Cass. crim., 3 février 1970, n° 68-90.038
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Costa CDFF
Rapporteur :
M. Gagne
Avocat général :
M. Boucheron
Avocat :
Me Calon, Nicolas
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 4, 5, 150, 164 ET 463 DU CODE PENAL, 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE, DANS UNE AFFAIRE OU LA PEINE PREVUE PAR L'ARTICLE 150 POUR LE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ETAIT LA PLUS FORTE ET SEULE A PRONONCER, LA COUR D'APPEL S'EST CRU OBLIGEE PAR L'ARTICLE 164 A AJOUTER UNE AMENDE A LA PEINE D'EMPRISONNEMENT SEULE PRONONCEE PAR LE JUGEMENT QU'ELLE CONFIRME ;
ALORS, D'UNE PART, QUE L'AMENDE INSTITUEE PAR L'ARTICLE 164 NE CONCERNE PAS LES FAUX POUR LESQUELS UN TEXTE SPECIAL, TEL QUE L'ARTICLE 150, INSTITUE DEJA UNE AMENDE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'EN MATIERE CORRECTIONNELLE L'AMENDE INSTITUEE PAR L'ARTICLE 164 N'EST PAS OBLIGATOIRE MAIS SUBIT L'EFFET DES CIRCONSTANCES ATTENUANTES ;
QU'EN CONSEQUENCE LA DOUBLE ERREUR DE DROIT COMMISE PAR LA COUR SUR LE CHAMP D'APPLICATION ET LE SENS DE L'ARTICLE 164 PRIVE LA PEINE PRONONCEE DE TOUTE BASE LEGALE ET QUE LA CASSATION DOIT ETRE TOTALE EN RAISON DE L'INDIVISIBILITE DES PEINES EN MATIERE CORECTIONNELLE ;
ATTENDU QUE LES PREMIERS JUGES APRES AVOIR ADMIS L'EXISTENCE DE CIRCONSTANCES ATTENUANTES EN FAVEUR DU PREVENU X..., L'ONT CONDAMNE A DIX-HUIT MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS POUR FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ET ABUS DE BIENS SOCIAUX ;
QUE LA COUR D'APPEL A MAINTENU CETTE CONDAMNATION, MAIS QUE, SE REFERANT A L'ARTICLE 164 DU CODE PENAL, ELLE A PRONONCE, EN OUTRE, UNE AMENDE DE 5000 FRANCS COMME CONSEQUENCE DE LA CONDAMNATION POUR FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LA COUR D'APPEL, LOIN D'AVOIR VIOLE LES ARTICLES DE LOI VISES AU MOYEN EN A, AU CONTRAIRE, FAIT UNE EXACTE APPLICATION ;
QU'EN EFFET, L'AMENDE EDICTEE PAR L'ARTICLE 164 DU CODE PENAL, DISTINCTE DE CELLE PREVUE PAR L'ARTICLE 150 DU MEME CODE, DOIT ETRE APPLIQUEE OBLIGATOIREMENT ET CUMULATIVEMENT, MEME EN CAS D'ADMISSION DE CIRCONSTANCES ATTENUANTES, CONTRE QUICONQUE EST DECLARE COUPABLE DE FAUX, AUX TERMES DES ARTICLES 147 ET SUIVANTS DU CODE PENAL, ALORS QUE LA PEINE DU FAUX N'EST PAS EN CONCOURS AVEC UNE PEINE ENCOURUE PLUS RIGOUREUSE ;
QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ADMIS ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147 ET 150 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE X... COUPABLE DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE POUR AVOIR ETABLI DES FACTURES ET DES BONS DE LIVRAISON MAJORES, ALORS QU'IL S'AGIT LA D'ECRITS SUJETS A VERIFICATION ET NE FORMANT PAS TITRE, QU'EN CONSEQUENCE, LES FAUSSES INDICATIONS QUI Y SONT INSEREES NE SONT PAS CONSTITUTIVES D'UN FAUX PUNISSABLE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DU JUGEMENT CONFIRME QUE X..., PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL DE LA SOCIETE ANONYME SOCIETE TEXTILE DES PYRENEES, A DELIVRE A DES COMMERCANTS LUI ACHETANT A CREDIT DES TROUSSEAUX REVENDUS PAR EUX EGALEMENT A CREDIT A LA CLIENTELE PARTICULIERE, DES FACTURES FALSIFIEES QUI LUI ONT PERMIS DE PERCEVOIR DES SOMMES INDUES ;
ATTENDU QU'UNE FACTURE EST UNE ECRITURE DE COMMERCE ;
QU'EN CAS D'INSTANCE JUDICIAIRE ENTRE COMMERCANTS ELLE EST DE NATURE A FORMER SINON UN TITRE PARFAIT, AU MOINS UNE DE CES PRESOMPTIONS QUE LA LOI ABANDONNE A LA PRUDENCE DU JUGE ;
QUE, D'AUTRE PART, AUX TERMES DES ARTICLES 46 ET 48 DE L'ORDONNANCE DU 30 JUIN 1945, TOUT ACHAT DE PRODUITS, DENREES OU MARCHANDISES EFFECTUE POUR LE COMPTE OU AU PROFIT D'UN INDUSTRIEL OU D'UN COMMERCANT POUR LES BESOINS DE SON EXPLOITATION DOIT FAIRE L'OBJET D'UNE FACTURE ;
QUE LES ORIGINAUX ET LES COPIES DES FACTURES DOIVENT ETRE REUNIS EN LIASSE PAR ORDRE DE DATE ET CONSERVES PAR L'ACHETEUR ET LE VENDEUR ;
QU'IL SUIT DE LA FALSIFICATION DE FACTURE DONNE NAISSANCE AUSSI BIEN A UN PREJUDICE INDIVIDUEL QU'A UN PREJUDICE SOCIAL ;
QU'IL N'IMPORTE QUE CE PREJUDICE PUISSE N'ETRE QU'EVENTUEL, LA POSSIBILITE D'UN PREJUDICE SUFFISANT A FAIRE TOMBER LA FALSIFICATION, DE LA VERITE SOUS L'APPLICATION DE LA LOI PENALE ;
QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ADMIS;
SUR LES TROISIEME ET QUATRIEME MOYENS DE CASSATION, REUNIS ET PRIS :
LE TROISIEME, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 15 ET 45 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867, 59 ET 60 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LES DEMANDEURS POUR ABUS DES BIENS ET POUVOIRS SOCIAUX ET COMPLICITE, SANS CONSTATER QUE L'AUTEUR DE L'INFRACTION PRINCIPALE AVAIT AGI DE MAUVAISE FOI, SACHANT QUE L'USAGE QU'IL FAISAIT DES BIENS SOCIAUX ETAIT CONTRAIRE AUX INTERETS DE LA SOCIETE, ALORS QU'IL S'AGIT D'ELEMENTS CONSTITUTIFS EN L'ABSENCE DESQUELS LA RESPONSABILITE PENALE DE L'AUTEUR ET DU COMPLICE NE PEUT ETRE RETENUE ;
LE QUATRIEME, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 59 ET 60 DU CODE PENAL, 15 ET 45 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A CONDAMNE LA FEMME X... POUR COMPLICITE DE DELIT D'ABUS DES BIENS ET POUVOIRS SOCIAUX SANS CONSTATER L'EXISTENCE D'UN DES MODES DE COMPLICITE LIMITATIVEMENT ENUMERES A L'ARTICLE 60 DU CODE PENAL ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DU JUGEMENT DONT L'ARRET A ADOPTE LES MOTIFS QUE GRACE NOTAMMENT A L'ETABLISSEMENT DE FAUSSES FACTURES, X... A TRANSFERE DES QUANTITES IMPORTANTES DE MARCHANDISES, DE LA SOCIETE TEXTILE DES PYRENEES QU'IL ADMINISTRAIT ET QUI EN ETAIT PROPRIETAIRE, AU MAGASIN TISS-NORD DONT IL ETAIT PROPRIETAIRE AVEC SA FEMME ;
QUE LES MARCHANDISES ETAIENT ENSUITE REVENDUES A BAS PRIX POUR LE SEUL PROFIT DES EPOUX X... QUI N'EN REGLAIENT PAS LA VALEUR A LA SOCIETE TEXTILE DES PYRENEES ;
QUE LES JUGES DU FOND ONT CONSTATE QUE X... AVAIT ETE AIDE ET ASSISTE PAR SA FEMME QUI ASSUMAIT UN ROLE PREPONDERANT DANS LA GESTION DU MAGASIN TISS-NORD ET QUI N'IGNORAIT PAS LE CARACTERE DES OPERATIONS AUXQUELLES ELLE APPORTAIT SON CONCOURS ;
ATTENDU QUE LA MAUVAISE FOI DE L'ADMINISTRATEUR DE SOCIETE QUI COMMET UN ABUS DE BIENS SOCIAUX ET LA CONNAISSANCE QU'IL A QUE SES ACTES SONT CONTRAIRES A L'INTERET SOCIAL N'ONT PAS A ETRE CONSTATEES EN TERMES SACRAMENTELS ;
QU'IL EN VA DE MEME DE LA MAUVAISE FOI DE SON COMPLICE ;
QU'IL SUFFIT QUE COMME EN L'ESPECE LA MAUVAISE FOI DES PREVENUS, AINSI QUE LES AUTRES ELEMENTS CONSTITUTIFS DES DELITS D'ABUS DE BIENS SOCIAUX ET DE COMPLICITE D'ABUS DE BIENS SOCIAUX, RESSORTENT SANS EQUIVOQUE DES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND ;
D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS REUNIS NE SONT PAS FONDES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS ;
ET ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 8 DE LA LOI D'AMNISTIE DU 30 JUIN 1969, SONT AMNISTIEES LES INFRACTIONS COMMISES AVANT LE 20 JUIN 1969 QUI SONT PUNIES A TITRE DEFINITIF D'UNE PEINE D'EMPRISONNEMENT INFERIEURE A UN AN AVEC APPLICATION DU SURSIS SIMPLE, QUE CETTE PEINE SOIT ASSORTIE OU NON D'UNE AMENDE ;
QUE L'INFRACTION RETENUE A LA CHARGE DE LA FEMME Y...-X... A ETE COMMISE AVANT LE 20 JUIN 1969 ;
QUE LA FEMME X... A ETE CONDAMNEE A UNE PEINE DE DEUX MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET MILLE FRANCS D'AMENDE, DEVENUE DEFINITIVE PAR LE REJET DU PRESENT POURVOI ;
DECLARE L'INFRACTION COMMISE PAR LA FEMME Y... EPOUSE X... AMNISTIEE.