Cass. crim., 24 avril 2013, n° 12-81.955
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Avocats :
SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le mémoire de la société Gegelec, venant aux droits de la société Cegelec Centre-Est, et tendant à faire constater l'extinction de l'action publique à l'égard de cette dernière société ;
Attendu que la société Cegelec soutient qu'elle a absorbé en vertu d'un traité de fusion-absorption la société Cegelec Centre-Est et qu'ainsi l'action publique est éteinte à l'égard de cette dernière ;
Attendu que cette argumentation, mélangée de fait et de droit, ne peut être soutenue en l'état de la procédure ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu à constater l'extinction de l'action publique à l'égard de la société Cegelec Centre-Est ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-2, 121-4 à 121-7, 313-1, 313-3, 313-7 et 8, 433-1, 433-22 et 23, 433-25 du code pénal ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la commune de Villeurbanne a passé avec la société Cegelec Centre-Est deux marchés publics portant sur l'éclairage de certains quartiers de la ville, contrats à l'occasion de l'exécution desquels ont été dénoncés par cette commune des paiements indus de factures, anticipées ou fictives, afférents à des travaux non réalisés, émises par cette société, dont le représentant était M. Z..., avec le concours de deux fonctionnaires de la commune, MM. X...et Y..., ce dernier bénéficiant, en contrepartie, de dons, présents ou avantages de la part de la société ; que, pour ces faits, sont poursuivis devant le tribunal M. X...pour escroquerie, M. Y...pour escroquerie et corruption passive, M. Z... et la société Cegelec Centre-Est pour recel et corruption active ;
Attendu que, pour relaxer les prévenus des chefs d'escroquerie et recel, au motif que l'élément intentionnel de ces infractions n'est pas établi l'arrêt retient que, malgré les mesures préconisées par leur hiérarchie, MM. X...et Y...ont " adopté une pratique de certification du service, fait inadmissible au regard des règles de la comptabilité publique et se caractérisant par l'établissement de faux documents " ; que M. Z... savait qu'il obtenait des paiements anticipés et que la société Cegelec Centre-Est n'ignorait pas que le paiement des travaux non terminés supposait des accommodements avec les règles de ladite comptabilité publique ;
Que, pour relaxer les prévenus des chefs de corruption active et passive, l'arrêt énonce que si " les éléments de l'espèce ne permettent pas de caractériser un pacte de corruption par rapport aux opérations visées à ce titre, force est de noter que ce type de relation, très suivie et assortie d'avantages matériels entre une personne dépositaire d'une parcelle de la décision publique et son donneur d'ordre, relève d'un relâchement regrettable chez M. Y...et de nature à faire suspecter des compromissions dans des situations où, comme relevé ci-dessus, les règles de la comptabilité publique n'ont pas été rigoureusement observées " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs contradictoires et en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 22 février 2012, et pour qu'il soit, à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre.