agisse de la souscription des contrats, de la facturation et du recouvrement. Pour chaque client, les données sont soit saisies par un conseiller de vente, soit directement entrées dans son espace client en ligne par le client79. S’agissant des données de consommation, celles-ci sont issues des distributeurs (Enedis et les filiales des ELD).

97. SIMM est utilisé uniquement pour les clients résidentiels. Cet outil ne concerne donc pas les professionnels au tarif Bleu80.

¨ PROFIL

98. Selon EDF, PROFIL est un outil intégrant une partie des données situées dans CLOE, utilisé pour réaliser des études statistiques. Les données pour ces études sont extraites de requêtes spécifiques réalisées dans PROFIL81.

99. En outre, PROFIL a été utilisé pour alimenter le service SIC Di@lège de suivi de consommation et de conseil énergétique proposé aux professionnels, entreprises et collectivités82.

¨ OCP

100. OCP est un outil qui permet à EDF d’identifier les sites présentant des économies d’énergie potentielles et des gisements de CEE.

101. L’outil OCP a été développé par un département spécifique de recherche et développement d’EDF et intégré dans PROFIL. Il a permis de produire des cartes des clients industriels en fonction des besoins en CEE et d’établir des indicateurs d’appétence aux CEE83. OCP est issu du croisement des données clients d’EDF avec d’autres données statistiques. En 2015, un module permettant de détecter l’appétence des clients pour les services énergétiques a été ajouté84.

Les enjeux liés à la qualification des comptes pour EDF Commerce

102. La politique commerciale d’EDF nécessite, pour sa bonne application, de pouvoir se fonder sur des comptes clients exploitables et mis à jour. Cette « qualification des comptes » regroupe en réalité trois types distincts d’opérations : la qualification proprement dite, le « périmétrage » et la segmentation. Ces activités permettent notamment de déterminer la « valeur client » de chaque contrat.

La qualification

103. Dans un document interne de janvier 201785, EDF indique que la qualification « permet de mieux connaître nos clients et ainsi porter les meilleures offres et services liés à leurs attentes et à leur approche relationnelle afin de les satisfaire et d'atteindre nos objectifs de performance commerciale (satisfaction, efficacité commerciale, performance financière) »86.

104. La qualification consiste ainsi à maintenir en permanence à jour les données essentielles de chaque client. Les cinq principaux points de qualification devant être vérifiés à chaque contact client dans CLOE sont les suivants87 : le SIREN et le SIRET, la raison sociale, le code NAF, l’adresse du point de livraison et l’identification de l’interlocuteur.

105. Le maintien à jour de ces données permet ensuite aux conseillers clients de les croiser et de les utiliser facilement : « Saisir le SIRET a pour effet de renseigner automatiquement dans CLOE : segment opérationnel, marketing, marketing sectoriel, classe de gestion, si le client est reconnu par RCT. Il permet l'attribution instantanée de la valeur client (P1-P2-P3) et du score RLJ »88.

Le périmétrage

106. Le périmétrage des comptes « permet de comprendre comment est organisé le client (multi- sites) et de différencier les types de comptes. Il permet d’attribuer un segment marketing au client (donc une équipe de compte) ». Concrètement, il s’agit de vérifier que tous les points de livraison d’un même client sont rattachés à son SIREN89. Ceci permet d’affecter tous les comptes d’un même client à une même équipe de compte90.

La segmentation

107. La segmentation, ou segmentation marketing, « permet de découper un marché en sous- ensemble selon des critères définis par la Direction Commerce. Le RCT (Référentiel Client Transverse) utilise les données issues du système d'information (CLOE et Felix) pour déterminer le segment marketing »91.

108. La segmentation permet ainsi de déterminer des modes de relation et une intensité commerciale correspondant aux attentes et à la valeur représentée par chaque segment92. La segmentation est établie « à la maille SIREN », ce qui signifie qu’elle est définie en fonction de la personne morale cliente et non en fonction de chaque point de livraison93. Le segment de chaque client est indiqué dans CLOE94.

La « valeur client »

109. La valeur client permet, au-delà de la segmentation, d’orienter l’action commerciale et de fidéliser les clients les plus rentables en tenant compte de l’intérêt relatif représenté par chaque client individuel95.

110. La valeur client est définie, au sein d’EDF Commerce, par deux paramètres96 :

- la valeur « panier », correspondant aux contrats déjà souscrits auprès d’EDF ;

- la valeur « potentielle » correspondant à ce qui reste à conquérir en termes de ventes supplémentaires.

111. Dès 2008, ces deux critères englobaient à la fois les contrats électricité, gaz et services mais également les CEE et les prestations à l’international. Un dernier élément utilisé est celui de

« qualité payeur », qui permet de déclasser les clients ayant un comportement de paiement incertain ou présentant un risque de faillite important97.

112. Cette notion de « valeur client » a conduit ensuite EDF Commerce à développer une stratégie de « pilotage par la valeur ». Cette stratégie supposait de développer l’usage de scores de valeur, d’inclure ces scores dans CLOE, voire de prévoir des modalités de calcul automatique des scores98.

2. Le groupe Engie

113. Le groupe Engie (anciennement GDF Suez) est l’opérateur historique de la fourniture de gaz naturel en France. Il est aujourd’hui actif sur l’ensemble de la chaîne de l’énergie, en électricité et en gaz naturel, d’amont en aval (achat, production et commercialisation d’électricité).

114. En France, l’activité de fourniture d’électricité d’Engie a débuté à la suite de l’ouverture à la concurrence du marché de la fourniture au détail d’électricité pour certaines catégories de clients industriels en février 2000.

115. Cette activité a ensuite été étendue à l’ensemble de la clientèle non résidentielle ainsi qu’aux clients résidentiels, au gré des différentes étapes de la libéralisation du marché de la fourniture au détail d’électricité.

D. LES COMPORTEMENTS RELEVES

1. PRESENTATION GENERALE DE LA STRATEGIE

116. Au moment de l’ouverture à la concurrence des marchés de l’électricité, EDF a constaté que la fourniture d’électricité pouvait être complétée par un ensemble de prestations supplémentaires, répondant au développement d’une demande de services énergétiques et à des préoccupations environnementales. Elle en a déduit qu’il était stratégique de proposer aux clients de nouveaux services en complément de l’électricité99.

117. L’instruction a permis de mettre au jour l’existence et la permanence d’une stratégie mise en place pour répondre à ces nouveaux enjeux. Cette stratégie, dont les grandes lignes sont restées inchangées pendant de nombreuses années, était fondée sur les principes suivants :

- la migration et la réorganisation du portefeuille des clients au TRV d’EDF, afin de permettre une gestion commerciale globale de ces derniers ;

- la « qualification » permanente des données des clients au TRV telle que décrite ci- dessus, en prenant notamment appui sur les « moments de vie » du contrat ;

- la segmentation des clients, permettant de distinguer entre ceux dits « à valeur » et les autres, afin de définir des politiques commerciales différenciées ;

- la fidélisation des clients au travers de services annexes de suivi de consommation, de diagnostic énergétique et d’économies d’énergie, permettant ensuite de proposer des prestations à plus forte valeur ajoutée ;

- la détection et/ou la vente au rebond100 de prestations supplémentaires (offres de marché gaz et services).

118. L’ensemble de ces actions reposait sur un enrichissement très important des données disponibles dans les fichiers d’EDF, combinant de nombreuses dimensions allant bien au- delà de la simple gestion des contrats de fourniture d’électricité. Ainsi, la démarche mise en œuvre était toujours identique, à savoir la « qualification » en amont la plus précise possible des comptes clients, c’est-à-dire leur enrichissement avec les données pertinentes nécessaires pour pouvoir ensuite proposer des offres plus individualisées ou de nouvelles prestations aux clients au TRV d’EDF. Ces actions prenaient notamment appui sur les évolutions successives du système d’information d’EDF Commerce et sur les applications de gestion de la relation clientèle mises à disposition des conseillers.

119. Seront traitées successivement la période 2004-2013 marquée par les débuts de l’ouverture à la concurrence (2.), la période 2013-2016 caractérisée par la fin des TRV Jaune et Vert (3.), et la période 2016-2020, par le recentrage sur les TRV Bleu (4.).

2. 2004-2013 : LES PRATIQUES MISES EN ŒUVRE AU MOMENT DE L’OUVERTURE A LA CONCURRENCE DES MARCHES DE L’ELECTRICITE

120. L’instruction a mis en évidence que, dès 2004, EDF s’est efforcée de restructurer les fichiers de clients au TRV (a.) dans le but de : qualifier les données de ces fichiers pour détecter les nouveaux besoins des clients au TRV (b.), affiner la segmentation de sa clientèle en électricité (c.), détecter les opportunités commerciales liées à des prestations autres que la fourniture d’électricité (d.), et mettre en place une stratégie de reconquête de clients partis à la concurrence (e.).

a) La migration et la restructuration des fichiers des clients au TRV

121. Dès l’année 2004, la DCO a conduit une série de mutations de son modèle d’organisation, afin de pouvoir faire évoluer la gestion des fichiers clients d’EDF d’une logique strictement liée au TRV (gestion site par site et classification en fonction des types de tarif uniquement) à une logique commerciale, en fonction de la valeur et de la taille du client101. L’objectif de cette évolution était de pouvoir, à partir de la base des clients au TRV, piloter la politique commerciale la plus complète possible.

L’organisation mise en place au moment de l’ouverture du marché pour les professionnels

122. Au moment de l’ouverture du marché de l’électricité pour les clients professionnels, EDF a mis en place une structure commerciale dédiée à ce type de clients, organisée selon un principe territorial. Cette structure commerciale était commune pour tous les types de contrats (au TRV et en OM), et pour toutes les activités liées à la relation client : accueil, gestion et vente102.

123. À la même époque, EDF a également mis en place un ensemble de regroupements de portefeuilles. Ainsi, dès cette époque, EDF a fait migrer des clients entreprises multi-sites au tarif Bleu de la Direction Particuliers et Professionnels vers la Direction Entreprises103.

124. Dans le même temps, en prévision de l’ouverture des marchés des clients professionnels à la concurrence, EDF a créé l’application CLOE. Celle-ci devait devenir la principale application de relation client à disposition des forces commerciales de l’entreprise pour ce type de clients.

125. Dès sa première version, CLOE était la reprise d’un ensemble d’applications commerciales d’EDF, dont certaines constituaient les applications historiques de gestion des contrats au TRV, à l’époque gérées par le service commun EDF-GDF, et notamment la base SICE104.

126. Au travers de la création de CLOE, EDF a ainsi organisé la reprise systématique des anciens comptes clients au TRV dans une nouvelle application commerciale. Cette migration a concerné tous les clients Entreprises, tant les contrats au tarif historique que les nouvelles offres. Les clients Entreprises et Professionnels au TRV Bleu ont été également concernés par cette migration105. Le développement de CLOE a aussi été l’occasion de fusionner autant que possible les comptes correspondant à plusieurs établissements au sein d’un même compte client, afin de pouvoir gérer les clients multi-sites au travers d’une seule entrée dans CLOE106.

127. En termes de fonctionnalités, dès l’origine, CLOE a été pensée comme un outil devant permettre de créer, pour chaque compte, des opportunités de vente d’offres d’électricité mais aussi d’autres services que l’électricité107. Des actions de « périmétrage » des clients, en vue d’améliorer la qualité des données dans CLOE, ont été prévues à cette époque108.

128. En termes de données, les informations sur les interlocuteurs, les contrats, les évènements récents pour chaque client et les opportunités et devis concernant notamment les services et les offres dites « développement durable »109 ont été saisies dans la base CLOE.

129. CLOE a continué à être développée dans des versions successives, afin notamment de permettre un traitement plus efficace de la relation client et de permettre également aux conseillers de clientèle d’entrer le maximum d’informations sur les besoins des clients. Ainsi, chaque appel entrant devait donner lieu à l’introduction dans le compte client des activités liées à la détection d’autres opportunités110. Parmi les types de détection, étaient prévues les « détection services de gestion », « détection gaz » et « détection S3E »111. Des remarques précises sur les besoins et les sites du client pouvaient être ajoutées.

130. Les équipes de vente recevaient ensuite toutes les détections, en vue d’un traitement ultérieur112. En particulier, la version CLOE V7 a permis de générer des devis automatiques pour des services de diagnostic énergétique113. Enfin, CLOE V7 a permis aux conseillers d’EDF d’envoyer des correspondances depuis l’application, en choisissant un « destinataire » parmi les interlocuteurs renseignés dans le compte client. Le processus était le même pour l’envoi d’un devis114.

Les différentes réorganisations du portefeuille et des fichiers de clients d’EDF

131. EDF a ensuite continué de réorganiser son portefeuille de clients afin de l’adapter à sa nouvelle politique commerciale. Cette réorganisation s’est effectuée sur de nombreuses années, au travers de différents « projets » ou « plans ».

132. Tout d’abord, EDF a mis en place le projet OASIS, visant la migration de clients du segment Entreprises du SI historique vers le SI Commerce. Un premier pilote de 70 000 points de livraison a été prévu en 2008115. La migration s’est ensuite déroulée sur plusieurs années.

133. Le projet NECTAR (Nouvel Environnement Commercial sur les TARifs) a immédiatement suivi OASIS116. Il avait pour objectif « la reprise des contrats en tarif Jaune et Vert » pour

« finaliser le modèle d’activité global en disposant d’un seul et même Systeme d’information (Cloe / Felix) pour gérer les clients sur l’ensemble de leurs contrats »117. La fin de la migration est intervenue en septembre 2013 et a concerné 350 000 clients aux tarifs Jaune et Vert118.

134. En termes d’enjeux commerciaux, NECTAR devait également « préparer la fin des tarifs réglementés Jaune et Vert, par la connaissance du portefeuille (notamment contrats atypiques), la qualité des données suite aux opérations d'assainissement nécessaires à la migration, la présence des Contrats aux tarifs réglementés dans le SI des Nouvelles Offres »119.

135. Enfin, le plan « Cap Commerce » a été suivi par le transfert complet des comptes clients professionnels du « marché de masse » (autrefois intégrés au sein de la DP&P) vers le marché d’affaires, selon un plan dit « Arpège »120. Ce plan visait notamment à rapprocher les clients Entreprises et Professionnels dans un même segment et d’en régionaliser le traitement121.

Conclusion sur les projets de réorganisation du SI

136. Ainsi, au travers de ses plans successifs de réorganisation et de migration de données, EDF a continué et amplifié la réorganisation de sa politique commerciale, entreprise dès 2004, afin de mettre à la disposition de ses conseillers de clientèle situés dans les DCR l’ensemble des portefeuilles de clients aux TRV Bleu, Jaune et Vert, qu’ils soient des entreprises, des professionnels ou des collectivités.

b) Les efforts de qualification des données et de détection des besoins

137. Dès l’ouverture à la concurrence pour les clients non résidentiels, EDF a mis en place des méthodes commerciales permettant de transférer et de mettre régulièrement à jour, dans les applications commerciales utilisées par les conseillers les informations sur les clients au TRV. Ainsi, dès 2004, la souscription d’une offre de marché par un client professionnel était réalisée dans CLOE et FELIX en accédant directement aux données issues du système informatique historique122.

138. Dans ce contexte, EDF a développé un ensemble de méthodes et de consignes destinées à ses conseillers commerciaux afin que ceux-ci renseignent le plus d’informations possibles lors des contacts avec les clients. Ces informations portaient sur des éléments destinés à améliorer la relation avec les clients pour leurs contrats d’électricité, mais également sur des sujets distincts, tels que leurs besoins en gaz, leurs projets de travaux ou les opportunités de fournir des services énergétiques supplémentaires.

139. À cet égard, il convient de relever que, de par sa situation de fournisseur historique, puis d’opérateur au TRV électricité sur la majorité du territoire français, et enfin en raison de sa base de clientèle sans commune mesure avec celles de ses concurrents, EDF pouvait compter sur un flux constant d’appels entrants de clients, ce qui lui permettait de mettre en œuvre sa stratégie sans avoir à lancer des campagnes massives d’appels sortants. En effet, comme indiqué par la CRE dans son avis rendu dans la présente affaire, EDF assure la plus grande partie des mises en service, qu’il s’agisse d’un nouveau client ou du déménagement d’un client existant123.

140. Pour chacun des « moments » de vie du contrat, tels qu’une demande de mise en service à la suite d’un déménagement ou d’autres actions liées à la gestion du contrat ou aux factures, EDF prévoyait un ensemble d’actions de « détection » de besoins et de promotion d’offres. Ainsi, tout appel pouvait constituer une opportunité de détection de besoins supplémentaires. Ces informations devaient être saisies systématiquement dans les outils de relation client de l’entreprise124.

c) La segmentation des clients en électricité

Pour les clients Entreprises

141. Dans un document relatif à un plan marketing 2006-2008 de la division Entreprises, EDF a présenté les grands axes de sa stratégie commerciale pour les Entreprises et les Grands Comptes. À cette époque, la principale menace concurrentielle concernait particulièrement les clients multi-sites au tarif Bleu de sites de moins de 7 GWh, lesquels étaient les plus susceptibles d’être attaqués par les concurrents125.

142. Il était prévu notamment de « Développer la valeur du portefeuille en adoptant une approche ciblée en fonction de la valeur des clients pour vendre », ce qui supposait de pouvoir hiérarchiser et identifier les clients à valeur et d’adapter les canaux et les actions commerciales en fonction de cela126.

143. Ces orientations ont été mises en œuvre notamment dans le cadre du projet GEODE. Le projet GEODE, appliqué de février 2008 à juin 2010, était un plan de transformation de la division Entreprises. Cette dernière était considérée comme insuffisamment efficace, en raison de la trop grande multiplicité des segments, des contrats et des interlocuteurs compétents pour chaque client127. Ce projet poursuivait un ensemble d’objectifs, dont :

« ■ Gagner 10% de part de marche Gaz ■ Doubler l’apport des affaires S3E ■ Doubler le volume des affaires CEE sur la prochaine période »128.

144. Par ailleurs, la segmentation a permis de déterminer quels types de clients pouvaient faire l’objet de démarches spécifiques, telles que, par exemple la proposition d’un « bilan commercial ». Comme pour l’ensemble de la structure commerciale mise en place par EDF, ce bilan commercial, proposé uniquement aux « clients à valeur » avait pour objectifs  de :

« Fidéliser nos clients à valeur (…) Détecter du potentiel de placement d’offres (…) »129.

Pour les clients Professionnels et Particuliers

145. S’agissant de ces deux segments, EDF relevait en 2009 que 20 % des clients représentaient 80 % de la valeur pour l’entreprise. EDF a dès lors choisi de différencier ces clients à valeur et les contacts dits « subis » pour lesquels une automatisation était préférable. Cela supposait donc de « [p]arvenir à piloter par la marge la politique de vente en s’appuyant sur le cœur de cible (segmentation), la relation client (traitement différencié), les offres (tarifaires et services) et des canaux optimisés »130. En pratique, EDF souhaitait notamment « [a]ccroître les contacts choisis à valeur et transférer vers les canaux automatisés les contacts subis à faible valeur »131.

146. Sur le segment résidentiel, cette segmentation devait en outre permettre de mettre en place des moyens spécifiques pour les clients à plus forte valeur (dits « Premium ») comme, par exemple, des lignes téléphoniques aux horaires plus étendus. Pour ces clients, la DP&P prévoyait notamment que « [l]'exposition aux offres et services sera accrue (rebond commercial) - La détection des besoins rénovation et 3 E sera systématisés (sic) [à partir de 2009] (…) »132.

 

Pour les clients Collectivités

147. La même attention à la valeur du client a caractérisé la politique commerciale à destination des collectivités.133.

148. La valeur de ces clients a été déterminée au regard de deux paramètres à savoir :

- la marge sur l’électricité représentée par un Score Electricité (SE). Il existait trois niveaux de score (« SE + », « SE = » et « SE -- », afin d’identifier les clients à plus forte valeur. Ainsi, « les clients ayant les scores SE+ et SE= sont ceux à plus forte marge. Ce sont également les plus attaquables et les plus attractifs pour la concurrence » ;

- la « valeur politique » du client, c’est-à-dire son « niveau d’enjeu » au regard de la démarche d’EDF concernant la « Lutte pour les Territoires »134.

149. Ainsi, « l’action commerciale s’articule prioritairement autour de ces deux notions. La qualité de la relation client, le potentiel de production de CEE, les marges réalisées sur les ventes de services ou de gaz naturel peuvent également conforter la Valeur Client »135. Pour les collectivités, la valeur du client reposait donc essentiellement sur la fourniture d’électricité, mais pouvait inclure le potentiel en gaz ou en services énergétiques.

d) La détection d’opportunités de vente d’autres prestations que la fourniture d’électricité

Principes généraux de détection et de rebond

Pour les clients Entreprises

150. Le plan marketing précité de 2006-2008 de la division Entreprises prévoyait « la systématisation de la vente sur appel entrant et du rebond commercial sur appel client et post-diagnostic (ETCP-Q-R) conjointement sur électricité, gaz naturel et services »136.

151. EDF entendait ainsi fournir le plus grand nombre de prestations annexes supplémentaires à ses clients, y compris ceux au TRV : « Développement des ventes de gaz naturel y compris sur l'OH [Offre Historique]- Développement des actions MDE [Maîtrise en Énergie] via la vente de services afin de collecter les CEE sur les GE/GC/CT y compris sur l'OH ». Cela supposait de « [s]ystématiser la vente sur appel entrant et le rebond commercial post- diagnostic (ETCP-Q-R) »137.

152. La détection a reposé essentiellement sur les équipes de Relation Client138, du fait des contacts fréquents qu’elles pouvaient avoir avec les clients. Le document mentionne ainsi que, pour les clients Entreprises, « [l]’ensemble des contacts avec le client étant des occasions de développer les ventes, les responsables de la relation client seront susceptibles de réaliser des détections (S3E) voire de la vente en rebond pour des offres simples ». Pour les clients Grandes Entreprises et Grands Comptes, les schémas du parcours client prévoyaient également de la vente au rebond139. Des modèles de fiches de détection ont été mis à disposition des conseillers140.

153. Cette détection et ce rebond ont fait également partie des activités des équipes en charge de la facturation, du recouvrement et de la production de services141. Ensuite, la Vente Directe effectuait une activité dite de « criblage », consistant à déterminer si le client pouvait être rentable pour le groupe et s’il convenait par conséquent de continuer la relation commerciale142, puis une activité d’affectation d’affaires venant des détections réalisées par la Relation Client vers le canal adéquat (Vente sur Affaire, Partenaires, etc.). Selon le canal, les affaires étaient transmises à l’équipe de Vente sur Affaires qui pouvait proposer des offres d’EDF ou de filiales143.

154. Ainsi, pour la Division Entreprises, il convenait de « faire de tout appel une opportunité de détection : - Pour le Gaz naturel et les services - En utilisant la vente en rebond ou la détection et transfert vers la vente en ligne, la vente sur affaire, ou le resp. commercial »144.

155. Les ventes de services supplémentaires n’avaient pas uniquement lieu en rebond sur appel entrant, mais pouvaient également intervenir lors de « moments-clés » de la vie du contrat. EDF contactait ainsi certains de ses clients Entreprises à des moments précis de la vie de leur contrat pour leur proposer des nouvelles prestations145.

156. Ainsi, les clients présentant le potentiel le plus important devaient être contactés au travers d’un « programme relationnel », organisé autour de l’envoi de courriels ciblés générant ensuite des appels de clients et également de ventes en « pro-actif » sur appels entrants. EDF leur transmettait ensuite des propositions de prestations par le biais de campagnes de courriels et de newsletters orientées146.

157. Pour réaliser ces actions de détection et rebond, les conseillers de vente devaient être formés de manière constante147.

Pour les clients Professionnels et Particuliers

158. Dès l’ouverture à la concurrence pour les clients professionnels en 2004, la Direction Particuliers et Professionnels a mis en place une structure commerciale commune pour tous les types de contrats (au TRV et en OM), et pour toutes les activités liées à la relation client : accueil, gestion et vente. Tous les conseillers clients d’EDF (appelés à cette époque CEL) devaient pouvoir réaliser l’ensemble des tâches commerciales. En particulier, l’« accueil » était défini comme la gestion des appels téléphoniques, en ce incluse la vente au rebond, tandis que la « vente » ne comprenait que les appels sortants commerciaux. Ainsi, la vente au rebond réalisée par les CEL pouvait conduire à la souscription d’offres de marché d’électricité mais également de gaz148.

159. Un parcours similaire a été prévu pour les clients résidentiels. Les services de relation clientèle qui répondaient au numéro de contact inscrit sur les factures des clients au TRV Bleu avaient pour mission d’utiliser ces appels pour détecter et vendre le plus de prestations possible (« Vente par rebond des offres relatives aux lignes de produits Énergie et Entretien Dépannage »), transférer les contacts vers les équipes commerciales des « pôles projets » en charge de la création de CEE et, enfin, pour les clients appelant pour une résiliation, mettre en œuvre des actions de « winback » (reconquête)149.

Pour les clients Collectivités

160. Concernant les collectivités, EDF a encouragé la bonne qualification des données des clients TRV à des fins de détection d’opportunités. Les forces commerciales devaient avoir recours aux outils informatiques du groupe pour cibler les clients les plus intéressants. En particulier, une « bonne pratique » a consisté en l’utilisation du fichier client TRV à des fins de détection de nouvelles opportunités pour la commercialisation d’offres / services : « Bonne pratique 3 : Exploiter son fichier clients pour identifier des prospects sur la base des critères de ciblage définis. Si besoin, solliciter la DAC pour faire des requêtes sur la base de ces critères (ex : listing des collectivités avec une piscine fourni par la DAC dans le cadre du déploiement de l’offre piscine en RAA) »150.

161. Il était également demandé de profiter des appels entrants et des moments de vie du contrat pour proposer des offres supplémentaires151. Le rebond sur appel entrant lié au contrat au TRV était également prévu pour les clients Collectivités, notamment pour leur proposer des services énergétiques à forte valeur ajoutée152. Plusieurs fiches à destination des conseillers clientèle détaillaient la posture à tenir pour vendre des offres de gaz et des services de gestion énergétique au rebond lors des contacts avec les clients Collectivités153.

Les actions dans le domaine des services énergétiques

L’utilisation des services de gestion de l’énergie comme porte d’entrée

¨ Pour les clients Entreprises

162. S’agissant des clients Entreprises, EDF considérait, en 2008, que les services énergétiques les plus simples, limités à des conseils et diagnostics, pouvaient constituer une première étape, permettant ultérieurement de proposer des offres à plus forte valeur ajoutée154.

163. Ainsi, « Les contrats de progrès sur le haut de portefeuille, comme les diagnostics (Optimia, EnR) sur l'ensemble des clients entreprises, doivent désormais être délivrés au client exclusivement dans une optique d'ouverture vers les EEE, que celle-ci qui conduise à la réalisation d'un service 3E (efficacité énergétique, bas carbone, EnR) porte par une filiale du Groupe EDF, ou à la production de CEE, ou mieux encore aux deux à la fois » (sic)155. EDF a pu mesurer en 2010 qu’une part non négligeable des apports d’affaires était liée à un « conseil MDE en amont »156.

¨ Pour les clients Professionnels et Particuliers

164. Pour ces deux segments, dès le mois de mai 2004, l’un des objectifs majeurs d’EDF était d’« [a]ugmenter la dépendance et la captivité du client avec des offres de services qui le scotch ». Ces principes étaient à cette époque déjà appliqués au travers de la « [g]amme EDF Pro : offres de services différenciés et segmentés selon les principales attentes clients. Logique d'enrichissement progressif et régulier »157.

165. Pour les clients professionnels, EDF a pu par la suite constater que, parmi les ventes et contacts les plus influents pour la fidélisation des clients, figurait « Le contact téléphonique par un Conseiller client, La vente de gaz, puis d’électricité seule », mais aussi « La vente de services kWh équilibre, PA, Mens. »158

166. S’agissant du segment résidentiel, EDF Commerce a établi une distinction entre, d’une part, les services connexes à la fourniture d’énergie, tels que le suivi de consommation, l’assurance facture énergie ou encore le dépannage et, d’autre part, les services d’efficacité énergétique, qui incluent les conseils en travaux, la mise en relation avec un partenaire ou encore les travaux eux-mêmes159. Pour le second type de services, plus de deux millions de clients avaient été accompagnés avant février 2012, y compris au travers de prêts160.

 

¨ Pour les clients Collectivités

167. De même, pour les clients Collectivités, les services énergétiques devaient faire l’objet d’un

« chaînage », la fin d’une prestation conduisant à la proposition d’une autre, ce qui devait favoriser l’apport d’affaires aux filiales du groupe161.

La détection et la vente au rebond de services énergétiques à forte valeur ajoutée

¨ Pour les clients Entreprises

168. S’agissant des services énergétiques à plus forte valeur ajoutée, tels que les services de maîtrise de la demande en énergie (MDE) ou les contrats de performance énergétique (CPE), EDF a demandé à ses équipes commerciales de mettre en place des méthodes pour détecter et vendre ces services à l’ensemble de la clientèle Entreprises, soit directement soit par l’intermédiaire de certains partenaires162.

¨ Pour les clients Collectivités

169. Le même souci de développer des opportunités de fourniture de service d’efficacité énergétique s’est retrouvé dans la stratégie commerciale déployée à destination des collectivités territoriales. Les opportunités détectées pour des services non proposés par EDF Commerce mais entrant dans le champ de compétence d’une de ses filiales devaient ainsi être transmises à cette filiale et les décisions devaient être prises en commun lors d’un

« comité de criblage ». Parmi les informations utilisées pour réaliser le ciblage des clients pour certains types d’offres, se trouvaient les données de consommation et de dépassement des tarifs Vert et Jaune163.

¨ Pour les clients Particuliers

170. Pour les clients particuliers également, les chargés de clientèle des pôles projets en charge de la création des CEE traitaient non seulement des appels effectués sur le numéro 3929, mais également des appels transférés par les équipes de la relation client lorsque celles-ci détectaient des besoins en travaux ou économies d’énergie. Par conséquent, ces équipes cherchaient à détecter au maximum les opportunités de ce type et à effectuer des ventes ou des apports d’affaires sur rebond d’appels concernant des contrats au TRV164. Il s’agissait en particulier pour elles de « capitaliser sur la base contact pour accroitre la collecte de CEE » et « [d’]augmenter la détection de projet par la mobilisation (…) de tous les canaux client »165.

171. En termes pratiques, les conseillers au sein de ces pôles projets devaient réceptionner les appels des clients résidentiels composant le 3929, ou bien les contacts transférés par les autres conseillers clientèle ou encore par des prestataires partenaires. Dans le cadre de ces contacts, les conseillers pouvaient proposer directement un ensemble de prestations ou déposer les coordonnées du client dans une « Base Contact »166.

172. En 2008, EDF a fixé comme objectifs de développement « une vente tous les 10 appels soit 450 ventes annuelles par Conseiller (Etx+Otx +Ete + CES), 750 lots qualifiés dans la Base Contact en moyenne par ETP, soit au final un acte à valeur tous les 4 appels en moyenne »167. En tout état de cause, les conseillers de clientèle avaient chacun des objectifs individuels relatifs à l’apport en CEE et l’apport d’affaires en travaux et services énergétiques168.

173. Outre les partenaires d’EDF, une partie des prospects intégrés dans la Base Contact profitait à CHAM, filiale d’EDF, notamment pour des opérations d’entretien et de dépannage de chaudière169.

174. Les pôles projets ont été supprimés en 2013-2014170. L’outil « Base Contact » a, quant à lui, été arrêté en 2014 et a été remplacé par la solution « Trouvez un pro ».

La proposition d’offres de marché de gaz aux clients au TRV électricité

L’utilisation systématique des mises en service et des contacts entrants

175. EDF est entrée en 2005 sur le marché du gaz naturel171. Dès cette époque, et pendant de nombreuses années, EDF a mis en place un ensemble de consignes invitant ses conseillers à utiliser leurs contacts avec la clientèle au TRV pour lui proposer de manière systématique des offres de marché de gaz.

¨ Pour les clients Entreprises et Collectivités

176. Pour la période 2006-2008, il était prévu au sein de la division Entreprises : « Afin de maximiser ses ventes de gaz naturel, EDF doit mettre en avant l'offre de gaz naturel à chaque occasion de contact client :

en ciblant en priorité les clients électricité / gaz naturel à valeur pour EDF (multisites Bleus, SGI, OR/P3 Jaune et Vert, à confirmer) ;

en vendant l’offre de gaz naturel, même si aucune nouvelle offre électricité n’est proposée au client ;

en profitant au maximum des contacts pour la promotion de la nouvelle offre électricité afin de proposer l’offre gaz naturel associée à des services. »172.

177. De même, dans son document du 16 septembre 2008 précité, la direction Entreprises d’EDF Commerce envisageait de favoriser la détection/rebond des besoins en gaz de ses clients, en mettant en place une offre sur grille tarifaire173. À cette époque, le rebond était déjà largement utilisé, notamment pour les PME174.

¨ Pour les clients Particuliers

178. S’agissant des clients résidentiels, EDF constatait en 2008 que la plupart des ventes de gaz intervenaient à partir des mises en service électricité. EDF comptait, pour les années suivantes, renforcer la part des ventes au rebond sur appel téléphonique.

179. En 2009, EDF rappelait que sa stratégie en matière de gaz devait également être construite en fonction d’un pilotage par la valeur175. Alors qu’EDF avait alors surtout développé sa part de marché dans le gaz au travers des mises en service, elle a décidé de désormais cibler des clients en « stock », c’est-à-dire ses propres clients déjà sous contrat électricité, au travers d’un ensemble de critères, fondés sur les données dont elle disposait176. EDF a également décidé, pour conforter sa politique en matière de gaz, de « [p]lacer parmi les priorités de la transformation la migration dans SIMM des clients a potentiel gaz en 2010 ■ Généraliser la vente en rebond sur stock en CRC, en boutique et par les vendeurs terrain à compter de janvier 2010 pour contribuer aux objectifs de vente sur stock »177.

180. EDF a adopté cette stratégie et l’a maintenue pendant de nombreuses années, même s’il lui a fallu pour cela « Assumer le risque juridique de vente en rebond » qu’elle avait elle-même identifié.178.

Le recours ponctuel à des contacts sortants

181. Quand bien même EDF assurait l’essentiel de ses ventes de gaz à partir de contacts entrants, l’entreprise a également lancé des campagnes régulières d’appels sortants, à certains moments stratégiques de la vie du contrat. Ainsi en septembre 2010, EDF a arrêté un plan consistant à commercialiser des offres opportunistes de gaz de façon plus systématique, tant aux particuliers qu’aux professionnels. Dans ce cadre, le service juridique d’EDF avait alors « attir[é] l’attention (…) sur les risques juridiques des Offres opportunistes gaz dans le cadre de l’expérimentation : Afin d’éviter la pratique de subventions croisées pouvant mener à des abus de position dominante, le fichier historique Elec (données détenues spécifiquement par EDF sur la puissance, la conso,…) ne peut être utilisé pour des actions de fidélisation élec-gaz. Le service juridique recommande de ne pas utiliser le fichier historique Elec pour les opérations TCS, mais de les construire sur la base de fichiers externes de clients gaz »179. Cependant, EDF a fait le choix « d’assumer les risques juridiques lors de la phase d’expérimentation, sur le 4ème trimestre 2010 »180.

182. En outre, des offres opportunistes de gaz, prenant appui sur l’évolution des prix de gros du gaz, pouvaient également être commercialisées au rebond sur appel entrant pour tous les clients particuliers et également de manière proactive pour les clients de haut ou milieu de portefeuille181.

183. Enfin, EDF avait aussi recours à la promotion de ses offres de marché de gaz naturel dans le cadre de courriers et brochures envoyés à ses clients électricité, comme observé par la CRE dans le cadre de son rapport 2014-2015182.

e) La reconquête de clients perdus et les offres en riposte

184. EDF a également utilisé son statut d’opérateur au TRV et les informations qu’elle détenait sur sa clientèle pour proposer aux clients qui souscrivaient une offre concurrente, voire même qui étaient simplement démarchés par d’autres opérateurs, des offres en « riposte ».

185. Les appels sortants en vue de la reconquête de clients perdus à partir du fichier original de clientèle constituaient une pratique habituelle de la DP&P au moment de l’ouverture à la concurrence pour les non résidentiels en 2004183.

186. En 2011, EDF a également mis en place une offre de marché intitulée « Offre Transfert Jaune », qui devait être envoyée aux clients identifiés comme étant « à valeur » quand ceux- ci étaient intéressés par une offre concurrente. Cette offre était établie au travers d’un « devis rapide » en se fondant sur les données contenues dans CLOE, à savoir, notamment, les données historiques du contrat184.

3. 2013-2016 : LA FIN PROGRAMMEE DES TRV JAUNE ET VERT ET LA STRATEGIE

IROISE

187. La fin programmée des TRV Jaune et Vert ouvrait une période potentiellement difficile pour EDF, dans la mesure où une grande partie de ses clients Professionnels allaient devoir choisir une offre de marché. Le risque était donc de voir partir un grand nombre de clients qui jusque-là se satisfaisaient de leurs contrats au TRV.

188. Le 19 février 2013, le directoire d’EDF Commerce a lancé une stratégie de grande ampleur, intitulée Iroise (« Inventons et Réussissons la transitiOn commercIale lors de la Suppression des tarifs réglEmentés de vente supérieur à 36KVA »)185.

189. Pour ce faire, EDF devait parvenir à basculer les sites aux tarifs Vert et Jaune en offres de marché (OM), en vue d’atteindre un objectif de préservation de ses parts de marché186 (a.). Parallèlement à ce plan spécifique, EDF a continué de renforcer son action autour des prestations connexes à la fourniture d’énergie : gaz, CEE, services énergétiques, etc. (b.).

a) L’effort de préservation de la part de marché d’EDF et de sa rentabilité

Présentation générale

190. La fin programmée des tarifs Jaune et Vert au 1er janvier 2016 constituait une menace pour la position d’EDF sur les segments des Grandes Entreprises, des Entreprises, des Professionnels et des Collectivités. Elle nécessitait pour EDF d’organiser la négociation et la conclusion de nouvelles offres pour environ 425 000 sites187. À ces chiffres, il faut également ajouter un nombre équivalent de sites au tarif Bleu qui pouvaient être

« embarqués » dans les négociations188.

191. L’objectif d’EDF était de garder 72 % de sa part de marché au 1er janvier 2016189.

192. Toutefois, dès l’origine, EDF a considéré qu’il n’était pas opportun d’anticiper la fin des TRV en migrant trop tôt des clients Entreprises et Collectivités vers des OM190. C’est en effet juste avant la date de fin des TRV Jaune et Vert que, pour EDF, tout devait se jouer.

193. S’agissant des offres de marché devant être proposées en remplacement des TRV, l’objectif d’EDF était de préserver son « premium de marque », en proposant des services énergétiques, des fonctionnalités de gestion multi-sites et le développement de canaux de communication diversifiés191.

194. Cette stratégie ne se limitait pas à l’horizon du 1er janvier 2016, mais visait à maintenir la position particulière d’EDF sur le long terme, y compris par la reconquête des clients perdus au moment de la fin des TRV Jaune et Vert192.

195. La stratégie Iroise a reposé essentiellement sur les actions suivantes :

- la mise en place de nouveaux outils informatiques permettant d’automatiser fortement les processus ;

- un effort très important de qualification des données des clients, s’appuyant sur toutes les occasions de contact avec les clients ;

- le développement de devis, de contrats et d’offres sur mesures générés automatiquement et mis à disposition des clients par des moyens de masse.

Les évolutions préalables des outils numériques d’EDF Commerce en prévision d’Iroise

196. L’une des dimensions fondamentales de la stratégie Iroise était le développement d’outils numériques permettant de gérer de manière massive un grand nombre de devis et de contrats. L’objectif de cette stratégie était de pouvoir « industrialiser » la politique commerciale vis- à-vis des clients aux TRV Jaune et Vert.

Principes d’organisation

197. L’enjeu principal pour la réussite de la stratégie Iroise était l’automatisation d’un certain nombre de processus de vente, comme par exemple la préparation à l’avance de devis pour l’offre de marché commercialisée par EDF au moment de la bascule sous le nom de

« Contrats Électricité Reconductibles » (ou « CER »)193.

198. Il était notamment crucial de permettre aux équipes de vente de créer simplement des devis, des projets de contrat ou des réponses à appels d’offres, pour l’ensemble des segments de clientèle194. En outre, les clients présentant les profils les plus simples devaient pouvoir recevoir des contrats standardisés directement dans leur espace client.

 

Le développement de bases de données et d’applications spécifiques

199. Le projet Iroise d’EDF prévoyait la modernisation des systèmes d’information de l’entreprise, et notamment une version améliorée de CLOE (la V17) permettant d’automatiser certains gestes afin de traiter la conversion de masse des contrats en offre historique. L’objectif de CLOE V17 était de mettre en œuvre un certain nombre de mécanismes automatiques de création et de validation de contrats195.

200. En particulier, la V17 de CLOE devait permettre à EDF d’être plus performant pour la cotation des clients multi-sites196.

201. Les fonctionnalités principales de la V17 étaient notamment :

- un processus d’acceptation automatique des contrats (retours Double-clic, Flash-codes pour contrats papiers) ;

- la reprise de l’ensemble des devis existants pour un client : électricité, gaz et services197.

202. Ces développements se sont prolongés avec une version V17.1, sortie en juin 2015, qui comprenait notamment un outil d’aide à la qualification de données via la saisie du SIRET198.

Les actions mises en œuvre dans le cadre d’Iroise

Les outils commerciaux mis en œuvre vis-à-vis des clients concernés par la fin des TRV

¨ Les outils classiques de promotion mis en œuvre par EDF

203. Dans le cadre de sa stratégie Iroise, EDF a tout d’abord utilisé les moyens habituels de promotion, tels que des campagnes publicitaires, l’utilisation de lettres électroniques ou de brochures envoyées aux clients, ou encore des courriels.

204. Dans le cadre de sa documentation d’information sur la fin des TRV électricité mais également gaz, EDF invitait les clients qui souhaitaient « en savoir plus sur les offres de marché d’EDF entreprises » à « contacte[r] [leur] conseiller clientèle, au numéro habituel figurant sur [leur] facture »199. L’approche était similaire pour les collectivités territoriales200.

205. De plus, dans ce même document d’information, une page informait les clients que la disparition des TRV s’appliquait également dans le domaine du gaz et mentionnait « qu’EDF Entreprises est un fournisseur alternatif aux opérateurs historiques susceptible de vous faire une proposition commerciale »201.

206. Par ailleurs, EDF a utilisé les lettres électroniques envoyées régulièrement à l’ensemble de sa clientèle pour faire la promotion de ses OM dans le cadre de la fin des TRV.

207. En effet, dans sa lettre d’information à destination des entreprises « Energie News » de janvier-février-mars 2015, EDF, après avoir expliqué la fin des TRV électricité et gaz, indiquait dans un encart : « EDF Entreprises vous accompagne pour vous proposer une offre de marché adaptée à vos besoins, en électricité comme en gaz naturel. »202.

208. La lettre « Energie News » d’avril-mai-juin 2015 était, quant à elle, essentiellement consacrée à la fin des TRV Jaune et Vert203. Sur la dernière page, un encart indiquait, juste après un compte à rebours des mois restants avant l’expiration des TRV : « Les tarifs réglementés de vente d'électricité pour les sites disposant d'une puissance strictement supérieure à 36 kVA vont disparaître dans huit mois soit le 31/12/2015. Le 31 décembre, ça arrive vite ! EDF Entreprises vous conseille de souscrire, dès maintenant, une offre de marché d'électricité pour vos sites > 36 kVA*.* En pratique, ce sont essentiellement les sites aux Tarifs Jaune et Vert de puissance souscrite strictement > à 36 kVA, qui sont concernés. ». Ce texte était suivi d’un lien hypertexte conduisant aux offres de marché d’EDF204. Le même encart a été reproduit dans un numéro de mai 2015 de « Votre Energie »205.

¨ La mise en place d’un « pré-test » et d’un test en 2014

209. Dès 2014, EDF a mis en place un « pré-test » destiné à mesurer l’intérêt des clients pour des OM, en expérimentant un discours relatif à la fin des TRV lors de « moments de vie » du contrat tels que la mise en service, le bilan commercial, l’optimisation tarifaire ou la conquête en gaz206. Ainsi au travers de ce « pré-test », EDF cherchait à identifier comment elle pouvait lier l’information sur la fin des TRV avec la demande d’OM de la part des clients. En outre, ce pré-test a permis à EDF de comprendre que la simplicité de gestion du contrat importait plus au client que le prix207.

210. À la suite de ce « pré-test », un test plus large a été lancé au mois de juin 2014208.

¨ La création d’un « fichier IROISE » des clients

211. À cette époque, un « fichier IROISE » des clients, « confidentiel et sensible », a circulé au sein d’EDF Commerce209. Ce fichier contenait notamment les services de gestion souscrits par les clients, leur segmentation commerciale, ainsi que les modalités de souscription qui allaient être proposées.

Un effort massif de qualification des données des clients au TRV

¨ Principes et méthode

212. La mise en œuvre de l’ambitieux programme d’automatisation des processus d’EDF Commerce dans le cadre d’Iroise supposait un effort intense de qualification et de mise à jour de la base de données d’EDF pour ses clients aux tarifs Jaune et Vert.

213. Ainsi, dès 2012, avant même le lancement officiel d’Iroise : « Dans les entités opérationnelles, l’objectif sera l’amélioration de la connaissance client sur ce segment permettant d’une part de contribuer à améliorer la satisfaction et à se préparer à un scénario de renégociations ciblées des contrats »210. Ainsi, en 2013, la DCR Méditerranée avait prévu un « Qualifthon », impliquant de qualifier l’ensemble du flux de clientèle ainsi que les clients les plus importants du stock211.

214. La nécessité de qualifier les données à des fins de bonne mise en œuvre du projet Iroise est rappelée à nouveau dans un document d’août 2014212. Il y est expliqué que « disposer de données qualifiées et de qualité est nécessaire pour : adresser l’offre adaptée, après avoir identifié…

- interlocuteur représentant le client : données de contact, information sur sa fonction, sur sa capacité ou non à signer les contrats en propre ou par délégation

- le client et son secteur d’activité : la clé, le SIRET, est nécessaire pour lui proposer une offre conforme à la politique commerciale

- sa qualité payeur : pour couvrir le risque de contrepartie par un dépôt de garantie ou une grille de prix mark-upée

- le périmètre de ses sites, pour proposer l’offre et l’approche commerciale adaptée »213.

215. EDF Commerce a ainsi mis en place une vaste campagne nationale de qualification de ses fichiers de clientèle. Cette qualification, mise en œuvre au plus près du terrain par les DCR, devait ensuite permettre à EDF de démarcher les clients concernés au moindre coût afin de leur proposer les offres les plus adaptées. L’objectif était ainsi d’être prêt au moment de la

« bascule », c’est-à-dire quelques mois avant le 1er janvier 2016, à convertir massivement les clients Entreprises/Professionnels/Collectivités aux offres de marché d’EDF, et ainsi de conserver l’essentiel de la clientèle historique sur ces segments.

216. Cette campagne nationale de qualification a reposé sur les mêmes principes que la stratégie commerciale précédemment décrite, mais a consisté à « industrialiser » le processus : qualification et mise à jour des données clients, détection des besoins spécifiques, segmentation de la clientèle et mise en œuvre de canaux différenciés de communication, établissement d’offres sur mesure.

217. Pour ce faire, des ressources spécifiques en personnel ont été affectées au projet Iroise214. Un suivi précis du taux de qualification des comptes a été effectué215, en fonction des six

« items » considérés comme prioritaires : SIRET, nom, fonction, adresse, téléphone et courriel de l’interlocuteur principal216.

218. Des campagnes d’appels sortants pour qualifier les six « items » précités ont été prévues pour les comptes n’ayant pas de SIRET ou avec des SIRET incohérents, pour un budget d’environ 150 000 euros par région217. Ces appels sortants ont effectivement été mis en œuvre dès juillet 2014218. En outre, une action nationale de qualification, utilisant un prestataire extérieur, a été déployée à la rentrée 2014219.

219. Cette qualification a également continué sous couvert d’une démarche d’information sur la fin des TRV à horizon du 31 décembre 2015. Ainsi, chaque étape d’information des clients TRV était l’occasion pour les forces commerciales de mettre à jour les données de chaque client.

220. Un document interne en date du 21 mars 2014 et traitant de l’envoi du premier courrier réglementaire décrit l’organisation d’une « campagne marketing » prévue à cette occasion220. Ainsi, le courrier réglementaire devait comporter un numéro de téléphone dédié, disponible pendant trois à quatre semaines, pour traiter les appels des clients ayant reçu le courrier221 :

221. « Les conseillers de la plateforme dédiée disposeront d’un formulaire leur permettant, en ligne, de :

- qualifier les données clients

- visualiser directement, pour mémo, les réponses aux différentes questions des éléments de langage mis à leur disposition.

- Ces données seront ensuite injectées dans CLOE.

- Ces conseillers se présentent comme des agents EDF suivant la charte relationnelle EDF Entreprises. »222.

222. Lors de l’information au client de l’objet de l’appel (à savoir la fin des TRV), il était demandé au préalable de procéder à la vérification de ses données : « “Très bien. Je vais vous informer des nouvelles dispositions réglementaires sur les tarifs d’électricité puis revenir sur votre contrat. En premier lieu, permettez-moi de vérifier quelques informations quant à votre contrat.” (vérification de la qualification du dossier : siren, mail, tel, adresse, signataire contrat…) »223.

¨ L’application par les DCR

223. Ces consignes ont été suivies par les directions commerciales régionales d’EDF. Il est fait état de l’« investissement de 60k€ de phoning sur la totalité des clients CLOE en TV et TJ ainsi que sur les TDG mono-couleurs Bleus du marché PME-PRO (pour qualifier les champs e-mail, nom d’interlocuteur introuvables sans contact direct avec le client). »224. La démarche de qualification s’accompagnait d’un périmétrage complet des clients multi- sites225.

224. En septembre 2013, les indicateurs de qualification du fichier clients se portaient respectivement à 80 % pour SIMM et à 90 % pour CLOE (dans sa version avant migration Arpège)226.

225. La DCR Ouest a développé une « matrice » pour la qualification des clients dans le cadre d’Iroise227. Cela incluait des informations précises : possession d’un site en Sup7, contrat gaz chez EDF ou un concurrent, tarif d’effacement, etc. La DCR Sud-Ouest, quant à elle, devait profiter de tout contact avec le client pour valider la qualification de ses coordonnées228.

¨ Le résultat des travaux : les données à la disposition des commerciaux d’EDF à la mi-2015

226. La campagne de qualification autour d’Iroise a donc permis d’enrichir et d’ordonner le fichier de clientèle d’EDF dans une mesure bien supérieure à ce qui était fait jusqu’ici. Ainsi, dans un document de mars 2016, portant sur un nouveau programme de qualification des données des clients des marchés d’affaires, le bilan dressé pour l’année 2015 était le suivant :

« 2015 aura été une année d’intense qualification afin d’être en capacité de générer des devis et de les envoyer aux bons interlocuteurs dans le cadre de la fin des tarifs réglementés jaune et vert (contribution directe à la réalisation de 100 000 devis et contribution globale aux autres) »229.

227. En particulier, les outils mis à disposition des conseillers d’EDF permettaient, contrairement à la base de données fournie aux fournisseurs alternatifs (voir ci-dessous paragraphes 267 à 270), d’identifier l’interlocuteur pertinent230.

L’importance de la segmentation des clients

228. Plus encore que le maintien des parts de marché d’EDF, la stratégie Iroise visait le maintien de sa rentabilité. Il était donc nécessaire d’investir prioritairement les ressources sur les segments les plus rentables.

229. Cette segmentation a permis notamment à EDF d’identifier quels clients étaient les plus

« attaquables » par la concurrence, en fonction des marges réalisées par le TRV. Dans le cadre de son audit de 2015, EDF a identifié une « zone de potentiel de marge significatif pour EDF » dans les mono-sites au tarif Jaune, les petits sites au tarif Vert tous modes d’achat confondus, et les moyens et grands sites au tarif Vert dans le cas de contrats de gré à gré231.

230. Dans le cadre de la stratégie Iroise, cette segmentation a conduit à la création de quatre profils de clients, en fonction de la complexité de la gestion contractuelle :

- le « prêt à porter » concernait les clients mono-sites et assimilés ;

- la « couture simple » concernait les petits multi-sites et les clients télérelevés ;

- la « couture complexe » concernait les grands multi-sites complexes ;

- la « haute couture » concernait les grands multi-sites très complexes et les « sites du domaine I »232.

231. EDF a ensuite déterminé le contenu et l’intensité de son action commerciale en fonction de ces catégories, et, pour les deux catégories les plus simples, il a été prévu que le prix du contrat soit déterminé suivant des modalités automatisées233.

232. Une classification similaire a été prévue pour les clients Collectivités234.

La création d’espace clients sur ee.fr

233. Afin de permettre la souscription automatique de contrats, il était nécessaire que tous les clients concernés disposent d’un espace client en ligne. EDF a donc développé un

« programme relationnel » incitant les clients à créer leur espace sur le site d’EDF dédié aux clients Entreprises et Professionnels, ee.fr235.

234. Par ailleurs, des OM étaient déjà disponibles dans CLOE pour les comptes nouvellement créés236.

Le développement de trames contractuelles puis de devis automatiques

235. Pour les clients les moins sophistiqués, qui représentaient l’enjeu économique le plus important, le succès de la conservation des parts de marché par conversion des TRV en OM était conditionné à la possibilité de leur fournir des modalités simples et immédiates de souscription à une OM, au moment où la pression liée à la fin des TRV commençait à s’accentuer.

236. Ceci impliquait la préparation à l’avance de trames contractuelles et nécessitait donc d’avoir à la fois des données ciblées sur les consommations pour proposer des offres pertinentes, et des coordonnées actualisées et précises de l’interlocuteur clé afin de garantir la conclusion du contrat237. C’est dans ce cadre qu’EDF a commencé à offrir un parcours de souscription sur le site « ee.fr », destiné aux clients professionnels238.

237. Grâce aux activités de qualification et à la mise en place d’outils informatiques capables de gérer les données obtenues, EDF était en mesure d’adresser à un grand nombre de clients des devis valides et préparés de longue date pour des contrats « CER »239. Il convient de relever que le contrat CER était un contrat tacitement reconductible240, pouvant donc ne donner lieu à aucune renégociation pendant de nombreuses années.

238. Pour les plus petits clients, EDF a eu recours à des campagnes de courriels invitant à aller sur le site ee.fr, pour souscrire directement à une OM en ligne sur la base d’un contrat pré- rempli241. Pour les clients qui ne souhaitaient pas souscrire directement sur Internet, les conseillers clients pouvaient organiser un envoi par courriel permettant une souscription en ligne par un parcours en « double clic »242.

239. Par ailleurs, au mois de juillet 2015, EDF a envoyé à l’ensemble des clients concernés par la fin des TRV, hors Grands Comptes et Grands Clients, un courrier « de nature plus commerciale », selon les propres termes de l’entreprise243. Ce courrier visait à proposer directement au destinataire la souscription d’une OM.

240. À ces actions générales se sont ajoutées des initiatives supplémentaires des DCR. Ainsi, en mars 2015, la DCR Rhône-Alpes Auvergne a conduit une expérience « web key » consistant en « une petit clé USB comportant de l'info et un lien direct pour contracter (…) adressée aux clients. »244. Puis en juillet 2015, la DCR de Rhône-Alpes Auvergne a eu recours aux facteurs de La Poste afin de transmettre des devis générés par un « robot-devis » à des clients présélectionnés245.

241. Les actions conduites ont été intensifiées au fur et à mesure de l’approche de la fin de la période de bascule. En effet, c’est véritablement à partir du milieu de septembre 2015 que la campagne commerciale d’EDF s’est intensifiée et que les clients ont commencé à passer en masse à une offre de marché246. EDF procédait alors à l’envoi massif de contrats par courrier suivi de relances téléphoniques à certaines catégories de clients. EDF a également créé une nouvelle page « pour tous les clients dans la cible du parcours et ayant reçu un CER » et contactait le client pour lui notifier qu’une offre lui avait été adressée, en lui rappelant les bénéfices et les modalités de souscription247.

242. Enfin, EDF a également utilisé l’occasion de l’envoi d’un troisième courrier réglementaire

« Marianne » contenant les conditions générales et tarifaires de l’offre de transition applicables aux clients n’ayant pas souscrit d’offre de marché le 31 décembre 2015. À cette occasion, EDF a transmis à ses équipes et aux employés du prestataire extérieur des consignes claires visant à proposer de manière systématique la souscription d’une OM, soit directement, soit par le rappel par un interlocuteur commercial248.

