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Décisions

Cass. crim., 10 novembre 1964, n° 64-90.071

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. ZAMBEAUX

Rapporteur :

M. COSTA

Avocat général :

M. TOUREN

Avocat :

Me MAYER

Paris, du 14 nov. 1963

14 novembre 1963

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2 DU DECRET DU 8 AOUT 1935, 614-15 DU CODE DE COMMERCE, 402 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE DU CHEF DE BANQUEROUTE UN MANDATAIRE SOCIAL POUR TENUE IRREGULIERE DE LA COMPTABILITE ET CE, A RAISON DE SA QUALITE, SANS ETABLIR SA MAUVAISE FOI QUI EST UN ELEMENT CONSTITUTIF DE L'INFRACTION ;

" ET ALORS, SUBSIDIAIREMENT, A SUPPOSER QUE L'ARRET AIT ADOPTE LES MOTIFS DU JUGEMENT SUR LA MAUVAISE FOI, QUE LA CONNAISSANCE DE LA POSSIBILITE D'UN PREJUDICE POUR LES CREANCIERS PRIVES DU MOYEN DE CONTROLE QUE CONSTITUE TEL LIVRE DE COMMERCE NE SAURAIT CONSTITUER LA MAUVAISE FOI " ;

ATTENDU QU'IL APPERT DU JUGEMENT CONFIRME PAR L'ARRET ATTAQUE QUE X..., MANDATAIRE SOCIAL DE LA "COMPAGNIE PAYSANNE DE PRODUCTION AGRICOLE" (COPPA), DONT LA COMPTABILITE AVAIT ETE SAISIE A L'OCCASION D'UNE INFORMATION LE CONCERNANT, N'A PAS OUVERT LES NOUVEAUX LIVRES REQUIS PAR LA LOI ;

QUE LE JUGEMENT ENONCE QU'EN S'ABSTENANT DE SE CONFORMER A CETTE OBLIGATION LEGALE, LE PREVENU N'A PU IGNORER LE PREJUDICE QUI POUVAIT EN RESULTER POUR LES CREANCIERS DE LA SOCIETE, ET QUE SA MAUVAISE FOI EST PAR CONSEQUENT CERTAINE ;

ATTENDU QUE PAR CES MOTIFS QUI NE COMPORTENT NI CONTRADICTION NI INSUFFISANCE, LES JUGES DU FOND ONT ETABLI L'EXISTENCE DE L'ELEMENT INTENTIONNEL DE L'INFRACTION PREVUE ET PUNIE PAR L'ARTICLE 614-15 DU CODE DE COMMERCE ;

QU'EN EFFET, SI LA CONSTATATION DE LA VOLONTE DE NUIRE AUX CREANCIERS N'EST PAS EXIGEE PAR LA LOI, IL EN RESULTE NECESSAIREMENT QUE CE N'EST PAS PAR SIMPLE NEGLIGENCE, MAIS DELIBEREMENT QUE LE DEMANDEUR N'A PAS TENU DE COMPTABILITE REGULIERE ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 15 ET 45 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PRESIDENT D'UNE SOCIETE ANONYME POUR USAGE ABUSIF DU CREDIT DE LA SOCIETE ;

" ALORS QU'IL RESULTE DE SES CONSTATATIONS QUE LEDIT PRESIDENT, EN SOUSCRIVANT UN BILLET A ORDRE ET UNE LETTRE DE CHANGE AU PROFIT DE SES PROPRES CREANCIERS, A DELEGUE A LA SOCIETE DEUX DE SES DETTES DONT LE TOTAL ETAIT DE BEAUCOUP INFERIEUR AU SOLDE CREDITEUR DE SON COMPTE COURANT LEGALEMENT EXIGIBLE A TOUT MOMENT, D'OU IL SUIT QUE LA DETTE DE LA SOCIETE N'A PAS ETE AUGMENTEE NI LES RISQUES QU'ELLE AURAIT AGGRAVEE, QU'EN CONSEQUENCE, L'USAGE DU CREDIT SOCIAL N'ETAIT PAS CONTRAIRE A L'INTERET DE LA SOCIETE ET QUE LE PRESIDENT N'A PU NI SAVOIR QU'IL AGISSAIT CONTRAIREMENT A L'INTERET SOCIAL, NI AGIR DE MAUVAISE FOI " ;

ATTENDU QU'IL APPERT DU JUGEMENT CONFIRME PAR L'ARRET ATTAQUE QUE X... EN SOUSCRIVANT UN BILLET A ORDRE ET UNE LETTRE DE CHANGE AU PROFIT DE SES PROPRES CREANCIERS, POUR UN TOTAL DE 6500000 ANCIENS FRANCS, A TRANSFERE A LA SOCIETE COPPA LA CHARGE DE CETTE DETTE ;

QUE LES JUGES DU FOND ENONCENT QUE L'ARGUMENT DE X... TENDANT A JUSTIFIER CE TRANSFERT PAR L'EXISTENCE A SON PROFIT DANS LES COMPTES DE LA COPPA D'UN COMPTE COURANT LARGEMENT CREDITEUR, NE MERITE PAS D'ETRE RETENU, CAR S'IL ETAIT LOISIBLE A X... DE PRELEVER SUR LA CAISSE SOCIALE DANS LES LIMITES DE CE COMPTE COURANT LES SOMMES DONT IL AVAIT PERSONNELLEMENT BESOIN, POURVU TOUTEFOIS QUE LA SOCIETE NE FUT PAS EN ETAT DE CESSATION DE PAYEMENTS, SA SITUATION DE CREANCIER DE LA SOCIETE NE L'AUTORISAIT AUCUNEMENT A USER DU CREDIT DE CELLE-CI DANS DES CONDITIONS QUI L'EXPOSAIENT A UN RISQUE DE PERTE ET QUI DEVAIENT, EN FAIT, CONSOMMER SA RUINE ;

ATTENDU QUE PAR LES MOTIFS CI-DESSUS QUI NE COMPORTENT NI CONTRADICTION NI INSUFFISANCE, LES JUGES DU FOND ONT AINSI ETABLI A L'ENCONTRE DU PREVENU, L'EXISTENCE DES ELEMENTS CONSTITUTIFS, TANT INTENTIONNELS QUE MATERIELS, DE L'INFRACTION D'ABUS DE CREDIT SOCIAL PREVUE ET PUNIE PAR L'ARTICLE 15, 6° DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867 ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI.