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Décisions

CA Paris, 16e ch. A, 13 février 2008, n° 06/14865

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

S.C.I Z A

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gaboriau

Conseillers :

Mme Imbaud-Content, M. Peyron

Avoué :

SCP DUBOSCQ – PELLERIN

Avocats :

Me CHAMBESLIN, Me GAK, Me PIALOUX

TGI de Paris, du 27 juin 2006, n° 04/098…

27 juin 2006

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement en date du 27 juin 2006, rendu par le tribunal de grande instance de BOBIGNY qui a statué en ces termes :

déboute la Y Z A de l’ensemble de ses demandes

condamne la Y Z A à payer à Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C la somme de 500€ chacun en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile

Vu l’appel relevé par la Y Z A à l’encontre de ce jugement,

Vu les dernières conclusions :

de l’appelante, déposées au greffe de la Cour, le 13 novembre 2007, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au terme desquelles la Y Z A, poursuivant la réformation de la décision entreprise, prie la cour de :

au visa des articles L. 145-1 du Code de commerce, 1184 et 1741 du Code civil,

s’entendre condamner solidairement ou à défaut in solidum Monsieur J K L et Monsieur D F à régulariser sous astreinte journalière de 500€ par jour de retard à compter de l’arrêt intervenir et cinq exemplaires bail en date du 20 novembre 2005 dores et déjà signés par Monsieur B C,

en conséquence, s’entendre condamner solidairement ou à défaut in solidum Monsieur J K L, Monsieur D G Monsieur B C à payer à la Y Z A la somme de 31 167,36€ toutes taxes comprises au titre du complément de loyers, charges et accessoires dû en application du bail du 20 novembre 2005 pour la période du 1er juillet 2003 inclus au 31 décembre 2006 inclus outre 1 654,92€ au titre du réajustement du dépôt de garantie,

subsidiairement, s’entendre condamner Monsieur B C, en sa qualité de signataire du bail du 20 novembre 2005, à payer à la Y Z A la somme de 31 167,36€ toutes taxes comprises au titre du complément de loyers, charges et accessoires dû en application du bail du 20 novembre 2005 pour la période du 1er juillet 2003 inclus au 31 décembre 2006 inclus outre 1 654,92€ au titre du réajustement du dépôt de garantie,

encore plus subsidiairement, s’entendre constater l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail, et subsidiairement, s’entendre prononcer la résiliation judiciaire du bail en conséquence s’entendre ordonner l’expulsion de Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C ainsi que toutes conséquences de droit dont le concours de la force publique s’entendre condamner, solidairement ou à défaut in solidum, Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C à payer à la Y Z A une l’indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers charges et accessoires et ce jusqu’à libération effective des lieux, s’entendre condamner, solidairement ou à défaut in solidum, Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C à payer à Y Z A la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, sollicitant, en outre, l’allocation d’une somme de 8000 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Des intimés, Monsieur J K L et Monsieur D F, déposées au greffe de la Cour, le 12 février 2007 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au terme desquelles Monsieur J K L et Monsieur D F, concluant au rejet de toutes les prétentions adverses et poursuivant la confirmation de la décision entreprise, prient la Cour de :

en tout état de cause, constater que les locataires ne se sont rendus coupables d’aucune infraction à la destination contractuelle des lieux,

dire et juger qu’il ne peut y avoir lieu à acquisition de la clause résolutoire et que l’appelante ne justifie, en tout état de cause, pas d’infraction suffisamment grave fondant une action en résiliation judiciaire du bail,

sollicitant, en outre, l’allocation d’une somme de 4000 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

De l’intimé, Monsieur B C déposées au greffe de la Cour, le 13 novembre 2007 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au terme desquelles Monsieur B C , concluant au rejet de toutes les prétentions adverses, poursuit la confirmation de la décision entreprise,

sollicitant, en outre, l’allocation d’une somme de 1500 € en application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Est en cause un bail portant sur un local commercial situé cour de la gare à LE RAINCY avec comme désignation de l’activité autorisée : tous commerces à l’exception du commerce de Café-restaurant existant dans l’immeuble’ et des commerces divers d’alimentation et autres commerces justifiant une autorisation administrative. Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C y exercent, à la suite de cessions, un commerce de restauration rapide plats à emporter’ (mention figurant au registre du commerce et des sociétés).

Après délivrance d’un congé aux locataires Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C, le 13 décembre 2002, avec offre de renouvellement à compter du 1er juillet 2003, et nouveau loyer d’un montant de 7000€, et alors qu’aucune acceptation de ce loyer n’avait été manifestée par les preneurs, la Y Z A , venant aux droits des précédents propriétaires les consorts H I, a fait dresser, successivement, deux procès-verbaux les 24 et 26 mars 2004 constatant l’exercice 'd’une restauration à table’ qui motiva un commandement indiquant que la partie propriétaire entend solliciter la résiliation du bail’ et énonçant la clause résolutoire, puis le 6 juillet suivant, un nouveau constat de 'la présence de quatre personnes assises à une table en train de consommer dans une assiette.

