Cass. crim., 12 mars 1985, n° 84-90.787
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bruneau
Rapporteur :
M. Leydet
Avocat général :
M. Rabut
Avocats :
SCP Waquet, SCP Guiguet Bachellier Potier de la Varde
SUR LE MOYEN ADDITIONNEL DE CASSATION PROPOSE :
ATTENDU QUE LEDIT MOYEN, QUI FIGURE DANS UN MEMOIRE DEPOSE LE 14 DECEMBRE 1984, SOIT POSTERIEUREMENT AU DEPOT DE SON RAPPORT PAR LE CONSEILLER COMMIS, EST IRRECEVABLE SELON LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 590 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 59, 60 ET 400 ALINEA 2 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE ME X... COUPABLE DE COMPLICITE DE TENTATIVE DE CHANTAGE ET L'A CONDAMNE EN REPRESSION A LA PEINE DE UN AN D'INTERDICTION D'EXERCICE DE LA PROFESSION ;
AUX MOTIFS QUE LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE PERPIGNAN AVAIT FAIT VALOIR, DANS DES MOTIFS QUE LA COUR D'APPEL ADOPTAIT EXPRESSEMENT, QUE ME X..., MANDATAIRE DE Y..., NOTAIRE EN FUITE, AVAIT RECONNU SAVOIR QUE SON CLIENT AVAIT DEJA ECRIT AUX CESSIONNAIRES DE SON ETUDE, Z... ET A..., AU SUJET DE L'ACTE SOUS SEING PRIVE DU 13 MAI 1982 ;
QUE ME X... AVAIT ARRANGE, EN SE SERVANT DE SA QUALITE D'AVOCAT, L'ECHANGE CONTRE UNE SOMME D'ARGENT DU TITRE DONT, TOUJOURS A RAISON DE SA QUALITE D'AVOCAT, IL NE POUVAIT IGNORER L'ILLEGALITE ;
QUE ME X... AVAIT ENCORE MECONNU SES REGLES DEONTOLOGIQUES EN TENTANT DE SAVOIR SI LA COPIE DE CET ACTE, RETROUVEE PAR LES GENDARMES APRES SA PERTE PAR Y..., SE TROUVAIT AU DOSSIER DE L'INFORMATION SUIVIE CONTRE CE DERNIER ;
QUE TOUJOURS EN SA QUALITE D'AVOCAT EXPERIMENTE, ME X... NE POUVAIT SERIEUSEMENT SOUTENIR AVOIR PU SE MEPRENDRE SUR LE CARACTERE ET LA NATURE DES MENACES CONTENUES DANS LES LETTRES RECUES LE 22 FEVRIER 1982 PAR Z... ET A... ET QUE MALGRE LA CONNAISSANCE QU'IL AVAIT DES MENACES PROFEREES PAR SON MANDAT ET DE LA CONTRAINTE QUE CES MENACES EXERCAIENT SUR Z... ET A..., ME X... AVAIT CONTINUE A PRETER UN CONCOURS ACTIF A L'ORGANISATION DE L'ECHANGE AUQUEL IL AVAIT PARTICIPE EN ESSAYANT D'ECHAPPER A LA SURVEILLANCE DE LA POLICE ;
QU'AINSI SA MAUVAISE FOI ETAIT ETABLIE ;
ALORS QUE, D'UNE PART, LOIN D'AVOIR EXPRIME LES MOTIFS QUE LA COUR LUI PRETE, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE PERPIGNAN A AU CONTRAIRE AFFIRME QUE LES PROPOS TENUS PAR X... A Z... ET A... LE 16 MARS 1982 N'IMPLIQUAIENT PAS CHEZ LUI LA CONNAISSANCE DES MENACES EXPRIMEES PAR Y... DANS DES LETTRES DONT X... CONCEDAIT CONNAITRE EN EFFET L'EXISTENCE MAIS NON POINT LA TENEUR ;
QUE LE TRIBUNAL AVAIT ENCORE AJOUTE QUE LA TENTATIVE EFFECTUEE PAR X... AUPRES DU JUGE D'INSTRUCTION POUR SAVOIR SI SON DOSSIER CONTENAIT UNE COPIE DE L'ACTE DU 13 MAI 1981 N'ETAIT PAS INCOMPATIBLE AVEC L'IGNORANCE PAR X... DES MENACES PROFEREES PAR Y... ;
QU'ENFIN, POUR LES PREMIERS JUGES, LA MAUVAISE FOI DE ME X... NE POUVAIT ETRE ETABLIE QU'A PARTIR DU MOMENT OU Z... ET A..., LE 8 AVRIL 1982, LUI AURAIENT LU LES LETTRES DE MENACE DE Y... ;
QU'EN CONSEQUENCE, LE TRIBUNAL N'AVAIT SANCTIONNE QUE LES FAITS COMMIS DU 8 AU 26 AVRIL 1982 ;
QU'EN FONDANT NEANMOINS LA PREUVE DE LA MAUVAISE FOI DE ME X... NOTAMMENT SUR DES FAITS ECARTES A CET EGARD PAR LE TRIBUNAL, TOUT EN PRETENDANT ADOPTER EXPRESSEMENT LA MOTIVATION DES PREMIERS JUGES, LA COUR D'APPEL A ENTACHE SA DECISION D'UNE CONTRADICTION INSURMONTABLE ;
ALORS QUE D'AUTRE PART, LA COUR D'APPEL N'A PAS UTILEMENT REPONDU AU MOYEN SOULEVE PAR LE PREVENU ET TIRE DE CE QUE, LOIN D'AVOIR PRIS CONNAISSANCE DES LETTRES DE MENACE, IL N'AVAIT FAIT QUE LES PARCOURIR RAPIDEMENT ;
" ALORS QU'ENFIN EN INDIQUANT QUE LA REVELATION DONT Y... MENACAIT Z... ET A... CONCERNAIT L'EXISTENCE MEME DE L'ACTE EXPRIMANT LA CREANCE DONT Y... POURSUIVAIT LE PAIEMENT ET EN RETENANT NEANMOINS UNE TELLE MENACE COMME CONSTITUTIVE D'UN CHANTAGE, LA COUR D'APPEL N'A PAS CARACTERISE UNE REVELATION PORTANT SUR DES FAITS DIFFAMATOIRES ETRANGERS A LA CAUSE DE LA DETTE DONT L'AUTEUR PRINCIPAL EXIGEAIT LE PAIEMENT ET A DONC VIOLE L'ARTICLE 400 ALINEA 2 DU CODE PENAL ;
" ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT QU'IL CONFIRME QUE Y... A ADRESSE AUX DEUX NOTAIRES ASSOCIES Z... ET A..., A QUI IL AVAIT CEDE SON ETUDE, DEUX LETTRES DANS LESQUELLES IL LEUR RECLAMAIT LE PAIEMENT D'UNE SOMME DE 800 000 FRANCS EN LES MENACANT DE REVELER AUX MINISTERES DE LA JUSTICE ET DES FINANCES L'EXISTENCE D'UNE CONTRE-LETTRE ETABLIE A L'OCCASION DE LADITE CESSION DANS LAQUELLE LES CESSIONNAIRES S'ETAIENT ENGAGES A LUI VERSER UNE CERTAINE SOMME D'ARGENT EN PLUS DU PRIX OFFICIEL ;
QU'IL LES INVITAIT A DONNER UNE REPONSE A " SON REPRESENTANT " ;
QUE CE DERNIER, X..., AVOCAT, APRES QU'IL EUT OBTENU DE Z... ET A... QU'ILS ACCEPTENT DE LUI REMETTRE POUR LE COMPTE DE Y... UNE SOMME DE 550 000 FRANCS EN ECHANGE DE L'ORIGINAL DE LA CONTRE-LETTRE, A ETE INTERPELLE PAR LES SERVICES DE POLICE ALERTES PAR LES NOTAIRES, ALORS QUE LE PAQUET DEVANT CONTENIR LADITE SOMME AVAIT ETE REMIS A UNE INTERMEDIAIRE, ET QUE Z... AVAIT RECU DE X... L'ORIGINAL DE LA CONVENTION OCCULTE ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER CE DERNIER COUPABLE DE COMPLICITE DE LA TENTATIVE D'EXTORSION DE FONDS COMMISE PAR Y..., LES JUGES CORRECTIONNELS ENONCENT QU'IL EST " ETABLI QUE ME X..., TITULAIRE DU POUVOIR QUE LUI AVAIT DONNE Y... EN DATE DU 3 MARS 1982, NE POUVAIT IGNORER, AINSI QU'IL L'A RECONNU LUI-MEME, QUE CE NOTAIRE EN FUITE AVAIT ECRIT A ME Z... ET A ME A... AU SUJET DE L'ACTE SOUS SEING PRIVE DU 13 MAI 1981 ", DONT " EN SA QUALITE D'AVOCAT IL NE POUVAIT IGNORER LE CARACTERE ILLICITE " ;
QU'ILS AJOUTENT " QUE LE 8 AVRIL 1982 LES DEUX NOTAIRES ONT PRESENTE A CE DERNIER QUI LES A LUES, LES LETTRES QU'ILS AVAIENT RECUES DE Y... LE 22 FEVRIER, EN LUI FAISANT REMARQUER QU'IL S'AGISSAIT DE LETTRES DE MENACE ET DE CHANTAGE " ET QUE " ME X... EN SA QUALITE D'AVOCAT EXPERIMENTE NE SAURAIT SERIEUSEMENT SOUTENIR QU'IL A PU SE MEPRENDRE SUR LE CARACTERE ET LA NATURE DES MENACES CONTENUES DANS CES LETTRES " ET QUE MALGRE CELA IL A " CONTINUE A PRETER SON CONCOURS ACTIF A L'ORGANISATION DES MODALITES DE L'ECHANGE " ;
QU'ILS EN CONCLUENT QUE SA MAUVAISE FOI EST DONC INDISCUTABLE DANS CETTE AFFAIRE ;
ATTENDU QUE CES ENONCIATIONS FONT RESSORTIR TOUS LES ELEMENTS DU DELIT SUSVISE ;
QU'EN EFFET, D'UNE PART, S'IL EST VRAI QUE LA MENACE DE RECOURIR AUX VOIES LEGALES POUR OBTENIR LE PAIEMENT D'UNE DETTE NE TOMBE PAS SOUS LE COUP DE L'ARTICLE 400 PARAGRAPHE 2 DU CODE PENAL, EN REVANCHE LE DELIT PREVU PAR CE TEXTE SE TROUVE CARACTERISE LORSQUE LA MENACE DE REVELER UNE IRREGULARITE SUSCEPTIBLE D'ENTRAINER DES POURSUITES D'ORDRE FISCAL OU DISCIPLINAIRE TEND A OBTENIR L'EXECUTION DE LA CONVENTION ENTACHEE DE NULLITE ;
QUE D'AUTRE PART LES JUGES ONT DEDUIT L'INTENTION DELICTUELLE DES ELEMENTS DE LA CAUSE SOUMIS AU DEBAT CONTRADICTOIRE, QU'ILS ONT SANS INSUFFISANCE NI CONTRADICTION SOUVERAINEMENT APPRECIES ;
QUE DES LORS LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.