Les clients plus importants ou complexes

243. Les importants travaux de qualification ont également permis à EDF d’être plus réactive pour des clients importants, aptes à faire jouer plus facilement la concurrence. EDF a été ainsi en mesure de répondre en 48 heures à toute demande d’offre venant d’un client ayant déjà reçu une offre d’un concurrent à « bas prix », dès lors que tous les éléments nécessaires avaient été bien préparés en amont (périmétrage, qualification, format de l’offre)249.

244. Pour les collectivités, qui ont très majoritairement eu recours aux appels d’offres dans le cadre des règles relatives à la commande publique, EDF a développé un outil spécifique, COMETES, permettant d’établir automatiquement des devis multi-sites250.

Le maintien des envois massifs de contrats automatiques pendant la période de transition

245. Les éléments fondamentaux de la stratégie Iroise ont continué à être mis en œuvre au moins jusqu’à la fin de la période de transition, au mois de juin 2016.

246. Dès 2015, EDF a prévu de maintenir et renforcer sa politique commerciale pendant la période de transition251. Les actions prévues sur cette période comprenaient notamment :

- des envois en masse de contrats papier, suivis de relance téléphonique pour les clients ciblés ;

- le « [m]aintien d’appels sortants pour tous les clients n’ayant pas reçu de contrats papier » ; (…) »252.

247. Ainsi, pendant la période de transition, EDF a maintenu la même stratégie consistant à proposer des moyens simples, et souvent automatisés, de souscription aux clients, en se fondant sur les informations qu’elle détenait dans ses applications commerciales pour générer des trames de contrat.

La préparation de la reconquête des clients

248. Comme indiqué précédemment, le suivi et la reconquête des clients partis à la concurrence faisaient dès le début partie intégrante de la stratégie Iroise (voir paragraphe 184 et suivants).

249. Dès les premières expérimentations de juin 2014, un mécanisme de suivi des départs chez les concurrents a été mis en place253. Puis, au mois d’octobre 2014, des échanges internes à EDF évoquaient « un chantier sur les clients partis a (sic) la concurrence : de la qualification à la stratégie de reconquête »254. L’objectif affiché était de « transformer un départ à la concurrence en prospect »255.

250. L’intégration dans le SI des départs à la concurrence faisait partie des consignes données aux conseillers commerciaux de l’entreprise. Cette qualification devait permettre l’élaboration d’une stratégie plus précise de reconquête, prévue en fin d’année 2015256.

251. Cette stratégie a été mise en œuvre notamment par une collaboration mise en place en 2017 avec l’entreprise Tilkee, laquelle s’est vu confier une mission de reconquête des clients partis à la concurrence257. L’existence de cette campagne est confirmée par un article de presse daté du mois de décembre 2017, qui ajoute que « [l]e groupe avait déjà entrepris des démarches auprès de ses prospects partis à la concurrence, mais sans ciblage préalable, avec un appel à froid sans relance et sans négociation personnalisée »258.

252. Par conséquent, l’instruction a mis en évidence la mise en œuvre effective, pendant l’année 2017, d’actions de reconquête des clients partis à la concurrence, à partir des informations collectées pendant le processus d’extinction des TRV Jaune et Vert.

La fourniture d’une base de données faiblement utilisable aux concurrents

253. En parallèle du déploiement de la stratégie Iroise, telle que décrite ci-dessus, EDF a fourni aux fournisseurs alternatifs certaines informations sur ses clients aux TRV Jaune et Vert.

Les raisons ayant conduit EDF à fournir un fichier de ses clients aux TRV Jaune et Vert à ses concurrents

254. Courant 2014, alors qu’EDF était en train d’élaborer sa stratégie Iroise, les débats concernant l’accès des opérateurs concurrents à sa base de données portant sur les clients au TRV se sont faits plus pressants259.

255. Dans le cadre de l’instruction, EDF a affirmé qu’elle « a(vait) décidé de manière spontanée de mettre en place une démarche d’ouverture de son fichier clients, dans un souci de placer ses concurrents dans une situation équivalente à la sienne, et ce alors même qu’aucune obligation réglementaire ni aucune procédure ne l’y obligeait »260.

256. Cette démarche avait pour objectif de conserver le contrôle sur le calendrier et l’étendue des données fournies et également de donner à EDF la possibilité d’exploiter son fichier client sans restrictions d’ordre juridique.

257. Ainsi, dans un courriel de janvier 2015, le pôle concurrence du service juridique d’EDF indiquait au secrétaire général la stratégie choisie par la Direction Commerce : « DCO [Direction Commerce] propose de confirmer l’ouverture affichée en 2014 pour les clients concernés par la fin des TRV jaunes et verts à fin décembre 2015 , en donnant accès aux fournisseurs alternatifs les données de consommation listées par DE [Direct Energie] ci- dessus d’ici mi-mars 2014 (…) Cette approche permet tout à la fois (i) de donner à EDF une marge de manœuvre pour le déploiement de ses propres offres de marché pour les clients concernés par la fin des TRV (à défaut en effet, EDF ne pourrait pas utiliser ou que partiellement les données de son fichier pour déployer son offre de marché, ou le ferait en s’exposant à un risque fort de contentieux) ; (ii) de réduire le risque de mesures conservatoires visées par DE et (iii) de garder une certaine maîtrise des modalités d’accès aux données du fichier qui, si elles étaient imposées par l’ADLC (dans un avis en réponse à la demande de la CRE ou dans le cadre d’une saisine contentieuse, suite à une plainte de tiers ou à une auto-saisine), pourraient être plus contraignantes pour EDF »261.

Historique de l’accès aux données des clients aux TRV Jaune et Vert accordé par EDF

258. Le calendrier et le périmètre de la fourniture des fichiers peuvent être résumés comme suit :

- à partir du 28 novembre 2014, EDF a transmis aux fournisseurs alternatifs d’électricité qui en faisaient la demande les données de contact de ses clients concernés par la fin des TRV : nom de l’établissement titulaire du contrat, référence du point de livraison et coordonnées connues des interlocuteurs clients ;

- à partir de mars 2015, EDF a aussi mis à disposition des fournisseurs qui en faisaient la demande les principales données de consommation des clients : tarif, option, puissance souscrite, consommation ;

- à partir du 30 juin 2015, les données de courbes de charge fournies par les opérateurs de réseau ERDF et RTE des clients télé-relevés concernés par la fin des TRV ont également été mises à disposition ;

- à partir du 25 juillet 2015, EDF a fourni les données de contact et de consommation des clients EJP262 concernés par la fin des TRV aux opérateurs d’effacement qui en faisaient la demande263.

 

L’origine du fichier fourni

259. Dans sa réponse à un questionnaire de l’Autorité, EDF a indiqué que « [l]es données de contact et de consommation transmises aux fournisseurs alternatifs en ayant fait la demande ont été extraites d’un entrepôt de données contenant l’ensemble des données issues de l’application CRM et du système de facturation, ainsi que des données provenant d’achat de fichiers externes, ou encore de données provenant d’Enedis. L’extraction des données de contact et de consommation a été faite en présence d’un huissier et est décrite dans deux procès-verbaux de constat d’huissier joints en annexe. »264.

260. Toutefois, EDF n’ayant pas indiqué, dans sa réponse, le nom de l’entrepôt de données, le nom du serveur indiqué dans les documents fournis par l’entreprise ne permet pas de comprendre l’origine des données265.

Les données contenues dans le fichier fourni

¨ La position d’EDF

261. En réponse à un questionnaire des services d’instruction, EDF a affirmé que « le périmètre des informations à fournir aux fournisseurs alternatifs a été défini en identifiant les informations utiles à EDF pour (i) identifier et contacter les clients concernés par la fin des TRV vert et jaune, et (ii) proposer à ces clients une offre commerciale adaptée, afin de permettre une totale réplicabilité du processus par ses concurrents »266.

262. Toutefois, les échanges en interne sur ce sujet contredisent cette affirmation, comme en témoigne un courriel du directeur Marketing B2B du 22 avril 2014267 :

« En complément de message de [S..], il y a deux natures d'infos susceptibles d'intéresser nos concurrents et que nous devons donc chercher à préserver :

> Les données qui permettent d'accéder à un interlocuteur privilégié au sein d'une entreprise : nom / fonction / coordonnées ...

> Les données qui permettent de cibler les clients à plus forte valeur : nature de l'offre au TRV actuellement souscrite, qualité payeur, historique de conso ...

En revanche, les données relatives au nom de l'entreprise / l'adresse du PDL n'ont pas une grande valeur car toutes les entreprises (et il suffit pour ce faire de prendre les pages blanches de l'annuaire) consomment de l'électricité. » (soulignement ajouté).

263. Le courriel continue en esquissant les arguments qui peuvent être utilisés pour refuser de partager les informations relatives à un interlocuteur privilégié : la possibilité d’accéder à ces informations par d’autres canaux (annuaires professionnels, réseaux sociaux), ou encore la nécessité de recueillir le consentement des interlocuteurs avant que les données les concernant soient transmises.

264. Enfin, l’objectif d’EDF était également d’empêcher ses concurrents d’utiliser les données fournies pour mettre en place des actions commerciales de masse. Une présentation du 3 juin 2014 relative à la demande d’accès aux données historiques fait apparaître que « [s]’il est décidé de livrer un fichier, le “meilleur” moment opérationnel pour le projet IROISE est de le fournir fin 2014 / début 2015, de le fournir une seule fois, et de limiter les items permettant des programmes relationnels industriels (partie basse du portefeuille)268.

265. Il ressort de ces documents que, contrairement à sa bonne volonté affichée, EDF entendait conserver, pour son usage exclusif, les données les plus précises et les plus pertinentes sur ses clients concernés par la fin des TRV au 31 décembre 2015.

¨ La position des concurrents ayant reçu le fichier

266. La base de données fournie par EDF ne constituait pas, d’après la CRE, pour la plupart des opérateurs concurrents, un outil exploitable pour la détection et le démarchage de clients concernés par la fin des TRV Jaune et Vert. Parmi les nombreuses critiques formulées par les concurrents, l’absence de l’interlocuteur principal, de l’interlocuteur de facturation, des SIREN et des SIRET, et des sites embarqués au tarif Bleu sont les plus souvent citées.

- Sur l’identification de l’interlocuteur principal

267. Il ressort des déclarations des fournisseurs alternatifs que la base de données recensait une série d’interlocuteurs, tant l’interlocuteur principal, gestionnaire du contrat, que l’interlocuteur technique, sans établir de hiérarchie précise sur l’interlocuteur à contacter de manière privilégiée.

268. Dans le cadre de sa réponse au questionnaire du 17 septembre 2018, un concurrent a indiqué, concernant ceux-ci, que « [l]es listes de correspondants à contacter, indispensables pour la prospection, n’étaient pas exploitables (pas de clair rattachement des correspondants locaux à chaque site et rattachement de nombreux noms de l’entité à un site). Ainsi, on pouvait trouver pour un site : 250 interlocuteurs commerciaux distincts dont les coordonnées semblaient en majeure partie erronées (exemple : indicatif téléphonique incohérent avec les coordonnées postales) »269.

269. De même, Engie a indiqué, dans une présentation transmise aux services d’instruction, que le fichier fourni par EDF comportait 18 millions d’interlocuteurs. En outre, de nombreux interlocuteurs étaient situés dans des villes différentes de celles du site concerné ou détenaient des adresses courriel sans lien avec les sites. De plus, certains interlocuteurs étaient identiques pour un nombre de PDL distincts270.

270. Un échange interne à EDF concernant le fichier « Post OT » confirme que, dans les fichiers initialement fournis, l’ordre des interlocuteurs sur la liste ne correspondait à aucune réalité, et que ce n’est qu’au 1er janvier 2016 qu’EDF a commencé à indiquer à ses concurrents à quel interlocuteur elle avait adressé une offre transitoire en juillet 2015271.

- Sur l’interlocuteur de facturation

271. Comme indiqué par EDF en audition, pour l’année 2015, l’outil FELIX de facturation faisait apparaître un « interlocuteur payeur » c’est-à-dire la personne recevant les factures 272. Or, cette information n’a été fournie aux opérateurs concurrents qu’à partir de la période de transition et non avant (voir ci-dessous).

- Sur les numéros de SIREN et SIRET

272. Plusieurs opérateurs concurrents ont également relevé l’absence de numéros SIREN et SIRET des clients listés273. Or, en l’absence de telles données, le fichier fourni par EDF ne permettait pas d’identifier les clients multi-sites, dans la mesure où il n’était organisé qu’en fonction des points de livraison, et non pas par contrat ou par client274.

273. Dans le cadre de sa réponse à un questionnaire des services d’instruction, Direct Energie a indiqué avoir abandonné l’utilisation de la base de données d’EDF pour ces raisons275. De même, Vattenfall a indiqué qu’il était impossible de réaliser un bon ciblage commercial sans SIRET, notamment en ce qui concerne les clients multi-sites276.

274. L’instruction a également permis de mettre en évidence que les employés d’EDF qui avaient exporté les fichiers de données fournis aux concurrents devant huissier avaient la possibilité d’enrichir automatiquement ces fichiers avec les SIRET contenus soit dans CLOE, soit dans PROFIL277.

- Sur l’absence des sites au tarif Bleu

275. Dans sa saisine, Engie indique qu’EDF a refusé d’étendre le périmètre des données fournies aux clients petits professionnels au tarif Bleu278.

276. Dans sa communication vis-à-vis des opérateurs concurrents, EDF explique son refus de communiquer les données des clients au tarif Bleu par le fait que ceux-ci n’étaient pas concernés par la fin programmée des TRV279.

277. Toutefois, il convient de relever que, comme indiqué précédemment (paragraphe 190), EDF incluait dans sa stratégie Iroise les sites au tarif Bleu dits « embarqués », c’est-à-dire ceux appartenant à des clients concernés par la fin des tarifs Jaune et Vert pour d’autres sites, et qui pourraient souhaiter une négociation globale sur l’ensemble de leur parc de consommation.

 

¨ L’analyse de la structure des fichiers transmis

278. L’analyse des documents et fichiers établis par EDF, et notamment de la structure du fichier fourni, confirme les déclarations mentionnées ci-dessus.

279. Au sein de la notice transmise par EDF à l’ensemble des concurrents ayant signé la charte d’utilisation des données, se trouve un document intitulé « structure et contenu du fichier »280, qui reprend un descriptif des variables attachées à chaque RAE (Référence Acheminement Electricité) :

« Num interloc : Cette variable permet de dénombrer les interlocuteurs pour chaque RAE.

RAISON_SOCIALE : La raison sociale de l'entreprise issue de l’INSEE (si elle est renseignée dans notre base). Dans le cas contraire nous avons indiqué le nom en notre possession.

Civilité : La civilité de l’interlocuteur. NOM : Le nom de l’interlocuteur.

PRENOM : Le prénom de l’interlocuteur (si renseigné dans notre base).

TEL FIXE : Le téléphone fixe de l’interlocuteur (si renseigné dans notre base). E MAIL : L’email de l’interlocuteur (si renseigné dans notre base).

numeroNomVoie : L’adresse de l’interlocuteur : son numéro et nom de voirie sous forme normalisée (si renseigné dans notre base).

codePostal : Le code postal de l’interlocuteur (si renseigné dans notre base). Commune : Le nom de la commune (si renseigné dans notre base). »281

280. Ainsi, le fichier fourni par EDF ne contenait ni le SIREN, ni le SIRET attaché à chaque point de livraison. Il ne contenait en outre aucune catégorisation permettant de hiérarchiser les interlocuteurs attachés à chacun de ces points. Ces manques n’ont pas été corrigés par le fichier de données de consommation fourni aux concurrents à partir de mars 2015282.

Sur le caractère essentiel de certaines données

281. Pour EDF, l’identité de la personne de contact ainsi que le numéro RCS (correspondant au numéro SIREN) constituaient des informations essentielles pour contacter le client283. Ainsi, un document de questions/réponses du mois de mars 2015 indiquait284 : « Dans le cadre du projet Iroise, il est essentiel de connaître le signataire du contrat afin de transmettre à la personne responsable le programme relationnel et l'offre commerciale.

Depuis décembre 2013, l'interlocuteur décisionnaire ou ayant le pouvoir de signature, est qualifié dans le champs (sic) “domaine” de Cloé (par les valeurs Signataire contrat ou Signataire délégué contrat). A compter de la V17, l'interlocuteur principal contrat Cloé présent sur le Compte Commercial sera repris par défaut pour toute création de devis. »

282. De même, un document de juin 2016 indique que les données essentielles pour identifier le client étaient le SIREN/SIRET, la raison sociale et, dans le cas des collectivités, leurs différents types et sous-types. S’agissant de l’interlocuteur principal, son identification supposait de connaître « ses Nom et Prénom - Sa Fonction, Son Domaine “Signataire” ou “Technique”, Son Numéro de tél Fixe et Portable, Son Email Son habilitation au site internet »285.

283. Enfin, il convient de relever que, comme indiqué précédemment, pendant la période précédant la fin programmée des TRV Jaune et Vert, EDF a envoyé plusieurs courriers à ses clients, dont certains à caractère commercial, leur proposant des offres de marché. Or, à aucun moment EDF n’a fourni les coordonnées des interlocuteurs utilisées pour ces courriers.

La fourniture d’un fichier toujours difficilement utilisable pour la période de transition

284. Comme indiqué par EDF dans une réponse à un questionnaire des services d’instruction286,

« lors de la transmission des données des clients en offre transitoire, le fichier des données de contact a été enrichi par des balises mettant en évidence l’interlocuteur, l’adresse à laquelle ont été envoyées les conditions générales de vente (CGV) et les conditions particulières de vente (CPV) de l’offre transitoire, ainsi que l’adresse de facturation. »

285. Toutefois, EDF n’explique pas comment cet interlocuteur a été choisi pour chacun des clients concernés.

286. Surtout, il apparaît que le fichier client fourni était incomplet ou difficilement utilisable par les opérateurs ayant remporté certains lots de l’appel d’offres organisé par la CRE287.

287. Des échanges internes à EDF confirment que, même à cette époque, le fichier transmis aux concurrents contenait, pour chaque site, un très grand nombre d’interlocuteurs (jusqu’à 1209) et que les équipes de l’entreprise elles-mêmes s’interrogeaient sur le moyen de déterminer lequel de ces interlocuteurs était le bon288.

b) La poursuite de la stratégie commerciale d’EDF pendant Iroise

288. Si la stratégie Iroise se concentrait essentiellement sur l’objectif de maintien des parts de marché pour la fourniture d’électricité aux clients concernés par la fin des tarifs Jaune et Vert, cette période a également vu la continuation des comportements décrits précédemment, consistant à fidéliser et enrichir les contrats au TRV par d’autres prestations tels que la fourniture de gaz, la production de CEE ou d’autres services énergétiques. Il est même rapidement apparu que cette diversification constituait un atout majeur pour le succès d’Iroise et participait à la préservation des parts de marché sur le cœur de métier d’EDF Commerce.

L’intégration d’Iroise dans la stratégie globale des DCR

289. La stratégie Iroise a été appliquée par les DCR en s’intégrant aux processus déjà mis en place depuis plusieurs années dans le cadre de la régionalisation des portefeuilles.

290. Dans son plan de performance opérationnelle pour 2014-2016, la DCR Ouest indiquait, s’agissant de la question de la satisfaction client : « Nous allons - comme pour l’orientation précédente - avoir une démarche commerciale ciblée sur nos clients à valeur et les clients les plus attaquables. L’objectif est de s’assurer de la satisfaction de nos clients par un suivi contractuel et un accompagnement énergétique de qualité et reconnus »289.

291. Le plan de performance opérationnelle pour 2014-2016 de la DCR Rhône-Alpes Auvergne indiquait290 : « Dans le même état d'esprit, la Relation Clients doit progressivement s'affirmer comme “la poursuite du commerce par d'autres moyens” ce qui nécessite de développer des compétences de vente de contrats de fourniture en énergie (cas simples) et de rebond systématique en matière de services énergétiques ».

292. Ainsi, « [l]a vente de services énergétiques aux clients à valeur sera développée et pilotée de manière volontariste sur les hauts de portefeuille du marché “Entreprises” et les Collectivités territoriales en privilégiant la commercialisation de services fidélisants et la recherche de revenus récurrents. Dans ce cadre, l'apport aux filiales et l'appui aux projets de développement territoriaux seront développés en améliorant la coordination stratégique et opérationnelle des acteurs services en région et en développant au sein de la DCR des compétences de criblage, de suivi d'affaires et d'animation technique. »291.

293. Plus loin, il était précisé : « La vente de services énergétiques pour sécuriser la valeur énergie du portefeuille des clients de la DCR sera résolument développée. Cela passera notamment par un développement des compétences de détection, criblage et suivi d'affaire pour un pilotage plus serré du transfert d'affaires aux filiales du groupe »292.

294. Dès 2013, la DCR Méditerranée prévoyait de continuer à demander à sa relation client de développer les ventes au rebond pour les services énergétiques293. De même, des questions relatives aux projets de rénovation devaient être systématiquement posées294. Dans son plan de performance opérationnelle pour 2015-2018, la même DCR prévoyait notamment  de « [d]évelopper une relation commerciale dans la durée en proposant des offres de services intégrés avec conseils, prestations filiales, CEE et suivi des courbes de charges »295. De manière générale, le contact avec les clients appelant EDF pour leurs besoins en électricité devait être utilisé au maximum : « RC : Renforcer le rebond sur appel entrant pour développer la création de valeur, en particulier sur les services énergétiques, mettre en place le BO Différencié sur la RC PME-PRO (efficience du traitement BO), se préparer à mettre en place un traitement différencié de la RC CT en fonction des attentes clients suite aux AO »296.

295. S’agissant de la production de CEE, une grande partie des actions réalisées par les DCR continuait de dépendre des détections effectuées directement chez les clients (35 % des CEE produits pour le segment Entreprises et 69 % pour le segment Collectivités)297. Pour la production de CEE, l’outil OCP devait également être utilisé (voir ci-dessus, paragraphes 100 et suivants)298.

L’intégration des filiales de services dans l’approche globale d’EDF

296. Pour EDF, « le moment IROISE » correspondait également à une forte montée en puissance de ses capacités de production en termes de services énergétiques à forte valeur, en raison notamment de l’acquisition de Dalkia en 2014.

297. Or, les synergies entre EDF Commerce et les filiales dites « de spécialité » étaient fortement dépendantes d’actions dites de « qualification » ou de « criblage » des prospects. C’est grâce à ces actions que pouvait être déterminée la pertinence de proposer des offres communes et d’engager des actions commerciales poussées. Ces actions constituaient un avantage stratégique pour permettre à Dalkia de conclure des marchés, mais également du point de vue d’EDF, qui pouvait ainsi conserver le client pour la fourniture d’électricité et limiter les mises en concurrence et le recours aux groupements d’achats.

298. À cet égard, comme indiqué dans un document interne d’EDF, la mise en place des méthodes de détection et de criblage en faveur de Dalkia a démarré avec la fourniture aux DCR d’une grille de criblage en novembre 2014299. Il ressort également d’une enquête réalisée par EDF auprès de ses différentes DCR que, au mois d’avril 2015, la transmission d’affaires détectées par les conseillers dans le cadre de leurs contacts avec les clients était devenue une pratique habituelle300.

299. L’un des principaux outils utilisés était OCP301. Cet outil, qui utilise des données externes croisées avec les données des clients d’EDF, permettait d’identifier les cibles les plus pertinentes pour l’action commerciale. Comme indiqué dans les pièces internes d’EDF, OCP constituait la première étape de l’organisation de la politique commerciale commune entre EDF et Dalkia. Les outils de criblage étaient également utilisés par les DCR pour identifier les opportunités en termes de CEE sur les marchés d’affaires302.

300. Cette stratégie a permis à EDF de prévoir, et d’obtenir, un important apport d’affaires à ses filiales. En octobre 2013, EDF prévoyait une forte croissance du chiffre d’affaires d’EDF Optimal Solutions, alors que « cette forte croissance repose essentiellement sur une hypothèse de forte augmentation des apports d’affaires EDF en région, dynamises grâce au Pôle Services »303. De même, en 2015, EDF prévoyait de développer les « actions locales de criblage » avec Dalkia et Citelum304. En avril 2015, EDF indiquait en interne que le volume d’affaires détectées par EDF Commerce pour Dalkia au 1er trimestre était de [30-50] millions d’euros305.

301. Ainsi, en même temps que la stratégie Iroise était déroulée, les filiales de services étaient intégrées dans les objectifs des DCR et devenaient partie intégrante de l’atteinte des objectifs du groupe. Les filiales bénéficiaient ainsi de la détection d’opportunités à partir du fichier de clientèle des DCR, et pouvaient également être intégrées dans des offres globales intégrant fourniture d’énergie et services. En échange, ces filiales constituaient une source supplémentaire de production de CEE.

La mise en œuvre des orientations par les DCR sur le marché du gaz

302. En 2013, la DCR Méditerranée prévoyait de continuer à demander à sa relation client de développer les ventes au rebond pour le gaz306. Puis, dans son plan de performance opérationnelle pour 2015-2018, il était prévu d’« [i]mpulser une nouvelle dynamique de prospection gaz », d’« [a]ssurer un suivi des clients gaz à valeur et développer des programmes relationnels adaptés » et enfin d’« [o]ptimiser le rebond commercial sur la mise en service et la relation clientèle »307.

303. Pour la DCR Rhône-Alpes Auvergne, il était prévu dans son plan de performance opérationnelle : « L'exploitation systématique par les équipes de RC des opportunités de rebond lors des mises en services électricité pour les clients consommant moins de 300 MWh de gaz/an »308. À cet égard : « En 2014, l'accent sera mis sur le développement systématique de la vente par rebond en profitant des opportunités de la mise en service de nouveaux contrats de fourniture d'électricité »309.

304. Dans un autre document, du 15 septembre 2014, la DCR Rhône-Alpes Auvergne insistait, s’agissant du gaz, sur « l'exploitation systématique par toutes les équipes de RC des mises en service en électricité pour placer du gaz » et « la reprise du rebond en relation courante »310.

305. La DCR Ouest prévoyait également en 2014 le maintien et le renforcement de la vente de gaz sur mises en service et au rebond311.

306. Enfin, la DCR Sud-Ouest indiquait en janvier 2015 avoir un fort taux de placement du gaz sur les mises en service électricité312.

4. 2016-2020 : LE RECENTRAGE DE LA STRATEGIE D’EDF SUR LE TARIF BLEU

307. EDF a poursuivi après 2016 la politique commerciale mise en œuvre les années précédentes (a.), tout en mettant en place des actions spécifiques à destination des « Bleus Pros » (b.). Sur cette période, EDF a également continué à développer ses OM gaz lors des mises en service de contrats d’électricité en TRV (c.) et de promouvoir ses offres de travaux et de services énergétiques auprès de clients résidentiels (d.)

a) La continuation de la politique commerciale d’EDF

308. Après la fin des TRV Jaune et Vert, EDF a maintenu les grands principes de la politique commerciale suivie jusqu’alors, comme cela est illustré par sa stratégie concernant le marché d’affaires.

309. En octobre 2016, EDF a défini un plan de conquête du marché d’affaires d’EDF à l’horizon 2020. Ce plan part du constat que « [l]e marché de l'énergie est aujourd'hui à un tournant historique marqué par trois tendances de fond [...] Accélération de la digitalisation du marché de l’énergie – Développement de la transition énergétique – Augmentation de la pression concurrentielle »313.

310. EDF y décrit le développement d’une concurrence multiforme, avec l’arrivée sur le marché de nouveaux énergéticiens, mais également de concurrents arrivés par l’angle des services énergétiques, et le développement de l’intermédiation (groupements d’achat, etc.)314.

311. S’agissant des actions envisagées, il était prévu de proposer de nouvelles offres et notamment des offres ciblées gaz et bi-énergie315. Il était également prévu de déployer une

« GRC [Gestion de relation de clientèle] 2020 » et de mettre en œuvre une « I.E. : qualification des prospects » et un « pilotage par la valeur »316.

312. Ainsi, il apparaît qu’après la fin des TRV Jaune et Vert, EDF a essentiellement cherché à renforcer les méthodes déjà utilisées depuis l’ouverture à la concurrence.

313. Ce plan de conquête des marchés d’affaires a été présenté dans le cadre d’un séminaire

« Magellan » organisé pour les équipes des DCR317.

314. Cette présentation a été l’occasion pour EDF de réaffirmer l’importance de « Qualifier les prospects et clients dans nos bases de données » l’objectif étant par ailleurs l’« [o]btention d'un CRM qualifié permettant d'améliorer la connaissance client et de mener l'ensemble des actions commerciales de fidélisation, de développement des ventes et de reconquêtes ». À cet égard, les indicateurs clés de réussite étaient les suivants : « Coût d'enrichissement de la donnée - % de SIRET qualifié - % des comptes CLOE avec un interlocuteur principal commercial et 1 un interlocuteur principal technique - % de comptes CLOE PDS desservis élec et/ou gaz rattachés à un compte CLOE TDG/IDG »318.

315. Pour l’ensemble de ces démarches, la stratégie développée lors du séminaire Magellan ne distinguait pas entre, d’une part, les clients en OM et, d’autre part, les clients restés au TRV Bleu. En particulier, les documents internes visaient explicitement le segment des PME/PRO/Collectivités, c’est-à-dire des clients majoritairement restés au TRV Bleu319.

316. Le terme « Magellan » a été ensuite utilisé pour refléter la stratégie pour les marchés d’affaires d’EDF320. En particulier, EDF comptait développer des « ambitions commerciales segmentées et multi-canal » incluant une « stratégie commercial [sic] par segment de clients » et renforcer la connaissance des clients incluant une « qualification des prospects et clients dans les bases de données »321.

b) Les actions spécifiques concernant les « Bleus Pros »

317. À partir du milieu de l’année 2016, il est apparu que la stratégie mise en œuvre par EDF pour préserver ses parts de marché pour la clientèle bénéficiant des tarifs Jaune et Vert avait connu un grand succès et qu’elle avait permis au groupe de convertir la position détenue grâce aux TRV en une présence aussi forte pour les offres de marché.

318. Toutefois, le tarif Bleu constituait un enjeu au moins aussi important pour EDF, en raison notamment de l’importance des clients multi-sites à ce tarif322, et de la taille du segment des clients professionnels et résidentiels.

319. En septembre 2017, EDF notait que ces clients étaient fortement ciblés par la concurrence et représentaient un risque d’érosion pour son portefeuille. Ainsi, le constat était le suivant :

« Sans action massive et rapide de notre part, risque d'accélération de l'érosion du fait d'une intensité concurrentielle croissante et ciblée. »323.

320. Pour ces raisons, EDF a continué d’appliquer pour ces catégories de clients les principes fondamentaux de la politique commerciale menée jusqu’alors, afin de conserver sa position centrale dans le secteur de l’énergie.

321. Pour cela, EDF a opéré une distinction entre deux types de clients au tarif Bleu pour les marchés d’affaires324 :

- les sites « C5 » gérés par des clients fortement multi-sites, qui étaient progressivement intégrés dans des appels d’offres et pour lesquels EDF était confrontée à une forte agressivité tarifaire ;

- les mono-sites C5 (ou « PEC privé »), pour lesquels la concurrence tarifaire était moins forte.

Les travaux de qualification spécifiques concernant les clients C5

322. En mars 2016, EDF a mis en place un « plan de qualification des données des clients marchés d’affaires 2016 »325 qui concernait tout particulièrement ce type précis de clientèle. Les enjeux étaient les mêmes que ceux identifiés depuis 2004, à savoir : « Cibler les clients pour des ventes additionnelles et ou déterminer la part de prospects. Identifier clairement les clients, quel est son profil pour l’étendre à d’autres profil similaires. Choisir quelle marque on veut utiliser pour notre prospection et quelle démarche commerciale utiliser. Identifier clairement les interlocuteurs pour établir une relation commerciale puis contractuelle. Maitriser nos couts de qualification indispensable à la contractualisation et à la relation courante »326.

323. Comme auparavant dans le cadre de la stratégie Iroise, les informations essentielles étaient :

« Le SIRET, l’interlocuteur, la fonction, l’adresse, le téléphone portable, l’email (secteur d’activité N2 pour les collectivités) »327.

324. Pour mener à bien ces actions, EDF rappelait la nécessité de « périmétrer » particulièrement les sites C5, et de préparer la reconquête en « qualifiant » les clients partis à la concurrence328.

La fourniture de services énergétiques aux clients C5 Professionnels et Collectivités

325. S’agissant plus particulièrement de la fourniture de services énergétiques, EDF entendait au mois de juillet 2018 développer de nouvelles offres et vendre ces services aux clients C5 de la catégorie « PEC privé », qui correspondent au bas de portefeuille329.

326. Pour le haut de portefeuille, qui inclut les clients C5 fortement multi-sites330, EDF entendait poursuivre la croissance des apports d’affaires à ses filiales, dont Dalkia331.

Le projet OCéAN

327. Dès l’année 2016, EDF a conçu un projet intitulé « OCéAN », dont l’objectif était de définir et proposer une OM pour les clients C5 Professionnels. Comme indiqué dans les documents internes d’EDF, « [l]es ambitions du projet OCéAN sur le segment C5 Professionnels, sont d’anticiper les menaces sur nos PDM et sur nos marges. Pour cela le Codir Commerce a validé la création d’une offre de marché compétitive sur ce segment, dans le but d’une expérimentation »332.

328. OCéAN constituait ainsi une expérimentation permettant à EDF d’identifier les pistes pour commercialiser des OM à ses clients au TRV Bleu333.

329. Cette expérimentation a commencé en juillet 2016 et s’est terminée en mai 2017334.

330. Or, il ressort des documents internes d’EDF que cette expérimentation impliquait notamment de vendre des offres « [e]n appel entrant pour une MES (mise en service) quel que soit le numéro de téléphone utilisé par le client »335.

c) La permanence des comportements s’agissant des offres de marché gaz proposées lors des mises en service de contrats d’électricité au TRV

331. EDF a continué à profiter des mises en service de contrats de fourniture d’électricité au TRV Bleu pour systématiquement proposer aux clients des OM de gaz.

332. Pour les clients non résidentiels, lorsqu’un client appelait le numéro dédié aux offres au TRV électricité pour une mise en service, le conseiller proposait à l’appelant des OM gaz, sauf si le client exprimait le souhait d’avoir le gaz au TRV336.

333. Le mécanisme était exactement le même pour les clients résidentiels, ainsi qu’il ressort des consignes commerciales données par EDF lors d’une mise en service réalisée au 09 69 32 15 15338.

d) La promotion des offres de travaux et de services énergétiques auprès des clients résidentiels

La permanence des comportements de détection s’agissant des offres de travaux et services énergétiques

334. EDF a profité du déploiement des compteurs intelligents Linky pour permettre aux conseillers de clientèle dédiés aux clients Particuliers de continuer à promouvoir des offres de travaux et services liés aux économies d’énergie339.

335. EDF a également profité de la souscription de contrats d’électricité (au TRV ou en OM) pour promouvoir auprès des clients résidentiels des offres de services énergétiques, à savoir les services d’entretien d’équipement de chauffage, ou d’installation d’un tel équipement, réalisés par sa filiale CHAM.

336. Plus précisément, lorsqu’un client souscrivait par téléphone à un contrat de fourniture d’électricité, au TRV ou en OM, il recevait par la suite un SMS dans lequel il lui était proposé de cliquer sur un lien renvoyant à une page du site Internet d’EDF Particuliers consacrée à l’assistant déménagement « Check », qui mettait notamment en avant les offres de CHAM. Cette mise en avant s’accompagnait d’une réduction tarifaire sur les services de CHAM340 dont pouvait bénéficier le client qui venait de souscrire une offre d’électricité, au TRV ou en OM341. La même démarche a été également mise en œuvre via l’envoi d’un mail342.

337. Le même parcours était accessible sur le tableau de bord de l’espace client de ses clients ayant un contrat de fourniture d’électricité343, y compris ceux ayant un contrat d’électricité au Tarif Bleu344.

La mise en avant du seul numéro 3004 (dédié aux OM) et le renvoi vers la page promouvant les OM électricité

338. Dans le cadre de l’instruction, EDF a indiqué avoir pris plusieurs mesures afin d’opérer une séparation entre son activité en monopole de fourniture au TRV et son activité concurrentielle de fourniture en OM. En particulier, EDF a mis en place des canaux téléphoniques distincts et dédiés respectivement à la commercialisation du TRV et des OM (voir paragraphes 86 et suivants).

339. S’agissant de son site Internet, EDF a adopté une présentation séparée des OM et des offres au TRV Bleu avec la mise en place de parcours clients différents et de pages Internet distinctes. Dans ce cadre, les captures d’écran du site Internet d’EDF dédié aux particuliers démontrent qu’EDF utilise un vocabulaire et une présentation visuelle permettant a priori une distinction entre ses OM et son offre au Tarif Bleu345.

340. Toutefois, l’instruction a permis de mettre en évidence que ces mesures et principes d’étanchéité n’étaient pas systématiquement respectés par EDF.

Lors du parcours de souscription en ligne au TRV

341. Premièrement, lorsqu’un internaute entame un parcours de souscription au tarif Bleu, il finit par être renvoyé vers un parcours de souscription générale, sur lequel s’affichaient le 3004 et d’autres numéros aléatoires renvoyant tous à des conseillers OM346.

342. Ainsi, un client prospect qui appelle ce numéro se verra proposer des OM, en lieu et place d’une offre au TRV initialement recherchée.

343. Ces constats révèlent l’existence de failles dans l’étanchéité des différents canaux de souscription mis en place par EDF, dédiés respectivement au TRV et aux OM. La présence du 3004 et d’autres numéros aléatoires renvoyant au 3004 sur le parcours de souscription d’un prospect souhaitant souscrire au TRV était susceptible d’entraîner une confusion entre les activités de service public et les activités concurrentielles d’EDF.

Lors de l’utilisation de l’assistant virtuel présent sur la page d’accueil du site Internet d’EDF

344. Lorsqu’un internaute a recours à l’assistant virtuel d’EDF, les seules offres proposées par défaut sont les OM d’EDF, sans présentation distincte de l’offre au TRV Bleu parmi les offres d’électricité commercialisées par EDF347. De même, le numéro d’appel communiqué pour entrer en contact avec un conseiller est uniquement le 3004348.

345. Lorsque l’internaute indique expressément vouloir souscrire à une offre au TRV Bleu, il lui est proposé d’accéder à des renseignements sur le tarif Bleu, mais également à des informations relatives aux OM d’électricité ou de gaz, voire même de contacter le 3004349.

L’affichage du seul 3004 sur les pages consacrées au déménagement

346. Sur la page dédiée aux particuliers du site Internet d’EDF (https://particulier.edf.fr), le lien

« Je déménage » renvoie à une page dédiée au déménagement. Sur celle-ci, seul le numéro 3004 s’affiche350.

347. De plus, lorsqu’un internaute effectue la recherche « EDF déménagement » dans un moteur de recherche et qu’il clique sur le résultat d’annonce, il est alors renvoyé vers une page sur laquelle s’affiche soit le 3004 ou bien un numéro aléatoire de type 09 77 XX XX XX renvoyant également à des conseillers OM351.

348. Enfin, lorsqu’un internaute effectuant la même recherche clique cette fois-ci sur le résultat hors annonce « Démarches déménagement : quand ouvrir votre contrat EDF », il est renvoyé vers une page affichant le 3004 comme numéro d’appel ainsi qu’un lien pour consulter les offres d’électricité d’EDF qui renvoie à la page de présentation des OM d’EDF. De plus, lorsqu’un internaute clique sur le lien « souscrire votre nouveau contrat d’électricité et/ou de gaz », il est renvoyé cette fois-ci sur la page dédiée au déménagement mentionnée au paragraphe 357 et sur laquelle n’est affiché que le 3004352. De la même manière, lorsque l’internaute clique sur le lien « Contacter un conseiller EDF », il est là encore renvoyé vers une page ne proposant que le 3004 comme numéro d’appel353.

Le recours à des algorithmes de prédiction pour limiter le départ des clients résidentiels

349. Le saisissant a fourni un certain nombre d’éléments indiquant qu’EDF a eu recours à un prestataire utilisant des techniques de modélisation et d’apprentissage automatique354 pour détecter et limiter le phénomène d’attrition355 de ses clients résidentiels356. Toutefois, une présentation de ce prestataire explique que les équipes d’EDF Commerce avaient déjà mis en place un système prédictif reposant sur « un ensemble de données clientèles, qu'elles soient statiques ou non : âge, sexe, type de logement, ancienneté, nombre de contacts avec EDF, type d'offre, problèmes de paiement ». Cet algorithme permettait de prédire si au cours des prochains mois un client allait partir chez un concurrent357. Le même prestataire liste l’ensemble des données nécessaires à la réalisation de tels modèles prédictifs :

- historique des départs à la concurrence sur les trois dernières années ;

- date d’entrée des clients ;

- segmentation de la clientèle ;

- contrats et produits détenus pour chaque client ;

- nombre et types de contacts entrants ;

- signes de mécontentements ;

- clients ayant quitté la société mais revenus depuis358.

350. Cette liste montre qu’une telle modélisation prédictive suppose de disposer d’un ensemble très riche de données sur le comportement des consommateurs, qui n’étaient disponibles qu’au travers des applications de relation courante d’EDF.

E. RAPPEL DU GRIEF NOTIFIE

351. Au vu des éléments exposés dans la notification de griefs du 25 mai 2021, les services d’instruction ont notifié le grief suivant :

« Il est fait grief à :

- la société Electricité de France ;

- la société Dalkia Smart Building ;

- la société Dalkia ;

- la société Citelum ;

- la société Cham ;

d’avoir abusé de la position dominante détenue sur les marchés de la fourniture d’électricité aux clients entreprises, professionnels, collectivités et résidentiels en France, en établissant et en appliquant une stratégie visant à s’appuyer sur son statut d’opérateur de service public au titre de la fourniture d’électricité au tarif règlementé de vente, afin de conserver et conforter sa position concurrentielle en matière de fourniture d’électricité et de se développer sur un ensemble de marchés connexes du secteur de l’énergie, et en particulier sur les marchés de la fourniture de gaz, des services énergétiques et de l’acquisition de certificats d’économie d’énergie.

Cette stratégie consistait à faire usage de l’ensemble de l’infrastructure commerciale développée au travers de la fourniture en électricité des clients demeurés aux tarifs réglementés de vente pour se développer sur un ensemble de marchés concurrentiels du secteur de l’énergie.

Ces pratiques ont eu pour conséquence de limiter fortement l’exercice de la concurrence et de faire obstacle à l’émergence de services innovants dans l’ensemble du secteur de l’énergie en France.

Cet ensemble de comportements, ayant débuté au mois de mars 2004 et ayant pris fin à tout le moins à la date de la présente notification de griefs, constitue une pratique prohibée par les articles 102 TFUE et L. 420-2 du code de commerce.

Les sociétés ci-dessus mentionnées sont tenues responsables de l’infraction de la façon suivante :

- la société Electricité de France pour l’ensemble de l’infraction, sur l’ensemble de la période considérée ;

- la société Dalkia Smart Building, ainsi que la société Electricité de France en tant que société mère, en ce qui concerne les marchés des services de gestion/maintenance multi- technique et d’optimisation énergétiques, à partir du 1er janvier 2009 et jusqu’au 31 décembre 2020 ;

- la société Dalkia, ainsi que la société Electricité de France en tant que société mère, en ce qui concerne les marchés des services de gestion/maintenance multi-technique et d’optimisation énergétiques, à partir du 1er novembre 2014 et jusqu’au 31 décembre 2020 ;

- la société Citelum, ainsi que la société Electricité de France en tant que société mère, en ce qui concerne les marchés de la fourniture d’électricité aux petits et moyens sites non résidentiels et des services de gestion/maintenance multi-technique et d’optimisation énergétiques, à partir du 17 septembre 2015 et jusqu’au 31 décembre 2020 ;

- la société Cham, ainsi que la société Electricité de France en tant que société mère, en ce qui concerne les marchés des services de gestion/maintenance multi-technique et d’optimisation énergétiques, à partir du 1er janvier 2008 et jusqu’au 31 décembre 2014. »

II. Discussion

A. SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROCEDURE DE TRANSACTION

352. Le III de l’article L. 464-2 du code du commerce dispose : « Lorsqu’un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l’entreprise ou l’organisme s’engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l’organisme ou l’entreprise donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l’Autorité de la concurrence, qui entend l’entreprise ou l’organisme et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d’un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire (...) dans les limites fixées par la transaction ».

353. En outre, le point 23 du communiqué de procédure de l’Autorité du 21 décembre 2018 relatif à la procédure de transaction (ci-après « communiqué transaction ») prévoit : « Dans le cas où l’entreprise en cause a, en outre, proposé des engagements, il appartient au rapporteur général d’apprécier s’il est pertinent de les prendre en compte au regard des circonstances particulières de l’affaire et, notamment, de la nature des griefs retenus. Si tel est le cas, le rapporteur général s’assure ensuite du caractère substantiel, crédible et vérifiable des engagements proposés ». Le point 27 du communiqué transaction précise que : « S’il estime pertinent de proposer à l’Autorité de rendre obligatoire les engagements présentés par l’entreprise, le rapporteur général en tient également compte dans sa proposition de transaction ».

354. Les parties qui entrent en procédure de transaction se doivent d’apporter toutes les garanties suffisantes, notamment en termes de délais de mise en conformité, afin que les pratiques qui font l’objet des griefs notifiés cessent dans les meilleurs délais359. La mise en conformité avec le droit de la concurrence, qui est la conséquence nécessaire d’une décision de sanction retenant des griefs comme établis, ne saurait ainsi faire l’objet d’une rétribution spécifique dans le cadre d’une procédure de transaction.

355. Il est toutefois loisible au rapporteur général, dans le cas où l’entreprise en cause a, dans le cadre de la procédure de transaction, proposé en outre des engagements comportementaux, de les annexer au procès-verbal de transaction s’il les estime pertinents au regard des circonstances particulières de l’affaire et lorsqu’ils sont substantiels, crédibles et vérifiables.

356. En l’espèce, par un procès-verbal signé le 20 septembre 2021, en raison de circonstances qui leur sont propres, et sans pour autant reconnaître leur culpabilité, les sociétés EDF, Dalkia, Dalkia Smart Building, Citelum et CHAM se sont engagées à ne pas contester le grief qui leur a été notifié.

357. Par ailleurs, EDF a proposé une série d’engagements relatifs, d’une part, à la mise à disposition de son fichier clients au TRV Bleu et, d’autre part, à la séparation des parcours de souscription au TRV Bleu et en OM électricité.

358. Lors de la séance du 16 novembre 2021, les entreprises en cause ont confirmé solennellement leur accord avec les termes de la transaction, dont elles ont accepté, en toute connaissance de cause, les conséquences juridiques, notamment en ce qui concerne le montant de la sanction pécuniaire pouvant être prononcée par l’Autorité. Elles ont également souhaité maintenir les engagements annexés au procès-verbal de transaction.

359. Postérieurement à la séance, EDF a communiqué au collège, qui l’a acceptée, une version des engagements amendée en ce qui concerne les dates de mise en œuvre de l’engagement n° 2.

360. Les pratiques n’ayant pas été contestées, l’Autorité se bornera aux développements suivants.

B. SUR LA NOTE EN DELIBERE PRESENTEE PAR ENGIE

361. Engie a transmis à l’Autorité, le 22 novembre 2021, postérieurement à la séance, une note en délibéré. Cette note n’a pas été demandée par le président de séance. Par ailleurs, Engie n’y fait état d’aucune circonstance de fait ou de droit, inconnue lors de la séance, de nature à modifier l’appréciation des pratiques. Cette note en délibéré sera, en conséquence, rejetée.

C. SUR L’APPLICABILITE DU DROIT DE L’UNION

362. L’article 102 du TFUE interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait, pour une ou plusieurs entreprises, d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci.

363. Conformément à la jurisprudence constante des juridictions de l’Union et à la communication de la Commission européenne relative à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne (devenus articles 101 et 102 du TFUE)360, trois éléments doivent être réunis pour que des pratiques soient susceptibles d’affecter sensiblement le commerce entre États membres de l’Union : l’existence d’échanges, à tout le moins potentiels, entre les États membres portant sur les produits en cause (i), l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges (ii), et le caractère sensible de cette affectation (iii).

364. En l’espèce, les marchés de la fourniture de l’électricité et du gaz ont été progressivement ouverts à la concurrence dans le cadre de directives européennes ayant pour objectif la réalisation du marché intérieur de l’énergie. Cette ouverture à la concurrence a permis à des fournisseurs d’énergie domiciliés dans d’autres pays de l’Union de proposer leurs prestations en France. Il en va de même des prestations de services énergétiques, fournies en France par certaines entreprises originaires d’autres États membres de l’Union, dans le cadre de la libre prestation de service ou à travers la liberté d’établissement. Il existe ainsi un flux d’échanges entre États membres sur les marchés concernés par les pratiques en litige.

365. Ces pratiques ont, en outre, consisté en un ensemble de comportements visant à préserver la position centrale d’EDF dans le secteur de l’énergie en France, en limitant la présence des concurrents pour la fourniture d’électricité, la fourniture de gaz, les prestations de services énergétiques ou encore la collecte de CEE. Ces pratiques étaient ainsi de nature à limiter les opportunités de développement des entreprises du secteur, notamment celles situées dans d’autres pays de l’Union. Les pratiques étaient donc susceptibles d’affecter les échanges entre États membres portant sur les produits et services en cause dans la présente affaire.

366. Enfin, les pratiques en litige, mises en œuvre durant de nombreuses années par un acteur ayant conservé une position concurrentielle particulièrement forte dans le secteur de l’énergie, ont couvert l’ensemble du territoire français et ont concerné un grand nombre de marchés distincts, unis entre eux par une étroite connexité.

367. Il résulte de ce qui précède que les pratiques constatées sont susceptibles d’avoir affecté sensiblement le commerce entre États membres et d’être qualifiées au regard de l’article 102 du TFUE.

D. SUR LES MARCHES PERTINENTS

1. RAPPEL DES PRINCIPES APPLICABLES

368. La définition des marchés de produits et des marchés géographiques, dans le cadre de l’application des articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce, est effectuée pour déterminer si l’entreprise concernée occupe une position dominante et si celle-ci lui permet d’empêcher le maintien d’une concurrence efficace sur le marché pertinent, en lui donnant le pouvoir de se comporter, dans une mesure appréciable, indépendamment de ses concurrents, de ses clients, et in fine, des consommateurs.

369. Le concept de marché pertinent implique qu’il puisse y avoir une concurrence efficace entre les produits et services qui appartiennent à ce marché. Cela présuppose qu’il y ait un degré suffisant de substituabilité entre tous les produits et services appartenant au même marché relativement à un usage spécifique de ceux-ci361.

370. Un examen à cette fin ne peut pas se limiter simplement aux caractéristiques objectives des produits et services concernés. Les conditions de concurrence et la structure de l’offre et de la demande sur le marché doivent également être prises en compte362.

371. L’identification de marchés de produits pertinents découle de l’existence de contraintes concurrentielles. À cet égard, les entreprises sont notamment soumises à la substituabilité du côté de la demande et à la substituabilité au niveau de l'offre. D’un point de vue économique, pour la définition du marché pertinent, la substituabilité de la demande constitue le facteur de discipline le plus immédiat vis-à-vis des fournisseurs d’un produit donné363.

372. La substituabilité de l’offre peut aussi être prise en compte dans le cadre de la définition du marché, dans les situations où ses effets sont équivalents à ceux de la substituabilité de la demande en termes d’effectivité et d’immédiateté. Il y a une substituabilité de l’offre lorsque les fournisseurs peuvent réorienter la production vers les produits ou services en cause et les commercialiser à court terme sans avoir à supporter ni coût ni risque supplémentaire substantiel en réponse à des variations légères, mais permanentes, des prix relatifs. Lorsque ces conditions sont remplies, le supplément de production qui est ainsi mis sur le marché devrait exercer un effet de discipline sur le comportement concurrentiel des entreprises en cause364.

373. Le marché géographique, quant à lui, comprend le territoire sur lequel les entreprises sont engagées dans l’offre et la demande en cause et sur lequel les conditions de concurrence sont homogènes.

2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE

a) Les marchés de la fourniture au détail d’électricité

Marché de produits

374. Il résulte de la pratique décisionnelle, tant de la Commission européenne que de l’Autorité, que plusieurs activités doivent être distinguées, s’agissant du secteur de l’électricité, selon le stade de la chaîne de valeur auquel elles se situent. Ces activités sont les suivantes : production et vente en gros ; négoce ; transport ; distribution ; fourniture au détail365. Les pratiques portent en l’espèce sur la fourniture au détail d’électricité.

375. Dans le cadre de sa décision relative au rachat des activités françaises de Dalkia par EDF366, la Commission européenne a distingué trois catégories de clients non résidentiels – le segment résidentiel n’étant pas concerné par l’opération – en fonction de la nature des clients et de la puissance souscrite (grands clients industriels dont la consommation annuelle est supérieure à 7 GWh, petits clients industriels et commerciaux dont la consommation annuelle est inférieure à 7 GWh mais dont la puissance de raccordement est supérieure à 36 kVA, petits clients professionnels dont la puissance de raccordement est inférieure à 36 kVA).

376. Dans sa pratique décisionnelle, l’Autorité a, dans certaines affaires, distingué les clients selon qu’ils sont ou non raccordés au réseau de transport ou au réseau de distribution, en relevant notamment que les clients raccordés au réseau de transport reçoivent des offres individualisées basées sur leur consommation réelle, alors que les clients raccordés au réseau de distribution se voient attribuer un tarif en fonction du profil type de leur consommation367. Dans d’autres décisions, l’Autorité a procédé à une segmentation plus fine, proche de celle retenue par la Commission européenne368.

377. Enfin, la CRE identifie quatre segments de clientèle sur la base de la puissance de raccordement souscrite : grands sites non résidentiels (puissance souscrite supérieure ou égale à 250 kW), sites moyens non résidentiels (puissance souscrite comprise entre 36 et 250 kW), petits sites non résidentiels (puissance souscrite inférieure à 36 kVA), sites résidentiels (puissance souscrite inférieure à 36 kVA). Cette approche coïncide, dans une certaine mesure, avec les couleurs tarifaires des TRV commercialisés par EDF369.

378. Compte tenu de ces différentes approches il y a lieu, au cas d’espèce, de retenir cinq segments de clientèle pour la définition des marchés de produits :

- le marché de la fourniture au détail d’électricité aux grands clients industriels dont la consommation est supérieure à 7 GWh / an ;

- le marché de la fourniture au détail d’électricité aux grands sites non résidentiels dont la consommation est inférieure à 7 GWh / an ;

- le marché de la fourniture au détail d’électricité aux sites moyens non résidentiels ;

- le marché de la fourniture au détail d’électricité aux petits sites non résidentiels ;

- le marché de la fourniture au détail d’électricité aux sites résidentiels.

379. Il pourrait être envisagé de délimiter, au sein de chaque segment de clientèle, des marchés plus restreints en fonction du type d’offre commercialisée – TRV ou OM. Toutefois, la disparition, au 1er janvier 2016, des tarifs réglementés pour les sites non résidentiels dont la puissance souscrite est supérieure à 36 kVA rend cette distinction sans objet à compter de cette date. Par ailleurs, l’Autorité a relevé dans sa décision n° 13-D-20 du 17 décembre 2013370 que, pour les consommateurs souscrivant à une puissance inférieure à 36 kVA, la pertinence d’une telle distinction a été remise en cause du fait de l’adoption de la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010, qui a modifié les règles d’éligibilité et de réversibilité en permettant notamment aux consommateurs en OM de revenir aux tarifs réglementés sans limitation de durée. Cette réversibilité était également rendue possible pour les clients souscrivant à une puissance supérieure à 36 kVA.

380. Par suite, pour chacun des marchés définis ci-dessus, il n’apparaît pas nécessaire de distinguer entre les offres au TRV et les OM, à tout le moins à partir du 7 décembre 2010, et jusqu’au 1er janvier 2016 pour les sites non résidentiels ayant une puissance supérieure à 36 kVA.

381. S’agissant de la période antérieure, la délimitation exacte des marchés peut être laissée ouverte dans la mesure où elle ne modifie pas l’analyse concurrentielle – et en particulier, la détermination de l’existence d’une position dominante d’EDF et d’une qualification des pratiques en litige d’abus de position dominante.

Marché géographique

382. Les marchés de la fourniture au détail d’électricité ont été considérés, tant par la Commission européenne371 que par l’Autorité372, comme des marchés de dimension nationale.

b) Les marchés de la fourniture au détail de gaz naturel

Marché de produits

383. Plusieurs activités doivent être distinguées s’agissant du secteur du gaz, selon le stade de la chaîne de valeur auquel elles se situent. Ces activités sont les suivantes : exploitation-export, transport, stockage, négoce, fourniture au détail373. Seules les pratiques portant sur la fourniture au détail de gaz naturel sont concernées au cas d’espèce.

384. La Commission européenne et l’Autorité ont distingué différents marchés selon le type de consommateur : fourniture de gaz aux gros clients industriels, aux petits clients industriels et commerciaux, aux producteurs d’électricité, aux revendeurs intermédiaires (ELD) et aux clients résidentiels. Cette distinction est fondée sur les différences d’usage que ces catégories de clients font du gaz, sur les différences ayant trait à leur profil et à leurs volumes de consommation, ou encore sur le prix d’achat374.

385. Par ailleurs, en se basant sur les travaux de la CRE et la position exprimée par la Commission européenne375, l’Autorité a considéré qu’il pouvait être pertinent, parmi les clients non résidentiels, d’opérer une distinction entre les gros clients industriels, raccordés au réseau de transport, et les petits clients industriels et commerciaux, qui sont raccordés au réseau de distribution376.

386. En outre, si la pratique décisionnelle des autorités de concurrence n’a pas défini un seuil précis de consommation permettant de distinguer les « gros clients industriels » et les « petits clients industriels et commerciaux », la fin des TRV pour le gaz est intervenue à des échéances distinctes pour ces deux catégories de clients. Cette segmentation peut ainsi permettre une définition plus étroite des marchés pertinents. De plus, elle apparaît utile dans la mesure où ces deux catégories de clients ont des profils de consommation distincts et où la dynamique concurrentielle est différente sur ces deux segments.

387. Enfin, si la question de la substituabilité entre les offres de gaz au TRV et les OM s’est posée à plusieurs reprises, cette question peut être laissée ouverte au cas d’espèce, dans la mesure où les pratiques en litige visaient, s’agissant du secteur du gaz naturel, indistinctement des clients au TRV ou en OM.

388. Il résulte de ce qui précède que, en combinant les critères de distinction présentés ci-dessus, il est possible de retenir l’existence de trois marchés distincts :

- la fourniture de gaz naturel aux très gros clients non résidentiels raccordés au réseau de transport ;

- la fourniture de gaz naturel aux gros clients non résidentiels raccordés au réseau de distribution ayant une consommation supérieure à 30 MWh/an ;

- la fourniture de gaz naturel aux petits clients non résidentiels et résidentiels raccordés au réseau de distribution ayant une consommation inférieure à 30 MWh/an.

389. En tout état de cause, il n’est pas nécessaire de conclure de façon définitive sur la définition des marchés de produits dès lors qu’au cas d’espèce, la position dominante d’EDF n’est établie sur aucun des marchés du secteur du gaz.

Marché géographique

390. Les marchés de la fourniture au détail de gaz ont été considérés, tant par la Commission européenne377 que par l’Autorité378, comme des marchés de dimension nationale.

c) Les marchés de la fourniture de services énergétiques

Marché de produits

Les services de performance énergétique

391. Les services énergétiques visent à permettre aux consommateurs d’améliorer leurs performances énergétiques. Ils revêtent des formes variées et sont le plus souvent interdépendants les uns des autres.

392. Selon la pratique décisionnelle européenne, les services de gestion énergétique incluent « des activités de conseil sur la réduction de la consommation d’énergie, une assistance dans la fourniture d’énergie et dans la gestion et la maintenance d’équipements liés à la consommation énergétique des clients, dans le but de réduire la consommation d’énergie des clients »379. La Commission européenne a également défini des prestations de gestion et de maintenance multi-technique regroupant « les activités d’entretien et d’optimisation du rendement de l’ensemble des installations techniques présentes chez les clients qui exploitent des bâtiments et souhaitent en déléguer la gestion »380.

393. S’agissant de la substituabilité au niveau de la demande, il peut être relevé que l’amélioration de la performance énergétique peut reposer sur plusieurs types de prestations susceptibles de se compléter. En conséquence, les clients souscrivent généralement un ensemble cohérent de services interdépendants381.

394. S’agissant de la substituabilité au niveau de l’offre, la Commission européenne a relevé que les prestataires fournissent souvent à la fois des services de gestion / maintenance multi-technique des immeubles et des services de gestion énergétique382. Ainsi, du point de vue de l’offre, la concurrence s’opère sur la base d’une gamme d’offres globales et adaptables en fonction des besoins du client.

395. Au regard de cette analyse, cohérente avec la pratique décisionnelle nationale383, il convient de retenir un marché global des services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique. Pour les besoins de l’analyse concurrentielle, il n’est pas nécessaire de conclure sur la pertinence d’une segmentation plus fine de ce marché global.

Les services de gestion et de suivi de la consommation

396. La Commission européenne a considéré que certaines prestations optionnelles, telles que la délivrance de duplicata de factures, l’assistance dépannage ou encore le suivi de la consommation, « sont directement liées à la fourniture d’électricité, de faible valeur ajoutée et ne peuvent pas être assimilées à des services énergétiques »384.

397. Par suite, ces services, qui ne sont pas fournis de manière autonome, en dehors de la souscription d’un contrat d’électricité, ne peuvent constituer un marché à part entière sur lequel s’exerce une concurrence.

Marché géographique

398. Les marchés des services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique ont été considérés, tant par la Commission européenne385 que par l’Autorité386, comme des marchés de dimension nationale.

d) Les marchés liés aux certificats d’économie d’énergie

Marché de produits

399. Dans le cadre du dispositif des CEE, différentes activités peuvent être identifiées selon le stade de la chaîne de valeur auquel elles se situent. Deux marchés verticalement liés peuvent être identifiés : un marché amont des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE et un marché aval sur lequel les CEE sont échangés de gré à gré.

Le marché des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE

400. Divers moyens d’action peuvent être mis en œuvre pour la délivrance de CEE. Les obligés et éligibles peuvent, ainsi, soit inciter le consommateur final à réaliser des opérations d’économies d’énergie, à travers des opérations standardisées ou spécifiques, soit contribuer financièrement à des programmes éligibles aux CEE tendant à la maîtrise d’énergie.

401. Les obligés ont eu recours à plusieurs modèles pour développer les actions de maîtrise de l’énergie. À titre d’exemple, EDF s’est principalement appuyée sur l’animation d’un réseau de partenaires professionnels, composé d’entreprises et artisans réalisant des travaux éligibles au dispositif CEE auprès du consommateur final. La remontée de CEE à EDF est possible grâce à des incitations financières (prêt bonifié, prime, etc.). Les installateurs partenaires fournissent les factures des travaux effectués à EDF qui pourra ensuite obtenir des CEE.

402. La délivrance de CEE peut également intervenir par l’intermédiaire de sociétés spécialisées dans les solutions d’efficacité énergétique qui, à l’instar de Dalkia, proposent des offres couvrant la conception, le pilotage et la réalisation de travaux d’économie d’énergie, ainsi que la prise en charge du dossier CEE pour le bénéficiaire, qui peut obtenir en échange une aide financière (prêt bonifié, prime, etc.).

403. La « production » de CEE constitue ainsi un marché sur lequel interviennent de multiples acteurs. Ce marché correspond dans une certaine mesure au marché des services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique dont il constitue le miroir, bien que certains services énergétiques ne donnent pas lieu à la délivrance de CEE.

404. Il convient en conséquence de définir un marché des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE.

Le marché de l’achat / vente de CEE

405. Une fois délivrés, les CEE font l’objet d’un enregistrement sur un compte individuel ouvert dans le registre national des CEE (registre Emmy) et peuvent ensuite faire l’objet de transactions, suivant un prix déterminé entre les deux parties. Sur le marché d’échange des CEE, les obligés peuvent à la fois acheter et vendre des CEE, tandis que les éligibles ne peuvent que vendre des CEE.

Marché géographique

406. La Commission européenne a considéré que le marché des CEE était de dimension nationale, dès lors que « les CEE ont été mis en place par les autorités nationales, reposent sur une obligation de réalisation d’économies d’énergie imposée au niveau national et que les CEE peuvent être obtenus dans le cadre de ce dispositif seulement en France »387.

e) Le marché de l’effacement

Marché de produits

407. La Commission européenne a défini l’effacement comme une « action temporaire de réduction de la consommation d’électricité d’un site donné ou d’un groupe d’acteurs (…) déclenchée par un fournisseur d’électricité, un opérateur d’effacement (…) ou par le consommateur lui-même »388. Il existe deux types d’effacement – l’effacement implicite (ou tarifaire) et l’effacement explicite – qui reposent sur des procédés techniques et une logique de fonctionnement distincts. Il en résulte que ces deux types d’effacement ne relèvent pas du même marché de produits.

L’effacement implicite

408. L’effacement implicite est indissociable de l’offre de fourniture d’électricité, de sorte que seuls les fournisseurs d’électricité sont en mesure de le proposer. Il repose sur un contrat de fourniture incluant des prix de l’électricité différenciés en fonction des plages temporelles de consommation.

409. L’effacement implicite repose sur une incitation tarifaire destinée à encourager le client à décaler certaines consommations d’électricité à des périodes au cours desquelles la consommation d’électricité est moindre. L’effacement tarifaire permet par ailleurs au fournisseur de réduire ses coûts d’approvisionnement et au gestionnaire de réseau de limiter les tensions.

410. Ce type d’effacement s’apparente ainsi à une optimisation tarifaire du contrat de fourniture d’électricité et ne constitue pas, dès lors, un marché distinct, autonome de la fourniture d’électricité au détail.

L’effacement explicite

411. L’effacement explicite se dissocie de l’effacement implicite en ce qu’il correspond à une prestation distincte de la fourniture d’électricité, qui peut être proposée par des acteurs autres que le fournisseur d’électricité.

412. L’effacement peut ainsi être réalisé par le consommateur lui-même, notamment les gros sites industriels, qui disposent à eux seuls d’une capacité d’effacement valorisable suffisante. Pour des acteurs de taille plus modeste, des opérateurs d’effacement peuvent intervenir auprès des consommateurs afin de valoriser leur capacité d’effacement. L’effacement explicite repose sur un pilotage à distance des équipements afin d’effacer, momentanément, la consommation de ces appareils. Par ailleurs, le consommateur s’engage à diminuer sa consommation d’un certain niveau sur une période définie, alors qu’il y est seulement incité dans le cadre de l’effacement implicite. Enfin, l’effacement est valorisable sur différents marchés connexes, notamment le mécanisme d’ajustement et les marchés de réserves du gestionnaire du réseau public de transport d’électricité (RTE), le mécanisme de capacité ou encore les marchés de gros de l’électricité.

413. Il en résulte que l’effacement explicite constitue un marché distinct, qui est autonome par rapport à la fourniture d’électricité au détail.

Marché géographique

414. Le marché des offres d’effacement explicite sera considéré comme étant de dimension nationale, car la valorisation des effacements dépend de mécanismes institués à l’échelle nationale (mécanisme de capacité, mécanisme d’ajustement)389.

f) La connexité entre les marchés en cause

415. Selon la cour d’appel de Paris, deux marchés distincts sont susceptibles d’avoir un lien de connexité étroit « soit parce qu’ils sont en amont ou en aval les uns des autres, soit parce qu’ils concernent des prestations similaires, à défaut d’être complètement substituables »390.

416. Les liens que présentent les marchés connexes peuvent permettre à une entreprise présente sur un marché et y disposant d’un fort pouvoir de marché d’exploiter un effet de levier afin de se développer sur un autre marché.

417. La pratique décisionnelle a identifié l’existence d’un lien de connexité entre les marchés de la fourniture au détail d’électricité et les marchés de la fourniture au détail de gaz naturel391.

418. Un lien de connexité entre les marchés de la fourniture au détail d’électricité et le marché de la fourniture de services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique a également été identifié392. Ces prestations sont en effet complémentaires dans la mesure où les services énergétiques permettent aux clients d’optimiser leur consommation d’électricité. La fourniture d’électricité est, par ailleurs, parfois intégrée dans des contrats globaux de gestion / maintenance multi-technique.

419. Par ailleurs, ainsi qu’il a été dit, le marché des actions de maîtrise de l’énergie concourant à la délivrance de CEE entretient un lien étroit avec le marché de la fourniture de services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique. Un lien de connexité peut dès lors être établi entre ce premier marché et le marché de la fourniture au détail d’électricité.

420. Ce lien de connexité entre ces différents marchés a d’ailleurs régulièrement été souligné par EDF dans ses propres documents internes393.

E. SUR L’EXISTENCE D’UNE POSITION DOMINANTE

1. RAPPEL DES PRINCIPES APPLICABLES

421. La position dominante est définie comme une « position de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs. L'existence d'une position dominante résulte en général de la réunion de plusieurs facteurs, qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants »394.

422. Un des critères principaux de la détermination de la position dominante est l’existence de parts de marché importantes. Des « parts de marché extrêmement importantes constituent par elles-mêmes, et sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l’existence d’une position dominante. En effet, la possession d’une part de marché extrêmement importante met l’entreprise qui la détient pendant une période d’une certaine durée, par le volume de production et d’offre qu’elle représente – sans que les détenteurs de parts sensiblement plus réduites soient en mesure de satisfaire rapidement la demande qui désirerait se détourner de l’entreprise détenant la part la plus considérable –, dans une situation de force qui fait d’elle un partenaire obligatoire et qui, déjà de ce fait, lui assure, tout au moins pendant des périodes relativement longues, l’indépendance de comportement caractéristique de la position dominante »395. Selon la jurisprudence de la Cour de justice, une part de marché de 50 % constitue par elle-même, et sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l’existence d’une position dominante396 .

423. Cependant, l’analyse de la position dominante d’une entreprise ne saurait toujours se limiter à un examen des parts de marché. D’autres facteurs peuvent être pris en compte, en particulier lorsque l’importance de la part de marché détenue par l’entreprise ne suffit pas à elle seule à caractériser sa position dominante sur le marché. Il pourra ainsi être tenu compte du rapport entre les parts de marché détenues par l’entreprise concernée et celles détenues par ses concurrents, de l’intensité de la concurrence et des barrières à l’entrée sur le marché concerné ou encore des caractéristiques propres à l’entreprise en cause : capacité d’influence sur le marché, image de marque, puissance financière397.

2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE

a) Sur les parts de marché d’EDF

Sur le marché de la fourniture au détail d’électricité aux sites résidentiels

424. Il ressort des données de marché publiées par la CRE, relatives au quatrième trimestre 2020, que les fournisseurs historiques – EDF et les ELD – disposaient d’une part de marché de 71,7 % en nombre de sites398. Dès lors que les ELD ne sont actives que sur une partie limitée du territoire national, la part de marché d’EDF sur ce segment de clientèle est estimée à plus de 65 % en nombres de sites. Ainsi, les données transmises par la CRE dans son avis du 3 décembre 2018 font état, au 31 décembre 2017, d’une part de marché d’EDF en nombre de sites de 82 % sur le segment résidentiel.

425. Par ailleurs, il peut être relevé qu’en 2019, 69 % des clients résidentiels bénéficiaient d’une offre au TRV399. Si l’intensité concurrentielle s’est accrue au cours des dernières années sur le marché résidentiel, la CRE relève cependant que le développement important des offres de marché en 2019 a profité à EDF, qui a renforcé sa gamme d’offres400.

Sur le marché de la fourniture au détail d’électricité aux petits sites non résidentiels

426. EDF a conservé une part de marché très importante sur ce segment de clientèle. En nombre de sites, cette part de marché s’élevait, à la fin de l’année 2017, à 80 %401.

427. Par ailleurs, à la fin de l’année 2019, 66 % des petits sites non résidentiels bénéficiaient toujours d’une offre au TRV402. Il convient toutefois de relever qu’une grande partie des sites professionnels appartenant à ce segment de clientèle a été concernée par la suppression des TRV au 31 décembre 2020403.

Sur le marché de la fourniture au détail d’électricité aux sites moyens non résidentiels

428. EDF a également conservé une part de marché très importante sur ce segment de clientèle. En nombre de sites, cette part de marché s’élevait, à la fin de l’année 2017, à 74 %404.

429. La CRE relève que, malgré la fin des TRV Jaune et Vert au 1er janvier 2016, « une grande majorité des clients sont tout de même restés chez leur fournisseur historique »405.

430. Toutefois, il peut être observé que la part de marché des opérateurs alternatifs a progressivement augmenté. Il résulte des données de la CRE que la part de marché des opérateurs alternatifs en nombre de sites s’élevait à 39 % à la fin de l’année 2019, alors qu’elle était seulement de 25 % à la fin de l’année 2017406. Selon la CRE, « cette évolution a réellement débuté au 1er janvier 2018, soit deux ans après la fin d’échéance des TRVE »407.

Sur les marchés de la fourniture au détail d’électricité aux grands sites industriels dont la consommation est supérieure à 7 GWh / an et aux grands sites non résidentiels dont la consommation annuelle est inférieure à 7 GWh/an

431. Il résulte des données fournies par la CRE que la part de marché d’EDF en nombre de sites, sur le segment des « grands sites non résidentiels », s’élevait à 72 % à la fin de l’année 2017. Il convient toutefois de relever que ces données concernent l’ensemble des grands sites non résidentiels sans distinction selon leur niveau de consommation, et ne permettent donc pas de distinguer la part relative des grands sites industriels.

432. Il peut néanmoins être observé qu’à la même date, la part de marché d’EDF s’élevait à 53 % en volumes de consommation408. Sur ce même segment des « grands sites non résidentiels », les données de la CRE font apparaître qu’au 1er janvier 2016, la part de marché en volumes des fournisseurs alternatifs s’élevait à 42 %409.

433. Ces éléments illustrent le fait que, avant même la fin des TRV Jaune et Vert, EDF était soumise à une forte concurrence des opérateurs alternatifs pour ce qui concerne les sites dont la consommation était la plus importante, à savoir les grands sites industriels. Cette tendance a pu être renforcée par le fait qu’EDF a pris, devant la Commission européenne, des engagements consistant à remettre annuellement sur le marché des volumes d’électricité sur le segment des grands sites industriels ayant une consommation égale ou supérieure à 7 GWh / an410.

b) Sur les autres facteurs

434. Si EDF a disposé de parts de marché très importantes depuis l’ouverture à la concurrence des marchés de l’électricité, la place prépondérante conservée par l’entreprise a en outre été renforcée du fait de sa qualité d’opérateur historique et de sa structure verticalement intégrée. EDF est en effet présente en France sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la production et de la fourniture d’électricité.

435. Ainsi, du fait de la structure particulière de la production électrique en France, EDF est le principal fournisseur d’électricité en gros de ses concurrents, à travers, notamment, le dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH)411. L’Autorité a relevé que ce mécanisme limitait l’incitation des fournisseurs alternatifs à investir dans leurs propres capacités de production, et à tenter de concurrencer EDF sur les différents niveaux de la chaîne de valeur412. Par conséquent, compte tenu du fait que le transport et la distribution d’électricité font l’objet d’une gestion régulée, la concurrence ne peut s’exercer qu’au stade de la fourniture d’électricité, ce qui limite les marges de manœuvre des concurrents d’EDF.

436. Enfin, il convient de relever qu’EDF dispose en France d’une image de marque très forte. Elle est l’une des entreprises les plus connues des Français. En novembre 2020, elle était classée en huitième position sur l’indice d’image du baromètre Posternak-Ifop publié par l’agence « La Matrice »413.

c) Conclusion

437. Il résulte de ce qui précède que, à partir de l’année 2004, et jusqu’au 31 décembre 2020, EDF a détenu une position dominante sur les marchés français de la fourniture au détail d’électricité aux sites résidentiels et aux petits sites non résidentiels.

438. Par ailleurs, EDF a détenu une position dominante sur les marchés français de la fourniture au détail d’électricité aux moyens sites non résidentiels et aux grands sites non résidentiels dont la consommation annuelle est inférieure à 7 GWh / an, à partir de l’année 2004 et jusqu’au 1er janvier 2018. Pour ce qui concerne la période postérieure à cette date, il n’est pas nécessaire de conclure définitivement sur ce point pour les besoins de l’analyse concurrentielle.

F. SUR LE BIEN-FONDE DU GRIEF NOTIFIE

1. RAPPEL DES PRINCIPES APPLICABLES

439. Aux termes de l’article 102 du TFUE : « Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci (…) ».

440. L’article L. 420-2 du code de commerce dispose que : « Est prohibée, dans les conditions prévues à l’article L. 420-1, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci (…) ».

441. La notion d’abus est une notion objective qui vise les comportements d’une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d’un marché où, à la suite précisément de la présence de l’entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien du degré de concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence414.

442. Si les articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce mentionnent certaines pratiques abusives, ces dernières ne constituent pas une liste exhaustive des pratiques susceptibles d’être qualifiées d’abus de position dominante415.

443. Afin de déterminer si l’entreprise dominante a abusé de sa position, il est nécessaire d’apprécier l’ensemble des circonstances de fait pertinentes et d’examiner si les pratiques tendent, par exemple, à limiter l’accès au marché de concurrents, ou encore à renforcer la position de l’entreprise dominante, en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent d’une concurrence par les mérites416.

444. La Cour de justice a considéré qu’une pratique mise en œuvre par une entreprise dominante pouvait être abusive et interdite par l’article 102 du TFUE « quels que soient les moyens ou procédés utilisés », dès lors que cette pratique est susceptible d’avoir des effets anticoncurrentiels417.

445. Les articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce prohibent également les comportements d’entreprises en position dominante sur un marché donné qui tendent à étendre cette position sur un marché voisin mais distinct, en faussant la concurrence418.

Ainsi, le fait que le comportement abusif d’une entreprise dominante produise des effets sur un marché distinct du marché dominé ne fait pas obstacle à l’application des articles 102 du TFUE et L. 420-2 du code de commerce419.

446. Par ailleurs, la Cour de justice rappelle dans sa jurisprudence en matière d’abus de position dominante que « si, aux fins de l’application de l’article 102 TFUE, il n’est nullement requis d’établir l’existence d’une intention anticoncurrentielle dans le chef de l’entreprise en position dominante, la preuve d’une telle intention, si elle ne saurait suffire à elle seule, constitue une circonstance factuelle susceptible d’être prise en compte aux fins de la détermination d’un abus de position dominante (…) »420.

447. S’agissant des effets du comportement de l’entreprise dominante, l’article L. 420-2 du code de commerce, comme l’article 102 du TFUE, interdit les comportements qui tendent à restreindre la concurrence ou sont susceptibles d’avoir un tel effet421. Cet effet anticoncurrentiel ne doit pas avoir un caractère purement hypothétique422, mais il n’est pas nécessaire qu’il se matérialise effectivement423. De même, la cour d’appel de Paris a jugé que « l’Autorité doit seulement démontrer l’existence d’un effet anticoncurrentiel au moins potentiel, sans avoir à apporter la preuve d’une détérioration effective quantifiable de la position concurrentielle des autres opérateurs sur le marché »424.

448. Les principes dégagés en matière d’abus de position dominante ont notamment trouvé application concernant les anciens monopoles légaux, lorsque leur secteur est progressivement ouvert à la concurrence, mais également s’agissant d’entreprises en monopole ou disposant de droits exclusifs procédant à une diversification de leurs activités sur des marchés avals ou connexes ouverts à la concurrence.

449. À cet égard, il résulte notamment de la pratique décisionnelle que, s’il est loisible à une entreprise qui dispose d’une position dominante sur un marché en vertu d’un monopole légal d’entrer sur des marchés relevant de secteurs concurrentiels, elle ne peut le faire qu’à la condition de ne pas abuser de sa position dominante « pour restreindre ou tenter de restreindre l’accès au marché de ses concurrents en recourant à des moyens autres que la concurrence par les mérites »425. Elle doit ainsi éviter que « les avantages concurrentiels liés au statut d’ancien monopole, et qui ne procèdent donc pas d’une concurrence par les mérites, soient utilisés d’une manière qui pourrait obérer le fonctionnement concurrentiel du marché »426.

450. Concernant l’utilisation des moyens dont bénéficie un opérateur du fait de son statut d’ancien monopole sur le marché nouvellement ouvert à la concurrence, la cour d’appel de Paris a jugé que cet opérateur « doit veiller à éviter toute exploitation abusive de moyens qui ne sont pas reproductibles par les nouveaux entrants sur le marché ouvert à la concurrence à un coût raisonnable et selon des délais acceptables, eu égard à sa responsabilité particulière sur ce marché, et à éviter que les avantages concurrentiels liés au statut d'ancien monopole, et qui ne procèdent donc pas d'une concurrence par les mérites, soient utilisés d'une manière qui pourrait obérer le fonctionnement concurrentiel du marché »427.

451. Parmi les moyens non reproductibles dont l’exploitation abusive est susceptible d’être qualifiée d’abus de position dominante figurent notamment les fichiers de clientèle constitués et mis à jour par l’opérateur dans le cadre de son monopole légal ou de sa mission de service public.

452. La cour d’appel de Paris a ainsi jugé, à propos de la base de données clients dont dispose EDF en tant que fournisseur d’électricité au tarif réglementé de vente, que « les noms et coordonnés des clients figurant dans la base de données d’EDF doivent être considérées comme des informations non reproductibles par les concurrents d’EDF ENR dans des conditions économiquement raisonnables en termes de coûts et de délais ». La cour a également relevé que « l’utilisation des informations privilégiées détenues de manière exclusive par EDF au titre de son ancien monopole et de ses missions de service public a constitué un avantage concurrentiel significatif pour EDF ENR en lui permettant d’assurer la promotion de ses offres auprès d’un nombre élevé de prospects, dans des conditions qui ne pouvaient être répliquées par les concurrents »428.

453. Il en résulte qu’un opérateur disposant, en vertu de son statut d’ancien monopole ou du fait de ses missions de service public, d’une base de données constituant un avantage concurrentiel non reproductible pour ses concurrents « doit être particulièrement attentif à la façon dont il utilise ladite base de données (…) »429.

454. De même, l’utilisation par l’opérateur des moyens matériels et commerciaux employés dans le cadre de la gestion des contrats au TRV est susceptible d’être regardée comme abusive lorsque l’entreprise utilise son positionnement en tant qu’opérateur au TRV pour proposer des prestations en offres de marché430.

2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE

a) Sur l’utilisation abusive des moyens dont dispose EDF du fait de son statut d’opérateur au TRV

455. Il résulte des éléments exposés ci-dessus qu’EDF a mis en œuvre une stratégie globale visant, dans le contexte de l’ouverture à la concurrence des marchés de la fourniture au détail d’électricité, à la fois à préserver sa position sur ces marchés et à renforcer sa position sur les marchés connexes. EDF a fait en effet le constat que, compte tenu des évolutions probables du secteur de l’énergie, la fourniture d’électricité ne pouvait désormais plus être dissociée de la fourniture de gaz et de services énergétiques. EDF a mis en œuvre cette stratégie en s’appuyant sur les moyens dont elle disposait grâce à son statut d’opérateur chargé de la mission de fourniture d’électricité au TRV dans les conditions prévues à l’article

L. 121-5 du code de l’énergie431.

456. À partir de 2004, cette stratégie a conduit EDF à adapter ses systèmes d’information et son organisation interne afin d’évoluer d’un modèle centré sur la simple gestion des contrats au TRV vers une logique commerciale de proposition d’OM aux clients restés au TRV.

457. Cette stratégie s’est intensifiée à partir de 2013, avec le projet Iroise, qui avait pour objectif, dans la perspective de la disparition des TRV Jaune et Vert, la souscription, par les clients professionnels, d’offres de marché en remplacement des contrats au TRV. Après la disparition des TRV Jaune et Vert au 1er janvier 2016, cette stratégie s’est poursuivie et a été recentrée sur les clients au TRV Bleu.

458. Cette stratégie mise en œuvre par EDF reposait en premier lieu sur l’exploitation des données disponibles dans les fichiers des clients au TRV. La démarche mise en œuvre consistait à enrichir l’information dont disposait EDF par le biais d’une « qualification » des comptes clients, destinée à collecter les données pertinentes afin de proposer des offres individualisées et des prestations complémentaires aux clients au TRV. Les données recueillies étaient mises à disposition des équipes commerciales d’EDF par le biais d’applications informatiques dédiées à la relation client.

459. Il résulte ainsi de l’instruction que les informations relatives aux clients au TRV dont disposait EDF pour la gestion et le suivi de ces contrats ont été continuellement et systématiquement enrichies au gré des contacts avec ces clients432. La qualification des données avait ainsi pour but d’obtenir des informations précises et actualisées, en particulier, pour ce qui concerne les entreprises, sur certains « items » jugés essentiels433 pour définir la valeur du client, ainsi que les segments opérationnels et marketing appropriés434.

460. Cette démarche de qualification des données devait in fine permettre à EDF de mieux connaître les besoins des clients au TRV afin de leur proposer les OM les plus susceptibles de répondre à leurs besoins435. À titre d’exemple, la qualification des données menée dans le cadre du projet Iroise a permis à EDF d’être en mesure de définir des offres personnalisées, de générer des devis et de les envoyer aux interlocuteurs pertinents, dans l’objectif de convertir en OM les contrats au TRV des clients concernés par la fin des tarifs réglementés Jaune et Vert au 1er janvier 2016436. L’envoi massif d’offres aux clients concernés par la fin des TRV Jaune et Vert avait, selon EDF, pour objectif de conforter ses parts de marché lors de cette étape décisive dans l’ouverture à la concurrence des marchés de l’électricité437.

461. L’effort de qualification des données s’est poursuivi après la fin des TRV Jaune et Vert, à destination des clients au TRV Bleu438, notamment sur le segment des professionnels et plus particulièrement des clients « multi-sites » pour lesquels EDF était confrontée à une forte agressivité tarifaire des opérateurs concurrents439.

462. Par ailleurs, la qualification des données des clients devait également permettre de développer les ventes de gaz. EDF a ainsi utilisé les données dont elle disposait en sa qualité d’opérateur au TRV de l’électricité pour les besoins de la prospection des clients pour la fourniture de gaz, afin notamment d’assurer un suivi des clients à forte valeur440. De même, EDF utilisait les données de ses clients au TRV afin de développer les offres de services énergétiques, au profit, notamment, de ses filiales441.

463. Il résulte de ce qui précède qu’EDF a utilisé les données issues de ses fichiers clients au TRV dans une mesure excédant les seuls besoins liés à la gestion et au suivi de ces contrats. Elle a en effet exploité ces données dans une logique de conquête commerciale, visant à la souscription d’OM par ses clients au TRV. L’exploitation de ces données a notamment permis à EDF, dans la perspective de la disparition des TRV Jaune et Vert, de proposer à ses clients au TRV des OM en électricité, afin de préserver ses parts de marché sur ce segment de clientèle et de limiter le développement de ses concurrents. L’utilisation de ces données a également permis à EDF, dans l’objectif de développer sa position sur les marchés connexes, de détecter les besoins des clients en matière de fourniture de gaz et de services énergétiques et de proposer à ces clients des offres en complément de la fourniture d’électricité.

464. Compte tenu de leur volume, de leur degré de précision et de leur actualisation régulière, les données collectées par EDF dans le cadre de sa mission de fourniture d’électricité au TRV représentaient pour l’entreprise un avantage concurrentiel décisif. En effet, EDF disposait d’une masse d’informations considérable en sa qualité d’opérateur historique dans le secteur de la fourniture d’électricité. Compte tenu des contacts réguliers avec ses clients dans le cadre de la mise en service et du suivi des contrats au TRV, EDF disposait en outre d’informations précises et actualisées, notamment, sur le profil et les besoins de ses clients, ainsi que sur l’identité des interlocuteurs pertinents.

465. Cet avantage concurrentiel n’était pas reproductible dans des conditions financières et des délais raisonnables par les opérateurs alternatifs, qui n’étaient pas en mesure d’accéder par leurs propres moyens, lors de leur entrée sur le marché, à des bases de données aussi complètes que celles dont disposait EDF442.

466. Il convient, à cet égard, de relever que, si EDF a, à partir de la fin de l’année 2014, transmis aux opérateurs alternatifs certaines données issues de son fichier clients aux TRV Jaune et Vert, les fichiers transmis ne comportaient pas certaines informations essentielles pour procéder à la prospection et à la définition d’offres adaptées aux besoins des clients. Plusieurs opérateurs alternatifs ont ainsi souligné que la liste des interlocuteurs à contacter figurant dans le fichier transmis n’était pas exploitable443 et que l’absence, dans ce fichier, des numéros SIREN et SIRET ne permettait pas d’identifier les clients multi-sites et de réaliser un ciblage efficace des prospects444. Cette démarche de transmission partielle d’informations a été délibérément mise en œuvre par EDF, ainsi qu’en atteste un document interne daté d’avril 2014, indiquant que certaines catégories d’informations susceptibles d’intéresser particulièrement les opérateurs alternatifs devaient être préservées445.

467. En deuxième lieu, les pièces du dossier démontrent qu’EDF a utilisé l’infrastructure commerciale dédiée à son activité de fourniture d’électricité au TRV pour commercialiser des OM. En effet, EDF n’ayant pas, au sein de ses équipes commerciales, créé d’unités distinctes en charge, respectivement, des TRV et des OM, les conseillers de clientèle étaient amenés à être en contact avec les clients et prospects tant pour la conclusion et le suivi de contrats au TRV que pour la commercialisation d’OM. Ainsi, les équipes dédiées à la gestion des contrats au TRV ont été employées pour assurer la promotion des OM d’EDF. À cette fin, les conseillers de vente d’EDF ont été formés et ont bénéficié de moyens, notamment informatiques, leur permettant de traiter les contacts liés aux contrats au TRV afin de favoriser la commercialisation des OM.

468. La CRE relève ainsi qu’EDF a procédé à une « mise en commun (…) des outils marketing et de relations clientèle pour les clients en tarifs réglementés de vente d’électricité et ceux en offre de marché d’électricité et de gaz naturel ». La CRE souligne en effet qu’« à l’occasion de l’ouverture du marché à la concurrence, EDF s’est appuyé sur ses infrastructures commerciales préexistantes pour commercialiser les offres de marché de gaz naturel et d’électricité. La Direction Commerce d’EDF prend ainsi en charge l’ensemble de la commercialisation des offres de fourniture d’EDF : TRV, offres de marché en électricité et offres de marché en gaz naturel »446.

469. Par ailleurs, il résulte des pièces du dossier que les équipes commerciales d’EDF avaient pour consigne d’améliorer la connaissance de la clientèle et d’enrichir les données des fichiers clients en recueillant des informations qui n’étaient, pour certaines d’entre elles, pas requises pour la simple gestion des contrats au TRV. Un document interne daté de mai 2016 prévoyait ainsi que « lors de tout contact client ou prospects, le conseiller et commercial [sic] qualifie ou vérifie l’ensemble des données utiles sur le site, le contrat, le compte client »447. Le même document précisait que « ces informations complétées sur les 3 objets permettent d’assurer un "périmètrage" complet des sites et de permettre de faire des offres commerciales vers les sites hors portefeuille ».

470. En outre, les canaux dédiés à la souscription d’offres d’électricité au TRV et en OM n’ont pas été systématiquement distingués de façon claire pour les clients résidentiels. Ainsi, le client engagé dans un parcours de souscription en ligne au TRV était susceptible d’être invité à contacter le 3004, dédié aux OM448. De même, la page du site internet d’EDF consacrée aux déménagements des particuliers renvoyait exclusivement au numéro 3004 pour la souscription d’une offre. Cette situation était susceptible de conduire à ce qu’une OM soit proposée à un client qui souhaitait pourtant souscrire une offre d’électricité au TRV.

471. Ainsi, EDF a utilisé les moyens humains et techniques liés aux TRV, qui n’étaient pas reproductibles pour ses concurrents et qui constituaient un avantage concurrentiel, afin de se développer sur des marchés concurrentiels.

472. En troisième lieu, compte tenu de sa situation de fournisseur historique et de la masse des clients disposant d’un contrat au TRV pour la fourniture d’électricité, EDF a tiré profit de ses contacts réguliers avec ses clients aux TRV, au travers du flux constant d’appels entrants de ses clients. De même, comme indiqué par la CRE dans son avis rendu dans la présente affaire, EDF assurait la plus grande partie des mises en service, qui concernent soit la souscription d’un contrat par un nouveau client ou le déménagement d’un client existant, et ce y compris pour les clients non résidentiels449.

473. Les pièces du dossier font apparaître que ces appels entrants concernant la mise en service ou le suivi des offres TRV ont été utilisés, même sans sollicitation préalable du client, comme des opportunités de détection et de ventes de prestations commerciales supplémentaires. Ainsi, les pratiques de vente au rebond à l’occasion d’appels entrants de clients au TRV ont été encouragées par EDF, ainsi qu’il résulte, par exemple, d’un plan marketing de la division Entreprises recommandant « la systématisation de la vente sur appel entrant et du rebond commercial sur appel client et post-diagnostic (ETCP-Q-R) conjointement sur électricité, gaz naturel et services »450. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu’à l’occasion d’un appel entrant concernant la mise en service d’une offre d’électricité au TRV, le client se voyait systématiquement proposer une OM pour la fourniture de gaz naturel451. De même, EDF a profité des souscriptions de contrats de fourniture d’électricité, y compris au TRV, pour faire la promotion d’offres de services énergétiques, notamment ceux proposés par sa filiale CHAM452.

474. Ces contacts permettaient ainsi à EDF de proposer ses offres commerciales à une clientèle facilement accessible. À l’inverse, les fournisseurs alternatifs étaient dans l’obligation de mener des campagnes de contacts sortants et des actions de communication destinées à faire connaître leurs offres auprès du grand public, sans pouvoir entrer en relation avec les clients et prospects selon des modalités analogues à celles dont bénéficiait EDF en sa qualité d’opérateur historique et de fournisseur d’électricité au TRV.

475. Au surplus, il peut être observé qu’EDF avait, au moins à partir du mois de février 2009, conscience du caractère potentiellement anticoncurrentiel de certains comportements mis en œuvre, tels que l’orientation de la clientèle vers ses filiales453, l’utilisation du fichier clients au TRV pour les besoins de ses activités concurrentielles454, ou encore les ventes au rebond455. Il résulte de documents internes qu’EDF a assumé ce risque juridique en connaissance de cause, notamment pour ce qui concernait les pratiques de vente au rebond456. De même, il ressort d’une présentation interne à EDF datée du mois de septembre 2010 que, en dépit de l’avertissement du service juridique, « le COGE [Comité des offres gaz et électricité] assume le risque juridique » lié à l’utilisation du fichier clients historique en vue de formuler des « offres opportunistes » de gaz457. Ainsi, l’intention anticoncurrentielle d’EDF est établie au cas d’espèce.

476. Il résulte de ce qui précède qu’EDF, dans le cadre d’une stratégie globale visant l’ensemble des segments de clientèle, a fait une exploitation abusive des moyens dont elle disposait en sa qualité d’opérateur au TRV, qui constituaient un avantage concurrentiel et qui n’étaient pas reproductibles par ses concurrents dans des conditions de coûts et de délais raisonnables, afin de maintenir sa position sur les marchés de la fourniture au détail d’électricité et de renforcer sa position sur les marchés connexes de la fourniture de gaz et de services énergétiques.

b) Sur les effets des pratiques

477. En premier lieu, s’agissant des marchés de la fourniture au détail d’électricité, il convient de relever que les pratiques ont été mises en œuvre dans le contexte particulier de l’ouverture des marchés de l’électricité à la concurrence, caractérisé par l’existence d’un fort pouvoir de marché de l’opérateur historique et le développement encore fragile des opérateurs alternatifs.

478. De telles pratiques sont de nature à faire échec – au moins temporairement – à la volonté des pouvoirs publics de procéder par étapes successives à la libéralisation du secteur de l’énergie. Ainsi, selon la cour d’appel de Paris, « des pratiques mises en œuvre par un opérateur détenteur historique d’un monopole ayant pour effet de freiner le développement de la concurrence sur le marché sur lequel il exerçait son monopole sont particulièrement néfastes en ce qu’elles sont susceptibles de ralentir, voire de faire échec à l’ouverture de ce marché à la concurrence par la mise en place d’une barrière à l’entrée »458.

479. Alors que la fin des TRV Jaune et Vert devait logiquement développer l’animation concurrentielle pour les types de clientèle concernés, les pratiques en litige ont permis à EDF de préserver sa position sur les marchés concernés. Il convient à cet égard de relever que, au 31 décembre 2017, soit deux ans après la fin de ces tarifs réglementés, EDF conservait, selon la CRE, une part de marché supérieure à 70 %, en nombre de sites, sur les segments des moyens et grands sites non résidentiels459. La CRE relève de même que, sur le segment des moyens sites non résidentiels, la part de marché des opérateurs alternatifs n’a réellement commencé à croître qu’à compter du 1er janvier 2018460.

480. Il y a lieu de relever que les pratiques mises en œuvre dans le cadre de la stratégie Iroise ont permis à EDF, peu avant la disparition des tarifs Jaune et Vert, de convertir de façon massive en OM les contrats au TRV de ses clients. À l’issue de cette période charnière, EDF indiquait avoir, grâce au projet Iroise, atteint, voire dépassé ses objectifs en termes de part de marché et de marge commerciale461. Ces pratiques ont pu être amplifiées dans leurs effets par le fait que certains clients ont privilégié le choix de la simplicité en décidant de rester client de l’opérateur historique et de souscrire auprès d’EDF une OM selon des modalités prédéfinies sur la base des données du contrat au TRV, sans négociation supplémentaire. Ainsi, malgré la fin des TRV Jaune et Vert, la grande majorité des clients est demeurée fidèle à EDF, ce qui, selon la CRE, « traduit la position privilégiée dont bénéficient les fournisseurs historiques pour convertir leurs clients en offre de marché »462.

481. Par ailleurs, alors qu’EDF a pleinement utilisé les données dont elle disposait dans le cadre de la gestion des contrats au TRV pour développer ses OM dans la perspective de la disparition des tarifs Jaune et Vert, les pratiques en litige ont également contribué à freiner le développement des opérateurs alternatifs. En effet, ainsi qu’il a été dit, la transmission à ces derniers d’un fichier ne comportant pas certaines données essentielles a contribué à rendre plus complexes et donc plus coûteuses les démarches de prospection et de démarchage de clients potentiels.

482. Les effets des pratiques sur les parts de marché d’EDF ont également pu être prolongés dans le temps, dans la mesure où, comme le relève la CRE, les caractéristiques de certains contrats proposés lors de la disparition des tarifs Jaune et Vert incluent des durées d’engagement pluriannuelles et des clauses de sortie payantes, qui font de facto obstacle, lorsqu’elles sont en vigueur, à un changement d’opérateur463.

483. S’agissant des clients au TRV Bleu, les pratiques en litige, en particulier celles en lien avec l’insuffisante distinction des parcours de souscription de contrats au TRV et en OM, peuvent potentiellement favoriser la souscription d’OM auprès d’EDF du fait de la confusion entretenue entre ces deux types d’offres. De même, les pratiques consistant à proposer une OM pour la fourniture de gaz ou de services énergétiques lors de contacts avec les clients disposant d’un contrat au TRV pour la fourniture d’électricité peut avoir pour effet de fidéliser le client avec des offres multi-services et de le dissuader de changer d’opérateur pour la fourniture d’électricité, et ce d’autant plus que la CRE, relève, dans son avis,

« l’attitude attentiste »464 et le « souci de simplicité » des consommateurs, qui peuvent les conduire à vouloir ne disposer que d’un seul interlocuteur pour leurs besoins en énergie465.

484. En second lieu, les pratiques d’EDF sont également susceptibles d’avoir eu des effets anticoncurrentiels sur les marchés connexes.

485. Ainsi qu’il a été dit, les pratiques mises en œuvre par EDF ont, notamment, consisté à utiliser les données des clients au TRV pour détecter les besoins de ses clients en services énergétiques. Ces prestations de services, proposées en parallèle à la fourniture d’électricité, devaient contribuer à fidéliser le client. Les opportunités identifiées par les équipes commerciales d’EDF ont, en outre, profité aux filiales du groupe, qui ont bénéficié d’apports d’affaires importants grâce à la stratégie mise en œuvre par EDF. Ces pratiques ont, ainsi, été de nature à priver de débouchés importants les entreprises actives dans le secteur des services énergétiques ou désireuses de se développer sur ces marchés.

486. De même, EDF a pu conserver un rôle important en matière de production de CEE, en faisant usage de l’infrastructure commerciale liée au TRV. En effet, les pratiques en litige ont permis à EDF de détecter des opportunités auprès de ses clients au TRV et de développer les ventes de services et de travaux d’économie d’énergie qui donnent droit à la délivrance de certificats. Ces pratiques ont ainsi été susceptibles de limiter l’accès des autres obligés à des capacités de production de CEE. Les entités éligibles ont également pu être privées de ressources liées à la revente de CEE du fait de l’appropriation des CEE par les obligés, en particulier par EDF.

487. Enfin, les pratiques en litige, en particulier celles consistant à proposer des OM pour la fourniture de gaz lors de mises en service de contrats au TRV, ont permis à EDF de renforcer sa position sur les marchés de la fourniture du gaz. À cet égard, la CRE relève dans son avis qu’ « il apparaît très clairement au regard (i) de la prédominance des mises en service pour l’acquisition de clients gaz d’EDF et (ii) de la prééminence du TRV électricité dans son portefeuille de sites bi-énergies, qu’EDF capte principalement ses clients résidentiels en gaz naturel lors de leur souscription du tarif réglementé en électricité ». Selon la CRE, EDF tire en effet parti « de l’appel du consommateur pour une mise en service en électricité (souvent au tarif réglementé de vente) pour lui proposer concomitamment un contrat en gaz naturel (en offre de marché) »466. La CRE souligne également que, sur le segment résidentiel, EDF est le deuxième acteur du marché derrière Engie et que ses parts de marché ont augmenté de façon constante depuis 2014, alors même qu’EDF a proposé, sur la période 2013-2017, des offres économiquement moins attractives que celles des autres opérateurs alternatifs467.

488. Ainsi, les pratiques en litige sont susceptibles d’avoir eu des effets anticoncurrentiels tant sur les marchés de la fourniture au détail d’électricité que sur les marchés connexes.

c) Conclusion

489. Il résulte de ce qui précède qu’EDF, ainsi que plusieurs sociétés appartenant au groupe EDF, ont abusé de la position dominante détenue par EDF sur les marchés de la fourniture au détail d’électricité aux grands sites non résidentiels dont la consommation annuelle est inférieure à 7 GWh/an, de la fourniture au détail d’électricité aux sites moyens non résidentiels, de la fourniture au détail d’électricité aux petits sites non résidentiels et de la fourniture au détail d’électricité aux sites résidentiels.

G. SUR LES AUTRES COMPORTEMENTS DENONCES PAR ENGIE

490. Outre les pratiques ci-avant qualifiées, Engie a dénoncé une pratique d’utilisation abusive par EDF de son fichier clients au TRV Bleu sur plusieurs points particuliers.

491. Toutefois, ni les faits rapportés dans la saisine, ni les éléments versés au dossier n’ont permis d’établir qu’EDF aurait, comme l’allègue Engie, utilisé les données contenues dans ce fichier afin d’assurer la promotion, auprès de ces clients, de ses OM d’électricité.

492. De même, il n’existe pas d’éléments suffisamment probants permettant d’établir qu’EDF aurait utilisé son fichier clients au TRV Bleu afin de cibler les consommateurs sensibles à l’effacement. Si Engie fait référence dans sa saisine au tarif Tempo, il convient de relever que ce tarif correspond à un TRV à option d’effacement qu’EDF est tenue de proposer à tous les clients éligibles qui en font la demande468. Il y a lieu, en outre, d’observer qu’EDF ne propose pas, à destination des clients résidentiels, d’offre d’effacement explicite.

493. Par ailleurs, les allégations d’Engie selon lesquelles l’espace client réservé aux clients au tarif Bleu permettrait d’assurer la promotion d’OM de gaz ne peuvent être retenues. En effet, la simple mention de l’absence de contrat de gaz souscrit auprès d’EDF469 ne peut par elle- même être regardée comme une proposition de souscription d’une offre pour la fourniture de gaz naturel.

494. Enfin, le courrier d’EDF portant sur une information relative à la fin des TRV de gaz et promouvant ses offres de fourniture de gaz naturel ne comporte pas de mention lui donnant l’apparence d’un courrier réglementaire470. Par ailleurs, aucun élément ne permet d’établir qu’un tel courrier aurait été envoyé sur la base des données de contact des clients au TRV Bleu.

495. Il résulte de ce qui précède que la dénonciation des comportements allégués par Engie n’est pas appuyée d’éléments suffisamment probants.

H. SUR LA DUREE DES PRATIQUES

496. Afin de déterminer la durée d'une infraction aux règles du droit de la concurrence, il convient de rechercher la période qui s'est écoulée entre la date de début des pratiques et la date à laquelle il y a été mis fin471.

497. La première manifestation identifiable des pratiques en litige résulte d’un document interne daté de mars 2004, exposant la stratégie à mettre en œuvre par EDF au moment de l’ouverture du marché de l’électricité aux clients professionnels et aux collectivités territoriales472. Il résulte par ailleurs des constatations opérées ci-dessus que les pratiques ont continué à être mises en œuvre de façon continue depuis cette date, et ont perduré après la fin des TRV Jaune et Vert. Enfin, il résulte des pièces du dossier qu’une partie des comportements en litige étaient toujours en cours à la date d’envoi de la notification de griefs473.

498. Il résulte de ce qui précède qu’il convient de retenir que les pratiques ont débuté en mars 2004 et ont perduré à tout le moins jusqu’au 25 mai 2021.

I. SUR L’IMPUTABILITE DES PRATIQUES

1. PRINCIPES APPLICABLES

499. Il résulte d’une jurisprudence constante que les articles L. 420-2 du code de commerce et 102 TFUE visent les infractions commises par des entreprises, notion qui désigne une unité économique, même si, du point de vue juridique, celle-ci est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales. Cette entité économique doit, lorsqu’elle enfreint les règles de concurrence, répondre de cette infraction, conformément au principe de responsabilité personnelle474.

500. Ainsi, au sein d’un groupe de sociétés, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques475.

501. Dans le cas particulier où une société mère détient, directement ou indirectement par le biais d’une société interposée, la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteure d’un comportement infractionnel, il existe une présomption selon laquelle cette société mère exerce une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, présomption compatible avec les principes de responsabilité personnelle et d’individualisation des peines. Dans cette hypothèse, il suffit pour l’autorité de concurrence de rapporter la preuve de cette détention capitalistique pour imputer le comportement de la filiale auteure des pratiques à la société mère. La société mère peut renverser cette présomption en apportant des éléments de preuve susceptibles de démontrer que sa filiale détermine de façon autonome sa ligne d’action sur le marché. Si la présomption n’est pas renversée, l’autorité de concurrence sera en mesure de tenir la société mère pour solidairement responsable pour le paiement de la sanction infligée à sa filiale476.

2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE

a) EDF

502. Les pratiques en litige ont été mises en œuvre par les différentes composantes de la direction Commerce d’EDF. De façon continue depuis le 1er janvier 2004, jusqu’à la date de fin des pratiques, la société EDF, société mère faîtière du groupe EDF, est l’entité juridique qui assure la gestion des activités de cette direction. Il en résulte que la société EDF doit se voir imputer l’ensemble du grief en tant qu’auteure des pratiques477.

b) Dalkia Smart Building

503. La société Dalkia Smart Building, anciennement EDF Optimal Solutions, est une filiale du groupe EDF spécialisée dans les services énergétiques478.

504. Ainsi qu’il résulte des paragraphes 296 à 301 ci-dessus, cette société a participé à la mise en œuvre des pratiques en litige, notamment en ce qui concerne les marchés des services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique, ainsi que le marché des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE. Il ressort des pièces du dossier que la participation d’EDF Optimal Solutions aux pratiques remonte à une période indéterminée au cours de l’année 2008479. Par ailleurs, la quasi-totalité des clients professionnels et des collectivités potentiellement concernés par les offres de la société Dalkia Smart Building a cessé d’être éligible au TRV le 31 décembre 2020480.

505. Il en résulte que la société Dalkia Smart Building doit être tenue responsable de l’infraction, en ce qui concerne les marchés mentionnés au paragraphe précédent, pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2020.

506. Par ailleurs, la société EDF Optimal solutions, devenue Dalkia Smart Building, est, depuis sa création, une filiale à 100 % de la société EDF, détenue directement, ou indirectement par l’intermédiaire de la société Dalkia481. En application des principes rappelés ci-dessus, la société EDF doit être tenue solidairement responsable des pratiques mises en œuvre par la société Dalkia Smart Building.

c) Dalkia

507. La société Dalkia est une filiale du groupe EDF spécialisée dans les services énergétiques482.

508. Ainsi qu’il résulte des paragraphes 296 à 301 ci-dessus, cette société a participé à la mise en œuvre des pratiques en litige, notamment en ce qui concerne les marchés des services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique, ainsi que le marché des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE. Il ressort des pièces du dossier que la participation de la société Dalkia aux pratiques remonte au mois de novembre 2014483. Par ailleurs, la quasi-totalité des clients professionnels et des collectivités potentiellement concernés par les offres de la société Dalkia a cessé d’être éligible au TRV le 31 décembre 2020484.

509. Il en résulte que la société Dalkia doit être tenue responsable de l’infraction, en ce qui concerne les marchés mentionnés au paragraphe précédent, pour la période  du 1er novembre 2014 au 31 décembre 2020.

510. Par ailleurs, EDF détient 100 % des activités de Dalkia en France depuis 2014485. En application des principes rappelés ci-dessus, la société EDF doit être tenue solidairement responsable des pratiques mises en œuvre par la société Dalkia.

d) Citelum

511. La société Citelum est un opérateur centré sur l’éclairage public et les infrastructures urbaines électriques486.

512. Ainsi qu’il résulte des paragraphes 296 à 301 ci-dessus, cette société a participé à la mise en œuvre des pratiques en litige, notamment en ce qui concerne la fourniture au détail d’électricité, les services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique, ainsi que les actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE. Il ressort des pièces du dossier que la participation de la société Citelum aux pratiques a débuté le 17 septembre 2015487. Par ailleurs, la quasi-totalité des clients professionnels et des collectivités potentiellement concernés par les offres de la société Citelum a cessé d’être éligible au TRV le 31 décembre 2020488.

513. Il en résulte que la société Citelum doit être tenue responsable de l’infraction, en ce qui concerne les marchés mentionnés au paragraphe précédent, pour la période du 17 septembre 2015 au 31 décembre 2020.

514. Par ailleurs, EDF détient indirectement 100 % du capital de la société Citelum depuis 2014489. En application des principes rappelés ci-dessus, la société EDF doit être tenue solidairement responsable des pratiques mises en œuvre par la société Citelum.

e) CHAM

515. La société CHAM est une entreprise spécialisée dans la vente, l’entretien et la maintenance d’installations de chauffage490.

516. Ainsi qu’il résulte des paragraphes 296 à 301 ci-dessus, cette société a participé à la mise en œuvre des pratiques en litige, notamment en ce qui concerne la fourniture au détail d’électricité, les services de gestion / maintenance multi-technique et d’optimisation énergétique, ainsi que les actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE. Il ressort des pièces du dossier que la participation de la société CHAM aux pratiques remonte à la fin de l’année 2007491. Sa participation a toutefois été interrompue à la fin de l’année 2014, en lien avec la suppression de la Base Contact d’EDF492. Néanmoins, la société CHAM a de nouveau participé aux pratiques en litige, à tout le moins à compter du 31 mars 2021493.

517. Par conséquent, la société CHAM doit être tenue responsable de l’infraction, en ce qui concerne les marchés mentionnés au paragraphe précédent, pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2014, puis du 31 mars 2021 au 25 mai 2021.

518. Par ailleurs, EDF détient 100 % du capital de la société CHAM depuis 2006494. En application des principes rappelés ci-dessus, la société EDF doit être tenue solidairement responsable des pratiques mises en œuvre par la société CHAM.

J. SUR LES SANCTIONS ET LES ENGAGEMENTS

1. SUR LES PRINCIPES RELATIFS A LA DETERMINATION DES SANCTIONS ET A L’ACCEPTATION DES ENGAGEMENTS

a) Sur les sanctions

519. Le I de l’article L. 464-2 du code de commerce et l’article 5 du règlement n° 1/2003 habilitent l’Autorité à infliger une sanction pécuniaire aux entreprises et aux organismes qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles interdites par les articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du TFUE.

520. Par ailleurs, le troisième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, dans sa version applicable à la présente affaire, prévoit que « les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l’importance du dommage causé à l’économie, à la situation individuelle de l’organisme ou de l’entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l’entreprise appartient et à l’éventuelle réitération de pratiques prohibées par le [titre VI du livre IV du code de commerce]. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction ».

521. Aux termes du quatrième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, « le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l’entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d’affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l’entreprise consolidante ou combinante ».

522. Le III de l'article L. 464-2 du code de commerce dispose : « Lorsqu'un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l'entreprise ou l'organisme s'engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l'organisme ou l'entreprise donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l'Autorité de la concurrence, qui entend l'entreprise ou l'organisme et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I dans les limites fixées par la transaction ».

523. Enfin, il résulte du point 37 du communiqué transaction que « (…) si les principes de détermination des sanctions pécuniaires dont s’inspire le communiqué du 16 mai 2011 de l’Autorité495 peuvent constituer un point de référence pertinent lorsque s’engage la discussion entre le rapporteur général et les entreprises en vue de la signature du procès- verbal de transaction, en revanche, la méthode de détermination des sanctions décrite dans ce communiqué n’a pas vocation à être mise en œuvre dans la décision du collège, qui prononce une sanction à l’intérieur de la fourchette fixée dans le procès-verbal de transaction » (soulignement ajouté).

524. De même, la cour d’appel de Paris juge que le caractère négocié de la sanction prononcée dans le cadre d’une procédure de transaction rend inutile la mise en œuvre des étapes et critères exposés dans le communiqué sanctions. Par ailleurs, la mise en œuvre de cette procédure justifie la réalisation de gains procéduraux au moyen d’une motivation plus succincte de la décision, de sorte que l’Autorité n’est tenue d’indiquer que les éléments essentiels permettant d’apprécier l’individualisation de la sanction infligée et d’en justifier la proportionnalité496.

b) Sur les engagements

525. Aux termes du III de l’article L. 464-2 du code de commerce, il est loisible à une entreprise qui souhaite recourir à la procédure de transaction de s’engager à modifier son comportement. Dans ce cas, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction.

526. Si le rapporteur général accepte d’inclure les engagements dans la proposition de transaction, il en tient compte, le cas échéant, pour déterminer le montant minimal et maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Le collège examine les engagements proposés par l’entreprise et peut décider de les rendre obligatoires.

2. SUR LA GRAVITE DES PRATIQUES

527. Le grief notifié porte sur une stratégie consistant, pour EDF, à utiliser des moyens non reproductibles pour ses concurrents, liés à son statut d’opérateur public de la fourniture d’électricité au TRV, afin de se développer sur un ensemble de marchés concurrentiels du secteur de l’énergie.

528. De telles pratiques mises en œuvre par une entreprise en position dominante, qui tendent à évincer des concurrents du marché ou à retarder leur développement, revêtent un degré certain de gravité en ce qu’elles conduisent à élever des barrières à l’entrée et à empêcher les concurrents de se développer sur le marché en dépit de leurs mérites propres.

529. Les pratiques en cause ont, de surcroît, été mises en œuvre par l’opérateur historique du secteur de l’électricité, chargé d’une mission de service public et, à ce titre, investi d’une responsabilité particulière à l’égard, notamment, de ses concurrents. Ces pratiques se sont, en outre, déroulées au cours d’une période cruciale pour le développement des opérateurs concurrents, marquée, en particulier, par la fin des TRV Jaune et Vert à compter du 1er janvier 2016.

530. Ainsi, les pratiques ont été de nature à contrecarrer l’objectif d’ouverture à la concurrence du secteur de l’énergie poursuivi par les pouvoirs publics depuis le milieu des années 1990.

531. Par ailleurs, il peut être observé que les pratiques ont été susceptibles d’affecter des acteurs en cours de développement, nouveaux entrants sur les marchés de la fourniture au détail d’électricité et de gaz, récemment ouverts à la concurrence, ainsi que les clients finaux, notamment les petites et moyennes entreprises.

532. La gravité des pratiques doit également être appréciée au regard de la position occupée par EDF, qui est un opérateur verticalement intégré, présent à tous les échelons de la chaîne de valeur dans le secteur de l’électricité, ainsi que sur les marchés connexes de la vente de gaz et de services énergétiques. EDF a pu d’autant mieux tirer parti des pratiques qu’elle bénéficie d’une grande notoriété et d’une très forte image de marque auprès des consommateurs.

533. Enfin, les pratiques s’inscrivent dans la volonté délibérée d’EDF de bâtir une stratégie globale et cohérente. Elles ont été mises en œuvre en toute connaissance de cause, EDF ayant notamment choisi d’adopter une « posture d’ouverture » vis-à-vis des opérateurs alternatifs et du régulateur497 tout en assumant le risque juridique associé à la mise en œuvre des pratiques498. Par ailleurs, eu égard, notamment, à la pratique décisionnelle de l’Autorité499, aucune incertitude ne persistait quant au fait qu’elles étaient susceptibles d’être qualifiées de pratiques anticoncurrentielles.

534. Eu égard à ce qui précède, les pratiques en litige doivent être regardées comme très graves.

3. SUR LE DOMMAGE A L’ECONOMIE

535. Indépendamment de la gravité intrinsèque de l’infraction, il convient d’apprécier l’incidence que le comportement d’EDF a pu avoir sur le fonctionnement concurrentiel des marchés.

536. En l’espèce, les pratiques en cause ont visé le marché de la fourniture d’électricité mais également ceux de la fourniture de gaz, des services énergétiques, et des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE.

a) Les marchés de la fourniture d’électricité

537. Pour ce qui est de l’ampleur des pratiques visant les marchés de la fourniture d’électricité, il est constaté que l’opérateur historique a conservé des parts de marché très élevées sur tous les marchés concernés. En 2016-2017, les parts de marché d’EDF en volumes de consommation étaient de 73-74 % pour les sites moyens non résidentiels, de 79-82 % pour les petits sites non résidentiels, et de 83-89 % pour les sites résidentiels. Les parts de marché d’EDF concernant les grands sites non résidentiels étaient de 53-54 % sur ces années, et elles étaient de plus de 70 % avant décembre 2015, et de plus de 80 % avant décembre 2010500.

538. Les pratiques en cause ont ainsi couvert l’ensemble du territoire national et ont concerné une large majorité des consommateurs d’électricité en France.

539. En revanche, et comme cela ressort aussi bien de la notification des griefs que des observations d’EDF sur les éléments susceptibles d’être pris en considération pour déterminer le  montant de la sanction pécuniaire, transmises à l’Autorité le 10 novembre 2021, ces pratiques ont visé les différents segments de clientèle sur des temporalités différentes. Par ailleurs, certains éléments concrets ont pu atténuer les effets de la stratégie mise en place par EDF. Ainsi, les grands clients étaient à même de communiquer, par exemple lors d’appels d’offres, des données permettant à leurs fournisseurs potentiels d’améliorer la compétitivité de leurs offres, de sorte que les effets des pratiques sont nécessairement d’une ampleur plus réduite, concernant ces clients.

540. Concernant les caractéristiques économiques du secteur de la fourniture d’électricité, les pratiques ont été mises en œuvre par l’opérateur historique alors même que le marché était en cours d’ouverture à la concurrence, soit à une période critique au cours de laquelle l’opérateur historique bénéficiait d’un pouvoir de marché significatif tandis que les opérateurs nouveaux entrants étaient en phase de développement.

541. À cet égard, les pratiques en cause ont épousé les moments charnières du processus de libéralisation du secteur de l’énergie, en particulier la fin des TRV Jaune et Vert, qualifiée de « transformation majeure » par EDF501. De plus, il convient de prendre en compte, sur l’ensemble de la période, y compris avant 2014, la mise en œuvre de pratiques de reconquête de la clientèle passée à la concurrence, sous forme d’offres « en riposte », grâce aux informations qu’EDF détenait en tant qu’opérateur des TRV.

542. Pour ce qui est des conséquences conjoncturelles et structurelles des pratiques, ces dernières ont facilité le maintien des parts de marché d’EDF sur les différents marchés de fourniture au détail d’électricité.

543. Ainsi, les pratiques en cause ont contribué à maintenir les parts de marché d’EDF et à retarder le développement de fournisseurs alternatifs d’électricité. À cet égard, lors de la disparition des TRV Jaune et Vert, EDF a indiqué : « Le projet Iroise a permis d'accompagner cette transformation majeure, Ses objectifs étaient de constituer un portefeuille rentable en conservant un maximum de clients, Avec [60-80]% de part de marché et des objectifs de marge commerciale dépassés, les résultats sont au rendez- vous »502. La CRE a ainsi relevé, pour les marchés des sites moyens non résidentiels, que si la part de marché en volume des fournisseurs alternatifs avait certes augmenté de 22 points (de 20 % à 42 %) entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2019, cette évolution a toutefois débuté au 1er janvier 2018, soit deux ans après la fin des TRV Jaune et Vert503. De plus, si les fournisseurs alternatifs ont réussi à se développer sur ce segment, la CRE a relevé que la durée pluriannuelle des contrats signés conduisait à figer les parts de marché consécutives à la fin des TRV : ainsi, chaque client conquis par EDF grâce aux pratiques reprochées était susceptible de demeurer un client EDF pour une période relativement longue504. Enfin, s’agissant des marchés résidentiels et des petits sites non résidentiels, les concurrents ont continué à ne pénétrer ce marché que relativement lentement505.

544. Cependant, l’intégralité du maintien des parts de marché d’EDF ne peut être attribuée aux pratiques. En effet, EDF disposait, indépendamment des pratiques, de plusieurs avantages sur ses concurrents, comme l’attachement des clients aux TRV et leur méconnaissance ou leur défiance vis-à-vis des offres de marché. De plus, la difficile « contestabilité » du TRV avant 2014 – du fait notamment de prix de gros de l’énergie plus élevés avant cette date – a également pu constituer un obstacle au développement des fournisseurs alternatifs avant cette date. Enfin, les effets des pratiques sur les marchés de la fourniture d’électricité doivent également être relativisés au regard de l’essor du nombre et de la part de marché des fournisseurs alternatifs, en particulier après 2014-2016, de l’ampleur des mouvements de clients, de l’écart croissant entre le TRV et l’offre tarifaire la plus basse depuis 2015, et de l’augmentation de l’innovation dans les offres.

545. En revanche, le développement d’Engie sur les marchés de fourniture d’électricité n’est pas de nature à remettre en cause l’effet des pratiques. En effet, ce développement a pu découler de la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles auxquelles ne pouvaient ou n’ont pas recouru les autres opérateurs concurrents d’EDF. De même, le fait qu’Engie, depuis le début de la période du grief jusqu’en 2016, ait commis des pratiques identiques à celles reprochées à EDF n’est pas de nature à réduire les effets causés par ces pratiques. En effet, si les pratiques reprochées à EDF lui ont permis de mieux résister aux pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par Engie, elles ont également empêché les concurrents, déjà handicapés par les pratiques mises en œuvre par Engie, de rivaliser avec EDF.

b) Les marchés de la fourniture de gaz, des services énergétiques, et des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE.

546. Pour ce qui est de l’ampleur des pratiques, les parts de marché d’EDF après la mise en œuvre des pratiques apparaissent relativement faibles sur les marchés des services énergétiques et des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE, comme sur le marché de la fourniture de gaz. Il apparaît toutefois que, sur le marché de la fourniture de gaz, EDF est devenu le premier opérateur alternatif. En 2018, sa part de marché s’élevait à 13 % en nombre de sites sur le marché résidentiel, et EDF représentait environ la moitié de la part de marché des fournisseurs alternatifs506, ce alors même que ses offres n’étaient pas nécessairement les plus avantageuses sur le plan tarifaire, avec des tarifs en offres de marché supérieurs aux TRV507. Pour les clients non résidentiels, la part de marché d’EDF était de 10 % après 2017 auprès des clients connectés au réseau de transport, et de 5 à 8 % après 2014 auprès des clients non résidentiels connectés au réseau de distribution508.

547. Concernant les caractéristiques économiques des marchés de la fourniture de gaz, des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE et des services énergétiques, ils étaient également en cours de libéralisation ou de développement tout au long de la période des pratiques. En revanche, sur ces marchés, l’avantage dont disposait EDF, qui n’en était pas l’opérateur historique, était moindre que sur les marchés de l’électricité.

548. Pour ce qui est des conséquences conjoncturelles et structurelles des pratiques, la pratique des ventes au rebond au moment de la souscription par les clients d’un contrat d’électricité au TRV a favorisé la captation de parts de marché sur le marché de la fourniture de gaz509. Cette pratique consistant à profiter des contacts entrants de clients au TRV pour évaluer leurs besoins en fourniture de gaz et/ou leur proposer des offres de marché de fourniture de gaz s’appliquait indistinctement aux clients résidentiels, entreprises, professionnels ou collectivités. Plus un client était important, plus il faisait l’objet d’efforts de commercialisation ciblés d’EDF. Cette pratique a été particulièrement développée avant la fin des TRV Jaune et Vert, et elle s’est poursuivie avec la promotion de ventes au rebond lors notamment des mises en service de nouveaux contrats de fourniture d’électricité510.

549. Concernant spécifiquement les marchés des services énergétiques, l’effet des pratiques a été limité. En effet, lorsqu’elle est connue, la part de marché d’EDF sur certains de ces marchés est demeurée relativement faible (7 % sur les services d’entretien d’installation de chauffage, 7 % sur les marchés de l’éclairage public et des infrastructures urbaines électriques). Si les parts de marché d’EDF ou de ses filiales auraient pu être inférieures en l’absence des pratiques, il semble néanmoins que la perte de clientèle induite pour les concurrents a été limitée. Pour autant, l’analyse des effets des pratiques sur les marchés des services énergétiques ne saurait revêtir la même importance que celles des effets sur les autres marchés affectés, en raison du poids tout à fait marginal des ventes d’EDF sur ce secteur.

550. Concernant spécifiquement les marchés des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE, les pratiques ont permis à EDF de contrôler une part significative du marché, avec pour conséquence d’accroître les coûts des concurrents d’EDF et de limiter la capacité des éligibles à entrer sur ce marché. En particulier, la notification des griefs souligne que la base Contact permettait à CHAM d’identifier [5 000-10 000] prospects par an alors que le mécanisme « Trouvez un Pro » qui a remplacé cette base Contact n’en apportait que [0-5000]. Cependant, le dossier ne comprend aucune donnée de parts de marché d’EDF sur ces marchés. En tout état de cause, et comme rappelé ci-avant, l’analyse des effets des pratiques sur les marchés des actions de maîtrise de l’énergie conduisant à la délivrance de CEE ne saurait revêtir la même importance que celles des effets sur les autres marchés affectés, en raison du poids marginal des ventes d’EDF sur ce secteur.

551. Il résulte ainsi de tout ce qui précède que le dommage causé à l’économie est certain mais différencié selon les segments de marché.

4. SUR L’ADAPTATION DE LA SANCTION A LA TAILLE DU GROUPE

552. L’appréciation de la situation individuelle peut conduire l’Autorité à prendre en considération l’envergure de l’entreprise en cause ou du groupe auquel elle appartient. L’Autorité peut ainsi adapter la sanction au regard de la taille, de la puissance économique et des ressources globales du groupe auquel appartient l’auteur des pratiques.

553. En l’espèce, l’infraction en cause a été imputée à la société EDF, société mère faîtière du groupe EDF, en tant qu’auteure des pratiques, et en tant que société mère des sociétés EDF Optimal Solutions, Dalkia Smart Building, Dalkia, Citelum et CHAM, également auteures des pratiques. Pour apprécier la puissance économique du groupe auquel appartiennent ces entreprises, il convient de relever que le chiffre d’affaires mondial (comptes consolidés) du groupe EDF s’élevait à 71,317 milliards d’euros en 2019 et à 69,031 milliards d’euros en 2020511.

5. SUR LA REITERATION

554. La réitération est une circonstance aggravante dont la loi prévoit, compte tenu de son importance particulière, qu’elle doit faire l’objet d’une prise en compte autonome.

555. Il résulte de la jurisprudence que la réitération « peut être retenue pour de nouvelles pratiques identiques ou similaires, par leur objet ou leurs effets, à celles ayant donné lieu au précédent constat d’infraction, sans que cette qualification n’exige une identité quant à la pratique mise en œuvre ou quant au marché concerné »512.

556. Au cas d’espèce, les pratiques en litige sont similaires, par leur objet ou leurs effets, aux pratiques sanctionnées par la décision n° 13-D-20 du 17 décembre 2013 précitée513, devenue définitive le 27 septembre 2018514, qui poursuivaient l’objectif de restreindre le développement des concurrents sur des marchés connexes au marché dominé, grâce aux avantages résultant pour EDF de sa situation d’opérateur historique.

557. Il y a lieu, par suite, de considérer qu’EDF se trouve en situation de réitération.

6. SUR LE MONTANT DE LA SANCTION

558. Au vu de l’ensemble de ces éléments et dans le respect des termes de la transaction, le montant de la sanction infligée à EDF est fixé à 300 millions d’euros.

559. Ce montant est inférieur au plafond légal de sanction prévu par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce, qui s’élève, au cas d’espèce, à 7,559 milliards d’euros.

7. SUR LES ENGAGEMENTS PROPOSES PAR EDF DANS LE CADRE DE LA PROCEDURE DE TRANSACTION

560. EDF a proposé plusieurs engagements lors des échanges avec le rapporteur général sur la procédure de transaction, comme le permet le III de l’article L. 464-2 du code de commerce qui prévoit : « lorsque l’entreprise (…) s’engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction ». Le procès- verbal de transaction signé par le rapporteur général et les parties ont ainsi retenu deux séries d’engagements.

561. En premier lieu, EDF s’engage à mettre à disposition des fournisseurs d’électricité alternatifs qui en feraient la demande son fichier clients au TRV Bleu (engagement n° 1). Le fichier comporte, d’une part, des données anonymisées relatives à l’ensemble des clients au TRV Bleu515. Ces données du fichier clients seront transmises dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision. Le fichier comporte, d’autre part, des données individuelles relatives aux clients au TRV Bleu non résidentiels (par site)516 et résidentiels517. La transmission de ces données nécessite au préalable le recueil du consentement des clients. Selon le degré de sensibilité de ces données, leur transmission est soumise au consentement exprès du client (procédure d’opt-in), ou à son absence d’opposition (procédure d’opt-out)518. EDF s’engage à transmettre ces données en trois étapes. La dernière partie des données concernant les clients résidentiels sera mise à disposition dans un délai de douze mois à compter de la notification de la présente décision. La mise à disposition de ces données donnera lieu à une contribution financière. S’agissant des données dont la mise à disposition nécessite au préalable le recueil du consentement des clients, la contrepartie financière mise à la charge des fournisseurs d’électricité – dont devra également s’acquitter EDF pour son activité d’offres de marché – sera fixée au prix coûtant des prestations externes nécessaires à la mise en œuvre de cet engagement, et inclut le coût du recueil et du traitement du consentement des clients.

562. En second lieu, EDF s’engage à séparer les parcours de souscription par téléphone des clients et prospects au TRV Bleu et des clients et prospects en OM (engagement n° 2). Cet engagement consiste à permettre au client ou prospect de choisir lui-même l’objet de son appel (souscription ou suivi d’un contrat au TRV ou en OM), à affecter sur une période donnée d’au moins une journée les conseillers par type de contrat (TRV ou OM) et à interdire aux conseillers TRV de proposer de manière proactive la vente d’OM de tout type, qu’il s’agisse d’électricité, de gaz ou de services énergétiques. À cette fin, EDF s’engage à mettre en place des consignes strictes interdisant toute démarche proactive de vente d’OM auprès des clients au TRV, à prévoir une souscription différée lorsqu’un client au TRV sollicite expressément la souscription d’une OM, à exclure toute rémunération variable reposant sur les volumes de ventes d’OM qui seraient réalisées par les conseillers TRV, et à mettre en place des appels mystères dans le but de contrôler le respect des consignes.

563. L’Autorité prend acte des engagements d’EDF, qui ont été confirmés devant elle en séance, et les rend obligatoires pour une durée de trois ans à compter de la notification de la présente décision. Ces engagements pourront être renouvelés dans les conditions décrites au point 40 de la proposition d’engagements.

564. L’exécution de ces engagements n’exonère pas EDF de l’obligation de se conformer pleinement au droit de la concurrence.

DÉCISION

Article 1er : Il est établi que la société EDF, en tant qu’auteure et en tant que société mère, ainsi que les sociétés Dalkia Smart Building, Dalkia, Citelum et CHAM, en tant qu’auteures des pratiques, ont enfreint les dispositions des articles 102 TFUE et L. 420-2 du code de commerce, pour avoir mis en œuvre des pratiques consistant à établir et appliquer une stratégie s’appuyant sur un ensemble de moyens non reproductibles par leurs concurrents, et liés au statut d’opérateur de service public d’EDF au titre de la fourniture d’électricité au tarif réglementé de vente, pour se développer sur un ensemble de marchés concurrentiels du secteur de l’énergie.

Article 2 : Il est infligé, au titre des pratiques visées à l’article 1er, une sanction de 300 millions d’euros, solidairement aux sociétés EDF, Dalkia Smart Building, Dalkia, Citelum et CHAM.

Article 3 : L’Autorité de la concurrence prend acte des engagements pris par EDF, qui font partie intégrante de la décision à laquelle ils sont annexés. Ces engagements sont rendus obligatoires pour une durée de 3 ans à compter de la notification de la décision.

Strictement confidentiel

 

 

 

 

NOTES :

1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.

2 Cotes 9430 à 9448.

3 Cote 9403.

4 Directive 96/92/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité (JOUE L 27 du 30 janvier 1997, p. 20-29) ; directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 96/92/CE (JOUE L 176 du 15 juillet 2003, p. 37-56) ; directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JOUE L 211 du 14 août 2009,

p. 55-93) ; directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive 2012/27/UE (JOUE L 158 du 14 juin 2019, p. 125-199). Ces textes ont fait l’objet de transpositions en droit national par le biais de plusieurs lois : loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité (JORF n° 35 du 11 février 2000, p. 1) ; loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières (JORF n° 185 du 11 août 2004, p. 1) ; loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (JORF n° 163 du 14 juillet 2005, n° 2) ; loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie (JORF n° 284 du 8 décembre 2006, p. 1) ; loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (JORF n° 284 du 8 décembre 2010, n° 3) : loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (JORF n° 65 du 18 mars 2014, p. 1) ; ordonnance n° 2021-237 du 3 mars 2021 portant transposition de la directive (UE) 2019/944 (JORF n° 54 du 4 mars 2021, n° 6).

5 Loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, article 14.

6 Décision de la Commission européenne du 12 juin 2012 concernant l’aide d’état n° SA.21918 mise à exécution par la France concernant les tarifs réglementés de l’électricité en France.

7 Cote 5649.

 

8 IV de l’article 64 de la loi Énergie Climat.

9 Ibid.

10 Voir avis de la CRE, Cote 2099.

11 Voir avis de la CRE, Cotes 2085 et 2094.

12 Rapport 2018-2019 de la CRE sur « Le fonctionnement des marchés de détail français de l’électricité et du gaz naturel », disponible à l’adresse suivante : https://www.cre.fr/Documents/Publications/Rapports- thematiques/le-fonctionnement-des-marches-de-detail-francais-de-l-electricite-et-du-gaz-naturel-rapport- 2018-2019, page 92.

13 Rapport 2018-2019 de la CRE, précité, page 6.

14 Voir avis de la CRE, Cote 2088.

15 CRE, « Les marchés de détail de l’électricité et du gaz naturel », observatoire du 3ème trimestre 2020 de la CRE disponible à l’adresse suivante : https://www.cre.fr/Documents/Publications/Observatoire-des- marches/observatoire-des-marches-de-detail-de-l-energie-du-3eme-trimestre-2020, page 10.

16 Voir avis de la CRE, Cote 2090 VC – 2136 VNC.

17 Directive 98/30/CE du 22 juin 1998 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel (JOUE L 204 du 21 juillet 1998, p. 1-12) ; directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel (JOUE L 176 du 15 juillet 2003, p. 57-78) ; directive 2009/73/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JOUE L 211 du 14 août 2009 p. 94-136).

 

18 Rapport 2016-2017 de la CRE, précité, page 94.

19 Voir avis de la CRE, Cote 2155.

20 Voir avis de la CRE, Cote 2155.

21 Loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique.

22 Le terme « cumac » correspond à la contraction de « cumulés » et « actualisés ». Par exemple, le montant de kWh cumac économisé suite à l’installation d’un appareil performant d’un point de vue énergétique correspond au cumul des économies d’énergie annuelles réalisées durant la durée de vie de ce produit. Les économies d’énergie réalisées au cours de chaque année suivant la première sont actualisées en divisant par 1,04 les économies de l’année précédente (taux d’actualisation de 4 %).

23 Article L. 221-4 du code de l’énergie : « Les personnes qui ne respectent pas les prescriptions de la mise en demeure dans le délai imparti sont tenues de se libérer par un versement au Trésor public. Ce versement est calculé sur la base d'une pénalité maximale de 0,02 euro par kilowattheure. Les titres de recettes sont émis par l'autorité administrative et sont recouvrés comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Une pénalité de 10 % du montant dû est infligée pour chaque semestre de retard. »

24 Cour des comptes, Communication au Premier Ministre – Les certificats d’économies d’énergie, octobre 2013, disponible à l’adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-certificats- deconomies-denergie.

25 Ibid., page 45.

26 Cotes 18013 et 18213 VC – 36510 et 36512 VNC.

27 Ibid, page 140.

28 ADEME, « Le marché français des services énergétiques, États des lieux et analyse », Étude réalisée pour l’ADEME par CODA Stratégies, juin 2014. La synthèse de ce rapport est disponible à l’adresse suivante : https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/marche-francais-services-energetiques-2014.pdf

29 Voir également à ce sujet les cotes 18401, 18402, 18403, 18405 et 18406.

30 Voir fiche sur les CPE éditée par l’ADEME et la région Auvergne Rhône-Alpes : https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/contrat-performance-energetique-cles-comprendre- 2014.pdf

31 Cote 16915.

32 Voir avis de la CRE, Cotes 20933 à 20937.

33 Voir avis de la CRE, Cote 2119.

34 Voir avis de la CRE, Cote 2119.

38 Cote 35029.

39 Cote 35029.

40 Cote 13811.

41 Cote 35030.

42 Cote 13760.

43 Cotes 13763 et 13765.

44 Cote 13781.

45 https://www.citelum.fr/industries-et-tertiaire/nos-services/

46 Cote 13795.

47  https://www.dalkia.fr/fr/espace-presse/communiques-de-presse/edf-optimal-solutions-rejoint-dalkia

48  https://www.groupecham.com/le-groupe-CHAM/qui-sommes-nous/

49 Cotes 13834 à 13836.

50 Cour des Comptes, Communication au Premier Ministre, précitée, page 100.

51 Cotes 21050 à 21051 et 36139.

52 Cote 35006.

53 Voir également, sur ce sujet, décision de l’Autorité n° 13-D-20 du 17 décembre 2013 relative à des pratiques mises en œuvre par EDF dans le secteur des services destinés à la production d’électricité photovoltaïque, paragraphe 111.

54 Cote 21822.

55 Cour des comptes, Communication au Premier Ministre, précitée, page 100.

56 Cotes 16669 et 16670.

57 Cotes 17093 et 17095.

58 Cotes 36511, 22415, 22417 à 22418, 35726.

59 Cote 36333.

60 Avant 2012, il existait trois directions de marché : une direction Particuliers et Professionnels, une direction Entreprises, et une direction Collectivités. À partir de 2012, EDF a revu en profondeur son organisation commerciale, notamment en rapprochant le segment des professionnels avec celui des entreprises.

61 Avant 2012, il y avait 8 DCR particuliers et professionnels et 8 DCR entreprises et collectivités locales. En 2012, les professionnels ont été rattachés aux 8 DCR en charge des clients professionnels, des entreprises et des collectivités locales.

62 Cote 2797 ; cote 2798 VC – 35895 VNC.

63 Cote 2798 VC – 35895 VNC.

64 Cote 2796.

65 Cote 2812.

66 Avis de la CRE, Cote 2117.

67 Cotes 2796, cotes 2799 et 2800 VC – 35896 et 35897 VNC.

68 Cote 2802 et cote 2803 VC – 35899 VNC.

69 Cote 14175 VC – 36008 VNC.

70 Cote 5428 VC – 35971 VNC.

71 Cote 13331 VC – 36002 VNC, et cote 13380.

72 Cote 6121.

73 Cote 22427.

74 Cote 22428.

75 Cote 2819 VC – 35900 VNC.

76 Cote 22431.

77 Cote 22435.

78 Cote 13331 VC – 36002 VNC, et cote 13380.

79 Cote 22435.

80 Cote 22436. À cette époque, les données relatives aux clients professionnels au tarif Bleu ont été migrées vers CLOE.

81 Cote 22428.

82 Cote 21740.

83 Cotes 21545 et 21546.

84 Cotes 33935 et 33936.

85 Cotes 5861 à 5876 VC – 35978 à 35993 VNC.

86 Cote 5864.

87 Cote 5864.

88 Cote 5865.

89 Cote 5872.

90 Cote 21916.

91 Cote 5868 VC – 35985 VNC.

92 Cote 22230.

93 Cote 35985.

94 Cote 5870.

95 Cote 21939.

96 Cote 21940, voir également cote 22229.

97 Cote 21941.

98 Cote 21950.

99 Cote 20953.

100 La vente au rebond consiste à profiter d’un contact pris à l’initiative du client pour formuler une offre commerciale distincte de sa demande initiale.

101 Cote 21738.

102 Cote 21336.

103 Cotes 36145 et 21337.

104 Cote 21188.

105 Cotes 21221 et 21222.

106 Cotes 21190 à 21193. Voir également cote 21201.

107 Cote 21211.

108 Cote 21214.

109 Cotes 21227 à 21230.

110 Cotes 21379 et suivantes.

111 Cote 21386.

112 Cotes 21387 à 21390.

113 Cotes 21267 et 21268.

114 Cotes 21525 à 21529.

115 Cote 21659.

116 Cote 34524.

117 Cote 21917.

118 Cote 13358, voir également cote 36002.

119 Cote 34526.

120 Cote 16897.

121 Cote 14172 VC – 36006 VNC.

122 Cote 21363.

123 Avis de la CRE, Cotes 2136 et 2097.

124 Cotes 20994 et 21278 à 21282.

125 Cote 22028.

126 Cotes 22029 à 22031.

127 Cotes 21834 à 21837.

128 Cote 21839.

129 Cotes 21110 et 21115.

130 Cote 17499.

131 Cote 17503. Voir également cotes 21103 et 21104.

132 Cote 21107.

133 Cote 21398.

134 Cote 21399.

135 Cote 21398. Voir également cote 21414.

136 Cote 22033.

137 Cotes 22029 et 22030.

138 Cote 21855.

139 Cotes 21850 et 21851.

140 Cotes 36413 à 36414.

141 Cotes 21856 à 21858.

142 Cotes 21286 et 21289.

143 Cotes 21860 et 219611.

144 Cote 20994, voir également cote 36130.

145 Cote 20981.

146 Cote 20981.

147 Cotes 34010, 34013 et 34015.

148 Cotes 21335 à 21341.

149 Cote 21093.

150 Cote 21276.

151 Cotes 21276 et 21278.

152 Cote 18398.

153 Cotes 21302 à 21304.

154 Cotes 36128 et 36506.

155 Cote 36506.

156 Cote 36423 VC – 36638 VNC.

157 Cotes 21491 et 21493.

158 Cote 21590.

159 Cote 16794.

160 Cote 16799.

161 Cote 18398.

162 Cote 20954. Voir également, Cote 21012 VC – 36132 VNC.

163 Cotes 21286 à 21289.

164 Cote 21051, cote 21052 VC – 36139 VNC, et également cote 21071 VC – 36143 VNC. Voir en outre cote 21082 sur la « détection de masse ».

165 Cotes 17505 et 17506 VC – 36065 VNC.

166 Cotes 21053 à 21055.

167 Cote 21075.

168 Cote 21097.

169 Cote 36254 VC – 36633 VNC. Voir également cote 35020, et cote 36264 VC – 36634 VNC.

170 Cote 22421.

171 Cote 22028.

172 Cote 22035.

173 Cote 20970.

174 Cote 21001 VC – 36130 VNC.

175 Cote 21131.

176 Cote 21132.

177 Cote 21154.

178 Cote 21148. Voir également cotes 13340 VC – 36003 VNC, 5264 VC – 35970 VNC et 33962.

179 Cote 22201. Voir également cotes 22193 et 22206.

180 Cote 22202.

181 Cotes 22196 et 22197.

182 Rapport 2014-2015 de la CRE, précité, pages 159 et 160.

183 Cotes 21337 et 21638 VC – 36144 VNC.

184 Cotes 21246 à 21249.

185 Cote 34347.

186 Cote 35611 VC – 36508 VNC.

187 Cote 14174 VC – 36007 VNC.

188 Cote 5649.

189 Cote 14192 VC – 36010 VNC.

190 Cote 13153 VC – 35996 VNC.

191 Cotes 34360 et 34368.

192 Cote 35481.

193 Cote 21601 VC – 36150 VNC.

194 Cote 34358.

195 Cote 33209.

196 Cote 33268.

197 Cote 33437.

198 Cotes 33434 à 33437.

199 Cote 281.

200 Cote 288.

201 Cote 281.

202 Cote 5803.

203 Cotes 5806 à 5809.

212 Cote 35529.

213 Cote 35529.

214 Cote 13959 VC – 36005 VC.

215 Cotes 33192 et 33193.

216 Cote 33193.

217 Cote 33226.

218 Cote 33174.

219 Cote 33527.

220 Cote 33331.

221 Cote 33333.

222 Cote 33333.

223 Cote 35462.

224 Cote 14106.

225 Cote 34102 VC – 36172 VNC.

226 Cote 13138 VC – 35994 VNC.

227 Cote 13203.

228 Cote 34148 VC – 36175 VNC.

229 Cote 21446. Voir également cote 21725.

230 Cote 35459.

231 Cote 5729.

232 Cote 5650.

233 Cote 5653 VC – 35976 VNC ; cote 5650. .

234 Cote 5651.

235 Cote 33217.

236 Cote 33216.

237 Cote 35445.

238 Cote 33190.

239 Cote 35648 VC – 36509 VNC.

240 Cote 33271.

241 Cote 5731 VC – 35977 VNC.

242 Cote 33209.

243 Cote 5625.

244 Cote 35631

245 Cote 35648 VC – 36509.

246 Cote 33799 VC – 36168 VNC.

247 Cote 33116 VC – 36162 VNC.

248 Cotes 5631 à 5635.

249 Cote 33209.

250 Cote 13274.

251 Cote 33801 VC – 36169 VNC ; Cote 33118.

252 Cote 33118.

253 Cote 33074.

254 Cote 33347.

255 Cote 33454, voir également cote 33074.

256 Cote 33216.

257 Cote 35227.

258 Cotes 35366 et 35367.

259 Voir à ce sujet décision de l’Autorité n° 14-MC-02 du 9 septembre 2014 relative à une demande de mesures conservatoires présentée par la société Direct Energie dans les secteurs du gaz et de l’électricité.

260 Cote 2838 VC – 6141 VNC.

261 Cote 14765 ; voir également cote 14766.

262 Pour « Effacement Jour de Pointe ».

263 Cote 35476.

264 Cote 6142 VC – 2839 VNC.

265 Cotes 6047 et 6065.

266 Cote 2839 VC – cote 6142 VNC.

267 Cotes 33596 à 33597.

268 Cote 35674.

269 Cote 1665. Voir également la réponse d’Enovos, Cote 1924, de Vattenfall, Cote 1699, et de Total Energie Gaz, Cote 1413.

270 Cote 2238.

271 Cotes 33463 et 33464.

272 Cote 22431.

273 Cote 1665.

274 Cote 1567.

275 Cote 1511.

276 Cote 1700.

277 Cotes 33683 et 33684.

278 Cote 236.

279 Cote 816.

280 Cote 1798.

281 Cote 1798.

282 Cotes 780 et 781.

283 Cotes 5985 et 6009.

284 Cote 33209.

285 Cote 21732.

286 Cote 2841, voir également cote 33125.

287 Cotes 1352 et 1353.

288 Cotes 33426 à 33429.

289 Cote 13224.

290 Cote 13314 VC – 36000 VNC.

291 Cote 13313 VC – 35999 VNC.

292 Cote 13317.

293 Cote 34021.

294 Cote 34020.

295 Cote 14010.

296 Cote 14017.

297 Cote 34511.

298 Cote 34515.

299 Cote 36325.

300 Cotes 36316 à 36319.

301 Cote 18236.

302 Cote 18019. Voir également cote 36337 VC – 36637 VNC.

303 Cote 14218 VC – 36011 VNC.

304 Cote 18077 VC – 36072 VNC et cote 13954 VC – 36004 VNC.

305 Cote 14830 VC - 36012 VNC. Voir également cotes 14053, 34089 VC – 36171 VNC, 34139 VC –

36174 VNC.

306 Cote 34019.

307 Cote 13975.

308 Cote 13312 VC – 35998 VNC.

309 Cote 13317.

310 Cote 34398 VC – 36176 VNC.

311 Cote 13216 VC – 35997 VNC.

312 Cote 34137 VC – 36173 VNC.

313 Cote 16886.

314 Cote 16886.

315 Cote 16900.

316 Cote 16912 VC – cote 36054 VNC.

317 Cote 18099.

318 Cote 18144.

319 Cote 16905.

320 Cote 5463 VC – 35972 VNC. Comme indiqué par EDF en audition, « Magellan était un programme lancé par la direction du marché d’affaires en 2017, dont l’objectif était de regrouper l’ensemble des projets du marché qui avaient trait à la conquête au sens large. Le terme « Conquête » est très large, cela va de la formation des vendeurs au lancement de nouvelles offres, en passant par le fonctionnement interne, par exemple le fonctionnement en mode « projet ». ».

321 Cote 5463 VC – 35972 VNC.

329 Cote 5495 VC – 36632 VNC.

330 Cote 5868 VC – 35985 VNC.

331 Cote 5495 VC – 36632 VNC.

332 Cote 3251 VC – 35903 VNC.

333 Cotes 3257 VC – 35904 VNC et 3473 VC – 35906 VNC.

334 Cote 3493 VC – 35908 VNC.

335 Cote 3473 VC – 35906 VNC.

336 Cote 2799 VC – 35896 VNC.

337 Cote 2802.

338 Cote 35177 VC – cote 36515 VNC.

339 Cote 33154.

340 Étaient ainsi proposées une réduction de 20 % sur la première année de souscription d’un contrat d’entretien de l’équipement de chauffage, et une réduction de 500 euros pour l’installation d’un nouvel équipement de chauffage performant (voir cotes 36563 et 36579). La réduction de 500 euros n’est plus en vigueur aujourd’hui.

341 Cotes 36565 et 36566.

342 Cotes 36566 et 36597-36598.

343 Cotes 36566 et 36591.

344 Cote 36567.

345 Cote 34682.

346 Cotes 34766, 34769 et 34772.

347 Cotes 35371 et 35391.

348 Cotes 35371 et 35397.

349 Cotes 35371, 35372, 35407 à 35419.

350 Cote 35427.

351 Cotes 36204, 36205, 36212 et 36216.

352 Cotes 36205, 36222 et 36226.

353 Cotes 36205, 36232 et 36234.

354 En anglais « machine learning ». Il s’agit d’une branche du domaine de l’intelligence artificielle qui concerne la capacité à permettre à une machine de réaliser une tâche spécifique (reconnaissance de certains éléments, traduction, etc.) en lui fournissant un ensemble défini de données à partir desquelles le programme peut s’entraîner (voir étude de l’Autorité « Algorithmes et concurrence ») pages 9 et 10. L’apprentissage automatique peut être continué et affiné après la mise en production.

355 En anglais « churn » : il s’agit de l’ensemble des phénomènes conduisant à la réduction de la rentabilité d’une base de clientèle : départs à la concurrence, mais également usage moindre ou passage à une offre moins rentable pour le fournisseur.

356 Cote 35187.

357 Cote 35187.

358 Cote 35353.

359 Décision n° 19-D-21 du 28 octobre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport routier de marchandises, paragraphe 71 ; décision n° 21-D-11 du 7 juin 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité sur internet, paragraphe 243.

360 Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, Journal officiel n° C 101 du 27/04/2004 p. 0081 – 0096.

361 Voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour de justice du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche c/ Commission, 85/76, paragraphe 28. Voir aussi la Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence, JO C 372, 9.12.1997, paragraphe. 5.

362 Voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour de justice du 9 novembre 1983, NV Nederlandsche Banden Industrie Michelin/Commission, 322/81 paragraphe 37 et l’arrêt du Tribunal du 25 mars 2015, Slovenská pošta contre Commission, T-556/08, paragraphe 112.

363 Voir les paragraphes 13 et suivants de la Communication européenne sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence, 9 décembre 1997.

364 Ibid., paragraphe 20.

365 Voir notamment décision de la Commission européenne COMP/M.5978 du 26 janvier 2011, GDF Suez/International Power ; décision de l'Autorité n° 11-DCC-142 du 22 septembre 2011 relative à la prise de contrôle de la société Poweo par la société Direct Energie, paragraphes 8 à 19.

366 Décision de la Commission européenne COMP/M.7137 du 25 juin 2014 - EDF/DALKIA France.

367 Décision de l’Autorité n° 12-DCC-20 du 7 février 2012 relative à la prise de contrôle exclusif d’Enerest par Électricité de Strasbourg, paragraphe 8 ; décision de l’Autorité n° 17-DCC-155 du 22 septembre 2017 relative à la prise de contrôle exclusive de la société Quadran par la société Direct Energie, paragraphe 24 ; décision de l’Autorité n° 17-DCC-67 du 26 mai 2017 relative à la prise de contrôle exclusif de la société La Compagnie du Vent par Engie, paragraphe 24.

368 Décision de l’Autorité n° 17-DCC-16 du 8 février 2017 relative à la prise de contrôle conjoint des sociétés Eole Moulin Tizon, Eole Brocéliande, Eoliennes de l’Ourcq et du Clignon par les sociétés Predica Prévoyance, Omnes Capital et Quadran, paragraphe 15 ; décision de l’Autorité n° 16-DCC-153 du 20 octobre 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Enel France par la société Energies Libres, paragraphe 9.

369 Cote 2788.

370 Décision n° 13-D-20 du 17 décembre 2013 relative à des pratiques mises en œuvre par EDF dans le secteur des services destinés à la production d’électricité photovoltaïque.

371 Voir par exemple décision de la Commission européenne COMP/M.3440 EDP/ENI/GDP et COMP/M.4994 Electrabel/Compagnie Nationale du Rhône ; décision COMP/M.7137, précitée.

372 Voir par exemple les décisions précitées n° 17-DCC-16 n° 16-DCC-153.

373 Voir notamment décision de la Commission européenne COMP/M.5978 du 26 janvier 2011, GDF Suez/International Power ; décision de l'Autorité n° 11-DCC-142 du 22 septembre 2011 relative à la prise de contrôle de la société Poweo par la société Direct Energie, paragraphes 8 à 19.

374 Voir notamment décision de l’Autorité n° 11-DCC-34 du 25 février 2011 relative à l’acquisition du contrôle exclusif de Ne Varietur par GDF Suez, paragraphe 30 ; décision de la Commission européenne COMP/M.4180. du 14 novembre 2006, Gaz de France/Suez, paragraphes 63 et suivants. Voir également décision de l’Autorité n° 14-MC-02 précitée, paragraphes 45 à 48.

375 Décision de la Commission européenne COMP/M.4180 précitée.

376 Décision n° 14-MC-02, précitée, paragraphes 45 à 48 et 61.

377 Voir par exemple la décision de la Commission européenne COMP/M.4180 précitée, paragraphe 104.

378 Voir par exemple la décision de l’Autorité n° 17-D-16 du 7 septembre 2017 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Engie dans le secteur de l’énergie, paragraphe 37.

379 Décision de la Commission européenne COMP/M.6020 du 14 janvier 2011, ACS/Hochtief, paragraphe 1819 ; décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 80.

380 Décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 81, et décision COMP/M.4180, précitée, paragraphe 1037.

381 Décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 98.

382 Décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 87.

383 Décision de l’Autorité n° 15-DCC-09 du 12 février 2015 relative à la prise de contrôle exclusif de la société JF Cesbron SAS par la société Dalkia SA ; décision de l’Autorité n° 15-DCC-72 du 18 juin 2015 relative à la prise de contrôle exclusif d’Altergis SAS par Veolia Environnement SA, paragraphes 6 à 12.

384 Décision COMP/M.7137, paragraphe 65.

385 Décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 102.

386 Décision n° 15-DCC-09, précitée, paragraphes 14 et 15 ; décision n° 15-DCC-72, précitée, paragraphe 13.

387 Décision COMP/M.7137, précitée, paragraphe 160.

388 Ibid, paragraphe 46.

389 Voir, respectivement, l’avis de l’Autorité n° 18-A-12 du 23 novembre 2018 concernant un projet de décret relatif au mécanisme de capacité dans le secteur de l’électricité et la décision COMP/M.7137, précitée.

390 Voir l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 31 mars 2009, n° 2008/11353.

391 Voir, en ce sens, décision de l’Autorité n° 09-DCC-28 du 30 juillet 2009 relative à la prise de contrôle exclusif de la société POWEO par la société Österreichische Elektrizitatswirtschaft AG, paragraphe 27 ; décision n° 14-MC-02 précitée, paragraphe 71 et décision n° 17-D-06 du 21 mars 2017 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture de gaz naturel, d'électricité et de services énergétiques, paragraphe 117.

392 Voir notamment la décision COMP/M.7137, précitée, paragraphes 313 et 332.

393 Voir en ce sens les paragraphes 194 à 199 et 552 à 553 de la notification de griefs du 25 mai 2021.

394 Voir, par exemple, l’arrêt de la Cour du 14 février 1978, United Brands et United Brands Continentaal BV/Commission, 27/76, paragraphes 64 et 65.

395 Voir l’arrêt du Tribunal du 10 mars 1992, Solvay/Commission, T-12/89, paragraphes 275 à 279.

396 Voir l’arrêt de la Cour de justice du 3 juillet 1991, Akzo c/ Commission, C-62/86, paragraphe 60.

397 Voir, à cet égard, les décisions de l’Autorité n° 10-D-32 du 16 novembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la télévision payante, paragraphe 532, n° 10-D-02 du 14 janvier 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des héparines à bas poids moléculaire, et n° 13-D-11 du 14 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur pharmaceutique, paragraphe 311.

398 https://www.cre.fr/Documents/Publications/Observatoire-des-marches/observatoire-des-marches-de- detail-de-l-energie-du-4eme-trimestre-2020

399 Cote 34799.

400 Cote 34800.

401 Cote 2096.

402 Cote 34844.

403 Voir paragraphe 20 de la présente décision.

404 Cote 2096.

405 Cote 2085.

406 Cote 34844.

407 Cote 34867.

408 Cotes 2094 à 2095.

409 Cote 34867.

410 Décision de la Commission européenne COMP/39.386 du 17 mars 2010, Contrats à Long Terme France, paragraphes 72 à 76.

411 Voir à ce sujet le rapport d’évaluation de l’Autorité du 18 décembre 2015 sur le dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique et l’avis de l’Autorité n° 19-A-01 du 22 janvier 2019 concernant un projet de décret relatif au dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH).

412 Avis n° 19-A-01, précité, paragraphes 205 à 208.

413 Cotes 35251 et 35252.

414 Voir, en ce sens, les arrêts de la Cour de justice du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche c/ Commission, 85/76, point 91 ; du 9 novembre 1983, NV Nederlandsche Banden Industrie Michelin c/ Commission, 322/81, points 57 et 70 ; du 3 juillet 1991, Akzo c/ Commission, C-62/86, point 69 ; du 15 mars 2007, British Airways c/ Commission, C-95/04 P, point 66 ; du 2 avril 2009, France Télécom c/ Commission, C-202/07 P, point 104 ; du 14 octobre 2010, Deutsche Telecom c/ Commission, C-280/08 P, point 173 ; du 17 février 2011, Konkurrensverket c/ TeliaSonera Sverige AB, C-52/09, point 27.

415 Voir, en ce sens, les arrêts de la Cour de justice du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission, C-280/08 P, point 173 ; du 16 février 2011, Konkurrensverket/TeliaSonera Sverige AB, C-52/09, point 26.

416 Voir, en ce sens, arrêt de la Cour de justice du 3 juillet 1991, Akzo/Commission, C-62/86, point 70 ; arrêt du Tribunal du 23 octobre 2003, Van der Bergh Foods/Commission, point 157 ; décision de la Commission européenne du 2 octobre 2017, Baltic Rail, AT.39813, paragraphes 182 à 201.

417 Voir, en ce sens, arrêt de la Cour de justice du 18 avril 1975, Europemballage et Continental Can/Commission, 6/72, points 27 et 29 ; arrêt du Tribunal du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission, T-128/98, point 170.

418 Voir, en ce sens, les arrêts de la Cour de justice du 3 octobre 1985, Centre belge d’études de marché – télémarketing, affaire 311/84, point 27 et du 14 novembre 1996, Tetra Pak c/ Commission, C-333/94 P, point 25 et les arrêts du Tribunal du 7 octobre 1999, Irish Sugar, T-228/97, point 166 et du 17 septembre 2007, Microsoft c/ Commission, T-201/04, point 1344.

419 Voir, en ce sens, les arrêts précités de la Cour de justice, Tetra Pak c/ Commission, point 25 et Konkurrensverket contre TeliaSonera Sverige AB, point 85.

420 Arrêt de la Cour de justice du 30 janvier 2020, Generics (UK) Ltd, C-52/09, point 162.

421 Voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour de justice du 19 avril 2012, Tomra Systems e.a./Commission, C-549/10 P, point 68.

422 Arrêt de la Cour de justice du 6 octobre 2015, Post Danmark A/S/Konkurrencerådet, C-23/14, point 65.

423 Voir, en ce sens, l’arrêt de la Cour de justice du 6 décembre 2012, AstraZeneca/Commission, C-457/10 P, points 109 et 111.

424 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 21 mai 2015, Solaire Direct, RG n° 2014/02694, page 16.

425 Décision n° 17-D-06 du 21 mars 2017 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture de gaz naturel, d'électricité et de services énergétiques, paragraphe 126.

426 Décision n° 17-D-26 précitée, paragraphe 128.

427 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 12 septembre 2018, PMU, RG n° 18/04914.

428 Arrêt précité de la cour d’appel de Paris du 21 mai 2015, Solaire Direct, RG n° 2014/02694, page 16.

429 Décision n° 17-D-26 précitée, paragraphe 129.

430 Décision n° 17-D-26 précitée, paragraphes 133 et 134.

431 Aux termes de ces dispositions : « La mission de fourniture d'électricité consiste à assurer, en favorisant la maîtrise de la demande, la fourniture d'électricité, sur l'ensemble du territoire, aux clients bénéficiaires des tarifs réglementés de vente dans les conditions prévues aux articles L. 337-4 à L. 337-9 (…) ».

432 Cote 21727.

433 Ces « items » sont : le numéro SIREN / SIRET, la raison sociale, le code NAF, l’adresse du point de livraison et l’identification de l’interlocuteur pertinent.

434 Cote 5865.

435 Cote 5864.

436 Cote 21446.

437 Cote 35648 VC – cote 36509 VNC.

438 Cote 18144.

439 Cotes 33610 et 33613.

440 Cote 13975.

441 Cote 13314 VC – 36000 VNC.

442 Cotes 33008 à 33012.

443 Cote 1975.

444 Cote 1700.

445 Cotes 33596 à 33597.

446 Cote 2117.

447 Cote 21727.

448 Cotes 34766, 34769 et 34772.

449 Avis de la CRE, cote 2090 VC – 2136 VNC et cote 2097.

450 Cote 22033.

451 Cote 2802.

452 Cotes 36565 et 36566.

453 Cote 21810.

454 Cotes 21811 et 15613.

455 Cotes 21817 et 17037.

456 Cote 21148.

457 Cote 33859.

458 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 31 octobre 2014, GDF Suez, RG n° 2014/19335.

459 Cote 2094.

460 Cote 34867.

461 Cote 35611 – cote 36508 VNC.

462 Cote 2085.

463 Cotes 2103 et 2121.

464 Cote 2092.

465 Cotes 2111 et 2156 VNC.

466 Cotes 2110 et 2156 VNC.

467 Cotes 2111 et 2156 VNC.

468 Cote 4295.

469 Cote 34685.

470 Cote 34686.

471 Voir, en ce sens, les arrêts du Tribunal du 27 juillet 2005, Brasserie nationale e.a./Commission, T-49/02 à T-51/02, Rec. p. 113033, point 185, et du 5 décembre 2006, Westfalen Gassen Nederland/Commission, T-303/02, Rec. p. 114567, point 138 ; ou encore la décision de l’Autorité n° 13-D-12 du 28 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation de commodités chimiques, paragraphes 740 à 742.

472 Cotes 21335-21337, 21341 et 21363.

473 Voir en ce sens les cotes 2799 – 35896 VNC et les cotes 34766, 34769 et 34772.

474 Voir, notamment les arrêts de la Cour de justice du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a. contre Commission, C-97/08 P, points 55 et 56, et du 20 janvier 2011, General Quimica contre Commission, C-90/09 P, point 36 ; voir, également l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 mars 2012, Lacroix Signalisation e.a., points 18 et 20.

475 Voir les arrêts précités Akzo Nobel e.a. contre Commission, point 58, General Quimica/Commission, point 37, et Lacroix Signalisation e.a., points 18 et 19.

476 Voir les arrêts de la Cour de justice dans les affaires Akzo Nobel e.a. contre Commission, points 60 et 61 et General Quimica contre Commission, points 39 et 40 ; voir également l’arrêt précité de la cour d’appel de Paris dans l’affaire Lacroix Signalisation e.a., points 19 et 20.

477 Cote 35004.

478 Voir paragraphes 68 et 69 de la présente décision.

479 Cote 36333.

480 Voir paragraphe 20 de la présente décision.

481 Cote 35005 VC – 35724 VNC ; cote 35020.

482 Voir paragraphe 66 de la présente décision.

483 Cote 36325.

484 Voir paragraphe 20 de la présente décision.

485 Cote 35020.

486 Voir paragraphe 67 de la présente décision.

487 Cote 13954 VC – 36004 VNC.

488 Voir paragraphe 20 de la présente décision.

489 Cote 35020.

490 Voir paragraphe 70 de la présente décision.

491 Cote 36254 VC – 36633 VNC.

495 Communiqué du 16 mai 2011 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires.

496 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 juin 2019, Alcyon SA, n° 18/20229.

500 Avis de la CRE, cotes 2088 et 2094.

501 Cote 35611 VC – 36508 VNC.

502 Cote 35611 VC – 36508 VNC.

503 Cote 34867.

504 Cote 2103.

505 Voir, par exemple la figure 2 de l’étude économique d’EDF en annexe des Observations d’EDF sur les éléments susceptibles d’être pris en considération pour déterminer le montant de la sanction pécuniaire.

506 Avis de la CRE, cote 2109.

507 Avis de la CRE, cote 2091.

508 Avis de la CRE, cote 2113.

509 Avis de la CRE, cote 2110.

510 Voir, par exemple, cotes 13975 et 13984.

511 Cote 37038.

512 Arrêts de la Cour de cassation du 22 novembre 2016, société Euro Cargo Rail, n° 14-28.224 et du 27 septembre 2017, société EDF, n° 15-20.087 et 15-20.291.

513 Décision n° 13-D-20 du 17 décembre 2013 relative à des pratiques mises en œuvre par EDF dans le secteur des services destinés à la production d’électricité photovoltaïque.

514 À la suite de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 septembre 2018, société EDF, n° 17/22720.

515 Ces données portent sur la puissance souscrite, au volume annuel de consommation, à la dénomination commerciale de l’option tarifaire souscrite, à l’indication de la présence d’un chauffage électrique pour les clients résidentiels, et au type de compteur.

516 Ces données portent sur la raison sociale de l’entité titulaire du contrat, le numéro SIREN du titulaire du contrat, le code NAF du SIREN, l’adresse de facturation, l’adresse de consommation, les civilité, nom, prénom, numéro de téléphone et adresse électronique des interlocuteurs pertinents, le numéro du point de livraison, la puissance souscrite, le volume annuel de consommation (avec une antériorité de deux ans), la dénomination commerciale de l’offre tarifaire souscrite, et le type de compteur.

517 Ces données portent sur les civilité, nom, prénom, numéro de téléphone et adresse électronique du titulaire du contrat, l’adresse de facturation, l’adresse de consommation, le numéro du point de livraison, la puissance souscrite, le volume annuel de consommation, la dénomination commerciale de l’offre souscrite, l’indication de la présence d’un chauffage électrique et le type de compteur.

518 Les données concernées par l’obligation de recueil du consentement exprès des clients sont, pour les clients non résidentiels, les civilité, nom, prénom, numéro de téléphone et adresse électronique des interlocuteurs pertinents et, pour les clients résidentiels, les civilités, nom, prénom, numéro de téléphone et adresse électronique du titulaire du contrat, l’adresse de facturation, et l’indication de la présence d’un chauffage électrique.