Livv
Décisions

Cass. crim., 22 mai 2002, n°  01-86.156

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme Beaudonnet

Avocat général :

M. Launay

Avocats :

Me Cossa, SCP Piwnica et Molinié

Besançon, ch. corr., du 28 juin 2001

28 juin 2001

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, de Me COSSA, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- C... Guy,

1- contre l'ordonnance de rejet de sa demande de complément d'expertise, rendue le 10 septembre 1999, par le président de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de BESANCON ;

2- contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANCON, chambre correctionnelle, en date du 28 juin 2001, qui, pour contrefaçon par édition ou reproduction d'oeuvres de l'esprit, débit d'oeuvres contrefaites et escroquerie, l'a condamné à 4 ans d'emprisonnement, 2 000 000 francs d'amende, a ordonné des mesures de confiscation, a décerné mandat d'arrêt et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi formé contre l'ordonnance du 10 septembre 1999 :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 28 juin 2001 :

Vu les mémoires personnels et ampliatif en demande et le mémoire en défense produits ;

Sur la recevabilité des mémoires personnels ;

Attendu que ces mémoires, transmis directement à la Cour de Cassation par le demandeur, sont parvenus au greffe plus d'un mois après la date du pourvoi, formé le 2 juillet 2001 ; qu'à défaut de dérogation accordée par le président de la chambre criminelle, ils ne sont pas recevables au regard de l'article 585-1 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le musée Rodin, titulaire du droit moral du sculpteur Auguste Rodin, a, le 8 janvier 1989, déposé plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction de Paris pour contrefaçon d'oeuvre d'art et tentative d'escroquerie, reprochant à Guy C... d'avoir mis en vente, dans son magasin du Louvre des antiquaires à Paris, un bronze contrefaisant une oeuvre du sculpteur ; que cette procédure a été transmise au juge d'instruction de Lure, saisi par réquisitoire introductif du 14 octobre 1991, à la suite de renseignements faisant état de la reprise d'activité d'une fonderie de Luxeuil-les-Bains, qui fabriquerait des contrefaçons de sculptures en bronze de Rodin et d'autres artistes ; qu'à l'issue de l'information, Guy C... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Lure des chefs de contrefaçon par édition de productions de 38 sculpteurs, de débit d'oeuvres contrefaites des mêmes artistes, et d'escroquerie ; que Bernard I... a été poursuivi pour complicité de ce dernier délit ;

En cet état,

Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles préliminaires, 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté Ia demande de réouverture des débats présentée par Guy C... ;

" aux motifs que le 26 juin 2001, le conseil de Guy C... a déposé des conclusions aux fins de réouverture des débats au motif que le courrier de Bernard I..., adressé à la Cour le 19 juin 2001, revêt une importance capitale ; le musée Rodin et M. G..., parties civiles, s'opposent à la requête ; le ministère public et les autres parties civiles, destinataires de celle-ci, n'ont pas fait connaître leur position ; alors que l'affaire est en délibéré, Bernard I... a adressé au président de la Cour une lettre datée du 19 juin 2001 dans laquelle il relate que l'article du " Figaro ", paru à l'issue de l'audience contient des contre-vérités ; les explications de Bernard I..., dont l'état de santé déficient l'a empêché de comparaître, sont pour la plupart incohérentes et n'apportent aucun élément nouveau ;

" alors que les juges ne peuvent fonder leur conviction que sur des preuves qui ont fait l'objet d'un débat contradictoire ;

qu'il résulte des motifs de l'arrêt qu'au cours du délibéré, Bernard I... a adressé un courrier au président de la chambre des appels correctionnels ; que, dans ses conclusions déposées en suite de cet envoi, le conseil de Guy C... faisait valoir que ce courrier revêtait une importance capitale ; qu'il n'avait fait l'objet d'aucun débat et sollicitait une réouverture des débats afin que soit respecté le principe du contradictoire ; que l'arrêt a constaté que deux des parties civiles, dont le musée Rodin, s'opposaient à cette requête, ce qui manifestait qu'elles avaient un intérêt à ce que les débats ne soient pas réouverts ; que, cependant, il résulte des motifs de l'arrêt que tout en rejetant la demande de Guy C..., les magistrats n'ont pas écarté le courrier de Bernard I..., l'ont examiné et en ont déduit que l'entière responsabilité des faits poursuivis devait incomber à Guy C... (arrêt, p. 46 et 47) et qu'en cet état, la cour d'appel ayant fondé partiellement sa conviction sur une pièce qui n'avait fait l'objet d'aucun débat contradictoire, la cassation est encourue pour violation des droits de la défense " ;

Attendu que, pour rejeter la demande de réouverture des débats présentée par Guy C... à la suite d'une note adressée à la cour d'appel, en cours de délibéré, par Bernard I..., l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que, contrairement à ce qui est soutenu, les juges ont fondé tant la déclaration de culpabilité de Guy C..., que la relaxe de Bernard I... sur les seuls éléments soumis à débat contradictoire, l'arrêt n'encourt pas la censure ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, 8, 203, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de bas légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription des délits de contrefaçon et de débit d'oeuvres contrefaites ;

" aux motifs que le musée Rodin a porté plainte avec constitution de partie civile le 8 novembre 1989 ce qui a interrompu la prescription car il n'est pas contesté que le versement de la consignation prévue par l'article 88 du Code de procédure pénale a été effectué ; elle a également valablement interrompu la prescription à l'égard de toutes les infractions même non expressément qualifiées dans cette plainte et de toutes les infractions connexes ; Guy C... ne saurait prétendre que seule la date de fabrication des bronzes doit être prise en compte ; d'une part, cette date n'a aucune incidence sur l'infraction de débit d'oeuvres contrefaites qui se réalise au jour où l'objet est proposé à la vente ; or excepté les ventes réalisées par Me A..., commissaire priseur à Dijon, toutes les autres ont été réalisées postérieurement au 8 novembre 1986 (annexe D 223) ; s'agissant du délit de contrefaçon, la date de fabrication est nécessairement comprise dans la période de la prévention ; les oeuvres contrefaites ont été retrouvées lors des perquisitions réalisées dans les différents lieux de production et de stockage ; la collaboration avec Georges I... a débuté en 1988, la fonderie Balland et l'atelier de ciselure de Nogent-sur-Marne n'ont fonctionné qu'à partir d'août 1990 pour la première et 1991 pour le deuxième. Si Guy C... a confié la réalisation de certains bronzes à la fonderie Galmiche à partir de 1984 ce n'est qu'au moment de la ciselure, soit chez Georges I..., soit à Nogent-sur-Marne que le délit a été réalisé ; Guy C... a été mis en examen à la suite du réquisitoire introductif du 14 octobre 1991 puis en vertu des différents réquisitoires supplétifs, le moyen tiré de la prescription n'est pas fondé ;

" alors que la notion de connexité ne peut recevoir application et permettre ainsi de faire échec aux règles normales de prescription qu'autant qu'il est expressément constaté entre les infractions prétendument connexes des rapports étroits définis par l'article 203 du Code de procédure pénale ; que la plainte du musée Rodin étant, selon les constatations de l'arrêt, strictement circonscrite à une oeuvre particulière de Rodin (L'Eve au Rocher) ne permettait pas, sauf à faire une application extensive de la notion de connexité, en tant que telle prohibée, d'interrompre la prescription à des faits d'édition et de débit d'oeuvres contrefaisantes concernant 38 autres artistes n'ayant aucun lien avec l'oeuvre du sculpteur précité ;

" alors que l'application de la notion de connexité implique que l'acte de poursuite considéré comme interruptif de prescription recèle, ne serait-ce qu'implicitement, une intentionnalité supposant la poursuite d'infractions connexes et qu'en prêtant à la plainte du musée Rodin en date du 8 novembre 1989, strictement circonscrite à la contrefaçon d'une oeuvre particulière de Rodin, l'intention de voir poursuivre des contrefaçons concernant d'autres artistes, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de cette plainte " ;

Attendu qu'en rejetant, par les motifs reproduits au moyen, l'application de la prescription aux faits de contrefaçon par édition et débit d'ouvrages contrefaisants commis au préjudice non seulement d'Auguste Rodin, mais aussi des autres sculpteurs mentionnés à la prévention, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;

Qu'en effet, une plainte avec constitution de partie civile faisant état d'un fait s'inscrivant dans une opération d'ensemble interrompt la prescription à l'égard de toutes les infractions, même non expressément qualifiées dans la plainte, qui, commises dans le cadre de cette opération, présentent avec l'infraction dénoncée des rapports étroits tels que ceux spécialement prévus par l'article 203 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, 8, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de bas légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique relativement au délit d'édition d'oeuvres contrefaites ;

" aux motifs que le musée Rodin a porté plainte avec constitution de partie civile le 8 novembre 1989 ce qui a interrompu la prescription car il n'est pas contesté que le versement de la consignation prévue par l'article 88 du Code de procédure pénale a été effectué ; elle a également valablement interrompu la prescription à l'égard de toutes les infractions même non expressément qualifiées dans cette plainte et de toutes les infractions connexes ; Guy C... ne saurait prétendre que seule la date de fabrication des bronzes doit être prise en compte ; d'une part, cette date n'a aucune incidence sur l'infraction de débit d'oeuvres contrefaites qui se réalise au jour où l'objet est proposé à la vente ; or excepté les ventes réalisées par Me A..., commissaire priseur à Dijon, toutes les autres ont été réalisées postérieurement au 8 novembre 1986 (annexe D 223) ; s'agissant du délit de contrefaçon, la date de fabrication est nécessairement comprise dans la période de la prévention ; les oeuvres contrefaites ont été retrouvées lors des perquisitions réalisées dans les différents lieux de production et de stockage ; la collaboration avec Georges I... a débuté en 1988, la fonderie Balland et l'atelier de ciselure de Nogent-sur-Marne n'ont fonctionné qu'à partir d'août 1990 pour la première et 1991 pour le deuxième. Si Guy C... a confié la réalisation de certains bronzes à la fonderie Galmiche à partir de 1984 ce n'est qu'au moment de la ciselure, soit chez Georges I..., soit à Nogent-sur-Marne que le délit a été réalisé ; Guy C... a été mis en examen à la suite du réquisitoire introductif du 14 octobre 1991 puis en vertu des différents réquisitoires supplétifs, le moyen tiré de la prescription n'est pas fondé ;

" alors qu'il appartient au ministère public-et par conséquent aux juges-d'établir que l'action publique n'est pas éteinte par la prescription ; qu'en l'espèce l'arrêt a considéré que le point de départ de la prescription des faits d'édition de sculptures contrefaisantes ne pouvait être fixé au moment où était achevée l'opération de fonderie, mais au moment de la ciselure, moment qu'il a situé soit en 1988, début de la collaboration de Guy C... avec Georges I..., soit en 1991 pour l'atelier de Nogent-sur-Marne ;

que, cependant, il résulte nécessairement des propres constatations de l'arrêt que les ventes réalisées par Me A..., commissaire priseur à Dijon, étaient antérieures au 8 novembre 1986 et que, par ailleurs, pour au moins deux autres oeuvres-Maillol " Méditerranée " et Rembrandt Bugatti " Grande Autruche " (arrêt p. 25 et 31)-, le débit se situe antérieurement à 1988 (soit le 6 mars 1987 et le 30 novembre 1986) ce qui signifie que les oeuvres concernées ont été achevées et par conséquent fondues et ciselées avant 1988 ; que, par conséquent, la considération générale de l'arrêt relative au début des opérations de ciselure est manifestement erronée et que la cour d'appel n'ayant pas, pour aucune des oeuvres qu'elle a déclaré contrefaisantes, constaté la date de la fonte et celle de la ciselure, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que les juges du fond n'ont pas, comme ils y étaient spécialement invités par les conclusions du demandeur, fixé sans insuffisance ni contradiction le point de départ de la prescription du délit d'édition d'oeuvres contrefaisantes " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les juges, ont, sans insuffisance ni contradiction, fixé le point de départ de la prescription du délit d'édition de sculptures au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles L. 122-3, L. 122-4 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Guy C... coupable d'édition et de débit de sculptures contrefaites ;

" alors que les dispositions du Code de la propriété intellectuelle ne protègent que les droits des auteurs sur les oeuvres originales ; que, pour entrer en voie de condamnation du chef d'édition de bronzes contrefaisants, la cour d'appel devait donc préalablement constater à propos de chaque oeuvre prétendument contrefaite, qu'elle soit tombée dans le domaine public ou qu'elle ne soit pas tombée dans le domaine public, qu'elle méritait protection c'est-à-dire que l'artiste n'avait fait que des tirages limités de son oeuvre, que ces tirages avaient une identité parfaite avec l'oeuvre réalisée par lui et que ces éditions avaient été faites à partir d'un plâtre original et qu'en se bornant à énumérer les bronzes prétendument contrefaisants, sans s'expliquer sur le caractère d'originalité des bronzes prétendument contrefaits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

" alors qu'après avoir énoncé que seules des épreuves en bronze en tirage limité coulées à partir du modèle en plâtre ou en terre cuite réalisé par le sculpteur personnellement pouvaient être considérées comme l'oeuvre même émanant de l'artiste dont elles tiraient leur originalité, la cour d'appel ne pouvait sans contradiction entrer en voie de condamnation à l'encontre de Guy C..., tandis qu'elle constatait expressément dans sa décision que les sculpteurs du XIXème siècle et notamment Rodin avaient édité leurs oeuvres à de multiples exemplaires ;

" alors qu'en s'abstenant de rechercher si, pour chaque pièce arguée de contrefaçon, elle reproduisait un exemplaire original résultant d'un tirage limité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;

Attendu que, pour condamner Guy C... du chef de contrefaçon, la cour d'appel constate notamment que certaines pièces saisies constituent la reproduction d'oeuvres dont des sculpteurs mentionnés à la prévention sont les auteurs et que leur édition ou leur diffusion porte atteinte aux droits dont ceux-ci sont titulaires ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors, d'une part, qu'il n'était pas contesté que les oeuvres des sculpteurs concernés portent l'empreinte de la personnalité de leurs auteurs respectifs et, d'autre part, que les caractéristiques essentielles de ces oeuvres ont été reproduites par le prévenu, la cour d'appel a, sans se contredire, justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 1er du décret n 67-454 du 10 juin 1967 codifié dans le Code général des impôts sous l'article 71 de l'annexe III, 9 du décret n 81-255 du 3 mars 1981, 4-1-2 de la loi n 91-716 du 26 juillet 1991, 3 du décret n 92-836 du 27 août 1992, 3 du décret n 95-172 du 17 février 1995, L. 112-1, alinéa 3, 2-4 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, 111-3 et 111-4 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Guy C... coupable d'édition et de débit d'oeuvres contrefaites (oeuvres tombées dans le domaine public) ;

" aux motifs que la reproduction des oeuvres tombées dans le domaine public est libre à condition d'apposer sur les bronzes la mention reproduction de manière lisible et indélébile et de ne pas porter atteinte au droit moral de l'artiste qui est perpétuel, si prescriptible et inaliénable ; que, selon le décret du 10 juin 1967 codifié sous l'article 71 de l'annexe III du Code général des impôts, constituent des oeuvres d'art originales " les fontes de sculptures exécutées entièrement de la main de l'artiste à tirage limité à huit exemplaires et contrôlées par l'artiste ou ses ayants droit " ; que l'article 71 est certes devenu sans objet à raison du décret du 27 août 1992 mais il a été remplacé par l'article 71 A de l'annexe III qui reprend la même définition puis par l'article 98 A issu du décret du 27 février 1995 qui édicte que sont considérées comme oeuvres d'art " les fontes de sculptures à tirage limité à huit exemplaires et contrôlées par l'artiste ou ses ayants droit " ; qu'excepté ces huit exemplaires auxquels il faut ajouter les quatre épreuves d'artiste numérotées I/ IV à IV/ IV, les autres bronzes ne sont que des reproductions sur lesquelles doit être apposée la mention " reproduction " de manière lisible et indélébile conformément à l'article 9 du décret du 3 mars 1981 qui n'a pas été abrogé, même si l'article auquel il renvoie est sans objet car l'article 98 A du Code général des impôts a remplacé l'article 71 ; que bien que dépourvu de valeur législative ou réglementaire, le Code de déontologie des fondeurs d'art que Guy C..., en tant que professionnel, ne pouvait ignorer, rappelle la définition de l'oeuvre d'art, l'exigence de la mention " reproduction " ; que le fait pour les sculpteurs du XIXème siècle et notamment Rodin, d'avoir édité leurs oeuvres à de multiples exemplaires n'a aucune incidence ; que l'absence sur Ies bronzes de la mention " reproduction " ne constitue pas seulement une contravention de cinquième classe mais un des éléments de la contrefaçon car associée à une marque de fondeur réputée, I... ou Barbedienne, fondeurs dont le nom est associé à celui de Rodin ;

qu'elle entretient la confusion avec une fonte ancienne autorisée par l'artiste ou le musée Rodin ; que ces faits constituent une atteinte au droit moral de l'artiste en attribuant aux oeuvres des qualités de rareté et d'ancienneté, ce qui est recherché par les collectionneurs, contrairement à ce qu'affirme Guy C..., surtout lorsque les bronzes portent une numérotation de 1/ 12 à 12/ 12 propre à Georges I..., ce qui n'est pas interdit en soi mais prête à confusion avec la numérotation utilisée par le Musée Rodin avant 1968 ; qu'en ce qui concerne certaines oeuvres, Guy C... a reconnu lors des débats avoir remplacé Georges I... par Alexis I... ; que Guy C... a apposé les marques Alexis I..., soit directement, soit après moulage, et F. Barbedienne pour " vieillir " artificiellement les fontes récentes qu'il éditait et leur conférer une valeur qu'elles n'auraient pas eue sans ce subterfuge ; que, pour les oeuvres tombées dans le domaine public, le surmoulage faisant apparaître tant le nom de l'artiste que celui du fondeur n'est pas interdit à condition que ce surmoulage comporte la mention reproduction et n'entretienne pas la confusion entre une fonte ancienne et une fonte récente, surtout lorsque la technique utilisée est identique ; que le Code de déontologie des fondeurs d'art recommande l'apposition du millésime en quatre chiffres de la date de fonte afin d'éviter toute équivoque ; que l'argument de Guy C... selon lequel il n'effectuait aucun surmoulage d'originaux au sens de l'article 71 de l'annexe III du Code général des impôts est fallacieux car toute son entreprise consistait à présenter ses bronzes comme des fontes anciennes ;

que, contrairement à ce que prétend Guy C..., les experts ont constaté que la qualité des bronzes n'était pas exceptionnelle, notamment en ce qui concerne la patine en général terminée par une couche de cirage ou de cire passée de façon grossière et masquant des insuffisances de la patine à chaud ; que, si les fonderies sont d'une qualité acceptable, certaines présentent un affaiblissement des formes par rapport aux oeuvres plus anciennes en raison des reproductions successives et portent incontestablement atteinte au droit moral de l'artiste, la reproduction n'étant plus fidèle à l'oeuvre maîtresse ;

" alors que les juges répressifs ne peuvent légalement statuer que sur les faits relevés par l'ordonnance ou la citation qui les a saisis ; que la contrefaçon commise au préjudice du droit d'un sculpteur et la contrefaçon par apposition illicite de marques de fabrique utilisée par les fondeurs sont des infractions distinctes ;

que Guy C... était poursuivi devant le tribunal correctionnel pour des faits de contrefaçon commis au préjudice de sculpteurs sur le fondement de l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle et qu'en entrant en voie de condamnation à son encontre pour contrefaçon par apposition illicite de marques de fondeurs, infraction distincte dans ses éléments légaux et matériels, en-dehors de toute comparution volontaire du prévenu, la cour d'appeI a excédé ses pouvoirs ;

" alors que, dès lors qu'une oeuvre de l'esprit est tombée dans le domaine public, sa reproduction n'est pas subordonnée à l'exigence de l'apposition de la mention " reproduction " ;

" alors que l'absence de la mention " reproduction " ne porte pas atteinte au droit moral de l'artiste lequel implique seulement que le bronze édité respecte en tous points la création née des mains de l'artiste ;

" alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle ne donne sanction qu'aux " lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs " et non aux règlements dont l'objet est fiscal et qui sont sanctionnés par des dispositions pénales autonomes et qu'en sanctionnant dès lors, des peines de l'article L. 335-2 du Code précité, la violation de l'obligation d'apposer de manière lisible et indélébile la mention " reproduction ", obligation ayant un objet fiscal et sanctionnée par une peine contraventionnelle, l'arrêt a méconnu le sens et la portée du principe et des textes susvisés ;

" alors qu'en toute hypothèse, les dispositions des articles 71 de l'annexe III du Code général des impôts et 9 du décret du 3 mars 1981 n'imposent pas l'exigence de la mention " reproduction " sur des fontes de sculpture dont le tirage initial n'a pas, comme les oeuvres visées par la poursuite selon les propres constatations de l'arrêt, été réalisé entièrement de la main de l'artiste à tirage limité à huit exemplaires et contrôlé par l'artiste ou ses ayants droit ;

" alors que l'article 71 de l'annexe III du Code général des impôts auquel renvoie l'article 9 du décret du 3 mars 1981 ayant été abrogé par les dispositions combinées de l'article 4-1-2 de la loi du 26 juillet 1991 et de l'article 3 du décret du 27 août 1992, ce texte ne peut recevoir en tout état de cause application en vertu du principe de la rétroactivité in mitius de la loi pénale ;

" alors que la cour d'appel qui constatait expressément que le Code de déontologie des fondeurs d'art était dépourvu de valeur législative ou réglementaire, ne pouvait, en se fondant sur les dispositions de ce Code et en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle, affirmer que la reproduction d'oeuvres tombées dans le domaine public était libre à condition d'apposer sur les bronzes la mention " reproduction " de manière lisible et indélébile ;

" alors que, si le fondeur qui reproduit une sculpture tombée dans le domaine public doit être fidèle à l'oeuvre originale, la reproduction qu'il réalise respecte suffisamment le droit moral du sculpteur, même si elle n'est pas strictement et en tout point identique à l'oeuvre que celui-ci a personnellement agréée dès Iors qu'elle ne la dénature pas et que la cour d'appel qui constatait expressément dans sa décision que la qualité des fonderies était acceptable, ne pouvait considérer que l'affaiblissement des formes dues exclusivement à des reproduction successives et le fait d'avoir complété la patine à chaud par une patine à la cire réalisait une méconnaissance de droit moral de l'auteur, aucune dénaturation de l'oeuvre n'étant constatée ;

" alors que la reproduction d'un bronze tombée dans le domaine public étant libre, la circonstance que le bronze reproduit soit présenté comme une fonte ancienne est une circonstance indifférente dès lors que manifestement elle ne réalise pas une dénaturation de l'oeuvre ;

" alors que, dans le cadre de sa saisine, la cour d'appel devait s'expliquer de manière précise sur chaque oeuvre dont la contrefaçon était alléguée et que la cour d'appel qui constatait expressément que les fonderies de manière générale étaient acceptables, ne pouvait se borner à affirmer que " certaines présentent un affaiblissement des formes par rapport aux oeuvres plus anciennes en raison des reproductions successives " sans préciser les oeuvres qui étaient concernées par ce prétendu défaut " ;

Attendu que, pour déclarer Guy C... coupable d'édition et de débit d'oeuvres contrefaites, la cour d'appel relève notamment, s'agissant des oeuvres tombées dans le domaine public, que les bronzes en cours de fabrication et les bronzes édités et mis en vente par le prévenu, qui ne portent pas la marque sincère du fondeur qui les a réalisés ni la mention " reproduction ", qui ont été vieillis artificiellement pour faire croire aux collectionneurs normalement avisés qu'il s'agit de fontes anciennes, qui, en raison du nombre de tirage, ne sont pas exactement fidèles à l'oeuvre originale ou maîtresse réalisée par l'artiste en raison d'un affaiblissement des traits, qui ont subi des artifices pour pallier une patine trop récente, constituent des contrefaçons d'oeuvres de l'esprit portant atteinte au droit moral des artistes ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que l'atteinte portée au respect dû aux oeuvres tombées dans le domaine public résulte tant de l'affaiblissement, sur certaines reproductions, des formes des oeuvres créées par les auteurs concernés, que de la présentation de ces reproductions comme des tirages anciens susceptibles d'être attribués aux artistes, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui, par ailleurs, manque en fait en ce qu'il invoque une prétendue condamnation pour apposition illicite de marque déposée, ne peut être admis ;

Sur le sixième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 405 de l'ancien Code pénal, 112-1 du Code pénal, 6, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, de la règle non bis in idem, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Guy C... coupable d'escroquerie et en répression l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement et 2 000 000 francs d'amende ;

" aux motifs que s'agissant des deux qualifications retenues, comme l'a relevé le tribunal, elles ne sont pas incompatibles entre elles et peuvent être retenues pour les mêmes faits dès lors qu'elles sanctionnent la violation d'intérêts distincts, d'une part, ceux des auteurs, d'autre part, ceux des acheteurs et ne sont sanctionnés que par une seule peine ; enfin le délit de tromperie n'implique pas nécessairement l'existence de manoeuvres frauduleuses, dès lors que celles-ci sont caractérisées par les falsifications constatées par MM. F... et B..., il n'y a pas lieu à requalification et seule la qualification la plus sérieusement réprimée doit être retenue ; si, selon MM. F... et B..., le prix d'une oeuvre d'art est celui que l'acheteur est décidé à payer pour entrer en sa possession, Ies acheteurs de bronzes de Guy C... n'auraient certainement pas payé des prix aussi élevés si le prévenu n'avait pas employé des manoeuvres pour donner aux bronzes le caractère ancien qui leur manquait ; M. E... a acquis en 1989 l'Age d'Airain taille monumentale Alexis I... pour 3 678 831 francs alors qu'en réalité il s'agit d'une fonte récente issue d'un surmoulage sur un plâtre artificiellement vieilli au tampon abrasif ; iI a également acquis un baiser 86 cm Alexis I... pour 4 250 000 francs pour lequel il lui a été remis un certificat d'authenticité alors que selon l'expertise la signature de Georges I... a été meulée pour être remplacée par Alexis I... ; M. Z... a acheté le 4 mars 1990 un Age d'Airain 1, 05 m Alexis I... pour 1 054 705 francs et le 13 mai 1990 un baiser 58 cm signé Barbedienne pour 819 533 francs ;

l'expertise a révélé qu'il s'agit de fontes récentes ; la patine du baiser part au white spirite et pour l'Age d'Airain les mentions reproduction et George I... ont été meulées ; la mention Alexis I... a été rajoutée et la terrasse a ensuite été repatinée à la peinture ; le 27 octobre 1991, M. G... a acquis un Age d'Airain monumental Alexis I... pour 2 200 000 francs à la SCP Faure et Rey pour lequel MM. B... et F... ont constaté qu'il s'agissait d'une fonte récente issue d'un surmoulage effectué sur un plâtre ; M. J... a acheté le 20 juin 1989 un Balzac nu Alexis I... pour 1 978 398 francs alors qu'il s'agit d'une fonte récente dont la patine part au white spirite ; Alexis I... a été apposé sur une surface meulée ; iI subsiste des traces de numérotation 3/ 12 ainsi que la ponctuation de Georges I... ; le 10 mars 1989 il a également acheté un baiser et l'éternel printemps signés tous deux F. Bardedienne pour 256 000 francs et 245 645 francs ; ces deux bronzes sont des fontes récentes ; l'éternel printemps a été surmoulé sur une fonte Barbedienne ; la mention d'origine a été meulée puis F. Barbedienne a été refrappé maladroitement avec un jeu de lettres indépendantes ; M. D... a acheté le 29 juin 1989 la tête de Jean d'Aire, taille monumentale, Alexis I... pour 500 000 francs alors qu'il s'agit d'une fonte récente sur laquelle la mention reproduction n'apparaît pas et qui constitue une contrefaçon ; bien que Guy C... ne soit pas responsable du prix final atteint par les bronzes lors des enchères publiques, il est incontestable qu'en proposant à la vente en toute connaissance de cause des oeuvres contrefaites il a voulu sciemment escroquer les acheteurs ;

" alors qu'un même fait ne peut donner lieu à une double déclaration de culpabilité sous peine que soit méconnu le principe du procès équitable ; que le débit d'ouvrages contrefaisants au sens de l'article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle inclut l'opération de vente de ces ouvrages et qu'en déclarant Guy C... cumulativement coupable pour les faits de vente d'oeuvres d'art, de débit d'ouvrages contrefaisants et d'escroquerie, qualifications qui étaient exclusives l'une de l'autre, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;

" alors qu'à supposer qu'une double déclaration de culpabilité fondée sur la prétendue nécessité de protèger les deux intérêts distincts que sont celui de l'artiste et celui de l'acquéreur soit possible, à la date des faits le fait de tromper un acheteur sur l'origine ou les qualités substantielles de la chose ne pouvait tomber que sous Ie coup de l'article L. 213-1 du Code de la consommation et non sous celui de l'article 405 de l'ancien Code pénal ;

" alors que l'absence de manoeuvres frauduleuses se déduit de l'absence de contrefaçon des oeuvres de Rodin tombées dans le domaine public et concernées par la poursuite ;

" alors que, sous l'empire de l'ancien Code pénal, le délit d'escroquerie par emploi de manoeuvres frauduleuses n'était constitué qu'autant que les manoeuvres en cause avaient pour objet de persuader l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire ou de faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès, d'un accident ou de tout autre événement chimérique et que la cour d'appel qui, pour entrer en voie de condamnation du chef d'escroquerie à l'encontre de Guy C... pour des faits qui, à les supposer établis, auraient été commis sous l'empire de l'ancien Code pénal, a cru pouvoir faire état de ce que les manoeuvres frauduleuses avaient consisté à donner aux bronzes le caractère ancien qui leur manquait, n'a pas, par cette motivation, constaté que les manoeuvres en cause aient eu l'un des objectifs limitativement définis par l'article 405 de l'ancien Code pénal ;

" alors que, par cette motivation, la cour d'appel a fait une application rétroactive de l'article 313-1 du Code pénal, loi pénale plus sévère que la loi ancienne, qui incrimine désormais toute manoeuvre frauduleuse ayant eu pour effet de tromper une personne physique et méconnu, ce faisant, le principe de non-rétroactivité des Iois ;

" alors que, pour constituer le délit d'escroquerie, les manoeuvres frauduleuses doivent avoir été déterminantes de la remise des fonds ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées, Guy C... faisait valoir que la qualité d'un bronze ne dépend pas de son ancienneté, mais de la qualité de sa fonte, de sa ciselure et de sa patine et que c'était la qualité exceptionnelle des bronzes qu'il avait vendus qui avait déterminé les acquéreurs à lui remettre des fonds et qu'en ne s'expliquant pas sur ce chef péremptoire des conclusions du demandeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;

Sur le septième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 405 de l'ancien Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Guy C... coupable d'escroquerie et en répression l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement et 2 000 000 francs d'amende ;

" aux motifs que Guy C... a vendu à plusieurs reprises des bronzes sur lesquels avait été apposée la marque " Alexis I... ", fondeur réputé, entretenant ainsi la confusion avec des fontes anciennes autorisées par l'artiste ou le musée Rodin ;

" alors que, dans ses conclusions régulièrement déposées, Guy C... démontrait : 1) que les mentions " Georges I... Fondeur Paris " et " Alexis I... Fondeur Paris " n'étaient pa des signatures mais constituaient les marques de fabrique de la fonderie I..., 2) que l'utilisation de ces marques, parfaitement licite aujourd'hui, n'impliquait pas l'ancienneté des bronzes mais l'utilisation d'une technique de fonte transmise par Alexis I... à ses descendants faisant des bronzes aujourd'hui fabriqués par la fonderie I..., des bronzes de qualité strictement identique à ceux fabriqués par Alexis I..., 3) que la marque " Alexis I... Fondeur Paris " avait été utilisée de manière continue par son fils Eugène I... notamment après la mort de Rodin de 1917 à 1952 pour le musée Rodin puis par son petit-fils Georges I..., 4) qu'il avait régulièrement déposé les marques " Georges I... Fondeur Paris " et " Alexis I... Fondeur Paris " en 1988 et qu'aucune décision de justice définitive n'avait constaté la nullité de ces dépôts, 5) que ces marques avaient été renouvelées au mois d'octobre 1998 sans qu'aucune opposition ne soit intervenue, 6) que l'ordonnance du juge commissaire du tribunal de commerce de Nanterre en date du 30 août 1999 démontrait de façon éclatante que la marque " Alexis I... Fondeur Paris " pouvait être légitimement exploitée puisque le musée Rodin en deviendrait propriétaire pour la somme de 200 000 francs et que la cour d'appel qui, tout en ne répondant pas à l'ensemble de cette argumentation péremptoire, a du moins constaté, d'une part, que la technique utilisée dans la fonte récente était identique à celle utilisée dans la fonte ancienne et, d'autre part, que la décision du tribunal de Paris, postérieure aux faits poursuivis, constatant la nullité du dépôt de marque par Guy C... était frappée d'appel et n'avait pas de caractère exécutoire, a néanmoins cru pouvoir retenir comme manoeuvre frauduleuse l'apposition de la marque " Alexis I... Fondeur Paris " sur des fontes récentes, a privé sa décision de base légale " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu, d'une part, que, pour déclarer le prévenu coupable à la fois de débit d'ouvrages contrefaisants et d'escroquerie, la cour d'appel retient que ces deux qualifications peuvent être retenues pour les mêmes faits dès lors qu'elles sanctionnent la violation d'intérêts distincts, ceux des auteurs pour le premier délit, ceux des acheteurs pour le second ;

Attendu, d'autre part, que, pour faire prévaloir la qualification d'escroquerie sur celle de tromperie, l'arrêt relève que, les manoeuvres frauduleuses commises par le prévenu étant caractérisées, seule la qualification la plus sérieusement réprimée doit être retenue ;

Attendu, enfin, que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'escroquerie dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Sur le huitième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles préliminaires, 427, 465, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 5, 6-1 et 6-2 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que la cour d'appel a décerné mandat d'arrêt contre Guy C... ;

" aux motifs repris des premiers juges, qu'il résulte d'un courrier anonyme reçu le 7 juillet 1995 que Guy C... est susceptible de continuer son activité de contrefaçon ; que l'attitude de Guy C... qui refuse de reconnaître quoi que ce soit est susceptible d'accréditer cette dénonciation ;

" alors qu'en fondant sa décision sur l'existence d'une dénonciation anonyme, l'arrêt a simultanément méconnu le principe du contradictoire et le principe de la présomption d'innocence ;

" alors que, dans ces conditions, la détention de Guy C... ne peut être considérée comme ayant été prise " selon les voies légales " au sens de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme " ;

Attendu que, pour décerner mandat d'arrêt à l'encontre du prévenu, la cour d'appel énonce que celui-ci ne présente aucune garantie de représentation ; qu'il change constamment d'adresse et a dû faire l'objet de plusieurs mandats d'amener en cours d'instruction ; que ses interventions récentes sur le marché de l'art laissent craindre une réitération des infractions ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article 465 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.