Dans le cadre d’une action engagée par la Y Z A devant le premier juge le 30 juillet 2004 tendant au constat de l’acquisition de la clause résolutoire, les parties sont entrées en pour-parlers transactionnels et un bail commercial a été établi par la Y Z A visant Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C, daté du 20 novembre 2005 avec effet du 1er juillet 2003 pour finir le 14 août 2012, au prix principal brut de 11750€ la destination suivante étant alors indiquée 'restauration, friterie, restauration rapide et à emporter.

Si la Y Z A a signé ce document, en ce qui concerne les locataires, Monsieur B C a, seul, apposé sa signature.

Discussion

Sur l’existence d’un nouveau bail liant les parties.

N’établit pas la réalité de l’accord de Monsieur J K L et de Monsieur D F le seul courrier émanant du conseil de Monsieur J K L et Monsieur D F adressé, par celui-ci, le 7 novembre 2005 au magistrat président la chambre devant laquelle, en première instance, l’affaire était pendante. En effet, sollicitant le renvoi de celle-ci avec 'un rabat de la clôture’ et indiquant 'un désistement probable’ en précisant qu’un délai était nécessaire 'pour finaliser définitivement l’accord actuellement en cours', ce courrier conforte l’existence de démarches de rapprochement des parties, que l’avocat de Monsieur J K L et Monsieur D F esperait voir prospérer, mais ne prouve pas que ceux-ci ont accepté le bail proposé par la Y Z A , bail qui n’était au demeurant pas que la simple reconduction du précédent, non seulement sur le prix mais encore sur bien d’autres dispositions importantes. Les preneurs soit l’indivision constituée par Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C devaient tous trois consentir à ce nouveau bail pour que celui devienne la loi des parties ; la signature de Monsieur B C, unique, est sans conséquence sur la souscription de ce contrat par les indivisaires qui ne pouvaient être engagés par celle-là. À elle seule, cette signature est dénuée de portée, la Y Z A ne pouvant valablement contracter qu’avec les trois qui sont indivisément bénéficiaires du droit au renouvellement du bail.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire.

N’est pas discutée la conformité à la destination contractuelle de l’activité de restauration rapide, le bailleur reprochant aux preneurs la restauration à table, le mode de consommation assise sur la base des constats précités faisant état de la présence outre de la possibilité de consommer débout’ de quatre tables et de consommateurs déjeunant dans des assiettes, étant indiqué qu’il s’agit, selon ces constats d’une 'sandwicherie de type turque avec broche verticale.

L’interdiction contractuelle est Café-restaurant existant dans l’immeuble, la finalité recherchée dans cette prohibition étant de ne pas concurrencer le café-restaurant le terminus’existant dans l’immeuble.

La restauration rapide distincte de l’activité de Café-restaurant, et ne se confondant pas avec elle, ne se caractérise nullement par le fait de consommer debout, ni par celui de consommer dans une assiette mais, traduction de fast-food, par le fait de consommer, à prix très modérés, (voire à bas prix) des repas rapides standardisés, sans la mise en oeuvre quelconque d’art culinaire, avec une fourniture quasi instantanée des aliments payés ; le restaurant, au contraire, suppose une cuisine préalable des mets plus ou moins élaborée, dont la préparation peut varier à la demande du client et pouvant entraîner un décalage de temps plus ou moins long entre la commande et le service.

Il faut souligner à cet égard que contrairement à ce qu’écrit le bailleur dans ses conclusions (p2) l’activité des preneurs n’est pas Restauration rapide de plats à emporter mais celle indiquée supra.

Quoiqu’il en soit, dans le cadre de l’exploitation d’une sandwicherie de type turque avec broche verticale, faisant appel, incontestablement, à une préparation standardisée, en permettant à ses clients de s’asseoir et de consommer dans une assiette, de surcroît dans le contexte de la proximité d’une gare pouvant conduire les consommateurs -soumis fréquemment aux aléas des transports- à souhaiter, sans s’adresser à un restaurant, une nourriture rapidement servie, d’un prix très accessible, accompagnée de la possibilité de faire une pause assise, les preneurs ne se sont aucunement livrés à une activité contraire à la destination contractuelle.

Sur les autres demandes.

La Y Z A, qui succombe en ses prétentions, sera condamnée aux entiers dépens de l’appel.

Il est justifié d’allouer à Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C la somme de 1200€ chacun en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en dernier ressort :

I. Confirme la décision entreprise

II. Condamne, en cause d’appel, la Y Z A à verser à Monsieur J K L, Monsieur D F et Monsieur B C la somme de 1200€ chacun sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

III. Condamne la Y Z A aux dépens d’appel et autorise sur leurs demandes, Maître Louis-Charles HUYGUE et la SCP. DUBOSQ-PELLERIN, avoués, à recouvrer directement contre la Y Z A ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE.