Cass. crim., 19 juin 2013, n° 12-83.031
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
M. Soulard
Avocat général :
M. Sassoust
Avocats :
Me Bouthors, SCP Roger et Sevaux
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X, pris de la violation des articles 314-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X coupable d'abus de confiance et l'a condamné à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 euros ainsi qu'à verser la somme de 131 411 euros à titre de dommages-intérêts à l'association CRRF de Lille-Hellemme ;
aux motifs qu'il est établi que M. X a réalisé les moulages nécessaires à la fabrication par M. Y, des prothèses définitives, durant son temps de travail, et sur son lieu de travail, avec les moyens et le matériel du centre L'Espoir ; que l'utilisation de son temps de travail et des moyens mis à sa disposition par son employeur, pour mener une activité extérieure au profit de M. X (sic) et rémunérée par ce dernier, constitue un acte de détournement pénalement punissable ; que, dans le rapport d'inspection de l'Agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du mois de mai 2004, il est relevé que les commandes de matériel qualifiées de surdimensionnées étaient effectuées directement par M. X sans aucune justification vis-à-vis de la direction ; que dans ce rapport, l'inspection de l'ARH a estimé que M. X travaillait entre 2,5 et 3 jours pour ses activités privées et que, sur les cinq dernières années, le coût des fournitures utilisées frauduleusement par M. X s'élevait à 27 690 euros ;
et aux motifs que, contrairement à ce qui est soutenu par les prévenus, le pacte frauduleux a été scellé à l'insu et sans l'autorisation de l'association qui était, ainsi que cela résulte du contrat de travail établi en 1985 et de la lettre de licenciement de mai 2004, l'employeur de M. A ; que l'association était dirigée par un conseil d'administration dont plusieurs membres constituaient le bureau qui avait à sa tête un président, M. Fortin ; que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. X pour exercer à titre exceptionnel une activité à l'extérieur du centre, par le docteur B, alors directeur salarié du centre, ni l'attestation de la veuve du docteur C, selon laquelle le docteur C, qui était directeur du centre l'Espoir de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société SIA, ni enfin les déclarations souscrites par M. X au cours de l'enquête préliminaire : je vous précise qu'en 1997, après le décès de M. C, quand le docteur D et Dominique E ont pris leurs fonctions, (de directeurs salariés), je les ai informés de mes activités et de l'existence de la société SIA. En 2004, je souhaitais informer M. E et M. D de mon rapport d'activité mais je n'en ai pas eu le temps ne sont de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association ; qu'en effet, d'une part, M. X, dans une déclaration ultérieure, a indiqué qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du centre l'entente lucrative avec M. Y ; qu'il a en effet déclaré : en 1999, il y a eu la procédure dont le CRAM est à l'origine. A ce moment, nous nous étions rencontrés avec Dominique E, nous avons discuté de mes activités extérieures. Je vous confirme que j'ai dit à Dominique E et au docteur D que je travaillais avec Eric Y mais sans leur parler de la société SIA, je ne leur ait pas non plus parlé des montants facturés par SIA à Y pour mes activités d'application ; que, d'autre part, l'autorisation donnée en 1990 était exceptionnelle et aucun avenant au contrat de travail de M. X, lequel comportait la clause Vous déclarez solennellement n'être lié à aucun employeur et avoir quitté votre précédent emploi libre de tout engagement et vous réserver exclusivement à votre activité professionnelle au sein de notre établissement n'a été conclu, par la suite, entre M. X et l'association, autorisant M. X à travailler à l'extérieur du centre ; qu'en tout état de cause, et même si, ainsi que le prétend MM. X et E avait été informé en 1999 de la constitution par M. X de la société SIA, l'absence d'opposition et le laxisme de M. E ne pourraient servir de justification aux pratiques incriminées dès lors qu'il n'est pas démontré que les personnes dirigeantes de l'association, le président et les membres du bureau, avaient connaissance des activités extérieures de M. X, de leur ampleur et des profits réalisés par le salarié via la société SIA, ni du pacte liant MM. X et Y ;
1) alors que le temps que le salarié doit consacrer à son emploi n'est pas un bien susceptible de faire l'objet d'un détournement constitutif d'un abus de confiance ; qu'en retenant que l'utilisation, par le prévenu, de son temps de travail pour mener une activité extérieure constituait un détournement constitutif du délit d'abus de confiance, la cour d'appel a violé l'article 314-1 du code pénal ;
2) alors qu'en se bornant à relever que des commandes de matériel d'un volume prétendument surdimensionné étaient passées par le prévenu sans justification vis à vis de son employeur sans constater l'utilisation effective, par le prévenu, d'un matériel à des fins étrangères à celles pour lesquelles il lui aurait été confié, la cour d'appel a violé l'article 314-1 du code pénal ;
