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Décisions

Cass. crim., 18 juillet 1968, n° 67-90.783

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M COMTE

Rapporteur :

M GAGNE

Avocat général :

M BARC

Avocat :

Me HENRY

Amiens, du 17 févr. 1967

17 février 1967

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 7 ET 8 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 405 DU CODE PENAL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REJETE LE MOYEN TIRE DE LA PRESCRIPTION DE L'ACTION PUBLIQUE, AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE LA PRESCRIPTION NE PEUT COMMENCER A COURIR QU'A PARTIR DU DERNIER ACTE D'USAGE DU CERTIFICAT QUALIFIE DE FAUX PAR LA PREVENTION, C'EST A DIRE A PARTIR DU 3 OCTOBRE 1959, DATE A LAQUELLE LOITRON A REMIS AU FNAH LE DERNIER MEMOIRE DE TRAVAUX ET QUE LA PLAINTE DU CREDIT FONCIER DE FRANCE EN DATE DU 3 FEVRIER 1961 EST DONC INTERVENUE AVANT QUE LA PRESCRIPTION NE SOIT ACQUISE, D'AUTRE PART, QUE LE PARQUET AVAIT DEJA OUVERT LE 14 NOVEMBRE 1957 UNE INFORMATION CONTRE X DU CHEF D'ABUS DE CONFIANCE ET D'INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES SOCIETES VISANT D'UNE MANIERE TRES GENERALE LES ACTIVITES DE LA SOCIETE LES LOGIS DONT LOITRON ETAIT EN FAIT LE GERANT, QUE LA QUALIFICATION PENALE DONNEE AUX FAITS LORS DE L'OUVERTURE DE L'INFORMATION N'AVAIT QU'UN CARACTERE INDICATIF ;

" ALORS, SUR LE PREMIER POINT, QUE L'ESCROQUERIE EST CONSOMMEE PAR LA REMISE DES OBLIGATIONS, DISPOSITIONS, BILLETS ET PROMESSES FRAUDULEUSEMENT OBTENUS A L'AIDE DES MOYENS PREVUS PAR L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL ET QUE LA DATE DU DELIT EST FIXEE AU JOUR OU CETTE REMISE A ETE EFFECTUEE, SANS QU'IL Y AIT LIEU D'AVOIR EGARD AUX ACTES QUI ONT PU ULTERIEUREMENT POURSUIVRE OU REALISER L'EXECUTION DES TITRES ESCROQUES, QU'EN L'ESPECE IL RESSORT DES ENONCIATIONS DU JUGEMENT ET DE L'ARRET ATTAQUE QUE LE 14 MAI 1956, FURENT CONSENTIS POUR L'EXECUTION DES TRAVAUX UNE SUBVENTION ET 1679400 ANCIENS FRANCS ET UN PRET DE 8397400 ANCIENS FRANCS, QUE C'EST A CETTE DATE DE REMISE D'UN TITRE D'OBLIGATION QUE L'ESCROQUERIE PRETENDUE A ETE CONSOMMEE, SANS QU'IL Y AIT LIEU D'AVOIR EGARD AUX ACTES ULTERIEURS, QU'AU SURPLUS LA REMISE PAR LE DEMANDEUR DES DERNIERS MEMOIRES DE TRAVAUX NE CONSTITUAIT PAS UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE DES LORS QU'IL A ETE CONSTATE QUE CES MEMOIRES N'ETAIENT PAS ATTESTES PAR L'ARCHITECTE ET NE POUVAIENT CONSTITUER QUE DE SIMPLES MENSONGES ECRITS ;

" ALORS, SUR LE DEUXIEME POINT, QU'UN REQUISITOIRE D'INFORMER N'EMBRASSE TOUS LES FAITS SE RATTACHANT AUX AGISSEMENTS DES ADMINISTRATEURS D'UNE SOCIETE QUE S'IL A ETE PRIS SUR UNE PLAINTE DENONCANT DE MANIERE GENERALE LESDITS AGISSEMENTS, QU'IL N'A PAS ETE CONSTATE QUE TEL AIT ETE LE CAS EN L'ESPECE, QU'EN OUTRE LE DEMANDEUR A ETE POURSUIVI NON EN QUALITE DE GERANT DE FAIT DE LA SOCIETE LES LOGIS, MAIS EN CELLE DE MANDATAIRE PERSONNEL DES CONSORTS X... ET QUE LA SOCIETE LES LOGIS N'A MEME PAS ETE RECHERCHEE COMME CIVILEMENT RESPONSABLE, QUE LA JONCTION DES PROCEDURES LORS DE L'INFORMATION EST INOPERANTE A MODIFIER LE FAIT QUE LA PRESCRIPTION N'A PAS ETE INTERROMPUE A L'EGARD DU DEMANDEUR PAR UN REQUISITOIRE QUI NE VISAIT PAS SES AGISSEMENTS A TITRE PERSONNEL";

JOINT AU SECOND MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 161 ET 405 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, INVERSION DE LA CHARGE DE LA PREUVE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'ESCROQUERIE ET D'USAGE DE FAUX CERTIFICATS ;

" AU MOTIF, D'UNE PART, QUE LES MEMOIRES DONT LA PRODUCTION ETAIT NECESSAIRE POUR L'OBTENTION DEFINITIVE DE LA SUBVENTION ET DU PRET FONT ETAT DE TRAVAUX D'UN COUT ET D'UNE QUALITE TRES SUPERIEURS, DANS LEUR ENSEMBLE, A CEUX DES TRAVAUX REELLEMENT EFFECTUES ;

" AU MOTIF, D'AUTRE PART, QUE LOITRON A FAIT USAGE DE FAUX CERTIFICATS ETABLIS PAR MILLOT EN AFFIRMANT QUE LA VALEUR DES TRAVAUX EFFECTUES AUX 14 JUIN 1956 ET 21 JANVIER 1957 ETAIT RESPECTIVEMENT DE 5000000 D'ANCIENS FRANCS ET DE 7788858 ANCIENS FRANCS, ALORS QUE MILLOT NE POUVAIT FORMULER PAREILLES APPRECIATIONS CHIFFREES PUISQUE, LE 21 JANVIER 1957, IL N'AVAIT VERIFIE QUE DEUX MEMOIRES S'ELEVANT AU TOTAL A 3061530 ANCIENS FRANCS ;

" ALORS, SUR LE PREMIER POINT, QU'IL N'Y A PAS ESCROQUERIE SANS ALLEGATION MENSONGERE DONT IL APPARTIENT AU MINISTERE PUBLIC D'APPORTER LA PREUVE ET QUE L'ARRET ATTAQUE N'A PAS CONSTATE QU'EN FAIT LES TRAVAUX N'AVAIENT PAS COUTE LES PRIX, MEME EXCESSIFS, MENTIONNES AUX MEMOIRES, ET QU'EN DECLARANT QUE LOITRON N'APPORTE AUCUNE JUSTIFICATION DE CE QUE, COMME IL LE PRETEND, LE COUT DES TRAVAUX A ETE TRES SUPERIEUR AU MONTANT DU PRET SOLLICITE ET OBTENU, LA COUR A INVERSE LA CHARGE DE LA PREUVE ;

" ALORS, SUR LE DEUXIEME POINT, QUE DU SEUL DEFAUT DE VERIFICATION DE CERTAINS MEMOIRES A LA DATE DE DELIVRANCE DES CERTIFICATS ARGUES DE FAUX, IL NE SE DEDUIT PAS NECESSAIREMENT QUE LES APPRECIATIONS CHIFFREES DE MILLOT ETAIENT FAUSSES, DES LORS SURTOUT QUE LA COUR ADMET QUE LES ENONCIATIONS RELATIVES AU DEGRE D'AVANCEMENT DES TRAVAUX POUVAIENT ETRE EXACTES ;

QU'EN OUTRE, LA MAUVAISE FOI DU DEMANDEUR LORS DE L'USAGE DES CERTIFICATS N'A PAS ETE CARACTERISEE " ;

ATTENDU QU'IL RESULTE, TANT DES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE DE CELLES DU JUGEMENT DONT IL A ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES, QUE LOITRON, ALORS NOTAIRE A SOISSONS, A CONVAINCU LES CONSORTS DE X..., SES CLIENTS, DE FAIRE TRANSFORMER EN IMMEUBLE DE RAPPORT UN VIEIL HOTEL PARTICULIER LEUR APPARTENANT ;

QU'IL A CONSTITUE A CETTE FIN LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DE LA GRAND-PLACE DONT IL A ETE LE MANDATAIRE ;

QU'IL A CONFIE L'EXECUTION DES TRAVAUX A LA SOCIETE DE CONSTRUCTION LES LOGIS DONT IL ASSUMAIT SEUL, EN FAIT, LA DIRECTION ET LA GESTION ;

QU'AINSI LOITRON S'EST TROUVE ETRE A LA FOIS LE PROMOTEUR ET L'ENTREPRENEUR DE CES TRAVAUX D'AMENAGEMENT ;

QUE, DE PLUS, EN SA QUALITE DE MANDATAIRE DES CONSORTS DE X..., PUIS DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DE LA GRAND-PLACE, IL A ENTREPRIS, SOIT PERSONNELLEMENT, SOIT SOUS LE COUVERT D'UN CLERC DE SON ETUDE, TOUTES LES DEMARCHES NECESSAIRES POUR OBTENIR DU FONDS NATIONAL D'AMELIORATION DE L'HABITAT (FNAH) UNE SUBVENTION ET UN PRET A INTERET AVANTAGEUX ;

ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND ENONCENT QUE POUR OBTENIR UNE SUBVENTION IMPORTANTE ET UN PRET D'UN MONTANT ELEVE, LOITRON A, VOLONTAIREMENT, MAJORE LA VALEUR DES TRAVAUX A EXECUTER ;

QUE, LE 16 MAI 1956, UNE SUBVENTION REPRESENTANT ENVIRON 20% DU MONTANT DES TRAVAUX LUI A ETE ACCORDEE PAR LE FONDS NATIONAL D'AMELIORATION DE L'HABITAT, SON ATTRIBUTION DEFINITIVE ETANT TOUTEFOIS SUBORDONNEE A LA PRESENTATION DES MEMOIRES DES TRAVAUX TERMINES ;

QUE, DE MEME, UN PRET DE 8397400 FRANCS FUT CONSENTI, MAIS DEVAIT ETRE VERSE PAR ACOMPTES, SUR JUSTIFICATION DES TRAVAUX EXECUTES ;

QUE, POUR TOUCHER CES SOMMES, LOITRON A PRODUIT, A DIVERSES DATES, SOIT DES MEMOIRES DE TRAVAUX VERIFIES PAR L'ARCHITECTE MILLOT, SOIT DES MEMOIRES DE TRAVAUX SOUMIS A L'ARCHITECTE MILLOT ET NON VERIFIES PAR CELUI-CI, OU VERIFIES TARDIVEMENT, SOIT DES CERTIFICATS D'EXECUTION DE TRAVAUX SIGNES PAR L'ARCHITECTE MILLOT ET DESTINES A LA PERCEPTION D'ACOMPTES, QUE LOITRON A AINSI PU TOUCHER DES AVANCES SE MONTANT A 6194000 ANCIENS FRANCS ;

ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND PRECISENT QUE SI LOITRON N'A PU, CEPENDANT, PERCEVOIR LA SUBVENTION DE 1679400 FRANCS ACCORDEE EN PRINCIPE, SAUF JUSTIFICATIONS A PRODUIRE, ET LE RELIQUAT DU PRET, EN DEPIT DE NOUVEAUX MEMOIRES ENVOYES PAR LUI, CE NE FUT QUE PARCE QU'UNE ENQUETE ADMINISTRATIVE, DONT LES RESULTATS DEVAIENT ETRE CONFIRMES PAR UNE INFORMATION JUDICIAIRE, AVAIT DEMONTRE QUE LES VERIFICATIONS DE L'ARCHITECTE N'AVAIENT ETE QUE DE PURE FORME, QUE LES MEMOIRES FAISAIENT ETAT, EN REALITE, D'UN COUT DES TRAVAUX CONSIDERABLEMENT EXAGERE ET QU'Y FIGURAIENT MEME DES TRAVAUX NE POUVANT DONNER DROIT, PAR LEUR NATURE, A UNE SUBVENTION ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DES FAITS AINSI SOUVERAINEMENT CONSTATES PAR EUX, C'EST PAR UNE EXACTE APPLICATION DE L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL ET SANS RENVERSER LA CHARGE DE LA PREUVE QUE LES JUGES DU FOND ONT DECLARE LOITRON COUPABLE D'ESCROQUERIE ET TENTATIVE D'ESCROQUERIE, DELITS DONT ILS AVAIENT RELEVE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS ET NOTAMMENT LES MANOEUVRES FRAUDULEUSES QUI ONT CONSISTE, EN L'ESPECE, A PRODUIRE DES MEMOIRES ET DES CERTIFICATS DE SITUATION INEXACTS DONT LA SINCERITE ETAIT CEPENDANT ATTESTEE PAR UN TIERS ARCHITECTE, MEMOIRE ET CERTIFICATS DESTINES A RENDRE DEFINITIVE LA PROMESSE DE SUBVENTION EN PERSUADANT LE FONDS NATIONAL D'AMELIORATION DE L'HABITAT DE LA VALEUR, CEPENDANT IMAGINAIRE POUR UNE PARTIE, DES TRAVAUX EXECUTES ;

QUE, D'AUTRE PART, C'EST A BON DROIT QUE LES JUGES DU FOND, ABSTRACTION FAITE DE MOTIFS SURABONDANTS, VOIRE ERRONES, ONT DECLARE QUE N'ETAIENT PAS PRESCRITS DES FAITS DELICTUEUX DONT LEURS CONSTATATIONS ETABLISSENT QU'ILS FORMENT UN TOUT INDIVISIBLE ET DONT LES DERNIERS SONT ANTERIEURS DE MOINS DE TROIS ANS A L'OUVERTURE DE L'INFORMATION JUDICIAIRE ;

QU'IL N'IMPORTE, A CET EGARD, QUE CES DERNIERS ACTES AIENT PU, OU NON, CONSTITUER, A EUX SEULS, DES MANOEUVRES FRAUDULEUSES, DES L'INSTANT OU ILS N'ONT ETE QU'UNE PARTIE DE LA MISE EN SCENE REALISEE PAR LOITRON POUR ESCROQUER LE FONDS NATIONAL D'AMELIORATION DE L'HABITAT ;

QU'ENFIN, LA TENTATIVE D'ESCROQUERIE RETENUE PAR LES JUGES D'APPEL N'AYANT ETE SUSPENDUE QUE PAR L'ANNULATION DE LA SUBVENTION, A LA SUITE DU DEPOT DU RAPPORT ADMINISTRATIF DU 30 SEPTEMBRE 1960, NE POUVAIT ETRE PRESCRITE LE 3 FEVRIER 1961, DATE D'OUVERTURE DE L'INFORMATION ;

D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS NE SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME.

REJETTE LE POURVOI.