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Décisions

CA Paris, 1re ch. D, 13 janvier 1999, n° 020374

PARIS

PARTIES

Demandeur :

Pel Investissement (Sté)

Défendeur :

M. Roussel

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Présidents :

M. Duclaud, M. Main

Conseillers :

Mme Cobert, M. mc Kee, M. Le Dauphin

Avoués :

SCP D Auriac-Guizard, SCP Teytaud, SCP Fisselier-Ciuloux-Boulay

Avocat :

Me Adam

CA Paris n° 020374

12 janvier 1999

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé en audience publique et solennelle par Monsieur DUCLAUD, Président, qui a signé

la minute avec Pierrette BOISDEVOT, greffier.

Saisie après renvoi de la cause et des parties devant elle prononcé par l'arrêt de la deuxième Chambre Civile de la Cour de cassation du 6 juin 1996, lequel a cassé et annulé l'arrêt rendu le 13 juillet 1993 par la 16ème Chambre A, la Cour, autrement composée, statue sur l'appel interjeté par la société PEL INVESTISSEMENT d'un jugement du Tribunal d'instance du 11ème arrondissement de Paris du 2 juin 1992 qui a débouté celle-ci de sa demande en résiliation judiciaire du bail commercial la liant à Monsieur ROUSSEL, aux torts exclusifs de celui-ci pour manquement à l'obligation de délivrance, et, subsidiairement en annulation dudit bail pour dol et erreur ainsi qu'en réparation de son préjudice, et, qui a également rejeté sa demande de condamnation en dommages-intérêts dirigée à l'encontre de la société MAURY-ROMANET, en sa qualité de mandataire du bailleur et de rédarteur d'acte, en réparation du préjudice qu'elle aurait subi par suite de l'impossibilité pour elle de s'installer dans les locaux loués.

Les faits et la procédure peuvent être résumés ainsi qu'il suit :

Monsieur Olivier ROUSSEL, réprésenté à l'acte par la société MAURY-ROMANET, administrateur d'immeubles, a consenti le 6 juin 1991 un bail commercial à la société PEL INVESTISSEMENT, portant sur des locaux situés 4 rue Bréguet, à Paris (Hème) et décrits comme suit :

- au rez-de-chaussée : en façade à gauche du porche de l'immeuble, un local d'environ 50 m2 avec accès sur me, et, un local à droite d'environ 32 m2 avec accès par le vestibule de l'immeuble à un ensemble de locaux d'une surface de 355 m2 environ,

- au premier étage : une mezzanine, locaux d'environ 190 m2 accessible par un escalier intérieur, avec une porte d'accès de secours donnant sur le palier de l'immeuble,

- au sous-sol : une surface d'environ 470 m2 accessible par deux escaliers intérieurs et par l'escalier de l'immeuble.

Le loyer est de 650  000 francs HT par an.

Désirant transformer les lieux loués qui auparavant abritaient un atelier de tringlerie, en " un centre de relaxation et un club de gymnastique, avec sauna, hamman, jaccuzzi , avec adjonction d'un bar-restaurant", la société PEL INVESTISSEMENT a signé le 8 juillet 1991 un contrat d'aménagement de locaux "clés en main" avec une société GRISBI d'un montant de 6 500 000 francs, - ce montant prévisionnel fut ensuite porté à 8 425 200 francs HT, outre les honoraires dudit maître d'oeuvre.

Le Maire de Paris, qui dit avoir reçu le 22 novembre précédent la demande de déclaration de travaux exemptés de permis de construire que la société PEL INVESTISSEMENT a déposée, a répondu à celle-ci le 26 novembre 1991 que les travaux projetés étaient soumis à la législation sur le permis de construire "en raison d'un changement de destination résultant de la nouvelle affectation des locaux ".

Il est constant que la société PEL INVESTISSEMENT qui avait commencé à faire exécuter les travaux avant d'avoir reçu l'autorisation de la Mairie de Paris les a alors interrompus, ceux-ci représentant alors une somme de 3 378 851,60 francs.

Antérieurement à la requête précitée adressée à la Ville de Paris, la Direction de l'Urbanisme de celle-ci avait dressé le 22 octobre 1991 un procès-verbal de contravention à l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme pour " travaux d'aménagement intérieur au sous-sol, rez-de-chaussée et mezzanine ", acte notifié le 12 décembre 1991 à la société PEL INVESTISSEMENT.

Prétendant être dans l'impossibilité de pouvoir obtenir le permis de construire nécessaire à l'exécution des travaux de transformation des lieux qu'elle a loués aux fins d'y exercer les activités contractuelles de centre de relaxation et "gymnase-club", la société PEL INVESTISSEMENT a, par acte du 5 mars 1992, assigné devant le Tribunal d'instance du 11ème arrondissement Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY ROMANET aux fins de voir :

- résilier aux torts exclusifs du premier le bail du 6 juin 1991,

*     subsidiairement, prononcer la nullité dudit bail pour dol, et, plus subsidiairement, pour erreur,

-   condamner in solidum Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à réparer l'entier préjudice qu'elle a subi,

- condamner conjointement et solidairement Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à lui payer la somme totale de 37 662 066,02 francs à titre de dommages-intérêts,

* plus subsidiairement, condamner in solidum Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à lui verser une indemnité provisionnelle d'un montant de 5.703.066,02 francs et désigner un expert avec mission d'apporter les éléments de nature à déterminer le surplus du préjudice.

Monsieur ROUSSEL a sollicité sa mise hors de cause au motif qu'il n'a jamais été personnellement en rapport avec la société PEL INVESTISSEMENT puisqu'il était représenté par la société MAURY-ROMANET.

A titre subsidiaire, il a indiqué le caractère éventuel du préjudice allégué, faute par le locataire d'avoir rempli les formalités administratives nécessaires, et, le défaut d'intérêt à agir.

A titre plus subsidiaire, il a demandé à être garanti par la société MAURY-ROMANET de toute condamnation.

La société MAURY-ROMANET a conclu à l'irrecevabilité et, en tout cas, au débouté des demandes dirigées contre elle.

C'est dans ces conditions qu'est intervenu le 2 juin 1992 le jugement déféré à la Cour, et ce, après cassation de l'arrêt de celle-ci du 13 juillet 1993 qui avait déclaré l'appel interjeté contre celui-ci par la société PEL INVESTISSEMENT irrecevable pour défaut d'intérêt.

Neuf mois après le prononcé de cette décision, le 26 février 1993 exactement, la société PEL INVESTISSEMENT a déposé une demande de permis de construire que le Maire de Paris a refusé par décision du 1er avril suivant avec motifs suivants :

- absence d'accord sur le projet du propriétaire,

-   absence de présentation d'une demande de permis de démolir des parties existantes,

-   la suppression de locaux à usage d'habitation n'a pas reçu l'accord préfectoral requis au titre des dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation (article R. 421-11 du code de l'urbanisme),

- dépassement du coefficient d'occupation des sols,

-   perte de deux places de stationnement et absence d'aire de livraison.

Maître DAUDE-BROUARD, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société PEL INVESTISSEMENT, appelant, demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions ;

- de constater que les lieux loués ne sont pas affectés à l'usage commercial convenu dans le bail ;

-   de constater qu'une partie significative des lieux loués est affectée à usage d'habitation ;

- de constater sur ce dernier point que le bailleur ne justifie pas d'une affectation commerciale acquise par les locaux d'habitation par une prescription trentenaire ininterrompue ;

- de constater en conséquence l'inexécution par Monsieur Olivier ROUSSEL de ses obligations de délivrance de la chose louée telles qu'elles résultent des dispositions de l'article 1719 du code civil ;

- de prononcer en conséquence, aux torts exclusifs du bailleur la résolution du bail du 6 juin 1991 ;

-   subsidiairement, de constater que la société MAURY-ROMANET, mandataire du propriétaire, était parfaitement informée, préalablement à la signature du bail de l'exacte nature des locaux donnés en location à la société PEL INVESTISSEMENT ;

- de constater en conséquence que le consentement de la société PEL INVESTISSEMENT à la signature du bail litigieux a été vicié par la réticence dolosive commise par le bailleur ou son mandataire ;

-   de prononcer en conséquence la nullité du bail susvisé par application des dispositions de l'article 1116 du code civil ;

-   plus subsidiairement, de constater qu'une partie significative des locaux loués étant affectée à l'usage d'habitation et ne pouvant de ce fait être exploitée par la société PEL INVESTISSEMENT, le consentement de cette dernière à la signature du bail a été vicié par l'erreur commise par la concluante sur les qualités substantielles de la chose louée ;

- de prononcer en conséquence la nullité du bail litigieux par application de l'article 1111 du code civil ;

- plus subsidiairement encore, de constater qu'en donnant en location à usage commercial des locaux d'habitation contrairement aux dispositions de l'article L. 63I-7 du code de la construction et de l'habitation, le bailleur a méconnu l'ordre public ;

- de prononcer en conséquence la nullité du bail litigieux par application des dispositions des articles 1131 et 1133 du code civil ;

- de retenir la responsabilité du Cabinet MAURY-ROMANET au surplus rédacteur d'actes ;

- en toute hypothèse, de condamner conjointement et solidairement Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à réparer l'entier préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT de leur fait ;

- de condamner en conséquence conjointement et solidairement les intimés à payer à la société PEL INVESTISSEMENT à titre de dommages-intérêts la somme totale de 37 662 066,02 francs, sauf à parfaire ;

- plus subsidiairement, si la Cour estimait nécessaire, après avoir résilié ou annulé le bail susvisé, de recourir à une expertise sur tout ou partie du préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT, de condamner conjointement et solidairement Monsieur ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à lui payer une indemnité provisionnelle correspondant au montant des dépenses d'ores et déjà engagées par la société appelante dont il sera justifié ainsi qu'aux indemnités de licenciement payées soit 5 703 066,02 francs ;

- de désigner par ailleurs tel expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission :

* de fournir tous éléments permettant à la juridiction saisie de déterminer le préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT du fait de la perte de son fonds de commerce résultant de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de se réinstaller à la date du ter avril 1992 ;

* de fournir tous les éléments permettant à la juridiction saisie de déterminer le préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT du fait de la perte pour elle de la chance qu'elle avait de valoriser son fonds de commerce par le transfert de l'établissement dans les nouveaux locaux et de percevoir les bénéfices attendus de son exploitation ;

* de manière générale, de fournir tous éléments permettant à la juridiction saisie de déterminer l'entier préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT comprenant notamment les frais financiers des emprunts souscrits par elle pour les nécessités de son transfert et toutes les dépenses engagées par la société PEL INVESTISSEMENT qui étaient en cours de facturation à la date de délivrance de l'assignation ;

-   de fixer le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par la société PEL INVESTISSEMENT au Greffe de la Cour dans le délai qui lui sera imparti ;

- de dire que l'expert devra déposer son rapport dans les trois mois de sa saisine ;

-   de condamner conjointement et solidairement Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET à payer à la société PEL INVESTISSEMENT la somme de 100.000 francs par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-   de condamner Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET aux entiers dépens.

Monsieur Olivier ROUSSEL, intimé, prie la Cour de :

-   le mettre hors de cause après avoir constaté qu'il n'est pas intervenu dans les négociations intervenues entre la société MAURY-ROMANET et la société PEL INVESTISSEMENT ;

- subsidiairement, condamner ladite société MAURY-ROMANET à le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et, commettre un expert avec mission de dire si, à son avis, au cas de restitution des lieux en leur état d'inachèvement des travaux de transformation, les locaux sont ou non susceptibles d'être reloués, et, de présenter le cas échéant, une estimation des travaux de leur remise en état, " pour les rendre présentables à des candidats locataires ", en tout état de cause :

- condamner la société PEL INVESTISSEMENT à lui verser la somme de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts pour abus de procédure ;

-   condamner enfin la société PEL INVESTISSEMENT, subsidiairement la société MAURY-ROMANET, a lui verser la somme de 30 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des dépens.

Dans des conclusions du 19 juin 1998, Monsieur ROUSSEL demande à la Cour de débouter la société PEL INVESTISSEMENT de ses demandes pour un motif supplémentaire, à savoir le défaut de production aux débats de la demande de permis de construire ayant abouti au refus de permis en date du ler avril 1993.

La société MAURY-ROMANET, intimée, invite la Cour à :

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mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société PEL INVESTISSEMENT irrecevable pour défaut d'intérêt légitime ;

-   constater qu'elle n'a commis aucune faute délictuelle ou quasi-délictuelle dans l'exécution de son mandat ;

- débouter la SCP BROUARD-DAUDE es qualités de toutes ses demandes dirigées contre elle ;

-   débouter Monsieur ROUSSEL de son appel en garantie.
Faisant droit à son appel incident :

- condamner ladite SCP BROUARD-DAUDE es qualité précitée à lui payer la somme de 150 000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-   condamner cette même partie à lui verser la somme de 150 000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- condamner Monsieur ROUSSEL à lui payer la somme de 30 000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

-   condamner enfin la SCP BROUARD-DAUDE es qualité précitée et/ou Monsieur ROUSSEL aux dépens de première instance et d'appel.

Ceci étant exposé, la Cour :

I - Sur l'irrecevabilité de l'appel

Considérant que la société MAURY-ROMANET soutient le défaut d'intérêt légitime de la société PEL INVESTISSEMENT, représentée par Maître BROUARD-DAUDE, mandataire liquidateur à sa liquidation au motif qu'elle pouvait se prévaloir vis à vis de l'Administration Préfectorale des constatations de cette décision quant à l'acquisition du caractère commercial des anciens locaux d'habitation par prescription trentenaire, à remis l'ancienne loge de la gardienne au rez-de-chaussée et un appartement de trois pièces au premier étage ; que selon la société MAURY-ROMANET, la société PEL INVESTISSEMENT a interjeté appel aux fins d'obtenir la résiliation du bail, " alors que le jugement rendu par le Tribunal d'instance, devenu définitif à défaut d'appel, aurait constitué un titre opposable à l'Administration, interdisant tout recours de cette dernière " ;

Mais considérant que l'action de la société PEL INVESTISSEMENT, représentée aujourd'hui par Maître BROUARD-DAUDE es qualité précitée, tend à voir prononcer la résiliation ou l'annulation du bail la liant à Monsieur ROUSSEL, et, non à obtenir un titre opposable à l'Administration que le bailleur se serait refusé à lui délivrer ; que les motifs du jugement déféré selon lesquels les lieux litigieux auraient acquis un caractère commercial par le jeu de la prescription trentenaire ne sont qu'un des éléments sur lequel le premier juge a cm.

Cour d'Appel de Paris T DU 13 JANVIER 1999

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pouvoir tirer la preuve de ce que la société PEL INVESTISSEMENT était une demanderesse de mauvaise foi et qu'il y avait donc lieu de la débouter de son action ;

Qu'il apparait ainsi que la société PEL INVESTISSEMENT a un intérêt légitime, eu égard aux fins que son action poursuit : résiliation sur annulation du bail précité, à remettre en cause le jugement déféré qui l'a débouté de ses demandes ;

Qu'en conséquence, la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt de la société PEL INVESTISSEMENT à interjeter appel sera rejetée ;

II - Sur la résiliation du bail :

1 °) ,Sur le caractère commercial de la totalité des lieux loués :

Considérant que le bail conclu le 6 juin 1991 entre la société MAURY-ROMANET au nom de Monsieur Olivier ROUSSEL, bailleur, et, la SARL PEL INVESTISSEMENT, locataire ne qualifie pas expressément la nature des lieux, lesquels sont désignés essentiellement par leur surface : au rez-de-chaussée, local à gauche du porche de 50m2, à droite de celui-ci de 32 m2, et un autre de 355 m2 ; au premier étage : une mezzanine, locaux d'environ 190m2, accessible par un escalier intérieur ; au sous-sol : local partiellement vouté d'une surface d'environ 470 m2 accessible par deux escaliers intérieurs et un par l'escalier de l'immeuble ;

Que cependant le fait que dans l'esprit des parties, la totalité des lieux loués était susceptible d'accueillir une activité commerciale n'est pas douteuse ;

Qu'en effet, il faut constater que la locataire est une SARL dont le numéro d'immatriculation au Registre du Commerce est bien précisée ; qu'elle prend à bail les lieux pour y exercer l'activité commerciale définie à la clause de destination des lieux conforme à son projet : " Centre de relaxation, gymnase-club (sauna, hamman, esthétique et relaxation, jaccuzzi) avec bar, restauration réservée à la clientèle de l'établissement (aucune enseigne extérieure concernant le bar et le restaurant), et, accessoirement dans le cadre de l'activité principale : show-rooms, vente de vêtements et articles de sport " ;

Que l'étendue de ce projet est telle qu'il supposait pour sa réalisation que tous les locaux soient utilisables pour une activité commerciale ; que ni le bailleur ni la société MAURY-ROMANET n'ont pu se méprendre sur ce point ;

Que le bail lui-même, comporte des clauses habituelles des baux commerciaux : durée de 3, 6, 9 ans ; faculté de dénonciation à l'expiration de chaque période triennale ; révision triennale du montant du loyer " dans les formes et conditions prévues par les lois en vigueur", ce qui fait référence à l'article 27 du décret du 30 septembre 1953 ;

Que ce bail entre donc dans le champ d'application du décret du 30 septembre 1953 et est régi en son entier par ce texte ;

Qu'en l'absence de désignation d'une partie des lieux loués comme étant à usage d'habitation, il faut retenir qu'il ne peut s'agir d'un bail mixte ;

Qu'il ressort de l'ensemble des observations précédentes que les lieux loués étaient dans l'esprit des parties dès la signature du bail susceptible en leur entier d'être affectés à un usage commercial ;

Que d'ailleurs, la société MAURY-ROMANET l'a expressément reconnu dans l'exposé du projet d'avenant au bail litigieux, qu'elle a proposé en vain à la signature de la société PEL INVESTISSEMENT, et ce, dans les termes suivants : " l'ensemble des locaux dont s'agit est bien à destination commerciale " ; aveu particulièrement réfléchi puisque ledit avenant avait précisément pour objet dans son esprit de porter remède au défaut de commercialité de la totalité des lieux loués ;

2°) Découverte du caractère non commercial d'une partie des lieux loués et ses conséquences :

Considérant que la société PEL INVESTISSEMENT avait mis en oeuvre dès le début du mois d'octobre 1991 des travaux de très grande importance puisqu'ils devaient s'élever à 10.455.000 francs TTC, lesquels affectaient le premier étage, le rez-de-chaussée et le sous-sol, soit la quasi totalité des lieux loués ; que les plans de ceux-ci avaient été approuvés le 24 octobre 1991 par la société MAURY-ROMANET ; qu'ils devaient être achevés pour le 1er avril 1992, date à laquelle la société PEL INVESTISSEMENT fermait son fonds précédent et devait en ouvrir un nouveau dans les lieux loués dont l'objet social était plus étendu que le premier ;

Considérant que la société PEL INVESTISSEMENT s'est vue contrainte, si elle voulait poursuivre ses travaux, pour lesquels elle n'avait fait qu'une simple déclaration de travaux exemptés de permis de construire, de déposer une demande de permis de construire pour régulariser sa situation, et ce, par lettre de la Mairie de Paris du 26 novembre 1991 ;

Considérant qu'au départ, le Maire de Paris a fondé son exigence d'un permis de construire au motif que " les travaux projetés étaient soumis à la législation sur le permis de construire (article R. 422-2 alinéa m) en raison d'un changement de destination résultant d'une nouvelle affectation des locaux " ;

Que par la même, le Maire a entendu faire application de l'article L. 421-1 du code de l'Urbanisme au terme duquel le permis de construire est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ou de créer des niveaux supplémentaires " ;

Qu'en effet, il semble que dans un premier temps, la société PEL INVESTISSEMENT ait tenté d'opposer à la Mairie de Paris l'absence de changement d'affectation des lieux au sens de l'article L 421-1 du code de l'Urbanisme en produisant une lettre de la société MAURY-ROMANET en date du 12 novembre 1991 qui attestait que " le précédent locataire se trouvant dans les lieux loués, la société SPECTRAL, recevait du public du fait de son activité et notamment de l'existence d'un petit auditorium de démonstration en sous-sol " ; que pour convaincre le Maire de Paris de l'absence de nécessité d'un permis de construire, il lui fallait démontrer que la transformation des lieux était compatible avec les normes d'occupation des sols fixées par le plan d'occupation des sols de la Ville-de Paris ;

Que c'est manifestement en étudiant ce problème du nouveau volume des lieux d'après le projet de travaux et des incidences de la création d'une mezzanine en regard des coefficients admis d'occupation des sols à Paris que la société PEL INVESTISSEMENT a été conduite à mettre en doute le caractère commercial de la totalité des locaux, et, a découvert qu'une partie de ceux-ci était répertoriée au cadastre comme étant affectée à l'habitation et ce, à la suite de l'étude qu'elle a demandée, fin 1991, à Monsieur MASSON, géomètre-expert ; que celui-ci lui a remis, le 21 janvier 1992, le résultat de ses recherches à partir du cadastre, lesquelles faisaient apparaître trois zones réputées être affectées à l'habitation :

- au premier étage : 190 m2 (partie A du plan, soit la partie donnant sur la rue Breguet) tandis que le reste de l'étage affecté à usage commercial représente 204 m2 ;

- au rez-de-chaussée : 60m2 (partie A du plan correspondant au local à droite du porche) tandis que le reste de cet étage affecté à usage commercial était de 547 m2 (= 138 + 409) ;

- au sous-sol : 198 m2 (partie A du plan, cave rattachée aux appartements du ler étage) tandis que 409 m2 sont à usage commercial ;

Qu'une remarque s'impose ici quant au chiffrage de la partie " habitation " du premier étage ; que si l'expert-géomètre a parfaitement délimité les lieux loués affectés ainsi (lesquels locaux loués excluaient les pièces de l'appartement donnant sur la rue Breguet) sur son plan, il a commis une erreur manifeste de calcul : cette partie " habitation " est d'environ de 33,25 m2 desquels il faut déduire comme l'a fait Monsieur MASSON 8 m2 pour les deux parties arrondies de l'escalier tangentes aux lieux dont il s'agit, ce qui donne une surface de 25,25 m2 environ au lieu de 198 m2 retenus par lui ;

Que, ceci étant, il convient de faire l'observation qui suit par étage :

- sous-sol : si la société MAURY-ROMANET vient aujourd'hui prétendre que la commercialité des locaux du sous-sol était un faux problème puisque de tels lieux n'entrent pas dans le champ d'application des articles L 631-7 et suivants du code de l'Urbanisme, il faut constater qu'elle n'a manifestement découvert ce principe que par le rappel qu'en a fait le préfet de Police de Paris dans le certificat administratif délivré en application de l'article L. 631-7-2 du code de la Construction et de l'Habitation le 24 août 1998 ; qu'en tout cas elle n'a pas fait savoir en temps utile à la société PEL INVESTISSEMENT qu'elle pouvait se prévaloir de cet argument vis-à-vis de l'Administration puisque le projet d'avenant précité qu'elle avait transmis à cette société par télécopie du 30 décembre 1991 excluait implicitement les caves du bâtiment A de l'assiette du bail tandis que pour les bâtiments B, C et D, il portait la mention suivante : "Seules n'en faisaient pas partie quelques caves du bâtiment en façade, libérées depuis longtemps qui, initialement, étaient attribuées aux locaux d'habitation" ; que cette dernière affirmation est inexacte puisque le plan du sous-sol annexé au bail original, montre, par un encadré jaune, courant le long des murs délimitant les caves que la totalité de celles-ci étaient incluses dans le bail litigieux ;                           

- au rez-de-chaussée : la partie " habitation " correspondant à la partie située à droite du porche, - point sur lequel les parties sont d'accord, était la seule de tous les lieux loués à ne

pas faire l'objet des travaux projetés ;                           

- premier étage : comme il vient d'être retenu plus haut par la Cour, la partie affectée à l'habitation est d'environ 25,25 m2, qu'elle est l'élément central commandant la restructuration de tout le premier étage et l'accès à la mezzanine devant être créé ;

Considérant qu'à l'époque de la découverte du caractère partiellement non commercial des lieux loués, à laquelle il faut se reporter pour apprécier son comportement, la société PEL INVESTISSEMENT était fondée à croire, au vu des mentions de la matrice cadastrale et de l'état de l'expert-géomètre MASSON, qui, sur les 1047 m2 loués selon les termes du bail, non seulement un tiers de cette surface, 334,25 m2 exactement (= 60 + 51 + 198 +25,25, chiffre rectifié), était réputé être affecté à usage d'habitation, mais qui plus est, réparti sur les trois étages loués de sorte qu'elle a cru de bonne foi son projet à jamais irréalisable, ou du moins faisable dans des délais non acceptables pour elle, laquelle ne pouvait légitimement souffrir de voir l'ouverture de son fonds différer de plus de trois mois ;

Que même si, un instant de raison, on considère que la société PEL INVESTISSEMENT aurait dû savoir que la surface des caves n'était pas à prendre en compte, le problème restait entier pour 136,25 m2 sur deux étages ;

Qu'avec logique, en effet la société PEL INVESTISSEMENT, à laquelle, à tort, le premier juge fait grief de n'avoir déposé de demande de permis de construire et voit dans cette abstention la preuve de sa mauvaise foi dans l'abandon de son projet, a tout de suite compris qu'il était totalement inutile pour elle de déposer une demande de permis de construire car celle-ci ne pouvait qu'aboutir à un refus de délivrance par la Mairie de Paris, faute de pouvoir justifier de l'autorisation préfectorale de changement d'affectation de la partie des lieux loués réputée être locaux d'habitation ; qu'elle savait qu'elle ne pourrait éventuellement obtenir une telle autorisation qu'en offrant une compensation physique ; qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir mis en oeuvre une telle procédure de régularisation car, en toute hypothèse, à supposer qu'elle eût réussi, aurait pris un délai qui n'aurait pas pu être inférieur à huit ou neuf mois dans le meilleur cas ; qu'en effet, il fallait que la société PEL INVESTISSEMENT, dont il n'est pas allégué qu'elle eut un local commercial autre que celui loué, soit, rachetât la commercialité d'un autre local, opération toujours difficile à conclure, soit, fit l'acquisition d'un fonds de commerce et des murs de celui-ci, et, que la compensation ainsi offerte répondit au voeu de l'administration préfectorale, laquelle jouit d'un pouvoir quasi discrétionnaire pour la dire satisfactoire ou non ; qu'il faut préciser que même si la société PEL INVESTISSEMENT avait une activité secondaire de marchand de biens ainsi que le montre très clairement l'étude de son bilan de l'exercice 1990, elle n'avait pas de local commercial dans son patrimoine -les chalets qu'elle commercialisait à Morzine étant évidemment sans intérêt pour une compensation physique ; qu'en outre, la société PEL INVESTISSEMENT avait tout lieu de craindre qu'un litige pourrait naître entre Monsieur ROUSSEL, la société MAURY-ROMANET et elle au sujet de la partie qui devrait en définitive supporter le coût financier de la compensation physique qui ne pourrait être inférieure, compte tenu de la surface d'habitation selon la croyance des parties à cette époque là, pourrait n'avoir aucune commune mesure avec les prévisions de l'économie du contrat pour la société PEL INVESTISSEMENT.

Cour d'Appel de Paris /ARRET DU 13 JANVIER 1999

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mais aussi pour le bailleur ;

Que la société PEL INVESTISSEMENT ne s'était pas trompée dans son appréciation, puisque, la préfecture de Paris, après qu'elle eut déposé une demande de permis à la Mairie de Paris postérieurement au prononcé du jugement déféré, lui a écrit le 16 mars 1993 ceci : "le projet impliquant un changement d'affectation des lieux nécessite la délivrance préalable à celle du permis de construire d'une dérogation à l'article L. 631-7 du code de la Construction et de l'Habitation ... Je vous précise que la dérogation, si elle était accordée par Monsieur le Préfet, serait nécessairement assujettie à la réalisation de notre part, d'une convention consistant en la conversion pour l'habitation de locaux commerciaux " ;

Considérant qu'il apparait bien que quatre mois après la prise d'effet du bail litigieux, la société PEL INVESTISSEMENT, qui ne pouvait dans le meilleur des cas espérer voir régulariser l'affectation des lieux loués dans un délai de huit ou neuf mois, auquel il faut ajouter trois mois d'instruction de la demande de permis de construire (délai qui a été indiqué officiellement dans un document adressé à la société PEL INVESTISSEMENT), était légitimement fondée à renoncer au bénéfice de la location,

- volonté qui s'est manifestée par l'assignation de Monsieur ROUSSEL et de la société MAURY-ROMANET en résiliation du bail litigieux aux torts exclusifs de Monsieur ROUSSEL et ce, devant le Tribunal d'instance du 11ème arrondissement de Paris qui ainsi saisi, a prononcé la décision déférée ;

Considérant que Monsieur Olivier ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET contestent une telle analyse des faits en soutenant que la renonciation de la société PEL INVESTISSEMENT a tenu uniquement, selon ces parties, à la volonté de celle-ci de renoncer à un projet qui ne lui apparaissait plus rentable ; que ces intimés disent voir la preuve de ce qu'elles avancent ainsi dans le fait que celle-ci n'avait même pas présenté à l'époque des faits, fin 1991 - début 1992, une demande de permis de construire pour poursuivre ses travaux ; qu'ils prétendent que cette société tente de mauvaise foi de justifier a posteriori cette abstention en se prévalant du fait qu'elle a déposé en 1993, après le prononcé du jugement déféré qui lui avait reproché de ne pas l'avoir fait, une demande de permis de construire en vue des travaux projetés laquelle comme elle l'avait prévu, a été rejeté par la Mairie de Paris ; que si les intimés disent qu'il y a eu la demande de permis de mauvaise foi, c'est parce que, selon eux, la société PEL INVESTISSEMENT l'a présentée de manière telle qu'elle était sûre du rejet de sa demande, faisant allusion à un des motifs du refus à savoir l'absence dans le dossier de l'accord du propriétaire des murs ;

Mais considérant que la société PEL INVESTISSEMENT n'avait aucun intérêt à prendre le risque de voir sa demande de permis de construire refusé pour ce seul motif, de sorte qu'elle n'aurait jamais pu prouver, comme elle cherchait à le faire, que le seul motif indiscutable du refus dudit permis de construire étant selon les termes mêmes de la décision de la Mairie de Paris le justifiant : "la suppression de locaux à usage d'habitation n'a pas reçu l'accord préfectoral requis des dispositions de l'article L. 631-7 du code de la Construction et de l'Habitation (article R. 421-11 du Code de l'Urbanisme) " ;

Qu'en effet, il pouvait facilement être porté remède aux autres causes du refus d'octroi du permis de construire en cause : absence d'accord du bailleur, dossier incomplet faute d'être assorti d'une demande de permis de démolir, dépassement de la densité réglementaire (correspondant à une insuffisance théorique de terrain de 82,67 m2), déficit de deux places de stationnement et absence d'aire de livraison ;

Considérant que Monsieur ROUSSEL et la société MAURY-ROMANET soupçonnent encore la société PEL INVESTISSEMENT de ne pas avoir joint à la demande de permis de construire qu'elle a déposée le 26 janvier 1993 copie du jugement déféré du 2 juin 1992 selon l'appréciation duquel les parties des lieux loués qui sont réputées à usage d'habitation selon le cadastre, - du moins en ce qui concerne l'appartement du premier étage et celui du rez-de-chaussée" qui ont été loués préalablement à usage commercial et de manière quasi ininterrompue sauf pour le local du premier étage de novembre à janvier 1979 par bail du 15 mars 1960 renouvelé le 15 juin 1966 et le 31 octobre 1978, et ce, depuis plus de trente ans de sorte que l'action de l'Administration est présente" ; que ledit jugement ajoutant que le changement d'affectation des caves n'est pas soumis à l'autorisation prévue par l'article L. 631-7 du code de la Construction, il en résultait, selon les intimés, que la production de celui-ci dans le dossier de demande de permis de construire suffirait à faire disparaître la cause du refus relative au défaut d'autorisation préfectoral du changement de destination de partie des lieux loués ;

Mais considérant que le premier juge a commis une erreur concernant les locaux du premier étage réputés être à usage d'habitation (trois pièces sur rue, entrée, petite pièce sur cour et WC), qu'après avoir été loué à usage d'activités commerciales, ont été repris par le bailleur pour une destination réputée être d'habitation du ler janvier 1975 au 15 janvier 1979 ;

Que, d'une part, l'Administration n'aurait pas manqué de faire ressortir cette interruption ;

Que, d'autre part, à supposer même que celle-ci ne l'ait pas fait, il ressort d'une réponse ministérielle du 8 avril 1996 (J.O. Ass. Nat. 9 septembre 1996 p. 4852) que la doctrine administrative courante selon laquelle la présomption de l'article 2262 du code civil qui éteint l'action publique concernant les infractions punies et sanctionnées par l'article 631-7 du code de la Construction et de l'Habitation est sans effet sur la régularité ou non de l'affectation du local qui demeure régi par ledit article 631-7 et s'apprécie au regard de ses dispositions de sorte que le projet n'est pas tenu de limiter ses investigations sur la seule période des trente dernières années ;

Considérant encore que Monsieur ROUSSEL avance comme preuve de ce que l'affectation partielle des lieux loués à usage d'habitation n'aurait été qu'un prétexte pris par la société PEL INVESTISSEMENT pour justifier sa renonciation à son projet, le fait que les travaux projetés n'emportaient pas modification des parties réputées être d'habitation de sorte que le défaut de changement d'affectation de ceux-ci n'a pu être un obstacle à la réalisation des travaux d'aménagement et de restructuration projetés ; que Monsieur ROUSSEL verse à l'appui de son affirmation " un certificat administratif délivré en application de l'article L. 631­7-2 du code de la Construction et de l'Habitation par le Préfet de Paris en date du 24 août 19998 qui indique comme affectés à usage d'habitation les lots N° 2, 4, 7 et 32 ; que sur ces lots, aucuns travaux n'étaient prévus selon ROUSSEL ;

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Mais considérant qu'au moment des faits, c'est-à-dire courant novembre et décembre 1991, et, janvier 1992, la société MAURY-ROMANET n'a jamais contesté que la partie des locaux du premier étage du bâtiment A qui ressortaient de la matrice cadastrale comme étant affectés à l'habitation ait bien cette qualification ; qu'elle n'a d'autant pas contesté ce fait qu'elle a proposé à la signature de la société PEL INVESTISSEMENT un avenant dont le caractère extrêmement embrouillé prouve son embarras alors que dans l'exposé des motifs de cet avenant, elle indique qu'il résultait d'un bail du 15 mars 1960 que les locaux du premier étage ainsi désigné "un appartement à gauche, comprenant trois pièces en façade, une pièce sur cour et W.C. "étaient loués à usage commercial et proposait de modifier le bail en protêt" Au premier étage : pièce sur cour, cuisine, WC" de sorte que cette partie, portée comme d'habitation au cadastre, serait devenue commerciale par prescription trentenaire ; qu'elle admettait ainsi qu'il y avait une difficulté sérieuse sur cette partie du premier étage situé dans le bâtiment A ; qu'en réalité, en faisant cette proposition, elle ne résolvait d'ailleurs pas la difficulté car les lieux dont s'agit avaient été repris par le bailleur en 1975 pour un usage réputé d'habitation et reloués à usage commercial qu'en 1979, de sorte que la prescription trentenaire ne pouvait normalement pas être invoquée ; que, le sachant, elle n'a d'ailleurs pas insisté auprès de la société PEL INVESTISSEMENT pour qu'elle signât ledit avenant ;

Considérant que, selon la société MAURY-ROMANET, de toute façon, cette partie du premier étage représentait 18 m2 et ne pouvait empêcher la société PEL INVESTISSEMENT de réaliser ses travaux ;

Mais considérant qu'il faut préciser que, la partie litigieuse du premier étage était d'environ 25,25 m2, comme exposé plus haut ; il s'agissait du passage obligé pour accéder au reste des lieux loués au premier étage qui, dès lors qu'il était réputé local d'habitation, rendait impossible non seulement de faire les travaux mais d'en faire de différents ; qu'il importe peu qu'il soit exact que dans les lots 2 et 4 du rez-de-chaussée non reconnus comme locaux commerciaux par le certificat dont il s'agit, aucuns travaux n'étaient prévus ;

Que ce n'est qu'aujourd'hui, en 1998, que Monsieur ROUSSEL vient apporter la preuve que la partie A du premier étage est réputée commerciale de sorte que son affectation ne pouvait faire obstacle à l'obtention du permis de construire ;

Que la production de ce document ne saurait remettre en cause la responsabilité dudit Monsieur ROUSSEL pour avoir loué des locaux comme étant réputés affectés à usage commercial alors qu'une partie de ceux-ci ne l'était pas ;

II - Sur les demandes dirigées contre Monsieur ROIJSSEI :

Considérant que Monsieur ROUSSEL a loué à la société PEL INVESTISSEMENT des locaux qui, contrairement à l'économie du bail commercial qu'il a conclu avec celle-ci, n'étaient pas dans leur intégralité susceptibles d'être affectés à un usage commercial au regard de la loi, en l'occurrence l'article L. 631-7 du code de la Construction et de l'Habitation ;

Qu'il s'agissait pourtant pour la société PEL INVESTISSEMENT d'une condition déterminante de son engagement ;

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Qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu du fait que l'activité que la société PEL INVESTISSEMENT pensait exercer dans les lieux consistait en des prestations des prestations de services demandant toutes de grands espaces (hammam, sauna, esthétique, relaxation, jaccuzzi, bar, restaurant, show-room, vente de vêtements et articles de sport) ; qu'il savait donc que la locataire entendait se servir de l'entier espace loué à usage commercial, ce qui impliquait des travaux d'une ampleur telle qu'un permis de construire serait nécessaire et que celui-ci ne pourrait être délivré que s'il n'y avait pas changement de destination des lieux au sens du texte précité ;

Qu'il ignorait d'autant moins qu'il y aurait nécessité de faire des travaux qu'il avait, à l'article 3-6° du bail, autorisé " le preneur à faire communiquer les locaux du sous-sol dans son ensemble par la création d'une ou plusieurs ouvertures soumises à l'approbation de l'architecte de l'immeuble " ;

Que ce faisant, Monsieur Olivier ROUSSEL a manqué à l'obligation de délivrance qui lui incombait en sa qualité de bailleur ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de prononcer la résolution du bail litigieux à ses tons.

Qu'il s'ensuit que Monsieur ROUSSEL sera condamné à réparer le préjudice subi par la société PEL INVESTISSEMENT, et ce, pour les motifs développés ci-après, in solidum avec la société MAURY-ROMANET ;

Qu'en revanche, Monsieur ROUSSEL sera seul condamné à restituer à la société PEL INVESTISSEMENT le montant du dépôt de garantie dont il est redevable envers elle en exécution du bail ; que la condamnation à ce titre sera de 325 000 francs, montant dudit dépôt de garantie selon le bail et non de 350 000 francs somme que cette société lui demande par erreur ;

III - Sur les demandes dirigées contre la société MAURY-ROMANET a) celles émanant de la société PEL INVESTISSEMENT :

Considérant que si la demande en indemnisation de la société PEL INVESTISSEMENT est fondée sur l'article 1184 du code civil en ce qu'elle est dirigée contre Monsieur Olivier ROUSSEL, en revanche celle-ci ne peut l'être que sur le fondement de l'article 1382 du code civil à l'encontre de la société MAURY-ROMANET ;

Considérant que la société PEL INVESTISSEMENT demande que la société MAURY-ROMANET soit condamnée in solidum avec Monsieur ROUSSEL au paiement des sommes destinées à réparer son préjudice ;

Considérant, ceci étant, qu'il est de principe que l'intermédiaire professionnel qui prête son concours à la rédaction d'un acte, - ce qui est le cas de la société MAURY-ROMANET en l'espèce -, après avoir été mandaté par l'une des parties, - Monsieur Olivier ROUSSEL en l'occurrence -, est tenu de s'assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l'efficacité juridique de la convention, même à l'égard de l'autre partie, soit la société PEL INVESTISSEMENT ;

Considérant qu'il ressort des faits que la société MAURY-ROMANET n'a pas vérifié si les lieux qu'elle a loués à la société PEL INVESTISSEMENT comme étant à usage commercial en leur intégralité l'étaient au regard de l'article L. 631-7 du code de la Construction et de l'Habitation comme doit le faire impérativement tout mandataire de gestion immobilière exerçant en région parisienne ;

Que pourtant, les lieux d'après les plans antérieurs à ceux dressés par le maître d'oeuvre choisi par la société PEL INVESTISSEMENT faisaient apparaître clairement des configurations d'appartements avec cuisine en particulier, et ce, au rez-de-chaussée (ancienne loge de la gardienne) et au premier étage, sans compter les caves ; que sur le plan ancien dudit premier étage notamment, qui, pour une raison non expliquée mais peut-être liée au litige qui va survenir, n'a pas été annexé au bail comme celui des autres niveaux, il apparaît un local " cuisine " dans le bâtiment A comme contigu à un local " archives " lui-même jouxtant un bail " bureau ", tous locaux résultant à n'en pas douter d'un démentelement d'un local d'habitation ;

Qu'après avoir pris connaissance de la difficulté née de l'affectation de partie des lieux à usage d'habitation au regard de la matrice cadastrale, elle n'a communiqué à la société PEL INVESTISSEMENT les baux antérieurs afférents aux parties litigieuses qu'avec réticence, le 7 janvier 1992, donc tardivement, et, " sur injonction de Monsieur DESERICOURT ", conseil immobilier indépendant ; que rapprochée de l'absence du plan du premier étage en annexe du bail, cette attitude donne à penser que la société MAURY-ROMANET avait sans doute vu le problème mais l'avait considéré lors de la conclusion du bail comme négligeable ;

Quoiqu'il en soit, elle a commis une faute qu'elle a essayé en vain de réparer en proposant le 31 décembre 1991 à la société PEL INVESTISSEMENT de signer un avenant dont la Cour a dit plus haut qu'il ne résolvait pas les difficultés telles que les parties pouvaient les apprécier à ce moment là ;

Considérant que ne s'étant pas assurée de l'observation des formalités requises, ou ayant peut-être fait volontairement l'impasse sur celles-ci, la société MAURY-ROMANET a commis une faute à l'égard de la société PEL INVESTISSEMENT dont elle doit réparer les conséquences à son égard, le préjudice subi par cette dernière étant déterminé plus loin, et, in solidum avec Monsieur ROUSSEL pour les motifs développés plus avant ;

b) celles émanant de Monsieur ROUSSE]

Considérant que Monsieur ROUSSEL demande dès lors que la Cour entre en voie de condamnation à son encontre, que la société MAURY- ROMANET soit condamnée " à l'en relever et garantir, y compris en ce qui concerne les conséquences directes ou indirectes d'une éventuelle résiliation du bail" et demande la désignation d'un expert aux fins de le voir dire : " si, en cas de restitution des lieux en leur état d'inachèvement de travaux de transformation,

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ceux-ci sont, ou non, susceptibles d'être relevés ", et, le cas échéant de chiffrer les dépenses nécessaires pour les offrir à la location ;

Considérant ceci étant, que Monsieur Olivier ROUSSEL a donné un mandat de gestion immobilière à la société MAURY-ROMANET, société d'administration et de gérance d'immeubles, titulaire de la carte professionnelle délivrée par la Préfecture de Police de Paris, par acte du 1er janvier 1981, d'une durée d'une année, renouvelable par tacite reconduction; qu'au terme de ce mandat, Monsieur ROUSSEL donne pouvoir de gérer tant activement que passivement les biens et droits immobiliers lui appartenant " ci-dessus

désigné : un immeuble situé 4 rue Breguet, Paris (11ème) ", de sorte que " la société MAURY-ROMANET a pouvoir de gérer ce bien, le louer aux prix, charges et conditions que le mandataire avisera, signer tous baux et locations, les renouveler, les résilier, donner et accepter tous congés, faire dresser tous états des lieux " ;

Considérant que le mandat reçu par la société MAURY-ROMANET était donc extrêmement étendu ; qu'en conséquence Monsieur ROUSSEL est fondé à se prévaloir du fait que celle-ci n'a pas accompli des vérifications nécessaires pour l'efficacité du bail litigieux dont elle était la négociatrice des conditions, la rédactrice et qu'elle avait signé en son nom ; que sa faute est d'autant plus patente qu'elle gérait l'immeuble abritant les lieux loués depuis dix ans à la date de la signature du bail et qu'elle avait donc en main les éléments, notamment les baux et plans antérieurs relatifs aux lieux loués, pour s'assurer de la commercialité de ceux-ci en leur intégralité ; qu'elle ne pouvait ignorer, pas plus que Monsieur ROUSSEL, que cette affectation commerciale des lieux était une des conditions déterminantes du bail litigieux et ce, exactement pour le mêmes raisons que celui-ci déjà exposé plus haut : en bref, projet d'aménagement des lieux pour y exercer les diverses prestations de service autorisées au bail impliquant nécessairement des grandes surfaces et de gros travaux à chaque étage donc un permis de construire en raison de leur amplitude et partant, la nécessité de l'affectation commerciale indiscutable des lieux sur toute leur étendue même si les plans des travaux projetés n'avaient pas encore été établis au jour de la signature du bail ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société MAURY-ROMANET a commis une grave faute dans l'accomplissement du mandat étendu que Monsieur ROUSSEL lui a donné ;

Qu'elle lui doit réparation du préjudice subi par celui-ci lequel résulte des condanmations à caractère indemnitaire à son encontre par le présent arrêt, consistera à le garantir des condamnations ainsi prononcées ;

Considérant que pour les motifs exposés plus avant, Monsieur ROUSSEL ne peut qu'être débouté de sa demande tendant à se voir garantir par la société PEL INVESTISSEMENT du montant de la restitution du dépôt de garantie ;

Considérant que Monsieur ROUSSEL conclut encore à la condamnation de la société MAURY-ROMANET à lui payer les frais éventuels de remise en état des lieux partiellement bouleversés par l'abandon des travaux projetés, alors qu'ils étaient à moitié faits, "pour les rendre présentables à des candidats locataires" et à la nomination d'un expert pour évaluer les dépenses nécessaires pour arriver à cette fin ;

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Mais considérant que si la société MAURY-ROMANET, est responsable vis-à-vis de Monsieur ROUSSEL de la faute consistant pour elle à n'avoir pas fait toutes les diligences nécessaires à la sécurité juridique du bail qu'il l'avait chargée de préparer, rédiger, signer en son nom, en revanche, celle-ci ne saurait être tenue de l'indemniser du coût des travaux de remise en état des lieux qui seraient nécessaires pour les offrir de nouveau à la location, s'agissant là d'un éventuel dommage ne se rattachant pas à sa faute dans l'exécution de son contrat dont elle serait une conséquence prévisible mais à raison du fait imprévisible d'un tiers ;

IV - Sur le préjudice de la société PEL INVESTISSEMENT 

Considérant que la société PEL INVESTISSEMENT évalue son préjudice à la somme de 37 662 066,02 francs résultant des chefs suivants :

- remboursement des travaux effectués, des honoraires des techniciens et maître

d'oeuvre : .........................................................................  3 378 851,60 F

- honoraires de l'architecte pour étude préliminaire, frais de géomètre, honoraires du bureau de contrôle, honoraires de l'architecte du bailleur, coût de différents constats d'huissier de justice, élément d'équipement pour l'installation des salles de

sport : ..................................................................................  344 559,68 F

- honoraires, frais et commission des conseils et intervenants à l'occasion de la

signature du bail : ...............................................................  238 182,09 F

-   loyers, frais et charges payés depuis le 1er juillet 1991 et restitution du dépôt de

garantie : .............................................................................  733 764,48 F

rais de publicité engagés à l'occasion du transfert de l'activité

126.302,00 F

-   indemnités de licenciement à payer au personnel arrêtés au 31 mars 1992 :

.............................................................................................  881 406,17 F

-   valeur du fonds de commerce perdu et

frais de remploi : ............................................................  23 657 000,00 F

-   perte d'une chance résultant de la moyenne entre la perte de plus-value du fonds de

                  commerce et le montant des bénéfices attendus sur neuf ans :                                                                                                                    .....................

..........................................................................................  8 102 000,00 F

- réparation du préjudice financier

(indemnité provisionnelle) :  ............................................... 200 000,00 F

Mais considérant qu'une partie de ces demandes doit être écartée.