3) alors que ne constitue pas un détournement punissable le fait pour un salarié de consacrer son temps de travail à une activité étrangère à son emploi et d'utiliser, dans le cadre de cette activité, le matériel qui lui a été confié par son employeur lorsque ce dernier a accepté l'exercice de cette activité personnelle ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le prévenu avait été autorisé en 1990 à travailler à l'extérieur du centre, que la veuve du directeur du centre en place entre 1994 et 1997 avait attesté que ce dernier était informé des activités réalisées par M. X et que le prévenu avait fait valoir au cours de l'enquête que les directeurs suivants, MM. E et D, avaient été également informés de ses activités ; qu'en se bornant à constater qu'aucun avenant au contrat de travail n'avait été conclu pour autoriser le prévenu à travailler pour la société Y et que les directeurs E et D n'avaient pas été informés de l'existence de la société SIA, circonstances impropres à exclure l'accord de l'employeur à la réalisation, par le prévenu, d'une activité pour la société Y pendant ses heures de travail et avec les moyens matériels du centre, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;
4) alors qu'en se bornant à constater que les membres du bureau de l'association n'avaient jamais eu connaissance de l'accord passé entre le prévenu et la société Y sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les directeurs du centre, qui avaient été informés des activités de M. X, n'étaient pas titulaires d'une délégation de pouvoirs dans le cadre de laquelle ils exerçaient les prérogatives de l'employeur, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. X, pris de la violation des articles L. 152-6 ancien du code du travail, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X coupable de corruption passive de salarié et l'a condamné à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 euros ainsi qu'à verser la somme de 131 411 euros à titre de dommages- intérêts à l'association CRRF de Lille-Hellemme ;
aux motifs que l'existence, à compter de 1994, d'une entente lucrative entre MM. X et Y est établie par la procédure et, au demeurant, non contestée par les prévenus ; que, dès le 18 novembre 2004, dans une attestation destinée à l'association CRRF, M. Y a reconnu qu'il était impossible de travail à L'Espoir sans accepter de payer M. X pour ses prestations et il convenait qu'un accord avait bien été conclu entre eux de manière explicite dès son entrée dans L'Espoir ; que le prévenu a confirmé au cours de l'enquête qu'en 1993, M. X lui avait montré ses fiches de paye à son nom établies par la société Lecante en lui indiquant clairement que s'il voulait continuer à travailler avec le centre L'Espoir, il devait entrer dans le système mis en place avec Lecante, c'est-à-dire la fourniture du moulage, par lui-même, en contrepartie d'un règlement, par bulletin de paie de 20 à 30% et qu'il avait compris que le seul moyen de travailler avec le centre était de rétribuer M. X ; que M. Y avait conscience du caractère illégal de l'accord passé entre lui et M. X et de son corollaire, la confection par M. X durant son temps de travail au centre L'Espoir, de moulages pour la confection des prothèses définitives ; qu'il a en effet déclaré : bien sûr, j'ai eu des réticences vis à vis de la déontologie, mais je suis organisé en société commerciale et je me vois mal proposer au client d'aller consulter un autre prothésiste. Je reconnais bien sûr la captation de clientèle dans le cadre de cet accord (…). Sur l'aspect légal, ce qui me gênait le plus c'est qu'il (M. X) effectuait ce travail sur son temps de travail, mais c'était toujours au vu et au su de la direction (…). Je vous précise que Pascal X m'avait affirmé que les médecins prescripteurs étaient au courant de cet accord, ce qui n'était pas vrai ; que M. X, pour sa part, a reconnu qu' il ( M. Y) a accepté le deal, je ne voulais pas qu'il y ait rupture dans la chaîne de traitement du patient. En ce qui concerne la rémunération, nous étions partis de 30%, les taux ont été révisés en 2000 à la suite de la modification du barème de remboursement. Nous sommes donc passés à 15% sur les changements d'emboîtures, 20% sur les prothèses fémorales neuves et le reste inchangé. Nous avons négocié ces taux de rétribution facturés par SIA, j'ai d'ailleurs un document signé de sa main (M. Y) , qu'il ressort de l'enquête qu'entre 1999 et 2004, la société Eric Y a versé à M. X une somme totale de 745 555 euros correspondant à 56 factures émises par la société SIA ; que M. X, qui percevait à l'époque une rémunération annuelle de l'ordre de 30 000 euros en sa qualité de salarié du centre L'Espoir, a admis que la société SIA, qui n'avait quasiment pas de charges, lui procurait d'importants dividendes, représentant, au moins, une fois et demi ou deux fois son salaire ;
et aux motifs que, contrairement à ce qui est soutenu par les prévenus, le pacte frauduleux a été scellé à l'insu et sans l'autorisation de l'association qui était, ainsi que cela résulte du contrat de travail établi en 1985 et de la lettre de licenciement de mai 2004, l'employeur de M. A ; que l'association était dirigée par un conseil d'administration dont plusieurs membres constituaient le bureau qui avait à sa tête un président, M. Fortin ; que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. X pour exercer à titre exceptionnel une activité à l'extérieur du centre, par le docteur B, alors directeur salarié du centre, ni l'attestation de la veuve du docteur C, selon laquelle le docteur C, qui était directeur du centre L'Espoir de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société SIA, ni enfin les déclarations souscrites par M. X au cours de l'enquête préliminaire : je vous précise qu'en 1997, après le décès de M. C, quand le docteur D et Dominique E ont pris leurs fonctions, (de directeurs salariés), je les ai informés de mes activités et de l'existence de la société SIA. En 2004, je souhaitais informer MM. E et D de mon rapport d'activité mais je n'en ai pas eu le temps ne sont de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association ; qu'en effet, d'une part, M. X, dans une déclaration ultérieure, a indiqué qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du centre l'entente lucrative avec M. Y ; qu'il a en effet déclaré : en 1999, il y a eu la procédure dont le CRAM est à l'origine. A ce moment, nous nous étions rencontrés avec Dominique E, nous avons discuté de mes activités extérieures. Je vous confirme que j'ai dit à M. E et au docteur D que je travaillais avec M. Y mais sans leur parler de la société SIA, je ne leur ait pas non plus parlé des montants facturés par SIA à Y pour mes activités d'application ; que, d'autre part, l'autorisation donnée en 1990 était exceptionnelle et aucun avenant au contrat de travail de M. X, lequel comportait la clause Vous déclarez solennellement n'être lié à aucun employeur et avoir quitté votre précédent emploi libre de tout engagement et vous réserver exclusivement à votre activité professionnelle au sein de notre établissement n'a été conclu, par la suite, entre M. X et l'association, autorisant M. X à travailler à l'extérieur du centre ; qu'en tout état de cause, et même si, ainsi que le prétend MM. X et E avait été informé en 1999 de la constitution par M. X de la société SIA, l'absence d'opposition et le laxisme de M. E ne pourraient servir de justification aux pratiques incriminées dès lors qu'il n'est pas démontré que les personnes dirigeantes de l'association, le président et les membres du bureau, avaient connaissance des activités extérieures de M. X, de leur ampleur et des profits réalisés par le salarié via la société SIA, ni du pacte liant MM. X et Y ;
1) alors que le délit de corruption passive de salarié suppose que le salarié sollicite ou agrée un avantage contre l'accomplissement d'un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction ; que le prévenu faisait valoir que l'orientation du patient vers un prothésiste extérieur au centre était réalisée par le médecin prescripteur, seul à être en lien avec le patient à ce stade du traitement, qui remettait audit patient le document, établi par le centre, indiquant que ce dernier travaillait avec la société Y ; qu'en retenant que la captation de la clientèle était imputable au prévenu dans la mesure où il était en contact avec les patients, qu'il était en situation de les conseiller quant au choix du prothésiste et qu'il était le seul à avoir tiré un avantage à l'orientation de la clientèle vers un prothésiste quasi-unique sans constater la réalisation, par le prévenu, d'un acte positif de nature à établir sa participation personnelle à l'orientation de la clientèle vers la société Y, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;
2) alors que le délit de corruption passive de salarié suppose que les faits reprochés aient lieu à l'insu et sans l'autorisation de l'employeur ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le prévenu avait été autorisé en 1990 à travailler à l'extérieur du centre, que la veuve du directeur du centre en place entre 1994 et 1997 avait attesté que ce dernier était informé des activités réalisées par M. X et que le prévenu avait fait valoir au cours de l'enquête que les directeurs suivants, MM. E et D, avaient été également informés de ses activités ; qu'en se bornant à constater qu'aucun avenant au contrat de travail n'avait été conclu pour autoriser le prévenu à travailler pour la société Y et que les directeurs MM. E et D n'avaient pas été informés de l'existence de la société SIA, circonstances impropres à caractériser, pour la première l'ignorance de l'employeur des agissements reprochés et, pour la seconde, l'ignorance d'un accord conclu entre M. X et la société Y, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs qui ne permettent pas la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le point de savoir si les faits reprochés ont été commis à l'insu de l'employeur et n'a pas légalement motivé sa décision ;
3) alors que le délit de corruption passive de salarié suppose que les faits reprochés aient lieu à l'insu et sans l'autorisation de l'employeur ou, en cas de délégation des pouvoirs de l'employeur, à l'insu et sans l'autorisation du bénéficiaire de cette délégation ; qu'en se bornant à constater que les membres du bureau de l'association n'avaient jamais eu connaissance de l'accord passé entre le prévenu et la société Y sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les directeurs du centre, qui avaient été informés de cet accord, n'étaient pas titulaires d'une délégation de pouvoirs dans le cadre de laquelle ils exerçaient les prérogatives de l'employeur, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. X, pris de la violation des articles 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X à verser à l'association centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelles de Lille-Hellemmes L'Espoir la somme de 103 721 euros à titre de dommages-intérêts ;
aux motifs qu'il est justifié au vu des conclusions du rapport d'inspection de l'ARH de faire droit aux demandes formées par l'association au titre des salaires et des consommables ;
alors que la part du salaire que l'employeur a versé à son salarié et correspondant aux heures passées par l'intéressé à commettre, à son préjudice, un abus de confiance ne constitue pas un préjudice résultant directement de cette infraction ; qu'en indemnisant l'association Centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelles de Lille-Hellemmes, en sa qualité d'employeur de M. X, de la perte correspondant au salaire versé à ce dernier pour le temps qu'il aurait consacré à réaliser, pour son propre compte, des prothèses en détournant les moyens matériels mis à sa disposition, la cour d'appel a violé les articles 2 et 3 du code de procédure pénale ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. X, pris de la violation de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 314-1 du code pénal, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de l'égalité des armes ;
en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X coupable d'abus de confiance et l'a condamné à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 euros ainsi qu'à verser à l'association Centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle de Lille-Hellemmes l'Espoir la somme de 103 721 euros à titre de dommage-intérêts;
aux motifs que l'utilisation de son temps de travail et des moyens mis à sa disposition par son employeur, pour mener une activité extérieure au profit de M. X et rémunérée par ce dernier, constitue un acte de détournement pénalement punissable ; que, dans le rapport du service de l'inspection de l'agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du mois de mai 2004, il est relevé que les commandes de matériel qualifiées de surdimensionnées étaient effectuées directement par M. X sans aucune justification vis-à-vis de la direction ; que, dans ce rapport, l'inspection de l'ARH a estimé que M. X travaillait entre 2,5 à 3 jours pour ses activités privées et que, sur les cinq dernières années, le coût des fournitures utilisées frauduleusement par M. X s'élevait à 27 690 euros ; qu'il est justifié au vu des conclusions du rapport d'inspection de l'ARH de faire droit aux demandes formées par l'association au titre des salaires et des consommables ;
1°) alors qu'en se bornant à se référer aux constatations du rapport de l'ARH aux termes desquelles M. X aurait travaillé entre 2,5 à 3 jours pour ses activités privées sans préciser la fréquence de ces journées ni rechercher, ainsi qu'elle y était invitée , s'il ne résultait pas de la circonstance que l'intéressé travaillait 60 heures par semaine dans les locaux du centre alors qu'il n'était rémunéré qu'à hauteur de 35 heures hebdomadaires que ses activités privées avaient été réalisées en dehors de son temps de travail, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;
2°) alors qu'en se fondant, pour faire droit aux demandes
indemnitaires de la partie civile, aux conclusions du rapport de l'inspection de l'ARH évoquant un détournement de salaire correspondant à 40 % du temps de travail de M. X et à 10 % des temps de travail des deux salariés du centre, proportions expressément contestées par la défense, la cour d'appel a tenu pour objectivement acquis un élément qui émanait pourtant de l'organisme de contrôle de la partie civile et a ainsi méconnu le principe de l'égalité des armes ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Y, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 314-1 du code pénal, L. 152-6 du code du travail, préliminaire, 2, 10, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré M. Y coupable de recel d'abus de confiance et de corruption active de salarié et accordé des dommages-intérêts à la partie civile ;
aux motifs que les premiers juges ayant exactement rappelé la procédure et la prévention et exposé les faits de la cause, la cour se réfère à cet égard aux énonciations du jugement ; que M. X avait été engagé en 1985 en qualité d'orthopédiste applicateur, par l'association de gestion du Centre de rééducation et réadaptation fonctionnelle (CRRF) de Lille-Hellemmes, L'Espoir ; que, l'année suivante, il avait été promu prothésiste chef de groupe et était devenu responsable salarié du service d'appareillage ; qu'à ce titre, il était chargé d'assurer la réalisation des moulages des prothèses provisoires, l'essayage et les retouches, le suivi des patients admis au Centre L'Espoir ; que son intervention prenait fin avec la sortie des patients ; qu'en effet, le fonctionnement du centre impliquait que les patients restituent à leur sortie les prothèses provisoires mises à leur disposition par le centre, et fassent l'acquisition de leur prothèse définitive auprès d'un prothésiste libéral de leur choix ; que M. X a été licencié pour faute grave le 18 mai 2004 ; que, depuis le 21 mars 1994, M. X était aussi le gérant et l'associé unique d'une société créée par lui, la Société ingénierie en appareillage (SIA), ayant son siège à son domicile, que cette entité n'avait, ainsi que le prévenu le reconnaît, aucun salarié et aucun moyen pour réaliser son objet social qui était l'ingénierie en appareillage ; que l'unique client de la société SIA était la société Orthopédie prothèse M. Y, dont M. Y, prothésiste libéral implanté à Dunkerque, était l'associé quasi unique, le gérant et le salarié ; que la société de M. Y, qui avait notamment pour activité la fabrication de prothèses définitives, employait plusieurs salariés ; qu'au mois de mars 2004, le comité d'entreprise du centre L'Espoir a porté à la connaissance du directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du Nord-Pas de Calais (ci-après ARH), des pratiques de nature à porter atteinte au libre choix du patient, ainsi qu'au droit de la concurrence, et impliquant MM. X et Y ; qu'aux termes des premières investigations effectuées par l'assurance maladie, le directeur de l'ARH, a dénoncé, le 12 mai 2004, au procureur de la République, les faits suivants :
- la situation de quasi-monopole dans laquelle se trouvait la société Eric Y, pour la fabrication des prothèses et orthèses des patients suivis par le centre L'Espoir, puisqu'en 2001, sur 176 prescriptions de prothèses définitives, 173 avaient été exécutées par M. Y, qu'en 2002, sur 203 prescriptions, 201 avaient été exécutées par M. Y, tandis qu'en 2003, 184 prescriptions sur 185, avaient été réalisées par M. Y, qu'au total, entre 1999 et 2003, sur cinq années, 797 prothèses définitives avaient été exécutées par M. Y pour des patients du CRRF ;
- la facturation, par la société SIA, de prestations d'études apparaissait être la contrepartie de l'organisation de ce quasi-monopole au profit de la société Eric Y ;
- une partie des prothèses définitives était réalisée avec les moyens de l'atelier d'appareillage du CRRF, et le suivi des patients, appareillés par la société Eric Y, était assuré par M. X dans l'atelier du Centre ;
que, concomitamment, le directeur de l'ARH a saisi le service d'inspection de l'ARH ; que l'enquête préliminaire ordonnée par le procureur de la République de Lille, le 1er juin 2004, a révélé l'existence, à partir de 1994, d'une entente lucrative entre MM. X et Y, aux termes de laquelle les clients du centre étaient dirigés, pour la confection de leur prothèse définitive, vers M. Y, qui les réalisait à partir des moulages fabriqués pendant ses heures de travail, avec le matériel du CRRF, par M. X, ce dernier recevant en contrepartie une rétrocession de 30% du coût des appareillages, sous la forme, dans un premier temps, d'un salaire versé par la société Eric Y, puis, à compter de 1994, sous la forme de paiement des factures via la société SIA, constituée à cet effet ; que M. X est poursuivi du chef de corruption passive de salarié pour avoir sollicité ou agréé, à l'insu et sans l'autorisation de son employeur, des avantages perçus, sous forme d'honoraires, pour orienter la totalité des patients nécessitant la réalisation d'une prothèse définitive, vers le cabinet de M. Y et du chef d'abus de confiance pour avoir utilisé les moyens mis à sa disposition par l'association CRRF l'Espoir, dans le cadre de son emploi salarié, pour réaliser durant ses heures de travail des moulages destinés à la fabrication des prothèses définitives par M. Y ; que M. Y est poursuivi des chefs de corruption active de salarié et de recel de l'abus de confiance commis par M. X ; que les deux prévenus sollicitent leur relaxe, au motif que les éléments constitutifs des infractions ne sont pas réunis à leur encontre ; que, reprenant pour l'essentiel, l'argumentation de première instance, ils soutiennent que les faits qui leur sont reprochés sous les qualifications pénales susmentionnées, étaient non seulement connus, mais avaient été autorisés par l'employeur de M. X, qu'à tout le moins, M. E, directeur financier et administratif du centre L'Espoir, dont l'attention avait été attirée en juin 1999 par la CPAM sur le fait que les prothèses émanaient pratiquement d'un seul et même fournisseur la société Eric Y et que M. X semblait intervenir directement dans le processus d'attribution de l'appareillage, disposait depuis cette date d'informations complètes sur les activités de M. X extérieures au CRRF et ne les a pas empêchées ;
et aux motifs que sur ce, la cour ; que l'existence, à compter de 1994, d'une entente lucrative entre MM. X et Y est établie par la procédure et, au demeurant, non contestée par les prévenus ; que, dès le 18 novembre 2004, dans une attestation destinée à l'association CRRF, M. Y a reconnu qu'il était impossible de travailler à L'Espoir sans accepter de payer M. X pour ses prestations et il convenait qu'un accord avait bien été conclu entre eux de manière explicite dès son entrée à L'Espoir ; que le prévenu a confirmé au cours de l'enquête qu'en 1993, M. X lui avait montré des fiches de paye à son nom établies par la société Lecante, en lui indiquant clairement que s'il voulait continuer à travailler avec le centre L'Espoir, il devait entrer dans le système mis en place avec Lecante, c'est-à-dire la fourniture du moulage, par lui-même, en contrepartie d'un règlement, par bulletin de paye de 20 à 30% et qu'il avait compris que le seul moyen de travailler avec le centre était de rétribuer M. X ; que M. Y avait conscience du caractère illégal de l'accord passé entre lui et M. X et de son corollaire, la confection par M. X durant son temps de travail au centre L'Espoir, de moulage pour la confection des prothèses définitives, qu'il a en effet déclaré : Bien sûr j'ai eu des réticences vis à vis de la déontologie mais je suis organisé en société commerciale et je me vois mal proposer au patient d'aller consulter un autre prothésiste. Je reconnais bien sûr la captation de clientèle dans le cadre de cet accord Sur l'aspect légal, ce qui me gênait surtout c'était qu'il (M. X) effectuait ce travail sur son temps de travail, mais c'était toujours au vu et au su de la direction Je vous précise que Pascal X m'avait affirmé que les médecins prescripteurs étaient au courant de cet accord, ce qui n'était pas vrai ; que M. X, pour sa part, a reconnu : Il (Eric Y) a accepté le deal , je ne voulais pas qu'il y ait rupture dans la chaîne de traitement du patient. En ce qui concerne la rémunération, nous étions partis sur 30%, les taux ont été révisés, en 2000, à la suite de la modification du barème de remboursement. Nous sommes donc passés à 15% sur les changements d'emboîtures, 20% sur les prothèses fémorales neuves et le reste inchangé. Nous avons négocié ces taux de rétribution facturés par SIA, j'ai d'ailleurs un document signé de sa main (Eric Y) ; qu'il ressort de l'enquête qu'entre 1999 et 2004, la société Eric Y a versé à M. X une somme totale de 745 455 euros, correspondant à 56 factures émises par la société SIA ; que M. X, qui percevait, à l'époque, une rémunération annuelle de l'ordre de 30 000 euros en sa qualité de salarié du centre L'Espoir, a admis que la société SIA, qui n'avait quasiment pas de charges, lui procurait d'importants dividendes, représentant, au moins, une fois et demi ou deux fois son salaire ; que l'orientation systématique des patients vers M. Y, à leur sortie du centre, qui est démontrée par le nombre très important de prothèses réalisées par M. Y, est également établie par des documents qui étaient remis aux patients et dont M. X a produit des exemplaires ; que, dans des documents à en-tête du centre L'Espoir remis aux patients à leur entrée au centre, il était indiqué : nous travaillons avec un prothésiste extérieur pour la fourniture des appareils après votre sortie ; nous vous rappelons que vous avez le libre choix du fournisseur et que nous tenons à votre disposition une liste de orthoprothésistes de la région, et dans un autre document portant en objet : choix du fournisseur daté du 22 mars 2002, il était écrit Nous avons l'habitude de collaborer avec les établissements Y avec qui nous travaillons en toute confiance. je soussigné(nom du patient) certifie avoir été informé du droit au libre choix du fournisseur et certifie avoir choisi les établissements Y pour la demande de prise en charge et la fourniture de mon appareil; que la captation de clientèle au profit de M. Y est imputable personnellement à M. X, qui, de par ses fonctions, était en contact avec les patients ayant besoin d'un appareillage définitif et était en situation de les conseiller quant au choix du prothésiste ; qu'en outre, il est le seul à avoir tiré un avantage de l'orientation de la clientèle vers un prothésiste quasi-unique ; qu'il est donc établi qu'en 1994, M. X a imposé à M. Y, comme condition de son accès aux commandes de prothèses définitives, l'engagement de ce dernier de lui rétrocéder un pourcentage du prix des prothèses et que ce pacte de corruption, accepté en toute connaissance de cause par M. Y, a fonctionné jusqu'en 2004 ; qu'ainsi que les premiers juges l'ont justement énoncé, il est par ailleurs, établi que M. X a réalisé les moulages nécessaires à la fabrication, par M. Y, des prothèses définitives, durant son temps de travail, et sur son lieu de travail, avec les moyens et le matériel du centre L'Espoir ; que l'utilisation de son temps de travail et des moyens mis à sa disposition par son employeur, pour mener une activité extérieure au profit de M. X et rémunérée par ce dernier, constitue un acte de détournement pénalement punissable ; que dans le rapport du service de l'inspection de l'agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du mois de mai 2004, il est relevé que les commandes de matériel qualifiées de surdimensionnées étaient effectuées directement par M. X, sans aucune justification vis à vis de la direction ; que, dans ce rapport, l'inspection de l'ARH a estimé que Pascal X travaillait entre 2,5 à 3 jours pour ses activités privées et que, sur les cinq dernières années, le coût des fournitures utilisées frauduleusement par M. X, s'élevait à 27 690 euros ; que, contrairement à ce qui est soutenu par les prévenus, le pacte frauduleux a été scellé entre les prévenus, à l'insu et sans l'autorisation de l'association, qui était, ainsi que cela résulte du contrat de travail établi en 1985 et de la lettre de licenciement de mai 2004, l'employeur de M. X, que l'association CRRF de Lille-Hellemmes était dirigée par un conseil d'administration dont plusieurs membres constituaient le bureau et qui avait à sa tête un président M. Fortin, à la date du dépôt de la plainte ; que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. X pour exercer à titre exceptionnel, une activité professionnelle à l'extérieur du centre, par le docteur B, alors directeur salarié du centre, ni l'attestation de la veuve du docteur C, selon laquelle le docteur C, qui était directeur salarié du centre L'Espoir de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société SIA, ni enfin les déclarations souscrites par M. X au cours de l'enquête préliminaire Je vous précise qu'en 1997 après le décès de M. C, quand le docteur D et M. E ont pris leurs fonctions (de directeurs salariés), je les ai informés de mes activités et de l'existence de la société SIA. En 2004 je souhaitais informer MM. E et D de mon rapport d'activité mais je n'en ai pas eu le temps, ne sont de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association ; qu'en effet, d'une part, M. X, dans une déclaration ultérieure, a indiqué qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du centre l'entente lucrative avec M. Y, qu'il a en effet déclaré : En 1999, il y a eu la procédure dont le CRAM est à l'origine. A ce moment nous nous étions rencontrés avec Dominique E, nous avons discuté de mes activités extérieures. Je vous confirme que j'ai dit à Dominique E et au Docteur D que je travaillais avec Eric Y mais sans leur parler de ma société SIA, je ne leur ai pas non plus parlé des montants facturés par SIA à Y pour mes activités d'application ; que, d'autre part, l'autorisation donnée en 1990 était exceptionnelle et aucun avenant au contrat de travail de M. X, lequel comportait la clause Vous déclarez solennellement n'être lié à aucun autre employeur et avoir quitté votre précèdent emploi libre de tout engagement et vous réserver exclusivement votre activité professionnelle à notre établissement, n'a été conclu, par la suite, entre M. X et l'association, autorisant M. X à travailler à l'extérieur du centre ; qu'en tout état de cause, et même si, ainsi que le prétend M. X, M. E avait été informé en 1999 de la constitution par M. X de la société SIA, l'absence d'opposition et le laxisme de M. E ne pourraient servir de justification aux pratiques incriminées, dès lors qu'il n'est pas démontré que les personnes dirigeantes de l'association, président et membres du bureau, avaient connaissance des activités extérieures de M. X, de leur ampleur et des profits retirés par leur salarié, via la société SIA, ni du pacte liant MM. X et Y ; que la cour confirmera la déclaration de culpabilité prononcée par les premiers juges dans les termes de la prévention ;
1°) alors que les délits d'abus de confiance et de corruption de salarié ne sauraient être caractérisés lorsque l'acte d'usage accompli par le salarié a été préalablement autorisé par l'employeur et a été réalisé conformément à cette autorisation ; qu'est assimilable à un employeur la personne non dirigeante dotée même implicitement au sein de l'entreprise des pouvoirs de gestion, de direction et de discipline ; qu'en l'état de l'autorisation donnée à M. X par les directeurs successifs du centre, dotés des pouvoirs de direction et de discipline propres à l'employeur, d'exercer une activité de fabrication de moulages de prothèses définitives en partenariat avec le demandeur et de la politique assumée du centre d'orientation systématique des patients vers ce dernier en vue de l'établissement de ces prothèses, la cour, en déclarant néanmoins le demandeur coupable de recel d'abus de confiance et de corruption active de salarié, a violé les textes susvisés ;
2°) alors que le délit de corruption suppose qu'un pacte de corruption ait pour objet l'accomplissement par le salarié d'un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction ; qu'en retenant la culpabilité du demandeur pour avoir rémunéré M. X en contrepartie d'une orientation systématique des patients vers lui, lors même que c'étaient exclusivement les médecins du centre qui, pour respecter l'obligation de rappel au patient du principe du libre choix dont ils étaient seuls débiteurs, remettaient un document à en-tête du Centre recommandant les services du demandeur, circonstance excluant tout pouvoir de M. X d'adresser les patients au demandeur et, par voie de conséquence, l'existence même d'un prétendu pacte de corruption, la cour s'est déterminée par des motifs contradictoires et a violé l'article L. 152-6 du code du travail ;
3°) alors que le délit de corruption suppose que le bénéfice perçu par le salarié soit la contrepartie de l'accomplissement d'un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction ; qu'en retenant la culpabilité du demandeur du chef de corruption active, lors même qu'il s'inférait des éléments du dossier et des termes de la prévention, que les sommes perçues par le salarié du centre n'étaient que la rétribution du travail par lui effectué au profit du demandeur au titre de la fabrication des moulages de prothèses définitives, la cour a, derechef, violé l'article 152-6 du code du travail ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. Y, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 2, 418, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
en ce que l'arrêt attaqué a reçu la constitution de partie civile de l'association Centre de rééducation et réadaptation fonctionnelles de Lille-Hellemmes et a condamné M. Y solidairement avec M. X à payer à cette association la somme de 131 411 euros à titre de dommages-intérêts ;
aux motifs que l'association Centre de rééducation et réadaptation fonctionnelles de Lille-Hellemmes, sollicite la condamnation solidaire des prévenus à lui payer à titre de dommages- intérêts, la somme de 217 155,98 euros, se décomposant comme suit :
- salaires : 103 721,72 euros ;
- amortissement de la machine Capod utilisée pour les moulages de prothèses définitives, de 1999 à 2001 : 61 824,48 euros ;
-amortissement des locaux : 23 919,78 euros ;
-consommable : 27 690 euros ;
-préjudice moral : 50 000 euros ;
que cette partie civile est recevable en son action ; qu'au fond, il est justifié au vu des conclusions du rapport d'inspection de l'ARH de faire droit aux demandes formées par l'association au titre des salaires et des consommables ; qu'en revanche, les premiers juges ont, à juste titre, rejeté les demandes relatives à l'amortissement de la machine Capod et des locaux, et le préjudice moral, en l'absence de lien direct avec les infractions commises ; qu'en conséquence, il sera alloué à la partie civile une somme de 131 411 euros à titre de dommages-intérêts ;
1°) alors que la partie civile en situation illicite ne peut prétendre à être indemnisée du préjudice qu'elle prétend avoir subi à l'occasion d'une infraction à laquelle elle aurait participé elle-même ; qu'en l'état de la connaissance par la direction du centre de l'activité de fabrication de moulages de prothèses définitives de M. X en partenariat avec le demandeur et manifestant la politique assumée du centre d'orientation systématique de ses patients vers le demandeur en vue de la fabrication des prothèses définitives, système lui ayant au surplus procuré un bénéfice financier, la cour ne pouvait faire droit aux conclusions indemnitaires de la partie civile, laquelle ne se prévalait pas d'un préjudice directement lié à l'infraction poursuivie ; qu'en condamnant, néanmoins, le demandeur à payer au centre des dommages-intérêts sans égard pour la participation de la partie civile aux faits de la prévention et sans établir en tout état de cause l'existence d'un préjudice procédant directement et exclusivement de l'infraction aujourd'hui poursuivie, la cour a violé les règles et principes gouvernant l'action civile ;
2°) alors qu'en se fondant pour faire droit aux demandes indemnitaires de la partie civile aux conclusions du rapport d'inspection de l'ARH évoquant un détournement des salaires correspondant à 40% du temps de travail de M. X et à 10% des temps de travail des deux salariés du centre, proportions expressément contestées par la défense, la cour s'est fondée sur un élément émanant de l'organisme de contrôle de la partie civile en violation du principe d'indépendance de l'expert judiciaire ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X occupait les fonctions de prothésiste chef de groupe au sein du centre de rééducation et réadaptation fonctionnelle (CRRF) de Lille-Hellemmes, L'Espoir ; qu'à ce titre, il était chargé d'assurer la réalisation des moulages des prothèses provisoires, l'essayage et les retouches ainsi que le suivi des patients admis au centre, lesquels restituaient à leur sortie les prothèses provisoires mises à leur disposition par le centre et faisaient alors l'acquisition de leur prothèse définitive auprès d'un prothésiste libéral de leur choix ; que, depuis le 21 mars 1994, M. X était également le gérant et l'associé unique d'une société créée par lui, la Société ingénierie en appareillage (SIA), ayant son siège à son domicile ; que cette société n'employait aucun salarié et n'avait aucun moyen pour réaliser son objet social, que son unique client était la société Orthopédie prothèse Eric Y, qui avait pour objet la fabrication de prothèses définitives et dont M. Y, prothésiste libéral implanté à Dunkerque, était l'associé quasi unique et le gérant salarié ; qu'à la suite d'une dénonciation émanant de l'Agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du Nord-Pas de Calais (ARH), une enquête a fait apparaître que la quasi-totalité des prothèses et orthèses des patients suivis par le centre L'Espoir avaient, entre 1999 et 2003, été exécutées par M. Y et que la facturation, par la société SIA, de prestations d'études, apparaissait être la contrepartie de l'organisation de ce quasi-monopole ;
Attendu que, pour déclarer MM. X et Y coupables le premier, d'abus de confiance et de corruption de salarié, et le second, de recel d'abus de confiance et de corruption de salarié, l'arrêt énonce que l'enquête préliminaire a révélé l'existence, à partir de 1994, d'une entente lucrative entre M. X et M. Y, aux termes de laquelle le premier incitait les clients du CRRF à faire confectionner leur prothèse définitive par le second, lequel utilisait à cet effet des moulages que M. X fabriquait pendant ses heures de travail et avec le matériel du CRRF ; qu'en échange de ce service, M. X recevait une rétrocession de 30% du coût des appareillages, sous la forme, dans un premier temps, d'un salaire versé par la société Eric Y, puis, à compter de 1994, sous la forme de paiement des factures via la société SIA, constituée à cette fin ; que ces faits ont été reconnus tant par M. X que par M. Y, ce dernier indiquant notamment qu'il n'aurait pas eu la possibilité d'effectuer des prestations pour les patients du CRRF s'il n'avait pas accepté de rémunérer M. X ;
Que les juges relèvent encore que la captation de clientèle au profit de M. Y est imputable personnellement à M. X, qui, de par ses fonctions, était en contact avec les patients ayant besoin d'un appareillage définitif et en situation de les conseiller quant au choix du prothésiste; qu'en outre, il est le seul à avoir tiré un avantage de l'orientation de la clientèle vers un prothésiste quasi-unique ;
Que les juges ajoutent enfin que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. X pour exercer à titre exceptionnel une activité professionnelle à l'extérieur du CRRF, par le docteur B, alors directeur salarié, ni l'attestation de la veuve du docteur C, selon laquelle ce dernier, qui fut directeur salarié du CRRF de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société SIA, ni enfin les déclarations de M. X selon lesquelles il aurait informé les directeurs de l'existence de la société SIA ne sont de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association, dès lors que M. X a indiqué ultérieurement qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du CRRF l'entente lucrative avec M. Y et qu'aucun avenant au contrat de travail de M. X, lequel comportait une clause d'exclusivité, n'a été conclu par la suite ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, fondés sur l'appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, et dès lors que l'utilisation, par un salarié, de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur constitue un abus de confiance, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Attendu que, enfin, en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour le CRRF des infractions, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né des infractions ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.