Cass. crim., 23 mai 2007, n° 06-84.113
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Rognon
Avocats :
SCP CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, SCP PIWNICA et MOLINIE
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Jean de la X... des Y... a exercé les fonctions de directeur du secteur immobilier des sociétés de banque Ibsa et Colbert, aux droits et actions desquelles vient la société CDR Créances ; qu'autorisé à le faire par son contrat de travail, il a créé et géré plusieurs sociétés qui ont pris des participations dans d'autres sociétés dirigées par Emmanuel de B..., ayant pour activités, les unes, la réalisation de programmes immobiliers et d'aménagements urbains, d'autres, la gestion de patrimoine ; que ces sociétés ont fait l'objet de contrôles fiscaux puis ont été déclarées en liquidation judiciaire ; que l'enquête préliminaire et l'information ont révélé que Jean de la X... des Y... et son directeur adjoint, Marie Z... A..., avaient trompé les banques Ibsa et Colbert, d'une part, en soumettant à leur comité de crédit des dossiers de financement irréguliers au bénéfice des sociétés dirigées par Emmanuel de B..., d'autre part, en détournant de leur destination les crédits octroyés, dont une partie leur était indirectement rétrocédée par la mise en place d'un système de fausses facturations ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 6 1 et 6 3 a de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 179, 385, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de Jean de la X... des Y... tendant à l'annulation de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel portant prévention du chef d'abus de biens ou du crédit des sociétés Ibis investissement et Financière d'Iena ;
" aux motifs, repris des premiers juges, que le temps de la prévention de cette infraction correspondait à celui de l'infraction qui la précède visant la complicité du délit de faux ou d'usage de faux reprochée à Antoine Z... A... et concernant les fausses factures Ferol patrimoine, du 12 décembre 1991, pour 593 000 francs et, du 12 avril 1991, pour 118 600 francs, et que, dans l'ordre des préventions de l'ordonnance de renvoi, cette infraction précédait celle d'abus de biens sociaux qui s'y réfère et explicitait, dès lors, les faits reprochés à Jean de La X... des Y... qui n'a pu se méprendre sur l'objet et la portée de cette incrimination ;
" alors que le droit de tout prévenu à ce que la procédure pénale suivie à son encontre soit équitable implique que la prévention articule de manière détaillée les faits pour lesquels celui-ci est renvoyé devant le tribunal correctionnel et que, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la rédaction de la prévention n'articule aucun fait précis à l'encontre de Jean de La X... des Y..., susceptible, comme il le faisait valoir dans ses conclusions in limine litis régulièrement déposées devant la cour d'appel et de ce chef délaissées de justifier la qualification d'abus de biens et du crédit prétendument commis par lui au préjudice des sociétés Ibis investissement et Financière d'Iena, la cassation est encourue pour violation des textes susvisés et violation des droits de la défense " ;
Attendu que, pour rémunérer les services rendus par le directeur adjoint du service immobilier de la banque Ibsa, Jean de la X... des Y... a fait prendre en charge par les sociétés Financière Iéna et Ibis investissement, dont il était le gérant, des fausses factures émises par Marie Z... A... pour la société Férol patrimoine ; que ce dernier a été renvoyé devant le tribunal des chefs de faux, usage et recel d'abus de biens sociaux, Jean de la X... des Y... étant poursuivi pour avoir, courant avril et décembre 1991, étant gérant des sociétés Financière Iéna et Ibis investissement, fait des biens et du crédit de ces sociétés un usage qu'il savait contraire à l'intérêt de celles-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser des entreprises ou sociétés dans lesquelles il était, directement ou indirectement, intéressé ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de l'ordonnance de renvoi prise par le prévenu de ce que cet acte de poursuite se contentait de reproduire l'incrimination légale sans articuler les faits permettant au prévenu de connaître l'objet exact et précis de la prévention, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que l'ordonnance de renvoi énumère précisément et clairement, par motifs adoptés du réquisitoire définitif, les faits ainsi qualifiés, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 6 1 et 6 2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 59, 60 et 179 de l'ancien code pénal, 121-3, 121-6, 121-7 et 433-1 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de complicité de corruption active ;
" aux motifs qu'il ressort de la procédure qu'Alain C... a effectivement accompli les actes de corruption active pour lesquels il est prévenu, quelle que soit la qualification retenue par le tribunal, laquelle ne saurait lier la cour, saisie de l'appel formé par le complice ; que ces actes de corruption ont été concrétisés par des remises de fonds à André D... et à Jean E... respectivement directeur et directeur-adjoint, agent de la Société d'économie mixte départementale pour l'aménagement du Val-d'Oise (Semavo) ; ces deux personnes étaient, de par leurs fonctions respectives, "citoyens chargés d'un ministère de service public", au sens de l'article 179 du code pénal en vigueur à l'époque des faits ou, au sens de l'article 433-1 du code pénal actuellement en vigueur, "chargées d'une mission de service public" ; qu'il est établi que ces remises de fonds avaient pour objet d'obtenir d'André D... et Jean E... qu'ils accomplissent un "acte de leur fonction ou de leur emploi mission", au sens de l'article 179 du code pénal en vigueur à l'époque des faits, ou "un acte de leur fonction", au sens de l'article 433-1 du code pénal actuellement en vigueur ; que là se situe le pacte de corruption ; que la cour estime que le dossier et les débats établissent, dans ce processus, la responsabilité pénale de Jean de la X... des Y... auquel il est reproché de s'être rendu complice des faits commis par Alain C... "par l'entremise de la société Agesi, dans le cadre des relations entre la société Venterre et la Semavo, en l'aidant ou en l'assistant sciemment dans sa préparation ou sa consommation, en l'espèce, en signant, le 20 avril 2002, au nom de Sihf, un contrat d'assistance commerciale avec Agesi, prévoyant une rémunération d'Agesi à hauteur de 5 millions de francs et en fournissant les fonds versés à Agesi à hauteur de 650 000 francs" ; qu'il apparaît, en effet, que Jean de la X... des Y... a effectivement signé au nom de la société Sihf, le 20 avril 1992, le "contrat d'assistance" liant cette dernière à la société Agesi, société de droit luxembourgeois que représentait Alain C..., alors que ce dernier ne possédait aucune compétence particulière en la matière ; aucune trace d'un travail technique d'Alain C... n'a d'ailleurs été découverte ; qu'en réalité, la tâche d'Alain C... consistait à intervenir auprès des dirigeants de la Semavo pour les convaincre de faire en sorte que la société Venterre soit choisie pour réaliser l'opération et il était, dès le départ, convenu par Jean de la X... des Y... et Alain C... qu'il serait nécessaire de "rémunérer" les responsables de la société d'économie mixte pour assurer le succès de cette entreprise ; que, par la suite, en septembre 1992 -à l'époque où s'est tenue une réunion décisive avec le préfet du Val-d'Oise, lequel prendra l'arrêté de cessibilité à la société Venterre au cours de ce même mois de septembre-, Jean de la X... des Y... a donné des instructions à Marie Z... A... pour que celui-ci fasse procéder au versement de la somme de 500 000 francs mentionnée plus haut par la société Ventererre, en faisant transiter les fonds sur le compte de la société SIHF ; que, de plus, il ressort des déclarations réitérées d'Alain C... (en partie citées plus haut) que Jean de la X... des Y... était intentionnellement et délibérément impliqué dans la démarche corruptrice d'Alain C... à laquelle il était pleinement associé ; que Jean de la X... des Y..., qui était à la fois comme banquier et associé d'Emmanuel de B..., directement intéressé à la réussite de l'opération, n'a d'ailleurs aucunement expliqué les motifs pour lesquels Alain C... aurait pris l'initiative de corrompre à son insu André D... et Jean E... ; que les déclarations d'Alain C... sont confortées par la télécopie, du 3 janvier 1993, adressée par la société Agesi à Jean de la X... des Y... évoquant la nécessité de verser un deuxième acompte "avant la délibération du conseil afin de satisfaire tout le monde" et par celle du 27 janvier 1993 par laquelle Alain C... demande à Jean de la X... des Y... la tenue d'une réunion avant le 28 janvier, ainsi que par celle envoyée le même jour, une minute plus tard, à Marie Z... A... par Jean de la X... des Y... qui écrivait : "Antoine, C... me harcelle, sous la pression de E... pour m'expliquer que la régularisation piétine, sois gentil de l'appeler immédiatement pour calmer l'incendie, car je me suis énervé, en effet, il voulait à tout prix un rendez-vous avec E... pour d'obscures raisons incompréhensibles, que nous devinons toi et moi " ;
" alors que tout prévenu étant présumé innocent, la charge de la preuve de sa culpabilité incombe à la partie poursuivante ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, Jean de la X... des Y... faisait valoir qu'il avait toujours soutenu avoir tout ignoré des relations entre Alain C..., poursuivi comme auteur principal du délit de corruption active et Jean E... et André D... poursuivis pour corruption passive ; que la cour d'appel a rejeté ce moyen de défense au motif que "Jean de la X... des Y..., qui était à la fois comme banquier et associé d'Emmanuel B..., directement intéressé à la réussite de l'opération, n'a aucunement expliqué les motifs pour lesquels Alain C... aurait pris l'initiative de corrompre à son insu André D... et Jean E..." ; qu'un tel motif implique un renversement de la charge de la preuve et qu'en cet état, la cassation est encourue pour violation du principe susvisé " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que, dans le cadre d'un projet de création, à Bonneuil-en-France, d'une zone d'aménagement concertée (ZAC), conduit par la Société d'économie mixte du Val-d'Oise (Semavo), la société Venterre, dirigée par Emmanuel de B..., a acquis un terrain de 25 hectares pour y édifier un centre commercial ; que, le 20 avril 1992, la Société immobilière hispano-française, gérée par Jean de la X... des Y... et, par ailleurs, associée dans la société Venterre, a signé avec la société luxembourgeoise Agesi, dont Alain C... était l'ayant droit, un contrat d'assistance confiant à cette dernière, moyennant une commission de cinq millions de francs, la mission d'intervenir auprès de la société Semavo pour favoriser l'obtention du marché ; que les honoraires stipulés, pris en charge par la société Venterre, ont été pour partie rétrocédés, selon un pacte préalablement établi, à André D... et Jean E..., respectivement directeur et directeur adjoint de la société d'économie mixte ;
Attendu que, pour déclarer Jean de la X... des Y... coupable de complicité de corruption, l'arrêt, après avoir relevé que la réticence de la société Semavo à confier l'aménagement de la ZAC à la société Venterre, dans laquelle ce dernier détenait indirectement des intérêts, avait motivé l'intervention de la société Agesi et rappelé que les condamnations des corrupteur et corrompus étaient définitives, retient, notamment, qu'en interposant cette société de droit luxembourgeois et en fournissant les fonds destinés aux cadres de la société d'économie mixte, le prévenu avait intentionnellement et délibérément participé à une démarche corruptrice ; que les juges ajoutent que Jean de la X... des Y... n'a pu expliquer les motifs pour lesquels Alain C... aurait pris seul l'initiative, à l'insu de son mandant, de corrompre les décideurs de la société Semavo ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié les faits et les éléments de preuve contradictoirement débattus, a justifié sa décision sans méconnaître la présomption d'innocence et sans renverser la charge de la preuve ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles L. 223-23, L. 225-254, L. 241-3 du code de commerce (425 de la loi du 24 juillet 1966), 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré non prescrit le délit de complicité d'abus de biens sociaux commis au préjudice de la société Venterre (à hauteur de 2 372 000 francs le 30 septembre 1991), a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de ce délit et, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à la peine de 300 000 euros d'amende ;
" aux motifs qu'Emmanuel de B... a reconnu, à plusieurs reprises, que de nombreuses factures prises en charge par l'une ou l'autre de ses sociétés étaient non causées ; qu'ainsi, deux factures, l'une de 2 372 000 francs, du 30 septembre 1991, et l'autre de 948 800 francs, du 2 février 1993, ont été adressées par la société Château Descas à la société Venterre et celle-ci les a payées ; que Jean de la X... des Y... a été le gérant de la société Château Descas jusqu'au 1er juillet 1993, date à laquelle Emmanuel de B..., auquel il avait cédé ses parts en novembre 1992, lui a succédé ; que ces factures faisaient référence à des conventions des 29 mars 1991 et 25 mai 1992 qui donnaient mission à la société Château Descas d'effectuer un certain nombre d'opérations d'assistance juridique et technique pour le compte de la société Venterre ; que l'information a démontré que ces missions étaient inexistantes ; qu'en effet, la société Château Descas n'avait pas de salarié en 1991 et la faiblesse du poste, charges externes, démontre que la mission qu'elle a facturée à la société Venterre à hauteur de 2 372 000 francs n'a pas été confiée en sous-traitance à une autre entreprise ; que, s'agissant du détournement de la somme de 2 372 000 francs correspondant à la facture du 3 septembre 1991, la cour constate que les faits sont antérieurs de plus de trois ans au 18 avril 1995, date du soit-transmis du parquet de Versailles qui constitue le premier acte interruptif de prescription dans cette affaire ; que, néanmoins, s'agissant d'un mouvement de trésorerie auquel une apparence de régularité a été donnée par l'émission d'une facture non causée -laquelle constitue par essence un acte de dissimulation susceptible de retarder le point de départ de la prescription- la cour constate que ce n'est qu'après qu'un mandataire ad'hoc ait été, le 14 novembre 1994, désigné par le président du tribunal de commerce de Versailles, que le ministère public a été en mesure d'exercer l'action publique sur ces faits ; qu'à la date du 18 avril 1995, la prescription n'était donc pas acquise sur le détournement visé par la prévention comme ayant été commis en septembre 1991 ;
" alors qu'en ne recherchant pas si des vérifications habituelles par le commissaire aux comptes n'étaient pas de nature à mettre en évidence la fausseté des factures et la fictivité des conventions auxquelles elle se référait, la cour d'appel n'a pas, abstraction faite de motifs insuffisants, caractérisé la dissimulation de nature à retarder le point de départ de la prescription en matière d'abus de biens sociaux " ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 59, 60 et 460 de l'ancien code pénal, 121-6, 121-7 et 321-1 du code pénal, L. 241-3 du code de commerce (425 de la loi du 24 juillet 1966), 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de complicité et recel d'abus de biens sociaux commis au préjudice de la société Venterre (à hauteur de 2 372 000 francs le 30 septembre 1991) et a condamné Jean de la X... des Y... à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à la peine de 300 000 euros d'amende ;
" alors que la complicité et le recel supposent l'existence d'un fait principal punissable ; que l'abus de biens sociaux suppose, pour être constitué, non seulement que l'auteur principal ait fait des biens un usage contraire aux intérêts de la société concernée, mais également qu'il ait agi à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement et que ni la cour d'appel ni les premiers juges n'ayant caractérisé l'intérêt personnel direct ou indirect d'Emmanuel de B..., auteur principal, la condamnation pour complicité et recel d'abus de biens sociaux prononcée à l'encontre de Jean de la X... des Y... est dépourvue de base légale " ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 59, 60, 150, 151, 408 et 460 de l'ancien code pénal, 121-6, 121-7, 314-1, 321-1 et 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de complicité et recel d'abus de confiance et usage de faux, et l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à 300 000 euros d'amende ;
" aux motifs que deux faits qualifiés abus de biens sociaux par la prévention sont reprochés à Emmanuel de B..., comme ayant été commis au préjudice de la société Venterre par le paiement de factures non causées à la société Descas, la première facture étant datée du 30 septembre 1991, la seconde du 2 février 1993 et les paiements étant intervenus aux mêmes époques ; que la cour constate que la Sarl Venterre ayant été transformée en société en nom collectif en juillet 1992 et que les faits datant de février 1993, ceux-ci sont en réalité constitutifs de délit d'abus de confiance commis au préjudice d'une SNC et non d'abus de biens sociaux commis au préjudice d'une Sarl, étant précisé que cette requalification éventuelle a été, au cours des débats devant la cour, soumise aux parties qui ont ainsi été en mesure de présenter leurs arguments sur la nouvelle qualification envisagée ; que la cour relève qu'Emmanuel de B... était à l'époque mandaté pour gérer les fonds détenus par la SNC Venterre dans l'intérêt de celle-ci et non pour en faire un usage différent, cet usage étant, dès lors, nécessairement préjudiciable à l'intérêt de la société, en l'espèce, servir une rémunération ne correspondant à aucune prestation réelle à une société contrôlée par Jean de la X... des Y... ; que, pour les motifs exposés plus haut sur le délit principal, la cour dira que les faits relatifs à la somme de 2 372 000 francs versée par la société Venterre en contrepartie de la facture du 30 septembre 1991 ne sont pas couverts par la prescription et requalifiera en complicité d'abus de confiance le délit de complicité d'abus de biens sociaux qui est reproché à Jean de la X... des Y..., s'agissant du versement de la somme de 948 800 francs (et non de 248 800 francs comme mentionné par la prévention par suite d'une erreur manifestement matérielle) commis par Emmanuel de B... en février 1993 ; que, sur le fond, la cour estime établie la prévention de complicité par aide et l'assistance apportée à l'auteur principal ; en effet, dans chaque cas l'établissement d'une fausse facture par Jean de la X... des Y..., gérant de la société Château Descas, a servi de justificatif comptable à la sortie d'argent correspondante, dont l'intéressé savait nécessairement qu'elle ne correspondait à aucune prestation de service susceptible de constituer la contrepartie du paiement devant intervenir ;
" alors que les juges correctionnels ont l'obligation de répondre aux conclusions dont ils sont régulièrement saisis ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, Jean de la X... des Y... faisait valoir que les honoraires versés par Emmanuel de B... à la société contrôlée par lui correspondaient à la création et à la mise en place d'une Aful destinée à faciliter la réalisation de l'opération Venterre, honoraires ayant donc pour contrepartie une prestation intellectuelle au profit de la SNC Venterre ainsi que l'avait reconnue Emmanuel de B... au cours des débats devant le tribunal et qu'en se bornant à affirmer que les factures de la société Descas étaient non causées comme ne correspondant à aucune prestation de service susceptible de constituer la contrepartie du paiement devant intervenir sans répondre à ce chef péremptoire de conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que la société Château Descas, société à responsabilité limitée transformée en société en nom collectif au cours du mois de juillet 1992, gérée par Jean de la X... des Y... jusqu'au 1er juillet 1993 puis par Emmanuel de B..., a signé, les 29 mars 1991 et 25 mai 1992, au profit de la société Venterre, des conventions d'assistance juridique et technique qu'en l'absence de tous moyens et structures, elle ne pouvait exécuter ; qu'elle a, néanmoins, émis à l'ordre de la société Venterre deux factures de 2 372 000 francs du 30 septembre 1991 et de 948 800 francs du 2 février 1993 ; que le paiement de ces prestations fictives a dissimulé la rémunération occulte des services rendus par Jean de la X... des Y... dans l'exercice de ses fonctions au sein des banques Ibsa et Colbert ;
Attendu que, d'une part, pour écarter la prescription des chefs d'abus de biens sociaux commis le 30 septembre 1991 par Emmanuel de B... et de complicité reprochée à Jean de la X... des Y..., l'arrêt énonce qu'une apparence de régularité a été donnée à un mouvement de trésorerie par l'émission d'une facture non causée qui, par essence, caractérise un acte de dissimulation susceptible de retarder le point de départ de la prescription ; que les juges en déduisent que les faits n'ont pu être connus dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique qu'après la désignation d'un mandataire de justice, le 14 novembre 1994, moins de trois ans avant la réquisition aux fins d'enquête du 18 avril 1995, premier acte interruptif de prescription ;
Attendu que, d'autre part, pour déclarer les prévenus respectivement coupables d'abus de biens sociaux et d'abus de confiance, après requalification pour les faits postérieurs au mois de juillet 1992, de complicité et de recel de ces délits, l'arrêt prononce par les motifs propres et adoptés repris aux moyens et retient, notamment, que l'usage des fonds sociaux pour servir une rémunération ne correspondant à aucune prestation réelle est nécessairement préjudiciable à l'intérêt de la société ; que les juges ajoutent que les fausses factures établies par Jean de la X... des Y... ont servi de justificatifs comptables aux sorties de fonds correspondantes et que celui-ci savait nécessairement qu'elles ne correspondaient à aucune prestation susceptible de constituer la contrepartie des paiements ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation, qui établissent des dissimulations comptables de nature à retarder le point de départ du délai de prescription, et, dès lors que, d'une part, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que la société Château Descas fût tenue à la désignation d'un commissaire aux comptes, d'autre part, un ensemble d'opérations frauduleuses indivisibles établit suffisamment l'intérêt personnel résultant pour Emmanuel de B... des concours financiers accordés par Jean de la X... des Y..., la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le sixième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 6 2 de la Convention européenne des droits de l'homme, 150, 151 et 460 de l'ancien code pénal, 121-6, 121-7 et 321-1 du code pénal, L. 241-3 du code de commerce (425 de la loi du 24 juillet 1966), préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de faux et d'usage de faux, complicité et recel d'abus de biens sociaux au préjudice d'Ofim et, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à 300 000 euros d'amende ;
" aux motifs que la cour considère en premier lieu que l'absence de date dans le libellé des préventions relevée par Jean de la X... des Y... n'est pas de nature à entraîner sa relaxe comme il le soutient ; que la cour relève qu'il n'existe, en effet, aucun doute sur la date des faits, outre que figure à la prévention la formule "en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription" ; qu'en effet, la date à laquelle il est mentionné que des fausses factures ont été émises pour couvrir les abus de biens sociaux visés par la poursuite suffit à individualiser les faits poursuivis ; que, s'agissant de l'incrimination de faux, la cour estime que les termes : "par quelque moyen que ce soit, altéré frauduleusement la vérité d'un écrit ou de tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques", peuvent valablement viser l'élaboration d'un faux intellectuel, même sans que l'utilisation, certes maladroite, dans le membre de phrase suivant, de l'expression "en falsifiant deux factures" soit de nature à dénaturer le sens général de la prévention ; que, sur le fond, la cour constate qu'il est établi que la société Ofim a versé à la société Ibis la somme de 3 439 000 francs et que ce versement n'a, de l'aveu même d'Emmanuel de B... et de celui de Jean de la X... des Y..., aucunement correspondu au paiement d'honoraires dûs pour les prestations annoncées par les factures émises comme justificatifs comptables de ces mouvements de trésorerie ; que, dès lors, ces factures, qui étaient, par nature,
des documents susceptibles de constituer la preuve d'un fait ayant des conséquences juridiques, constituaient des altérations écrites de la vérité ; qu'elles ont nécessairement été intentionnellement établies et étaient susceptibles de causer un préjudice puisque destinées à fournir une apparence de légalité à des mouvements de fonds illicites et à tromper les organes de contrôle (commissaire aux comptes, services fiscaux notamment) auxquels les comptes de la société pouvaient être soumis, ainsi que ceux de l'établissement bancaire qui finançait la société Ofim ; que la cour considère, dans ces conditions, les faits de faux et usage de faux constitués au regard des critères du code pénal en vigueur à l'époque des faits et de ceux du code pénal actuel ; qu'elle en déclarera coupable Jean de la X... des Y..., gérant de la société Ibis investissement, qui a émis les deux factures visées par la prévention et déclarera Emmanuel de B... coupable de complicité d'usage de faux ; qu'elle relaxera Emmanuel de B... du chef de complicité de faux, les éléments de la complicité n'étant pas établis ; que le caractère non fondé des mouvements de trésorerie correspondant à ces factures est établi, ces derniers ayant nécessairement appauvri sans contrepartie la société Ofim au profit de la société Ibis investissement ; que l'établissement allégué d'un "avoir" ultérieur, qui a constitué en réalité une fiction juridique et comptable destinée à donner une apparence de régularisation à l'opération frauduleuse, ne fait pas, à cet égard, disparaître le délit ;
que, de même, sont sans effet sur la constitution des infractions poursuivies les arrangements qui ont pu être pris ultérieurement dans le cadre des transactions intervenues entre cette dernière et la société SIHF en juin 1995, transactions dont rien n'établit d'ailleurs qu'elles aient été en relation avec les mouvements de trésorerie concernés ; qu'en tout état de cause, ces opérations n'ont pas eu pour effet de faire réintégrer dans l'actif d'Ofim la trésorerie indûment prélevée en juin 1993 au profit de la société Ibis investissement ;
" alors que tout prévenu étant présumé innocent, la charge de la preuve de sa culpabilité en ce qui concerne tous les éléments des infractions poursuivies, y compris l'élément intentionnel, incombe à la partie poursuivante ; qu'en l'état des conclusions de Jean de la X... des Y..., faisant valoir que les factures incriminées avaient été établies par erreur, la cour d'appel ne pouvait, sans renverser la charge de la preuve, se borner à affirmer que celles-ci avaient "nécessairement" été intentionnellement établies " ;
Sur le septième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles L. 241-3 du code de commerce (425 de la loi du 24 juillet 1966), 59, 60 et 460 de l'ancien code pénal, 121-6, 121-7 et 321-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de complicité et recel d'abus de biens sociaux commis au préjudice de Mam, et, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis et 300 000 euros d'amende ;
" aux motifs qu'il résulte de l'information et des débats, notamment des déclarations réitérées d'Emmanuel de B..., que les factures qui sont visées par la prévention n'étaient pas causées et correspondaient à des prestations fictives ; qu'il est établi que les décaissements correspondants n'étaient pas justifiés par l'objet social des sociétés Mam et Ofim et ont essentiellement servi à "rémunérer" Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... qui jouaient un rôle décisif dans l'octroi de crédits par la banque qui les employait ;
" 1 ) alors que la complicité et le recel supposent l'existence d'un fait principal punissable ; que le caractère contraire aux intérêts de la société concernée par l'opération reprochée à l'auteur principal est un élément constitutif du délit d'abus de biens sociaux et que la cour d'appel, qui constatait expressément que les opérations reprochées sous la qualification d'abus de biens sociaux à Emmanuel de B... avaient permis l'octroi de crédits notamment à la société Mam, ne pouvait, sans contradiction, déclarer établi le délit principal et entrer en voie de condamnation à l'encontre de Jean de la X... des Y... pour complicité et recel ;
" 2 ) alors qu'en s'abstenant de mettre en balance le montant des factures réglées par la société Mam et l'importance des crédits obtenus en contrepartie par cette société grâce à ces paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Sur le huitième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation des articles 460 de l'ancien code pénal, 321-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de recel d'abus de biens sociaux commis au préjudice de la société Mam et, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à 300 000 euros d'amende ;
" 1 ) alors que la déclaration de culpabilité figurant dans le dispositif, sur ce point, n'est justifiée par aucun motif de l'arrêt ;
" 2 ) alors que la cour d'appel n'a pas, quant à ce délit, adopté les motifs non contraires des premiers juges faisant état de ce que Jean de la X... des Y... aurait "bénéficié de règlements indus" dès lors qu'elle a considéré qu'il importe peu que Jean de la X... des Y... se serait au final enrichi personnellement " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que Jean de la X... des Y... est poursuivi des chefs de faux et usage, complicité et recel d'abus de biens sociaux pour avoir, en ses qualités de gérant des sociétés Immobilière hispano-française (SIHF), Financière d'Iéna, Ibis investissement et Ferol patrimoine, qui avaient des intérêts dans la société Venterre, concepteur et réalisateur de projets immobiliers, émis au préjudice de celle-ci et des sociétés Ofim et Mam, toutes trois dirigées par Emmanuel de B..., des factures fondées sur des prestations fictives ; qu'en exécution de la promesse de lui vendre ses participations dans la société Venterre, la société Ibis investissement a émis sur la société Ofim, le 16 juin 1993, deux factures d'honoraires fictifs, l'une pour intervention, montage juridique et négociation de l'opération de Bonneuil-en-France, l'autre pour intervention dans le dossier Arsa, payées, la première, pour 2 609 200 francs, le 17 juin 1993, la seconde, pour 330 200 francs et 500 000 francs, les 20 juillet et 12 août 1993 ; que, par ailleurs, sous le couvert d'opérations commerciales, de travaux juridiques et de démarches administratives, les sociétés Financière d'Iéna, Ibis investissement, SIHF et Ferol patrimoine ont facturé des avances sur marge à la société Mam, qui, sans la moindre contrepartie, a payé, sur des fonds provenant de la société Ofim, cinq factures, émises entre les 10 avril et 16 novembre 1992 ;
Attendu que, pour retenir la culpabilité de Jean de la X... des Y..., par les motifs propres et adoptés repris aux moyens, l'arrêt retient, notamment, que les fonds ont été versés sans la contrepartie des prestations annoncées et que les factures ont été intentionnellement établies pour fournir une apparence de légalité à des mouvements de trésorerie illicites et tromper les organes de contrôle des comptes ; que les juges relèvent que l'établissement ultérieur d'avoirs constitue une fiction juridique et comptable pour donner une apparence à la régularisation d'opérations frauduleuses ; qu'ils ajoutent qu'il n'importe que l'auteur ne se soit pas personnellement enrichi ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation et caractérisant les éléments, tant matériels qu'intentionnel, des délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, sans renverser la charge de la preuve, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;
Sur le neuvième moyen de cassation proposé pour Jean de la X... des Y..., pris de la violation de l'article 6 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et de la règle non bis in idem ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean de la X... des Y... coupable de complicité d'abus de biens sociaux et d'usage de faux et, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont trente mois avec sursis, et à 300 000 euros d'amende ;
" alors qu'un même fait ne saurait donner lieu à une double déclaration de culpabilité et que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, au vu de l'ensemble des motifs de l'arrêt attaqué, que les faits retenus à l'encontre de Jean de la X... des Y... sous la double qualification d'usage de faux et de complicité d'abus de biens sociaux sont strictement identiques et, qu'ainsi, la cassation est encourue tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine " ;
Attendu que le demandeur est sans intérêt à reprocher à l'arrêt de l'avoir déclaré coupable des mêmes faits sous les qualifications pénales de complicité d'abus de biens sociaux et d'usage de faux dès lors que ces infractions comportent des éléments constitutifs distincts et que, conformément aux dispositions de l'article 132-3 du code pénal, une seule peine a été prononcée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le premier moyen de cassation proposé pour les sociétés CDR Créances, Venterre et Immobilière hispano-française, pris de la violation des articles 313-1, 314-1 du code pénal, 408 de l'ancien code pénal, 2, 3, 470, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Jean de la X... des Y... du chef d'abus de confiance et, en conséquence, a débouté le CDR Créances de ses demandes ;
" aux motifs que, "- sur les faits reprochés à Emmanuel de B..., il résulte de l'information et des débats, notamment des déclarations réitérées d'Emmanuel de B..., que les factures qui sont visées par la prévention n'étaient pas causées et correspondaient à des prestations fictives ; qu'il est établi que les décaissements correspondant n'étaient pas justifiés par l'objet social des sociétés Mam et Ofim et ont essentiellement servi à "rémunérer" Jean de la X... des Y... et Marie Z... A..., qui jouaient un rôle décisif dans l'octroi de crédits par la banque qui les employait ; qu'Emmanuel de B... sera, en conséquence, déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés à l'exception de ceux qui sont couverts par la prescription ; - sur les faits reprochés à Marie Z... A... : qu'il ressort de la procédure et des débats que Marie Z... A... a créé, sur l'instigation de Jean de la X... des Y..., une Eurl n'ayant pas d'autre objet que de servir de "coquille vide" destinée à recueillir des fonds détournés et devant constituer une rémunération occulte de ses activités aux cotés de son chef ; que, contrairement à ce qu'indique le conseil de Marie Z... A... dans ses conclusions, le libellé de la prévention est suffisamment précis pour permettre de déterminer la nature des faits reprochés et la qualification apportée ; que, sur le fond, la cour constate que Marie Z... A... a reconnu, pendant l'instruction et devant la cour, que les factures émises par la société Ferolles patrimoine à destination de la société Mam ne correspondaient à aucune réalité et que leurs libellés étaient faux ; qu'il sera, en conséquence, déclaré coupable des délits de complicité et recel d'abus de biens sociaux visés par la prévention ; - sur les faits reprochés à Jean de la X... des Y... : 1) sur les faux et usage de faux et les abus de biens sociaux : comme indiqué précédemment, qu'il résulte de l'information et des débats et notamment des déclarations réitérées d'Emmanuel de B..., que les factures adressées à la société Mam et à la société Ofim et qui sont visées par la prévention n'étaient pas causées ; que, peu importe que Jean de la X... des Y... se soit ou ne se soit pas, au final et comme il le soutient, enrichi personnellement compte tenu de la tournure ultérieure des événements, la notion d'enrichissement personnel n'entrant pas en ligne de compte pour ce qui est d'apprécier la constitution du délit ;
que Jean de la X... des Y... sera, en conséquence, déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés sous la qualification d'abus de biens sociaux et de complicité de faux et usage, à l'exception du faux daté du 10 avril 1992 qui est couvert par la prescription ; 2) sur l'abus de confiance : que la cour constate que le libellé de la prévention par lequel il est reproché à Jean de la X... des Y... d'avoir, courant 1992, ( ) détourné 3 600 000 francs (qualifiés d'avances sur marge) répartis entre les associés des sociétés Venterre, "Ibis investissement, Financière d'Iena, SIHF, Ferol patrimoine qui lui avaient été remis et qu'il avait acceptés à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé, et ce au préjudice d'Ibsa" ne précise pas à quel titre le prévenu disposait des fonds qui auraient été détournés et à quel titre il était habilité, par la banque qui l'employait, pour ordonner leur décaissement ; que la cour rappelle que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel détermine les faits qui sont déférés à la juridiction correctionnelle et fixe l'étendue de sa saisine ; que la juridiction de jugement peut, certes, modifier la qualification des faits qui lui sont soumis, mais à la condition de ne rien changer à ceux-ci et de ne pas statuer sur des faits non compris dans la prévention ; que, quand bien même des éléments factuels pourraient être tirés de l'analyse du dossier qui lui est soumis comme pouvant être pénalement qualifiables, il n'appartient pas à la juridiction de jugement de se substituer aux autorités de poursuites et à la juridiction d'instruction pour pallier ce qui pourrait éventuellement lui apparaître comme des lacunes de l'acte de saisine ; que la cour relève, s'agissant de faits qualifiés abus de confiance et supposés commis en 1992, que le délit ne peut être constitué que si les fonds détournés avaient été confiés au prévenu en vertu de l'un des contrats énumérés par l'article 408 du code pénal abrogé mais en vigueur à l'époque des faits ; que la cour constate que la prévention citée ci-dessus ne précise pas de quel contrat la violation constituerait le délit reproché à Jean de la X... des Y... ; que cette lacune pourrait être palliée par des indications contenues dans l'exposé des faits du réquisitoire définitif -dont les motifs ont été adoptés par l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel- qui seraient suffisamment précises pour permettre à la cour d'apprécier l'existence et la qualification juridique à donner à ce contrat ; qu'ainsi, la détermination de la nature du contrat qui liait Jean de la X... des Y... à la banque Ibsa pourrait éventuellement être déduite des éléments de faits exposés dans le réquisitoire définitif et qui permettraient à la cour d'apprécier à quel titre le prévenu pouvait disposer des fonds détenus par la banque ; que la cour constate, à la lecture du réquisitoire définitif, que le seul passage du texte relatif à ces faits semble être le suivant : " il apparaissait ainsi que de la X... des Y... ne percevait pas de commission pour des opérations avec le groupe de B..., mais à travers des procédures d'avances sur marge, et dans le cadre de Venterre, il avait pu percevoir à travers des sociétés écran, associées dans Venterre, des intérêts indus ; que de la X... des Y... présentait des demandes de crédit d'Emmanuel de B... au comité de la banque Ibsa ; que ce dernier n'avait jamais essuyé de refus ; que l'acceptation du dossier passait par une rémunération présentée sous forme de fausses factures, par de la X... des Y..." ; que la cour relève qu'aucun passage du réquisitoire définitif ne contient d'élément dont il pourrait être déduit que Jean de la X... des Y... était mandaté pour ordonner le décaissement de fonds détenus par l'établissement, et ce, alors que les délégations de pouvoir et les procédures internes sont normalement soumises à un formalisme très strict au sein des établissements bancaires ; que la cour constate plus particulièrement que le texte du réquisitoire définitif n'indique pas à quel titre et dans quelles circonstances Jean de la X... des Y... aurait disposé de la somme de 3,6 millions de francs retenue par la prévention ; que la cour observe, à l'inverse, qu'il ressort des éléments du dossier que la procédure suivie en matière d'ouverture de crédit que la personne qui prenait la décision n'était pas Jean de la X... des Y... ; qu'ainsi, la partie civile indique-t-elle dans ses conclusions qu' "à partir de 1992, M. de Brem a signé toutes les ouvertures de crédit et que "M. F..., directeur du crédit, était incontournable pour tous les dossiers de financement et notamment ceux d'Emmanuel de B..." ; que l'influence que le prévenu pouvait exercer au sein de la banque pour faire débloquer les crédits qu'il souhaitait voir accorder aux sociétés d'Emmanuel de B... ne peut être assimilée à la disposition pour lui des fonds concernés en vertu d'un mandat certifié par la banque ; qu'il se déduit de ce qui précède que les éléments constitutifs du délit dont la cour est saisie par la prévention ne sont pas caractérisés ; que la cour relaxera, en conséquence, Jean de la X... des Y... du chef de poursuite d'abus de confiance portant sur le détournement de la somme de 3,6 millions de francs au préjudice de la banque Ibsa " ;
" alors que, d'une part, aux termes de l'article 408 de l'ancien code pénal, applicable à l'époque des faits, constitue notamment un abus de confiance le fait de détourner ou dissiper au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances ou tout autre écrit contenant ou opérant obligation des charges qui ont été remis pour un travail salarié ou non à la charge de les rendre ou représenter, ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé ; qu'en l'espèce, Jean de la X... des Y... était chargé, en vertu de son contrat le liant à son employeur, de présenter au comité de crédit les dossiers d'ouverture et de s'assurer de l'emploi qui serait fait des crédits ainsi octroyés ;
qu'en reprochant à l'ordonnance de renvoi de ne pas avoir précisé à quel titre Jean de la X... des Y... disposait des fonds et à quel titre il était habilité par la banque qui l'employait à ordonner leur décaissement, tout en admettant qu'il ressortait du réquisitoire définitif que Jean de la X... des Y... présentait des demandes de crédit au comité de la banque Ibsa, puis de la banque Colbert, lequel réquisitoire précisait également que Jean de la X... des Y... en assurait le suivi, consistant notamment à décaisser les fonds au fur et à mesure des appels de fonds, ce dont il résultait que l'intéressé disposait de la confiance de son employeur pour exercer un contrôle à la fois sur le caractère réel et sérieux des demandes de prêt, ainsi que sur l'usage des crédits octroyés, ce qui suffisait à caractériser une remise, même d'ordre juridique, des fonds dont le contrôle lui avait été confié, au sens du texte susvisé, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" alors que le CDR avait fait valoir que, si le comité de crédit était ordonnateur de l'enveloppe globale de crédits accordés à la société Venterre dans le cadre du projet immobilier qui lui avait été présenté, Jean de la X... des Y... était, en revanche, chargé de répartir les fonds pour les besoins du projet accepté par le comité de débiter le compte de la société au fur et à mesure de la présentation des justificatifs, ce dont il résultait qu'en acceptant d'honorer les factures de la société Ofim au titre de prétendues conventions de gestion qu'il savait fausses pour alimenter la trésorerie d'autres sociétés du groupe d'Emmanuel de B... et pour percevoir à titre personnel une rémunération, Jean de la X... des Y... n'avait pas fait des fonds, dont il avait la charge d'en assurer le décaissement, l'emploi qui avait été stipulé par le comité de crédit ; que la cour d'appel constate que Jean de la X... des Y... était l'initiateur des avances sur marges, lesquelles lui permettaient d'obtenir une rémunération au travers de crédits accordés par la banque qui l'employait et que le même Jean de la X... des Y..., aux dires d'Emmanuel de B..., avait accepté de verser des fonds supplémentaires aux sociétés d'Emmanuel de B... ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel, qui refuse de qualifier juridiquement la nature de l'activité de Jean de la X... des Y... au sein de la banque qui l'employait, a violé les articles visés au moyen ;
" alors que, de troisième part, il ressortait des réquisitions du parquet, dont les motifs ont été expressément adoptés par l'ordonnance de renvoi, qu'à l'occasion des "avances sur commercialisation" portant notamment sur la somme de 4 150 000 francs, l'ordre de règlement, soit un chèque d'un même montant, avait été signé par Jean de la X... des Y... lui-même, en raison du refus de sa subordonnée de valider l'opération ; qu'il s'en évinçait que Jean de la X... des Y... disposait, nécessairement dans les faits, d'une délégation de pouvoirs pour ordonner le décaissement des sommes dont l'emploi lui avait été confié par le comité de crédit, en sorte qu'en refusant de voir dans les termes de la prévention le titre en vertu duquel Jean de la X... des Y... était habilité par la banque qui l'employait à ordonner le décaissement des fonds, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen ;
" alors que, de quatrième part, le juge correctionnel, qui n'est pas lié par la qualification donnée à la prévention, ne peut prononcer une décision de relaxe qu'autant qu'il a vérifié que les faits dont il est saisi ne sont constitutifs d'aucune infraction ; que l'escroquerie est le fait par l'emploi de manoeuvres frauduleuses de tromper une personne physique et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ; qu'il ressortait du réquisitoire introductif dont l'ordonnance de renvoi adopte les motifs, que les ouvertures de crédit présentées au comité de la banque par Jean de la X... des Y... étaient, pour partie, destinées à rémunérer les différents associés de la société Venterre, dont Jean de la Porte des Y..., ce dont il résultait que Jean de la X... des Y... avait trompé son employeur sur l'affectation des ouvertures de crédit pour obtenir une rémunération sous couvert de factures qu'il savait fausses ; qu'en refusant d'examiner les faits en cause sous la qualification d'escroquerie, la cour d'appel a méconnu son office, violant les articles visés au moyen" ;
Et sur le deuxième moyen de cassation proposé pour les sociétés CDR Créances, Venterre et Immobilière hispano-française, pris de la violation des articles 314-1 du code pénal, 408 de l'ancien code pénal, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... des chefs d'abus de confiance pour avoir détourné un chèque de deux millions de francs et a, en conséquence, débouté le CDR Créances de ses demandes ;
" aux motifs que la cour observe, en premier lieu, que le fait, par le client d'une banque, d'affecter les fonds qui lui sont prêtés par l'établissement, différemment de ce qui était convenu lors de l'octroi du prêt, ne saurait constituer en lui-même un abus de confiance ; que le client n'est, en effet, pas, dans cette hypothèse, mandaté par sa banque pour faire des fonds avancés un usage déterminé ; que la cour relève, ensuite, que le non-respect des procédures internes d'un établissement bancaire, à le supposer avéré, ne constitue pas en lui-même une infraction pénale et que le fait, pour un employé de banque, de tromper son employeur, à supposer ce fait établi, ne tombe pas sous le coup de la qualification d'abus de confiance ; qu'en l'espèce, la cour constate, concernant Emmanuel de B..., que la prévention ne précise pas à quel titre des fonds lui auraient été remis "à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé et qu'aucune relation contractuelle n'apparaît comme ayant existé entre le prévenu et la banque Ibsa prévoyant ce type d'obligation ; que, concernant Jean de la X... des Y... et Marie Z... A..., la cour note, d'une part, que les libellés des deux préventions d'abus de confiance semblent faire double emploi, bien que la victime concernée ne soit pas identique (la banque Ibsa pour la première et la Banque Colbert pour la seconde) et, d'autre part, que ces préventions ne précisent pas à quel titre les prévenus disposaient des fonds qui auraient été détournés et à quel titre ils étaient habilités par ces banques pour ordonner leur décaissement ; que la cour observe que les préventions citées ci-dessus ne précisent pas quels pouvoirs sur les fonds détenus par les banques étaient délégués à Jean de la X... des Y... et à Marie Z... A..., à supposer que les prévenus aient disposé de telles délégations, et que ces indications ne peuvent être déduites des éléments de faits exposés dans le réquisitoire définitif aux motifs adoptés par l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ;
que la cour constate, en effet, que le texte du réquisitoire définitif (aux motifs adoptés par l'ordonnance de renvoi) ne contient aucun renseignement, ni sur les procédures internes en la matière adoptées par les banques concernées ni sur les pouvoirs en découlant pour les deux prévenus sur la gestion des fonds détenus par la banque Ibsa et/ou par la banque Colbert ; que, plus particulièrement, il n'est pas indiqué à quel titre et dans quelles circonstances Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... auraient disposé de la somme de 2 millions de francs retenue par la prévention, ce qui aurait permis à la cour de déterminer la nature de cette supposée relation contractuelle ; que la cour rappelle que la cour pourrait, certes, modifier la qualification des faits qui lui sont soumis, mais à la condition de ne rien changer à ceux-ci et de ne pas statuer sur des faits non compris dans la prévention et que, quand bien même des éléments factuels pourraient être tirés de l'analyse du dossier qui lui est soumis comme pouvant être pénalement qualifiables, il n'appartient pas à la juridiction de jugement de se substituer aux autorités de poursuites et à la juridiction d'instruction pour pallier ce qui pourrait apparaître comme des lacunes de l'acte de saisine ; qu'à cet égard, la cour renvoie aux motifs précédents relatifs à l'abus de confiance portant sur la somme de 3,6 millions de francs ; qu'il se déduit de ce qui précède que les éléments constitutifs des délits d'abus de confiance et recel dont la cour est saisie par la prévention ne sont pas caractérisés ; que la cour relaxera, en conséquence, Emmanuel de B..., Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... des chefs de poursuite visés plus haut ;
" alors que, d'une part, le salarié d'un établissement bancaire, qui fait usage des fonds dont il a la charge à des fins contraires à ce que son employeur avait initialement prévu, commet un abus de confiance ; qu'en affirmant péremptoirement que le fait pour un employé de banque de tromper son employeur, à supposer ce fait établi, ne tomberait pas sous le coup de la qualification d'abus de confiance, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen ;
" alors que, d'autre part, aux termes du réquisitoire définitif dont l'ordonnance de renvoi adopte les motifs, toute opération et octroi de crédit par le comité de la banque étaient affectés à une destination précise ; que le chèque de deux millions de francs avait été émis à l'ordre de la société Ofim, en débit du crédit consenti à la société Venterre pour les besoins du projet immobilier, et était destiné à couvrir les besoins de trésorerie des sociétés Ofim et Mam, appartenant au groupe d'Emmanuel de B... ; que l'arrêt constate, par ailleurs, que Jean de la X... des Y... avait donné son aval à l'opération, après que sa subordonnée ait refusé de signer le chèque sans son accord et que Jean de la X... des Y... avait admis avoir utilisé une ligne de crédit de la société Venterre ouvert dans la banque pour couvrir les difficultés de trésorerie d'Emmanuel de B..., ce dont il résultait qu'il avait fait des ouvertures de crédit, spécialement affecté par le comité de crédit, et qu'il était chargé de contrôler un usage différent de celui qui était prévu, de sorte que la cour d'appel, qui croit pouvoir déduire des termes de la prévention l'impossibilité de déterminer le titre en vertu duquel Jean de la X... des Y... disposait des fonds, n'a pas tiré de ses propres constatations et des termes du réquisitoire définitif les conséquences légales qui s'en évinçaient " ;
Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour les sociétés CDR Créances, Venterre et Immobilière hispano-française, pris de la violation des articles 408 de l'ancien code pénal, 314-1 du code pénal, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénal, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... d'avoir détourné un chèque de 4 151 000 francs, d'avoir relaxé Emmanuel de B... du chef de recel de cette somme et, en conséquence, d'avoir débouté le CDR Créances de ses demandes ;
" aux motifs que la cour, reprenant les motifs développés ci-dessus sur le détournement de la somme de deux millions de francs et de son recel qui était reproché aux prévenus, relaxera ces derniers des chefs de prévention cités plus haut ;
" et aux motifs que la cour observe, en premier lieu, que le fait, par le client d'une banque, d'affecter les fonds qui lui sont prêtés par l'établissement, différemment de ce qui était convenu lors de l'octroi du prêt, ne saurait constituer en lui-même un abus de confiance ; le client n'est, en effet, pas, dans cette hypothèse, mandaté par sa banque pour faire des fonds avancés un usage déterminé ; que la cour relève, ensuite, que le non-respect des procédures internes d'un établissement bancaire, à le supposer avéré, ne constitue pas, en lui-même, une infraction pénale et que le fait, pour un employé de banque de tromper son employeur, à supposer ce fait établi, ne tombe pas sous le coup de la qualification d'abus de confiance ; qu'en l'espèce, la cour constate, concernant Emmanuel de B..., que la prévention ne précise pas à quel titre des fonds lui auraient été remis "à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé" et qu'aucune relation contractuelle n'apparaît comme ayant existé entre le prévenu et la banque Ibsa prévoyant ce type d'obligation ; que, concernant Jean de la X... des Y... et Marie Z... A..., la cour note, d'une part, que les libellés des deux préventions d'abus de confiance semblent faire double emploi, bien que la victime concernée ne soit pas identique (la banque Ibsa pour la première et la banque Colbert pour la seconde) et, d'autre part, que ces préventions ne précisent pas à quel titre les prévenus disposaient des fonds qui auraient été détournés et à quel titre ils étaient habilités par ces banques pour ordonner leur décaissement ; que la cour observe que les préventions citées ci-dessus ne précisent pas quels pouvoirs sur les fonds détenus par les banques étaient délégués à Jean de la X... des Y... et à Marie Z... A..., à supposer que les prévenus aient disposé de telles délégations, et que ces indications ne peuvent être déduites des éléments de faits exposés dans le réquisitoire définitif aux motifs adoptés par l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ;
que la cour constate, en effet, que le texte du réquisitoire définitif (aux motifs adoptés par l'ordonnance de renvoi) ne contient aucun renseignement, ni sur les procédures internes en la matière adoptées par les banques concernées ni sur les pouvoirs en découlant pour les deux prévenus sur la gestion des fonds détenus par la banque Ibsa et/ou par la banque Colbert ; que, plus particulièrement, il n'est pas indiqué à quel titre et dans quelles circonstances Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... auraient disposé de la somme de deux millions de francs retenue par la prévention, ce qui aurait permis à la cour de déterminer la nature de cette supposée relation contractuelle ; que la cour rappelle que la cour pourrait, certes, modifier la qualification des faits qui lui sont soumis, mais à la condition de ne rien changer à ceux-ci et de ne pas statuer sur des faits non compris dans la prévention et que, quand bien même des éléments factuels pourraient être tirés de l'analyse du dossier qui lui est soumis comme pouvant être pénalement qualifiables, il n'appartient pas à la juridiction de jugement de se substituer aux autorités de poursuites et à la juridiction d'instruction pour pallier ce qui pourrait apparaître comme des lacunes de l'acte de saisine ; qu'à cet égard, la cour renvoie aux motifs précédents relatifs à l'abus de confiance portant sur la somme de 3,6 millions de francs ; qu'il se déduit de ce qui précède que les éléments constitutifs des délits d'abus de confiance et recel dont la cour est saisie par la prévention ne sont pas caractérisés ; que la cour relaxera, en conséquence, Emmanuel de B..., Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... des chefs de poursuite visés plus haut ;
" alors que, d'une part, le salarié d'un établissement bancaire, qui fait usage des fonds dont il a la charge à des fins contraires à ce que son employeur avait initialement prévu, commet un abus de confiance ; qu'en affirmant péremptoirement que le fait pour un employé de banque de tromper son employeur, à supposer ce fait établi, " ne tomberait pas sous le coup" de la qualification d'abus de confiance, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen ;
" alors que, d'autre part, l'abus de confiance implique le détournement de fonds qui ont été remis, à charge pour le détenteur d'en faire un usage conforme à ce qui a été stipulé ; qu'il ressort de la lecture du réquisitoire définitif du parquet, dont l'ordonnance adopte les motifs, que les ouvertures de crédit ont été consenties par le comité de la banque à la société Venterre pour les besoins de son projet immobilier, et que Jean de la X... des Y... a débloqué les fonds en signant le chèque litigieux de 4 151 000 francs pour une fin qu'il savait contraire à l'emploi qui avait été stipulé par le comité de la banque, de sorte qu'en relaxant Jean de la X... des Y... par la considération que les termes de la prévention ne permettaient pas de déterminer le titre en vertu duquel ce dernier avait un pouvoir sur les fonds, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que la société de banque Ibsa a financé la société Venterre à hauteur de 189 millions de francs pour permettre la réalisation du programme immobilier lié à la création de la ZAC de Bonneuil-en-France alors que ce projet ne pouvait aboutir faute de saisine de la commission départementale d'équipement commercial et de dépollution des sols ; que cet établissement de crédit a encore apporté la somme de 35 millions de francs pour permettre le rachat du cabinet d'architecture Atebat par la société Arsa que venait de constituer Emmanuel de B..., sur la production de documents mensongers persuadant d'un chiffre d'affaires potentiel irréalisable ;
Attendu que les fonds prêtés ont été détournés de leur destination et notamment utilisés pour remédier aux difficultés de trésorerie des nombreuses sociétés détenues par Emmanuel de B... et rémunérer les interventions de Jean de la X... des Y... et de Marie Z... A... ; qu'à ces fins, le directeur du service immobilier de la société de banque Ibsa, devenue la banque Colbert, a mis en place des circuits de facturations de prestations imaginaires et d'avances sur marges de commercialisation fictives ; qu'à raison de ces opérations, Jean de la X... des Y... et Marie Z... A... sont poursuivis pour avoir détourné, le premier, la somme de 3 600 000 francs, montant d'un crédit octroyé par la banque Ibsa sur la production d'une fausse convention de gestion conclue entre les sociétés Venterre et Ofim, les deux, un chèque de deux millions de francs émis pour la banque Colbert le 25 mars 1994 à l'ordre de la société Ofim, et dont le montant a été encaissé par la société Venterre, en état de cessation des paiements, enfin, l'un et l'autre, un chèque émis par la banque Colbert le 9 mai 1993 pour 4 151 000 francs, à l'ordre de la société Ofim, dont l'encaissement, par la société Venterre, a permis de verser à Emmanuel de B... des honoraires fondés par l'émission d'une fausse facture ;
Attendu que, pour relaxer les prévenus du chef d'abus de confiance et débouter la société CDR Créances, partie civile, de ses demandes, l'arrêt infirmatif prononce par les motifs repris aux moyens et énonce, notamment, que la prévention ne précise pas le contrat dont la violation est invoquée ; que les juges relèvent que l'ordonnance de renvoi ne fournit aucune indication permettant de caractériser le titre en vertu duquel les prévenus disposaient des fonds et étaient autorisés à ordonner leur décaissement ; qu'ils ajoutent qu'ils n'ont pas à se substituer à l'autorité de poursuite et à la juridiction d'instruction pour remédier aux lacunes de l'acte de saisine ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les crédits autorisés sur la production, par les prévenus, de dossiers incomplets et comportant sciemment des renseignements inexacts, avaient été détournés de leur véritable destination par ces derniers, à leur profit, sous le couvert de sociétés écran et de fausses facturations, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations et à qui il appartenait de rechercher si les éléments de preuve soumis au débat contradictoire ne caractérisaient pas à la charge des cadres supérieurs d'un établissement bancaire le mandat d'affecter les fonds à l'usage auquel les organes de décision les destinaient, n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
I - Sur le pourvoi de Jean de la X... des Y... :
Le REJETTE ;
II - Sur le pourvoi des sociétés CDR Créances, SIHF et Venterre :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 17 mars 2006, mais en ses seules dispositions ayant débouté la société CDR Créances, partie civile, de ses demandes, après relaxe de Jean de la X... des Y... et de Marie Z... A... des chefs d'abus de confiance au préjudice des sociétés de banque Ibsa et Colbert, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de PARIS, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
DIT n'y avoir lieu à application, au profit des sociétés CDR Créances, Venterre et Immobilière hispano-française, de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.