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Décisions

Cass. 2e civ., 9 décembre 2021, n° 20-10.096

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

M. Besson

Avocats :

SCP Spinosi, SCP de Nervo et Poupet

Saint-Denis de la Réunion, du 5 nov. 201…

5 novembre 2019

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée rendue, sur renvoi après cassation (2e Civ., 25 octobre 2018, n° 17-24.606), par le premier président d'une cour d'appel (Saint-Denis de la Réunion, 5 novembre 2019), la délégation Unedic AGS (l'AGS) a confié à M. [S] (l'avocat) la défense de ses intérêts dans une série de dossiers concernant les salariés d'une même association, l'ARAST.

2. Alors que l'avocat avait suivi l'ensemble de ceux-ci en première instance, l'AGS l'a chargé de suivre la procédure en appel pour sept-cent-quatre-vingt-quinze dossiers et en a confié cent-quarante à un autre avocat. Ayant été dessaisi en cours d'instance, l'avocat a demandé au bâtonnier de son ordre de fixer ses honoraires en faisant valoir qu'il avait droit à un complément d'honoraires pour la première instance, à des honoraires pour la procédure d'appel et à une rémunération de son intervention lors de la procédure collective de l'ARAST.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'AGS fait grief à l'ordonnance de fixer à 252 350 euros TTC la somme qu'elle reste à devoir à l'avocat, alors « que si la violence économique exercée contre celui qui a contracté l'obligation est une cause de nullité, seule l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, permet de caractériser ce vice ; que la profession d'avocat est une profession libérale et indépendante quel que soit son mode d'exercice, et que, dès lors, l'avocat exerce ses fonctions avec indépendance, dans le respect des termes de son serment ; que ces principes guident l'avocat en toutes circonstances, en sorte qu'il ne saurait se placer en situation de dépendance économique vis-à-vis de l'un de ses clients ; qu'en retenant pourtant que Maître [S] était en difficulté financière et était donc dépendant de l'AGS, pour annuler la convention d'honoraires conclue entre eux le 13 février 2013, laquelle fixait à 90 000 euros hors taxe le montant des honoraires forfaitaires perçus par l'avocat pour la procédure d'appel, et fixer ces honoraires à la somme de 350 000 euros, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 1112 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 1 et 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article 1111 ancien du code civil applicable à la cause, la violence exercée contre celui qui a contracté l'obligation est une cause de nullité.

6. Selon l'article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, la profession d'avocat est une profession libérale et indépendante et, selon son article 3, l'avocat prête serment d'exercer ses fonctions « avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ».

7. S'il résulte de ces deux derniers textes que l'avocat doit en toutes circonstances être guidé dans l'exercice de sa profession par le respect de ces principes et s'il doit, en particulier, veiller à préserver son indépendance, ces dispositions ne sauraient priver l'avocat, qui se trouve dans une situation de dépendance économique vis à vis de son client, du droit, dont dispose tout contractant, d'invoquer un consentement vicié par la violence, et de se prévaloir ainsi de la nullité de l'accord d'honoraires conclu avec ce client.

8. C'est donc sans encourir le grief du moyen que l'arrêt, ayant caractérisé l'état de dépendance économique dans lequel l'avocat se trouvait à l'égard de l'AGS, ainsi que l'avantage excessif que cette dernière en avait tiré, en déduit que cette situation de contrainte etait constitutive d'un vice du consentement au sens de l'article 1111 ancien du code civil, excluant la réalité d'un accord d'honoraires librement consenti entre les parties, et fixe les honoraires dus à l'avocat en application des critères définis à l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la délégation Unedic AGS aux dépens.