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Décisions

Cass. crim., 3 mai 1985, n° 83-95.073

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Escande

Rapporteur :

Mme Guirimand

Avocat général :

M. Rabut

Avocats :

SCP Labbé et Delaporte, SCP Guiguet Bachellier Potier de la Varde

Paris, ch. correct., du 22 nov. 1983

22 novembre 1983

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 6, 368 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 405 DU CODE PENAL, DEFAUT DE MOTIF, ET MANQUE DE BASE LEGALE ;

" EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE X... COUPABLE DU DELIT D'ESCROQUERIE AU DETRIMENT DE LA SOCIETE FACTO FRANCE HELLER, ET L'A CONDAMNE A LUI VERSER LA SOMME DE 694 655,35 FRANCS ;

AUX MOTIFS QUE LES PREMIERS JUGES ONT A BON DROIT REJETE L'EXCEPTION DE LA CHOSE JUGEE EN RELEVANT QUE LA PRESENTE POURSUITE NE PROCEDE PAS DE FAITS IDENTIQUES DANS LEURS ELEMENTS MATERIELS ET LEGAUX A CEUX QUI ONT SERVI DE BASE A LA POURSUITE CLOSE LE 22 JUIN 1981 PAR LE JUGEMENT DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE TOURS, QUE LA RELAXE DU CHEF DE FAUX EN ECRITURE COMMERCIALE PRONONCEE PAR CE JUGEMENT " NE FAIT PAS OBSTACLE A LA PRESENTE POURSUITE ;

EN EFFET, POUR QUE LA PRESENTATION DES FACTURES EN CAUSE CONSTITUE UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE AU SENS DE L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL, IL N'EST PAS NECESSAIRE QUE CES FACTURES SOIENT RECONNUES DES FAUX AU SENS DES ARTICLES 145 ET SUIVANTS DU MEME CODE ;

IL SUFFIT QUE CETTE PRESENTATION AIT DONNE FORCE ET CREDIT AUX ALLEGATIONS REPROCHEES A M. X... " ;

" ALORS QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 6 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, L'ACTION PUBLIQUE POUR L'APPLICATION DE LA PEINE S'ETEINT NOTAMMENT PAR LA CHOSE JUGEE ;

QU'IL EST EGALEMENT DE PRINCIPE QUE LE MEME FAIT NE PEUT DONNER LIEU CONTRE LE MEME PREVENU A DEUX ACTIONS PENALES DISTINCTES ;

QUE CETTE REGLE S'OPPOSE A CE QU'UNE MEME PERSONNE RELAXEE DU CHEF DE FAUX EN ECRITURE COMMERCIALE PORTANT SUR DES FACTURES PUISSE ETRE POURSUIVIE POUR ESCROQUERIE POUR USAGE DE CES FACTURES, DANS LA MESURE OU LA POURSUITE DU CHEF D'ESCROQUERIE PORTE SUR L'UTILISATION DE FAUSSES FACTURES PAR X... QUI PRECISEMENT A ETE RELAXE, PAR LE JUGEMENT DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE TOURS DU 22 JUIN 1981 DEVENU DEFINITIF, DU DELIT DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE PORTANT SUR CES FACTURES, QU'AINSI LE MEME FAIT NE POUVAIT PAS ETRE POURSUIVI DEUX FOIS SOUS DEUX QUALIFICATIONS DIFFERENTES ;

" ATTENDU QUE POUR REJETER L'EXCEPTION DE CHOSE JUGEE SOULEVEE PAR X..., LES JUGES DU SECOND DEGRE ENONCENT QUE, POUR QUE LA PRESENTATION DES FACTURES LITIGIEUSES PUISSE ETRE ANALYSEE COMME UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE CONSTITUTIVE DE L'ESCROQUERIE, IL N'EST PAS NECESSAIRE QUE CES DOCUMENTS SOIENT RECONNUS COMME ETANT DES FAUX AU SENS DES ARTICLES 145 ET SUIVANTS DU CODE PENAL ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, LA COUR D'APPEL A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION, DES LORS QU'ELLE A ESTIME A BON DROIT QUE LES FAITS SUR LESQUELS ETAIT FONDEE LA SECONDE POURSUITE POUR ESCROQUERIE N'ETAIENT PAS IDENTIQUES, DANS LEURS ELEMENTS TANT LEGAUX QUE MATERIELS, A CEUX QUI AVAIENT MOTIVE LA PREMIERE POURSUITE DU CHEF DE FAUX ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;

SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL, DEFAUT DE MOTIF, MANQUE DE BASE LEGALE ;

" EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE CONSTITUE A L'ENCONTRE DE X... LE DELIT D'ESCROQUERIE ET A CONDAMNE CELUI-CI A 15 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, ET A PAYER A LA SOCIETE FACTO-FRANCE HELLER LA SOMME DE 694 655,35 FRANCS ;

AUX MOTIFS NOTAMMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE " M. X... A RECONNU QU'EN REALITE LES LIVRAISONS ETAIENT INTERVENUES POSTERIEUREMENT A L'ETABLISSEMENT DES FACTURES, QUE LA PRESENTATION PAR LE PREVENU A LA SOCIETE FACTO-FRANCE HELLER DE FACTURES NE CORRESPONDANT PAS A DES CREANCES NEES ET REELLES EST DIFFERENTE DU SIMPLE ETABLISSEMENT DESDITES FACTURES ET S'ANALYSE EN DES PRETENTIONS MENSONGERES ET CORROBOREES PAR L'INTERVENTION ABSOLUMENT INVOLONTAIRE DES TIERS QU'ETAIENT LES CLIENTS AUXQUELS LES ORIGINAUX DES FACTURES ETAIENT SOI-DISANT ADRESSES, QUE CES AGISSEMENTS ONT PERSUADE LA PARTIE CIVILE DE L'EXISTENCE D'UN CREDIT INEXISTANT ET ONT DETERMINE LA REMISE DES FONDS, QU'AINSI LES MANOEUVRES FRAUDULEUSES DE L'ESCROQUERIE SONT CARACTERISEES ", ET QUE LE PREVENU SAVAIT QUE SANS LES MANOEUVRES FRAUDULEUSES RELEVEES A SA CHARGE, LA SOCIETE FACTO-FRANCE HELLER NE LUI AURAIT PAS REMIS LES FONDS LITIGIEUX, CE QUI CARACTERISE SA MAUVAISE FOI ;

ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE, POUR QUE LE DELIT D'ESCROQUERIE SOIT CONSTITUE, IL NE SUFFIT PAS QUE DES MANOEUVRES FRAUDULEUSES AIENT ETE EMPLOYEES ET QU'IL EXISTE UNE RELATION DE CAUSE A EFFET ENTRE LES MANOEUVRES ET LA REMISE, MAIS QU'IL FAUT ENCORE QUE CES MANOEUVRES AIENT EU POUR BUT DE FAIRE CROIRE A L'EXISTENCE DE FAUSSES ENTREPRISES, D'UN POUVOIR OU D'UN CREDIT IMAGINAIRE, OU DE FAIRE NAITRE L'ESPERANCE OU LA CRAINTE D'UN SUCCES, D'UN ACCIDENT OU DE TOUT AUTRE EVENEMENT CHIMERIQUE, QUE SI L'EMISSION DES FACTURES LITIGIEUSES ET LEUR PRESENTATION A LA SOCIETE FACTO-FRANCE HELLER NE RESPECTAIENT PAS LES CONDITIONS DU CONTRAT D'AFFACTURAGE, ELLES NE CARACTERISAIENT PAS POUR AUTANT LE DELIT D'ESCROQUERIE, PUISQU'ELLES N'AVAIENT PAS POUR OBJET DE FAIRE CROIRE A UN CREDIT IMAGINAIRE, OU A L'EXISTENCE D'UNE FAUSSE ENTREPRISE, DANS LA MESURE OU IL RESULTAIT DES FAITS DE LA CAUSE, QUE CES FACTURES CORRESPONDAIENT A DES MARCHANDISES LIVREES POSTERIEUREMENT AUX CLIENTS, ET QUE SI CERTAINES DE CES FACTURES QUI CORRESPONDAIENT A DES COMMANDES N'AVAIENT PAS FAIT L'OBJET DE LIVRAISON, C'EST EN RAISON DE L'ARRET DANS LA FABRICATION DU A LA LIQUIDATION DE BIENS DE LA SOCIETE TOURAINE CONFECTION, QUE LES FAITS REPROCHES A X... N'AVAIENT PAS EU POUR OBJET DE FAIRE CROIRE A UN CREDIT IMAGINAIRE OU A UNE FAUSSE ENTREPRISE, ET QU'AUCUNE INTENTION FRAUDULEUSE NE POUVAIT DES LORS ETRE RETENUE A SON ENCONTRE ;

" ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT DONT IL ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE LA SARL " TOURAINE CONFECTION " A CONCLU AVEC L'ETABLISSEMENT FINANCIER " FACTO-FRANCE HELLER " UN CONTRAT D'AFFACTURAGE, PAR LEQUEL ELLE S'ENGAGEAIT A TRANSFERER A CET ETABLISSEMENT LES CREANCES DONT ELLE DISPOSAIT SUR SES CLIENTS APRES LIVRAISONS DE MARCHANDISES DE SA FABRICATION, TANDIS QUE " FACTO-FRANCE HELLER " SE TROUVAIT SUBROGEE DANS SES DROITS, DES LE PAIEMENT IMMEDIAT EN SA FAVEUR DU MONTANT DESDITES CREANCES ;

QUE X..., AFIN D'OBTENIR LA REMISE DE SOMMES D'ARGENT, A ADRESSE A " FACTO FRANCE HELLER ", ENTRE LE 30 NOVEMBRE 1977 ET LE 30 JUIN 1978, DES QUITTANCES SUBROGATIVES AUXQUELLES ETAIT JOINT LE DOUBLE DE FACTURES PRETENDUMENT ENVOYEES A SES CLIENTS, SANS QUE LES MARCHANDISES COMMANDEES AIENT ETE LIVREES ;

ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE DU DELIT D'ESCROQUERIE, LES JUGES EXPOSENT QUE L'EXAMEN DES QUITTANCES SUBROGATIVES TRANSMISES A LA SOCIETE " FACTO-FRANCE HELLER " PERMET DE CONSTATER QUE LESDITES QUITTANCES ETAIENT SIGNEES PAR LE PREVENU ET PORTAIENT UNE MENTION CERTIFIANT QUE LES CREANCES ETAIENT ENGENDREES PAR DES LIVRAISONS DE MARCHANDISES ;

QU'ILS ENONCENT QUE LA PRESENTATION PAR X... DE FACTURES NE CORRESPONDANT PAS A DES CREANCES " NEES ET REELLES " SUR DES CLIENTS DE LA S. A. R. L. " TOURAINE CONFECTION " A DONNE FORCE ET CREDIT AUX ALLEGATIONS MENSONGERES DU PREVENU CONCERNANT LES LIVRAISONS ET QUE CES PROCEDES CONSTITUENT LES MANOEUVRES FRAUDULEUSES DE L'ESCROQUERIE ;

QU'ILS AJOUTENT, POUR CARACTERISER LA MAUVAISE FOI DE X..., QUE CE DERNIER SAVAIT QUE SANS CES MANOEUVRES, QUI ONT PERSUADE " FACTO-FRANCE HELLER " D'UN CREDIT IMAGINAIRE, CET ETABLISSEMENT NE LUI AURAIT PAS REMIS LES FONDS LITIGIEUX ;

ATTENDU QU'EN CET ETAT, ABSTRACTION FAITE DE TOUT AUTRE MOTIF, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION ;

QU'ELLE A SUFFISAMMENT CARACTERISE L'INFRACTION RETENUE A LA CHARGE DE X... EN RELEVANT QUE LES REMISES DE FONDS ONT ETE LE RESULTAT DES MOYENS FRAUDULEUX EMPLOYES PAR LE DEMANDEUR ET QU'ELLES N'ONT PAS ETE CONSENTIES LIBREMENT PAR CEUX QU'IL A TROMPES ;

QU'IL IMPORTE, DES LORS, CONTRAIREMENT A CE QUE SOUTIENT LE MOYEN, QUE POSTERIEUREMENT A L'ETABLISSEMENT DES FACTURES, LES MARCHANDISES AIENT ETE LIVREES OU NON EN RAISON DE LA MISE EN LIQUIDATION DES BIENS DE LA S. A. R. L. " TOURAINE CONFECTION " QUI AURAIT ENTRAINE UN ARRET DANS LA FABRICATION EFFECTUEE PAR CETTE SOCIETE ;

ATTENDU, EN OUTRE, QUE L'APPRECIATION DE L'ELEMENT INTENTIONNEL EN MATIERE D'ESCROQUERIE RENTRE EXCLUSIVEMENT DANS LES ATTRIBUTIONS DES JUGES DU FOND ET QUE LEUR APPRECIATION DE CE CHEF N'ENCOURT LA CENSURE DE LA COUR DE CASSATION QUE SI ELLE EST EN OPPOSITION AVEC LES CONSTATATIONS MEMES DE L'ARRET ATTAQUE ;

QUE TEL N'EST PAS LE CAS EN L'ESPECE ;

QU'AINSI LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI.