Cass. com., 11 décembre 1990, n° 89-16.225
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defontaine
Rapporteur :
Mme Pasturel
Avocat général :
M. Patin
Avocats :
M. Consolo, SCP Célice et Blancpain, SCP Waquet, Farge et Hazan
Joint le pourvoi n° 89-16.225 formé par l'administrateur du redressement judiciaire de la société Le Cèdre bleu et le pourvoi n° 89-16.246 formé par la banque La Hénin, qui attaquent le même arrêt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 février 1989), que la société Le Cèdre bleu (la société) ayant été mise en redressement judiciaire le 16 mars 1988, Mme X a, le 31 mai 1988, mis l'administrateur en demeure de lui faire connaître s'il entendait poursuivre le contrat de bail portant sur le local dans lequel s'exerçait l'activité de la débitrice ; que, n'ayant pas obtenu de réponse dans le délai d'un mois, elle a, le 28 juillet 1988, assigné l'administrateur devant le juge des référés en résiliation de bail et expulsion et a dénoncé son assignation le 16 septembre 1988 à la banque La Hénin (la banque), créancière inscrite sur le fonds de commerce ; que le 10 août 1988, le tribunal de la procédure collective a arrêté un plan de cession de l'entreprise incluant la cession du fonds de commerce ; que, par ordonnance du 25 octobre 1988, le juge des référés a accueilli la demande de Mme X ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 89-16.225 :
Attendu que l'administrateur fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé cette décision, alors, selon le pourvoi, que la présomption de renonciation à la continuation de tel ou tel contrat, et spécialement du contrat du bail où est exploité un fonds de commerce, après une mise en demeure adressée à l'administrateur, restée plus d'un mois sans réponse, peut être combattue ; qu'en décidant le contraire au prétexte que l'on serait en face d'une présomption irréfragable, la cour d'appel a violé par fausse interprétation l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 et, par refus d'application, l'article 1352 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a énoncé, à bon droit, que la présomption édictée par l'article 37, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 a un caractère irréfragable ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° 89-16.246 :
Attendu que la banque reproche à l'arrêt d'avoir constaté la résiliation du bail, alors, selon le pourvoi, que la renonciation à continuer un bail en cours, résultant de la volonté de l'administrateur, opère comme une résiliation amiable ; qu'une telle renonciation ne peut devenir définitive qu'un mois après la notification qui en est faite aux créanciers inscrits ; qu'en décidant que la banque ne pouvait s'opposer à la résiliation, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 14 de la loi du 17 mars 1909 ;
Mais attendu que la renonciation à la continuation du bail résultant de l'absence de réponse pendant plus d'un mois à la mise en demeure adressée à l'administrateur par le propriétaire n'avait pas entraîné la résiliation du contrat et que, dès lors, l'article 14 de la loi du 17 mars 1909 n'était pas applicable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen du pourvoi n° 89-16.246 :
Attendu que la banque fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, qu'un plan de cession de l'entreprise est intervenu par jugement en date du 10 août 1988, avant la saisine du juge aux fins de résiliation judiciaire ; que les dispositions du plan de cession sont opposables à tous et que le juge d'instance, ni la cour d'appel, ne pouvaient de ce fait prononcer la résiliation d'un bail compris dans le plan de cession sans méconnaître l'autorité qu'y attache l'article 64 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Vu l'article 64 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu, pour répondre à l'affirmation de principe énoncée au moyen, que lorsque l'administrateur renonce à la continuation du bail de l'immeuble affecté à l'activité de l'entreprise, le bailleur acquiert, du fait de cette renonciation, le droit de faire prononcer en justice la résiliation du contrat et que ce droit ne peut être remis en cause par les dispositions du jugement arrêtant le plan de redressement de l'entreprise ;
Mais attendu, en l'espèce, que le premier juge ayant constaté la résiliation du bail après avoir relevé que, selon les indications fournies par l'administrateur, un plan de cession de l'entreprise avait été proposé au Tribunal qui l'avait arrêté, il ne résulte ni de ses conclusions ni de l'arrêt que la banque ait soutenu devant la cour d'appel l'argumentation dont fait état le moyen ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, celui-ci est donc irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.