Cass. com., 19 décembre 2000, n° 98-10.968
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Monod et Colin, SCP Thomas-Raquin et Bénabent
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mai 1997), que la société Genentech Inc est titulaire du brevet français n° 80 14108, déposé le 25 juin 1980 avec revendication d'une priorité américaine du 5 juillet 1979 et délivré le 10 juillet 1985 ayant pour titre " Procédé de production d'un vecteur de clonage duplicable comportant un gène quasi synthétique, plasmide capable d'exprimer l'hormone de croissance, cultures viables de transformants bactériens contenant ces plasmides et procédé d'obtention de l'hormone de croissance utilisant ces cultures " ; que la société Lilly France (société Lilly) l'a assignée en demandant notamment l'annulation de la revendication n° 10 qui tendant à la protection d'un produit dont l'action permet, par un processus biologique, à une bactérie de fournir de l'hormone de croissance humaine est ainsi libellée : " Plasmide bactérien duplicable, caractérisé en ce qu'il peut, dans une bactérie transformante, exprimer l'hormone de croissance humaine non accompagnée d'une protéine étrangère " ;Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :
(Publication sans intérêt) ;
Sur le moyen unique, pris en ses cinquième et sixième branches :
Attendu que la société Lilly fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en annulation de la revendication n° 10, alors, selon le moyen :
1° que la revendication ne doit pas dépasser la consistance de l'invention ; que la société Lilly France faisait valoir que Genentech a cherché à protéger plus qu'elle n'avait inventé ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'étaient déjà connus les procédés de fabrication du gène de structure par la voie biologique, ainsi que par la voie chimique ; que l'invention de Genentech résidait donc dans la combinaison des voies chimique et biologique pour obtenir le gène " pur ", c'est-à-dire dans la technique quasi synthétique de fabrication du gène, décrite par les revendications 1 à 9 ; que la revendication 10 ne vise pas le procédé quasi synthétique, mais concerne un plasmide bactérien ayant la faculté d'exprimer l'HCH " pure " ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la revendication litigieuse qui, ne se limitant pas au plasmide comportant un gène quasi synthétique et prétendant donc couvrir tous les plasmides bactériens aptes à exprimer l'HCH " pure ", quel que soit le procédé d'obtention d'un tel plasmide, ne dépassait pas la teneur de l'invention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 611-10 et L. 612-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
2° que, selon les constatations de l'arrêt, c'est parce qu'ils ont mis au point la technique du gène quasi synthétique que les chercheurs de Genentech ont réussi à fabriquer un gène de structure complet et dépourvu de toute séquence additionnelle et, par suite, à produire un plasmide capable d'exprimer l'HCH non accompagnée d'une protéine conjuguée étrangère, ne pouvant en pratique être obtenu par une autre technique connue, en particulier la voie chimique ; que dès lors, l'activité inventive se situait au niveau du procédé de fabrication du gène et donc du procédé de construction du vecteur de clonage, et non pas dans la fonction du vecteur du clonage, les opérations d'insertion, de duplication, et d'expression du gène étant elles-mêmes connues ; que la cour d'appel ne pouvait donc, pour admettre que la revendication 10 qui, ne vise ni la technique quasi synthétique ni un autre procédé, impliquerait une activité inventive, se fonder sur le fait qu'ont été surmontés, par le procédé quasi synthétique, les préjugés et difficultés inhérents aux autres techniques connues de fabrication du gène ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 611-10 et L. 612-6 dudit Code ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que l'objet même de l'invention consiste en ce que le plasmide défini par la revendication n° 10 permet d'exprimer une HCH " pure " non en conjugaison avec une autre protéine ; qu'ainsi la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt motive son appréciation de l'activité inventive non seulement du procédé de construction du produit mais aussi de ce produit lui-même, en constatant que pour le définir, et entreprendre sa réalisation, il a fallu aller outre le préjugé conduisant les chercheurs, pour éviter le phénomène de protéolyse intracellulaire, à produire une protéine au moyen de plasmides exprimant cette protéine sous forme conjuguée à une protéine étrangère ; qu'ainsi la cour d'appel a exercé, en la motivant, son appréciation souveraine de l'activité inventive du produit objet de la revendication litigieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux dernières branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.