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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 24 février 2022, n° 20/05391

RENNES

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Vivre en bois Piveteau Bois (SAS)

Défendeur :

Burger et Cie (SAS), Synema (Sarl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rauline

Conseillers :

Mme Delapierregross, Mme Malardel

Avocats :

SELARL ALEMA AVOCATS, SELARL ASKEA AVOCATS

TGI de Quimper, du 29 sept. 2020

29 septembre 2020

FAITS ET PROCÉDURE

Par un contrat en date du 20 décembre 2010, M. et Mme Alain C., propriétaires d'une maison d'habitation [...], ont confié à la société Synema la conception et la pose d'une terrasse extérieure en bois composite WEX sur plots, accessible par le séjour-salon, avec garde-corps et habillage de l'escalier existant donnant sur le jardin. La réception des travaux a été prononcée le 3 juin 2011. La facture d'un montant de 12 328,40 euros TTC a été réglée.

En juillet 2016, M. et Mme C. ont constaté l'absence de rigidité des gardes-corps et la défaillance des lames de bois. Une expertise amiable a été diligentée en octobre 2016.

Par actes d'huissier des 26 avril et 4 mai 2018, les époux C. ont fait assigner la société Synema et son assureur, la CRAMA Bretagne-Pays de Loire, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Quimper aux fins d'expertise.

La société Synema a appelé à la cause son franchiseur, la société Grad Travaux venant aux droits de la société Architecture du Bois, laquelle a assigné en intervention forcée la société Piveteau Bois, fournisseur des lames.

Par ordonnance du 11 juillet 2018, le juge des référés a désigné M. D. qui a déposé son rapport le 21 janvier 2019.

Par actes d'huissier des 29 avril, 3 et 13 mai 2019, M. et Mme C. ont fait assigner la société Piveteau Bois, la société Synema et la CRAMA Bretagne-Pays de Loire devant le tribunal de grande instance de Quimper sur le fondement des articles 1792, 1147 et 1604 du code civil.

La société Piveteau Bois a appelé en garantie la société Architecture du Bois aux droits de laquelle vient la société Burger et Cie.

Par un jugement en date du 29 septembre 2020, le tribunal judiciaire a :

- déclaré la société Synema tenue de garantir les désordres affectant la terrasse installée au domicile des époux C. ;

- déclaré la CRAMA Bretagne-Pays de Loire tenue de garantir la société Synema au titre des préjudices matériels subis par les époux C. ;

- condamné in solidum la société Synema et la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à payer aux époux C. la somme de 9 255,95 euros TTC au titre du préjudice matériel, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- condamné la société Synema à payer aux époux C. une indemnité de 1 200 euros au titre du préjudice de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- déclaré recevable l'action en garantie des vices cachés exercée reconventionnellement par la société Burger et Cie venant aux droits de la société Architecture du Bois à l'encontre de la société Piveteau Bois ;

- déclaré la société Burger et Cie hors de cause ;

- rejeté l'action en garantie de la société Synema et de la CRAMA Bretagne-Pays de Loire contre la société Piveteau Bois ;

- rejeté les demandes des époux C. contre la société Burger et Cie et la société Piveteau Bois;

- condamné in solidum la société Synema et la CRAMA à payer aux époux C. la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Piveteau Bois à payer à la société Burger et Cie la somme de 3 000 euros sur le même fondement ;

- condamné la société Piveteau Bois aux dépens comprenant les frais de référé et d'expertise ;

- ordonné l'exécution provisoire.

La société Vivre en Bois Piveteau Bois a interjeté appel de cette décision par déclaration du 5 novembre 2020 et la CRAMA Bretagne-Pays de Loire par deux déclarations du 13 novembre jointes le 10 décembre suivant.

La jonction a été prononcée le 17 juin 2021.

Les époux C., la société Synema, la société Burger et Cie et la CRAMA ont relevé appel incident.

L'instruction a été clôturée le 30 novembre 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions en date du 18 juin 2021, la société Vivre en Bois-Piveteau Bois demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris au titre des condamnations prononcées à son encontre ;

- dire et juger qu'il existe une chaîne contractuelle entre les époux C., la société Synema, la société Architecture du Bois, aux droits de laquelle vient la société Burger et Cie, et la société Piveteau Bois ;

- dire et juger que, s'agissant de la conformité de la chose vendue à sa destination normale, seule l'action prévue par les articles 1641 et suivants du code civil est recevable, le défaut de conformité de la chose vendue constituant le vice caché de l'article 1641 du code civil ;

- dire et juger que la terrasse litigieuse ne constitue pas un ouvrage régi par les articles 1792 et suivants du code civil, les lames litigieuses n'ayant pas été intégrées à un ouvrage lors de sa construction mais simplement ajoutées à un ouvrage préexistant ;

- constater que la connaissance du vice par la société Architecture du Bois, la société Synema et donc les époux C. remonte au 28 et 29 mai 2013, dates qui constituent le point de départ de l'action pour vices cachés à son encontre, quel que soit le demandeur faisant partie de la chaîne contractuelle ;

- dire et juger qu'à compter des 28 et 29 mai 2015, l'action fondée sur les articles 1641 et suivants à son encontre est prescrite ;

- constater qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu et qu'il appartient à la société Burger ès qualités de répondre de la défaillance de la société Architecture du Bois ;

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action en garantie des vices cachés et l'a condamnée au paiement de la somme de 3 000 euros au profit de la société Burger et Cie et aux entiers dépens comprenant les frais de la procédure de référé et les frais d'expertise;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'action en garantie de la société Synema et de la CRAMA à son encontre ;

- confirmer le principe selon lequel l'action des époux C. à son encontre a été rejetée ;

- débouter les époux C. et la société Synema et enfin la société Architecture du Bois de leur action à son encontre ;

- prononcer sa mise hors de cause.

Dans leurs dernières conclusions en date du 16 avril 2021, au visa des articles 1231-1, 1604 et suivants, 1792 du code civil et L110-4 du code de commerce, M. et Mme C. demandent à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- déclaré la société Synema tenue de garantir les désordres affectant la terrasse installée au domicile des époux C. ;

- déclaré la société CRAMA Bretagne-Pays de Loire tenue de garantir la société Synema au titre des préjudices matériels ;

- condamné in solidum la société Synema et son assureur la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à payer la somme de 9 255,95 euros TTC au titre du préjudice matériel, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- condamné in solidum la société Synema et son assureur la CRAMA à payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens comprenant les frais de référé et d'expertise judiciaire ;

- sur leur appel incident, à titre principal, réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Synema à leur payer une indemnité de 1 200 euros au titre du préjudice de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ; la condamner à leur payer une indemnité de 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir;

- à titre subsidiaire, dire et juger que la responsabilité contractuelle de la société Synema est pleinement engagée ;

- en tout état de cause, dire et juger que la responsabilité contractuelle de la société Piveteau Bois et de la société Architecture du Bois, aux droits de laquelle vient la société Burger et Cie, est pleinement engagée sur le fondement des dispositions des articles 1604 et suivants du code civil;

- condamner solidairement et/ou in solidum la société Piveteau Bois, la société Synema, la CRAMA Bretagne-Pays de Loire, la société Burger et Cie au versement :

- de la somme de 9 255,95 euros TTC en réparation de leur préjudice matériel;

- de la somme de 3 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

- de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance, outre les entiers frais et dépens de la présente procédure et de la procédure de référé en ce compris les frais d'expertise taxés à 3 700 euros;

- débouter la société Synema, la CRAMA Bretagne-Pays de Loire en qualité d'assureur de la société Synema, la société Piveteau Bois, la société Burger et Cie de toutes leurs demandes ;

- dire que l'ensemble de ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt intervenir jusqu'à parfait paiement ;

- condamner la société Piveteau Bois à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et aux dépens d'appel.

Dans ses dernières conclusions en date du 24 novembre 2021, la société Burger et Cie demande à la cour de :

- déclarer que la composition, le mode de fabrication, le traitement des lames de la société Piveteau Bois et, en conséquence, leurs caractéristiques techniques en termes de solidité, durabilité et de résistance aux variations climatiques, aux pourritures et autres champignons, aux insectes xylophages et aux termites, étaient des éléments contractuellement convenus avec la société Piveteau Bois ;

- déclarer que la société Piveteau Bois a modifié unilatéralement la formule du traitement de ses produits finaux qu'elle lui livrait en ce qu'elle avait augmenté les doses de lubrifiant ;

- déclarer que cette modification de formule a entrainé des conséquences sur la qualité des lames de bois composite ;

A titre principal,

- déclarer que, suivant la modification par la société Piveteau Bois de la formule de traitement des lames de bois composite, celles-ci ne possédaient plus les caractéristiques et qualités contractuellement convenues ;

- déclarer que les modifications unilatéralement apportées aux spécifications techniques des lames de bois composite de la société Piveteau Bois, contractuellement convenues, étaient à l'origine des désordres produits sur les terrasses montées par la société Architecture du Bois ;

- déclarer que la société Piveteau Bois a reconnu être à l'origine des altérations des spécifications techniques de ses lames de bois composite ;

- déclarer que les expertises réalisées produites aux débats excluent toute incidence de la pose, du système de fixation Juan et de la charpente support dans la survenance des sinistres ;

- déclarer que l'expertise judiciaire réalisée dans le cadre de la présente procédure désigne la société Piveteau Bois comme la seule responsable dans la survenance du sinistre de la terrasse des époux C. ;

- déclarer que le défaut de délivrance de la société Piveteau Bois constitue une inexécution contractuelle à son égard, sanctionnée par le droit commun ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la défectuosité de la terrasse des époux C. est due exclusivement à un vice caché affectant le matériau des lames de bois composite fabriquées par la société Piveteau Bois ;

- juger que les désordres qui affectent les lames de bois composite fabriquées par la société Piveteau Bois relèvent d'un défaut de conformité ; déclarer la présente action engagée à l'encontre de la société Piveteau Bois au titre de la délivrance non conforme recevable et bien fondée et non prescrite ;

A titre subsidiaire, si la juridiction de Céans n'admet pas la non-conformité des lames de bois composite de la société Piveteau Bois à leurs caractéristiques techniques contractuellement convenues comme seul fondement juridique,

- déclarer que dans le cadre du présent litige, l'altération des lames de bois composite de la société Piveteau Bois ne peut être envisagée en tant que vice caché que dans le cadre d'un cumul avec une délivrance non conforme ;

- déclarer, si un tel cumul devait être envisagé, que ses conditions sont réunies ;

- déclarer qu'elle choisit dans cette hypothèse d'exercer son action à l'encontre de la société Piveteau Bois sur le fondement de la non-conformité ;

- déclarer la présente action engagée à l'encontre de la société Piveteau Bois au titre de la délivrance non conforme recevable et non prescrite ;

A titre infiniment subsidiaire, si la juridiction de Céans n'admet pas le cumul de la non-conformité des lames de bois composite de la société Piveteau Bois à leurs caractéristiques techniques contractuellement convenues avec le vice caché,

- confirmer le jugement qui a jugé que les désordres qui affectent les lames de bois composite fabriquées par la société Piveteau Bois sont dus exclusivement à un vice caché et en ce qu'il a déclaré recevable et non prescrite l'action en garantie des vices cachés à l'encontre de la société Piveteau Bois ;

En tout état de cause,

- confirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause ;

- condamner la société Piveteau Bois à la garantir de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la défectuosité de la terrasse des époux C. relevait exclusivement d'une anomalie affectant les lames de bois composite fabriquées par la société Piveteau Bois, et en ce qu'il a rejeté les demandes des époux C. formées contre elle;

- débouter la société Piveteau Bois de l'intégralité de ses demandes formulées à son encontre ;

- débouter toutes les parties de l'intégralité de leurs demandes à son encontre ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Piveteau Bois à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens comprenant les frais de la procédure de référé et les frais d'expertise judiciaire ;

- condamner la société Piveteau Bois à lui payer une indemnité de 3 500 euros pour les sommes exposés à hauteur d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 23 mars 2021, la société Synema demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la terrasse de M. et Mme C. est un ouvrage couvert par la garantie décennale et que la CRAMA est débitrice d'une obligation de garantie à son égard et a condamné cette dernière à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre;

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté son action en garantie à l'encontre de la société Piveteau ;

- juger que les désordres qui affectent les lames fournies par la société Piveteau Bois relèvent d'un défaut de conformité ;

- juger par ailleurs que la société Piveteau Bois est tenue par sa garantie contractuelle et par l'engagement qu'elle a pris le 30 mai 2013 de remplacer les lames affectées de désordres;

- juger que l'action en garantie des défauts de conformité et des engagements contractuels est recevable ;

- juger que la société Piveteau Bois doit sa garantie à raison des défauts de conformité et des engagements contractuels qu'elle a pris, subsidiairement à raison des vices cachés qu'affectent les matériaux ;

- condamner la société Piveteau Bois à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge sur la demande des époux C. ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à régler à M. et Mme C. la somme de 1 200 euros au titre d'un préjudice de jouissance ; débouter les époux C. de leur demande à ce titre;

- condamner la CRAMA et la société Piveteau Bois au versement de la somme de 3 000 euros, outre les entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 15 juillet 2021, la CRAMA Bretagne-Pays de Loire demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal de Quimper ;

- débouter les époux C. de leurs demandes à son encontre ;

- débouter également la société Piveteau de toutes ses demandes ou à tout le moins la déclarer irrecevable de toutes demandes contre elle ;

- dire et juger que le dommage n'est lié qu'à la faute exclusive de la société Piveteau ;

- subsidiairement, si la cour considérait que le dommage est de nature décennale, dire et juger que la société Piveteau Bois devra la garantir intégralement au titre des condamnations pouvant être mises à sa charge, tant en principal, frais, accessoires, dépens et article 700 du code de procédure civile ;

- débouter les époux C. au titre du préjudice immatériel ;

- dire et juger qu'elle est fondée à opposer un défaut de garantie pour les préjudices immateriels, n'étant pas l'assureur à la réclamation ;

- condamner la société société Piveteau Bois ou toute parties succombantes à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laisser les dépens à la charge de la société Piveteau Bois.

MOTIFS

Il ressort du rapport d'expertise que l'expert a constaté les désordres suivants :

- des mouvements de rives de l'escalier qui s'expliquent par une déformation du produit posé,

- des déformations des lames de rives entre deux points de vissage, en lien avec un phénomène de dilatation d'une lame qui en provoque le cintrage,

- l'arrachement des fixations dû à des poussées des lames de la terrasse,

- des jeux entre les lames de 3 à 7 mm,

- une épaisseur variable de celles-ci de 21 à 23 mm,

- des mouvements du garde-corps côté Est.

Il a noté un mouvement irréversible d'allongement des lames, particulièrement en rive sud de la terrasse et sur l'escalier. Il l'attribue aux lames fournies par la société Piveteau, relevant que dans la partie la plus altérée, l'allongement est de 14 mm, supérieur au jeu de 10 mm annoncé par le fabricant.

Sur les demandes des époux C.

Il y a lieu de procéder à une distinction selon la nature des contrats, de louage d'ouvrage avec la société Synema, de vente avec les sociétés Burger et Cie et Piveteau, les maîtres de l'ouvrage rappelant justement qu'ils disposent d'une action contractuelle directe contre le fournisseur de l'entrepreneur et le fabricant des lames en bois composite (assemblée plénière 7 février 1986 n° 83-14631 84-15189).

Sur la responsabilité de l'entrepreneur.

Le tribunal a retenu la responsabilité décennale de l'entrepreneur avec la garantie de son assureur.

La CRAMA conteste la qualification d'ouvrage au motif que la terrasse ne repose pas sur des fondations.

Il ressort des pièces versées aux débats que la terrasse repose sur des poteaux dont la mise en place a donné lieu à des fouilles dans le sol et à un ancrage dans du béton. Il en découle une immobilisation par incorporation au sol de la structure porteuse et à la maison dont elle est devenue une extension, comme cela a exactement été jugé.

Il n'y a pas de débat sur l'impropriété à destination du fait de la dangerosité de l'installation (dévissage des fixations des garde-corps, la terrasse étant à deux mètres du sol), l'expert ayant préconisé des mesures conservatoires.

La responsabilité de plein droit de la société Synema est ainsi engagée, le moyen pris de son absence de faute étant inopérant.

La CRAMA ne critique pas la disposition du jugement qui a retenu sa garantie au titre des dommages matériels.

Sur la responsabilité des vendeurs.

Les époux C. invoquent la non conformité contractuelle des lames WEX qui ne correspondent pas aux caractéristiques de la vente, s'appuyant sur les conclusions de l'expertise.

La société Piveteau réplique que l'obligation de délivrance conforme n'est en cause que dans les cas où des spécifications convenues par les parties font défaut. Elle soutient que lorsque la destination normale de la chose est affectée par le défaut, c'est la garantie des vices cachés qui doit être appliquée, invoquant une jurisprudence constante depuis l'arrêt de la Cour de cassation du 5 mai 1993 n° 90-18331.

Il résulte du dossier que les époux C. ont commandé une terrasse composée notamment d'un platelage en lames de bois composite WEX. L'absence de déformation de celles-ci faisait partie des caractéristiques attendues sans qu'ils aient à le spécifier dans le bon de commande. Or, au bout de cinq ans, ils ont constaté une souplesse du garde-corps et une déformation des lames, en particulier dans l'angle sud-est. Les désordres ont pour cause un phénomène de dilatation ayant pour effet un allongement des lames supérieur à ce qui était annoncé par le fabricant.

Il est ainsi démontré que les engagements du fabricant quant à la durabilité du produit (garantie de 20 ans), sa résistance aux variations hygrométriques et ses tolérances en matière de dilatation thermique, énoncés dans les documents émanant de la société Piveteau (publicités, notice de montage, guide technique) ne sont pas tenus, ces caractéristiques techniques relevant de l'obligation de délivrance.

Ces éléments caractérisent, non une inaptitude de la chose vendue à son usage normal au sens de l'article 1641 du code civil, mais une inaptitude à l'utilisation contractuellement définie, les lames WEX étant destinées à la construction des terrasses.

Il y a donc une non conformité aux stipulations contractuelles, contrairement à ce qui a été jugé et à ce qui est soutenu par l'appelante.

Dès lors, cette dernière ne peut se prévaloir du bref délai de l'article 1648 du code civil.

Il convient de faire droit à la demande des maîtres de l'ouvrage de condamnation in solidum de la société Burger et Cie et de la société Piveteau avec la société Synama et la CRAMA.

Sur l'indemnisation des époux C.

La disposition du jugement relative à l'indemnisation du préjudice matériel n'est pas critiquée mais celle au titre du préjudice de jouissance. Les époux C. réclament 3 000 € tandis que la société Synema estime qu'ils ne justifient d'aucun préjudice certain, liquide et exigible.

La cour fait siens les motifs par lesquels le tribunal a dit que la terrasse était un élément extérieur qui n'était pas indispensable à l'utilisation de la maison. Le préjudice existe néanmoins puisqu'il en a réduit les conditions d'utilisation jusqu'à la réalisation des travaux conservatoires et que les maîtres de l'ouvrage devront supporter la gêne liée aux travaux réparatoires pendant une semaine.

Au regard de ces éléments, le tribunal a exactement évalué à 1 200 € l'indemnité destinée à réparer le préjudice de jouissance subi par les époux C..

Sur les appels en garantie.

L'entrepreneur et le fournisseur fondent leur appel en garantie contre le fabricant sur le non respect de l'obligation de délivrance prévue par l'article 1604 du code civil.

La CRAMA se prévaut à tort de l'article 1240 du code civil, son assuré étant lié au fournisseur par un contrat et ayant dès lors la qualité de sous-acquéreur à l'égard du fabricant. Il y a lieu de procéder à la requalification sans solliciter les observations des parties, ce texte étant dans les débats.

Il résulte des courriers de la société Piveteau à la société Architecture du Bois datés des 30 mai 2013 et 24 juin 2014 qu'elle reconnaissait l'existence d'un défaut de fabrication de certains lots fabriqués en 2010 et 2011 et se traduisant par un allongement anormal des lames à l'origine de déformations, ce qui est le phénomène décrit par M. D., et ce en lien avec la modification de sa méthode de fabrication. La facture de la société Architecture du Bois à la société Synema est du 24 mars 2011.

Pas plus que les époux C. à l'égard de leur cocontractant, la société Architecture du Bois n'avait à mentionner dans son bon de commande à la société Piveteau que les lames devaient respecter les caractéristiques techniques, la distinction que cette dernière opère entre celles-ci et les engagements contractuels étant dénuée de fondement.

Selon l'expert, la société Synema n'a commis aucune faute lors de la pose en lien de causalité avec les désordres. Aucune faute n'est articulée à l'encontre du vendeur intermédiaire.

Compte tenu de ce qui a été jugé plus haut, il convient de faire droit intégralement aux appels en garantie contre la société Piveteau.

Sur les dépens et frais irrépétibles.

La société Piveteau fait observer à juste titre que le tribunal ne pouvait la condamner aux dépens alors qu'aucune condamnation n'était prononcée contre elle sans motiver sa décision. De même aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, l'indemnité allouée à ce titre est à la charge de la personne condamnée aux dépens. Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont donc infirmées.

Compte tenu de ce qui a été jugé plus haut, la société Synema, la CRAMA, la société Burger et Cie et la société Piveteau sont condamnées in solidum aux dépens et à payer la somme de 3 000 € aux époux C. en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elles sont condamnées aux dépens d'appel et à payer à ces derniers la même somme au titre de leurs frais irrépétibles d'appel, soit au total 6 000 €.

La société Piveteau est condamnée à garantir intégralement les codébitrices et à payer à la CRAMA la somme de 2 000 € et à la société Synema, la somme de 3 000 €.

Le jugement est confirmé en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 3 000 € à la société Burger et Cie, une indemnité complémentaire de 3 000 € lui étant allouée en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement :

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a dit que la CRAMA Bretagne-Pays de Loire était tenue de garantir la société Synema au titre des préjudices matériels subis par les époux C. et en ce qu'il a condamné la société Piveteau Bois à payer à la société Burger et Cie la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE in solidum la société Synema, la CRAMA Loire Bretagne, la société Burger et Cie et la société Vivre en bois- Piveteau Bois à payer à M. et Mme Alain C. la somme de 9255,95 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

CONDAMNE in solidum la société Synema, la société Burger et Cie et la société Vivre en bois- Piveteau Bois à payer à M. et Mme Alain C. la somme de 1 200 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement au titre du préjudice de jouissance,

CONDAMNE in solidum la société Synema, la CRAMA Loire Bretagne, la société Burger et Cie et la société Vivre en bois- Piveteau Bois à payer à M. et Mme Alain C. la somme de 6000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum la société Synema, la CRAMA Loire Bretagne, la société Burger et Cie et la société Vivre en bois- Piveteau Bois aux dépens de première instance comprenant les frais de référé et d'expertise et aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société Vivre en bois-Piveteau Bois à garantir intégralement la société Synema, la CRAMA Loire Bretagne, la société Burger et Cie de toutes les condamnations prononcées à leur encontre en principal, intérêts, frais et accessoires,

CONDAMNE la société Vivre en bois- Piveteau Bois à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile :

- à la société Synema, la somme de 3 000 €,

- à la CRAMA Loire Bretagne, la somme de 2 000 €,

- à la société Burger et Cie, la somme de 3 000 €.

Le Greffier, Le Président.